Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20230314


Dossier : A-32-23

Référence : 2023 CAF 60

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LA JUGE MONAGHAN

 

 

ENTRE :

SA MAJESTÉ LE ROI et LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

appelants

et

BOLOH 1(a), BOLOH 2(a), homme seulement, BOLOH 12 et BOLOH 13

intimés

Requête jugée sur dossier sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 14 mars 2023.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE STRATAS

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE WEBB

LA JUGE MONAGHAN

 


Date : 20230314


Dossier : A-32-23

Référence : 2023 CAF 60

CORAM :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LA JUGE MONAGHAN

 

 

ENTRE :

SA MAJESTÉ LE ROI et LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

appelants

et

BOLOH 1(a), BOLOH 2(a), homme seulement, BOLOH 12 et BOLOH 13

intimés

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE STRATAS

[1] Les appelants ont déposé une requête en sursis d’exécution d’une décision rendue par la Cour fédérale dans le dossier T-1483-21 dans l’attente d’une décision en appel.

[2] J’accueillerais la requête et accorderais la suspension du jugement de la Cour fédérale dans l’attente d’une décision définitive en appel, sauf que les alinéas 4a) et 4b) de l’ordonnance de la Cour du 16 février 2023 demeureraient exécutoires.

A. Question sérieuse à juger

[3] Les parties conviennent de l’existence d’une question sérieuse à juger dans l’appel. Ainsi, le premier élément du critère à trois volets pour l’octroi d’une suspension est satisfait : RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, 1994 CanLII 117 (CSC).

B. Préjudice irréparable

[4] Les appelants subiront un préjudice irréparable si la suspension n’est pas accordée.

[5] Suivant ce volet du critère, la seule question en litige est de savoir s’il existe un préjudice irréparable, indépendamment de son degré ou de son étendue. Les affidavits des hauts fonctionnaires d’Affaires mondiales Canada, de Sécurité publique Canada et d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada expliquent en détail la probabilité réelle d’un préjudice irréparable en fonction des renseignements qu’ils détiennent actuellement, de leurs connaissances et de leur expérience. Selon les renseignements actuels, le protocole à suivre pour la libération des quatre intimés sera probablement plus rigoureux que celui suivi pour la libération des dix-neuf autres personnes que les appelants ont accepté de rapatrier.

C. Prépondérance des inconvénients

[6] La prépondérance des inconvénients joue en faveur des appelants.

[7] Le préjudice décrit en détail par les appelants est important et a une incidence sur les intérêts plus larges de la sécurité canadienne et de la sécurité des personnes participant à tout rapatriement des intimés. Il se pourrait, notamment, que des renseignements sensibles doivent être communiqués à l’Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie et que, suivant cette communication, la circulation de ces renseignements échappe aux appelants. Cette possibilité doit être soupesée au regard du préjudice grave et continu subi par les quatre intimés.

[8] Dans l’ensemble, la prépondérance est en faveur des appelants, particulièrement à la lumière des éléments suivants propres à cette affaire inhabituelle.

– I –

[9] L’appel doit être entendu dans moins de deux semaines. La formation saisie de l’appel s’efforcera de rendre un jugement le plus rapidement possible. Les intimés pourraient subir un préjudice supplémentaire en raison du délai, mais ce dernier sera court.

[10] Cette considération doit être soupesée au regard des préjudices plus généraux et plus graves subis par les appelants, dont certains pourraient durer beaucoup plus longtemps, avoir des répercussions à plus long terme et être permanents.

[11] Dans ces circonstances, il est impérieux de maintenir le statu quo pendant le peu de temps qu’il faudra à notre Cour pour examiner ces questions vastes et importantes.

– II –

[12] Les intimés ont pris plus de temps que d’ordinaire pour déposer leurs documents de requête. Dans une certaine mesure, cela va à l’encontre de leur affirmation selon laquelle tout délai additionnel dans l’exécution du jugement de la Cour fédérale – peut-être quelques semaines seulement s’ils ont gain de cause en appel – leur causerait un préjudice supplémentaire inacceptable.

– III –

[13] Dans les alinéas 4a) et 4b) de son ordonnance du 16 février 2023, la Cour a ordonné aux appelants de prendre des mesures pour mettre en œuvre le paragraphe 2 du jugement de la Cour fédérale. Ce paragraphe exigeait que les appelants « demandent officiellement à l’[Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie] d’autoriser le rapatriement volontaire des [intimés] détenus dans les prisons gérées par la branche militaire de l’[Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie], soit les [Forces démocratiques syriennes] ». Les éléments de preuve démontrent que les appelants tentent de le faire, mais qu’ils se heurtent à des obstacles : voir les observations écrites des appelants aux paragraphes 24 et 25. Les intimés n’ont pas mené de contre-interrogatoire au sujet de ces éléments de preuve.

