Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20230518


Dossier : A-285-21

Référence : 2023 CAF 106

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE GLEASON

LA JUGE GOYETTE

ENTRE :

 

BELL CANADA, BELL EXPRESSVU LIMITED PARTNERSHIP,

BELL MEDIA INC., GROUPE TVA INC., VIDÉOTRON LTD.,

ROGERS COMMUNICATIONS CANADA INC. et

ROGERS MEDIA INC.

 

appelantes

 

et

 

ERIC ADWOKAT et

RED RHINO ENTERTAINMENT INC.

 

intimés

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 7 février 2023.

Jugement prononcé à Ottawa (Ontario), le 18 mai 2023.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GLEASON

Y A SOUSCRIT :

LE JUGE BOIVIN

MOTIFS DISSIDENTS :

LA JUGE GOYETTE

 


Date : 20230518


Dossier : A-285-21

Référence : 2023 CAF 106

CORAM :

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE GLEASON

LA JUGE GOYETTE

ENTRE :

 

BELL CANADA, BELL EXPRESSVU LIMITED PARTNERSHIP,

BELL MEDIA INC., GROUPE TVA INC., VIDÉOTRON LTD.,

ROGERS COMMUNICATIONS CANADA INC. et

ROGERS MEDIA INC.

 

appelantes

 

et

 

ERIC ADWOKAT et

RED RHINO ENTERTAINMENT INC.

 

intimés

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE GLEASON

[1] Notre Cour est saisie de deux affaires : une requête présentée par les appelantes demandant l’autorisation de produire des éléments de preuve supplémentaires et un appel de la peine pour outrage imposée par la Cour fédérale dans la décision Bell Canada c. Red Rhino Entertainment Inc., 2021 CF 895, [2021] A.C.F. no 1050 (QL) (motifs du juge Norris). Dans leur appel, les appelantes demandent à notre Cour d’augmenter l’amende imposée par la Cour fédérale.

[2] Dans le jugement frappé d’appel, la Cour fédérale a imposé aux intimés une amende de 40 000 $, dont ils étaient solidairement responsables, pour avoir violé une injonction interlocutoire interdisant la vente d’appareils qui, selon les appelantes, étaient utilisés pour violer leurs droits d’auteur sur des émissions de télévision qu’elles diffusaient.

[3] Pour les motifs qui suivent, je rejetterais la requête et l’appel, avec dépens.

I. La requête en autorisation de produire des éléments de preuve supplémentaires

[4] En ce qui concerne la requête, les critères applicable à l’autorisation de produire de nouveaux éléments de preuve en appel est bien établi et exige que la partie demandant cette autorisation démontre que ces éléments de preuve : (1) n’auraient pas pu être présentés au procès avec diligence raisonnable; (2) sont pertinents, en ce qu’ils portent sur une question décisive ou potentiellement décisive quant à l’appel; (3) sont plausibles, car on peut raisonnablement y ajouter foi; (4) sont tels que, si l’on y ajoute foi, on peut raisonnablement penser qu’ils auraient influé sur le résultat. Même s’il n’est pas satisfait à ces critères, la cour d’appel possède tout de même le pouvoir discrétionnaire résiduel d’autoriser la production de nouveaux éléments de preuve en appel. Toutefois, ce pouvoir discrétionnaire doit être utilisé avec parcimonie, seulement dans les affaires les plus claires où l’intérêt de la justice l’exige (Coady c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), 2019 CAF 102, [2019] A.C.F. no 488 (QL), au para. 3, et la jurisprudence qui y est citée).

[5] Le premier volet des critères ci-dessus, comme l’ont fait observer récemment les juges majoritaires de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Barendregt c. Grebliunas, 2022 CSC 22, [2021] A.C.S. no 101 (QL) [Barendregt], au paragraphe 36, « met l’accent sur la conduite de la partie qui cherche à produire la preuve. Il oblige les parties à prendre toutes les mesures raisonnables pour présenter leur meilleure preuve au procès. Cela garantit le caractère définitif et le déroulement ordonné des procédures judiciaires [notes omises] ».

[6] En l’espèce, les nouveaux éléments de preuve que les appelantes souhaitent produire auraient pu être produits devant la Cour fédérale si ces dernières avaient fait preuve de plus de diligence dans leurs efforts pour les obtenir. Parmi ces nouveaux éléments de preuve, les principaux sont les dossiers bancaires de deux comptes de banque appartenant à l’intimée Red Rhino Entertainment Inc. (Red Rhino), lesquels montrent qu’il est possible que les intimés, après avoir été avisés de l’injonction rendue par la Cour fédérale, aient fait des ventes en violation de cette injonction, qui auraient rapporté des revenus bruts d’au moins 600 000 $. Bien que les appelantes aient écrit plusieurs fois au syndic de faillite des intimés pour lui demander de produire les relevés bancaires de Red Rhino, elles n’ont pas pris d’autres mesures pour les obtenir.