[14] Il s’agit d’une première étape nécessaire dans l’exécution du jugement de la Cour fédérale. On peut soutenir que les autres obligations ne peuvent pas être respectées tant que cette étape n’est pas terminée. La Cour ne dispose d’aucun élément de preuve lui permettant de croire que cette première étape a été franchie.

[15] Ainsi, même si une suspension était refusée, il n’est pas clair, d’après les éléments de preuve présentés à la Cour, qu’un effet pratique en résulterait avant que la Cour ne rende son jugement dans le présent appel.

– IV –

[16] Le refus d’accorder la suspension pourrait avoir pour effet de rendre des parties de l’appel théoriques en ce sens que les appelants pourraient prendre des mesures irréversibles ou préjudiciables qu’ils n’auraient pas prises autrement, si l’appel était accueilli.

[17] L’appel comporte des questions défendables et importantes qui pourraient avoir de vastes ramifications et une grande importance pour l’intérêt public et les droits et intérêts des intimés. Bien que le jugement de la Cour fédérale représente une expression de l’intérêt public et mérite une grande importance, il en va de même pour ces autres éléments de l’intérêt public.

– V –

[18] La preuve déposée par les intimés en opposition à la suspension consiste en grande partie en des reportages médiatiques annexés à des affidavits de témoins autres que des experts. Cette preuve constitue du ouï-dire.

[19] Dans l’ensemble, toutefois, cela n’aura pas beaucoup d’effet sur l’analyse : les conclusions de fait de la Cour fédérale fournissent des éléments de preuve du préjudice subi par les intimés.

D. Conclusion

[20] Les présents motifs n’ont aucune incidence sur l’issue de l’appel et ne doivent pas être interprétés de façon à en tirer une quelconque conclusion quant aux questions en litige dans l’appel, qui doivent toujours être tranchées.

[21] Les appelants n’ont pas demandé à la Cour de modifier son ordonnance du 16 février 2023. En fait, les appelants conviennent qu’ils devraient continuer de prendre des mesures pour favoriser l’exécution du paragraphe 2 du jugement de la Cour fédérale à moins qu’une mesure particulière soit préjudiciable aux intimés, comme l’ont déterminé les appelants agissant de bonne foi. Ainsi, les appelants continueront d’appliquer le paragraphe 2 du jugement de la Cour fédérale ou, autrement dit, les alinéas 4a) et 4b) de l’ordonnance du 16 février 2023 de notre Cour (qui traitent du paragraphe 2 du jugement de la Cour fédérale) demeureront exécutoires.

[22] Les obligations découlant des alinéas 4a) et 4b) sont sérieuses et les appelants ont convenu de les honorer en attendant l’issue du présent appel. Il y aura de graves conséquences s’il est constaté plus tard que les appelants ont manipulé la situation et essayé de gagner du temps.

[23] Par conséquent, j’accueillerais la requête en suspension. Je surseoirais à l’exécution du jugement de la Cour fédérale dans le dossier T-1483-21 dans l’attente d’une décision définitive en appel, sauf que les alinéas 4a) et 4b) de l’ordonnance de la Cour du 16 février 2023 demeureraient pleinement exécutoires.

« David Stratas »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Wyman W. Webb, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

K.A. Siobhan Monaghan, j.c.a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-32-23

 

INTITULÉ :

SA MAJESTÉ LE ROI et al. c. BOLOH 1(a) et al.

 

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

LE JUGE STRATAS

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE WEBB

LA JUGE MONAGHAN

DATE DES MOTIFS :

Le 14 mars 2023

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Anne M. Turley

Elizabeth Richards

Helene Robertson

Sanam Goudarzi

Sarah Jiwan

 

Pour les appelants

 

Lawrence Greenspon

Graham Bebbington

 

Pour les intimés, boloh 1(a), BOLOH 2(a), homme seulement, et BOLOH 12

 

Barbara Jackman

Zoe Chong

Pour l’intimé, boloh 13

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada

Pour les appelants

 

Greenspon Granger Hill

Ottawa (Ontario)

Pour les intimés, boloh 1(a), BOLOH 2(a), homme seulement, et BOLOH 12

 

Jackman & Associates

Toronto (Ontario)

Pour l’intimé, boloh 13

 

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