[7] Les appelantes auraient pu obtenir les dossiers bancaires de Red Rhino en se prévalant des recours mis à leur disposition par la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. (1985), ch. B-3 (la LFI). Plus précisément, elles auraient pu solliciter une ordonnance leur permettant d’interroger M. Adwokat, le seul administrateur de Red Rhino, au titre du paragraphe 163(2) de la LFI ou se tourner vers la Banque TD, chez qui les comptes se trouvaient, si elles avaient obtenu une ordonnance au titre de l’article 38 de la LFI. En effet, le syndic de faillite des intimés a informé les appelantes qu’à son avis, elles auraient plus de chance de réussir en se tournant vers l’un ou l’autre de ces recours.

[8] En outre, M. Adwokat a déposé un affidavit relativement à la requête ayant donné lieu à la peine. Il aurait pu être contre-interrogé à ce sujet et au sujet des actifs et revenus de Red Rhino, et les appelantes auraient pu lui demander de produire tous les dossiers bancaires pertinents lors du contre-interrogatoire. Au besoin, un ajournement aurait pu être demandé pour en faciliter la production ou pour demander une ordonnance enjoignant cette production. Toutefois, les appelantes n’ont tenté aucun de ces recours.

[9] Il semble plutôt que les appelantes aient fait le choix stratégique de s’abstenir de faire d’autres efforts pour obtenir les dossiers bancaires de Red Rhino, comme les intimés le soutiennent. À cet égard, les appelantes ont fait valoir durant l’audience relative à la peine que le fait que les intimés n’aient pas communiqué leurs dossiers bancaires au syndic de faillite était un facteur aggravant, ce qui justifiait une peine plus sévère.

[10] Par conséquent, les appelantes ne satisfont pas aux critères relatif à l’admissibilité de nouveaux éléments de preuve car elles n’ont pas établi la première des conditions préalables, en raison du manque de diligence raisonnable dans leurs efforts pour les obtenir.

[11] Dans les circonstances, je ne suis pas convaincue que la présente affaire en est une où il convient que notre Cour exerce son pouvoir discrétionnaire exceptionnel pour admettre les nouveaux éléments de preuve que les appelantes souhaitent produire. Comme l’enseigne l’arrêt Barendregt, aux paragraphes 70 à 72, ce n’est que dans des circonstances rares et exceptionnelles, lorsque l’intérêt de la justice l’exige, que la cour d’appel devrait exercer son pouvoir discrétionnaire pour admettre des éléments de preuve qui auraient pu être produits devant la cour d’instance inférieure si la partie, en demandant la production, avait fait preuve de diligence raisonnable. À mon avis, il n’y a pas en l’espèce de circonstances rares et exceptionnelles qui justifieraient l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire.

[12] Par conséquent, je rejetterais la requête des appelantes, avec dépens.

II. L’appel

[13] En ce qui concerne le fond de l’appel, contrairement à ce que les appelantes soutiennent, je ne constate aucune erreur qui justifierait que notre Cour intervienne pour modifier la peine imposée par la Cour fédérale.

[14] Dans l’arrêt récent Simon c. Bacon St-Onge, 2023 CAF 1, [2023] A.C.F. n° 17 (QL) [Simon], notre Cour a décrit le cadre de ce qui est permis lors de l’examen en appel de pénalités pour outrage, notant que les principes issus du contexte de la détermination de la peine en matière pénale s’appliquent et qu’il faut donc faire preuve d’une grande déférence envers le juge qui a prononcé la peine. Par conséquent, la cour d’appel ne peut intervenir simplement parce qu’elle aurait imposé une peine différente ou parce qu’elle aurait apprécié les facteurs pertinents de manière différente. Au contraire, à moins qu’il n’y ait une erreur de droit isolable, une intervention n’est justifiée que si la cour d’appel est convaincue que la peine n’est manifestement pas indiquée ou est nettement déraisonnable (Simon, aux para. 6 à 12).

[15] Dans l’arrêt R. c. Lacasse, 2015 CSC 64, [2015] 3 R.C.S. 1089, les juges majoritaires de la Cour suprême du Canada ont souligné, au paragraphe 12, que, « si les tribunaux d’appel interviennent sans retenue pour modifier des peines perçues comme trop clémentes ou trop sévères, leurs interventions risquent d’éroder la crédibilité du système et l’autorité des tribunaux de première instance ». Donc, les cours d’appel doivent faire preuve de déférence dans les affaires comme la présente affaire.

[16] En l’espèce, je suis d’avis que la Cour fédérale a appliqué les bons principes pour déterminer la peine appropriée.

[17] Contrairement à ce que les appelantes soutiennent, je ne suis pas convaincue que la Cour fédérale devait en dire plus sur la nécessité de communiquer un message de dissuasion générale ou qu’elle a indûment fait fi de ce facteur, d’autant plus que les appelantes ont produit relativement peu d’éléments de preuve relativement à leur observation voulant qu’il soit nécessaire de punir plus sévèrement des comportements d’outrage tels que celui des intimés en raison de la supposée répétition de ces comportements. À ce sujet, il y avait très peu d’éléments de preuve, hormis le cas de M. Wesley, qui a violé la même injonction (Bell Canada c. Wesley (d.b.a. MtlFreeTV.com), 2016 CF 1379 [Wesley]), et des affirmations générales dans des affidavits produits par les appelantes au sujet de la nécessité d’imposer des peines plus sévères pour des comportements d’outrage comme celui des intimés.

[18] En fait, en formulant cette observation, les appelantes confondent dans une certaine mesure l’objectif des peines pour outrage avec la réparation dans les procédures civiles des dommages-intérêts pour violation du droit d’auteur. La peine pour outrage a principalement pour but de favoriser le respect des ordonnances des tribunaux en sanctionnant les personnes qui en font fi (Carey c. Laiken, 2015 CSC 17, [2015] 2 R.C.S. 79 au para. 30; Pro Swing Inc. c. Elta Golf Inc., 2006 CSC 52, [2006] 2 R.C.S. 612 au para. 35). Les dommages-intérêts pour violation du droit d’auteur dans les procédures civiles, de leur côté, ont pour but l’indemnisation des parties dont le droit d’auteur a été violé et, plus généralement, la dissuasion contre la violation du droit d’auteur. Une grande partie des éléments de preuve des appelantes portent sur la supposée répétition des violations du droit d’auteur et non sur la supposée multiplicité des violations d’injonctions de tribunaux.

[19] De plus, la peine imposée par la Cour fédérale n’est pas si disproportionnée qu’elle n’est pas justifiée au regard des éléments de preuve dont cette cour était saisie.

[20] La Cour fédérale savait uniquement que les intimés exploitaient une entreprise commerciale, avaient des locaux, offraient en vente et avaient vraisemblablement vendu des produits violant le droit d’auteur dans plusieurs foires et salons de l’habitation, des marchés aux puces, sur l’Internet et dans leur magasin physique. La Cour fédérale était également saisie d’éléments de preuve concernant le train de vie de M. Adwokat, qui comprenait des séjours dans des hôtels de luxe et des billets d’avion en première classe. Cependant, la Cour fédérale ne disposait pas de renseignements concrets sur la véritable ampleur des ventes faites par Red Rhino en violation de l’injonction.

[21] La Cour fédérale a conclu que les intimés exploitaient une entreprise plus sophistiquée et plus commerciale que celle de M. Wesley (qui avait été condamné à des amendes de 15 000 $ et 30 000 $ dans deux procédures consécutives pour outrage à l’égard de la même injonction dans les affaires Wesley, précitée, et Bell Canada v. Wesley (d.b.a MtlFreeTV.com), 2018 FC 861).

[22] La Cour fédérale a pris note des différences entre les deux affaires et a conclu que la nature plus sophistiquée et commerciale de l’entreprise des intimés faisait pencher la balance en faveur d’une peine plus sévère, mais que les deux conclusions consécutives d’outrage dans le cas de M. Wesley étaient plus graves. Après avoir pris en compte cette situation ainsi que des pénalités imposées dans d’autres affaires, la Cour fédérale a imposé aux intimés une amende de 40 000 $.

[23] À mon avis, lorsque l’on prend en compte les éléments de preuve dont disposait la Cour fédérale, on peut difficilement conclure que la peine qu’elle a déterminée est disproportionnée au point de ne pas être indiquée.

[24] Je note à cet égard que la fourchette de pénalités imposées par la Cour fédérale dans de nombreuses affaires, antérieures et postérieures, d’outrage pour violation d’une injonction rendue pour protéger les droits de propriété intellectuelle d’une partie s’étend, en dollars de 2023, d’un peu plus de 1 500 $ à environ 190 000 $. L’amende de cette dernière somme a été imposée dans l’affaire Apotex Inc. c. Merck & Co. Inc., 2003 CAF 234, [2003] A.C.F. no 837 (QL) à une défenderesse qui était une grande société ayant touché plusieurs millions de dollars en violation d’un jugement. La majorité des amendes imposées par la Cour fédérale se trouvent dans le bas de la fourchette. Les affaires où une peine a été imposée dans des circonstances semblables à celles en l’espèce sont résumées à l’annexe A des présents motifs, où figurent des décisions rendues par des tribunaux ontariens où des peines d’emprisonnement ont été imposées pour des actes semblables d’outrage.

[25] Devant notre Cour, les appelantes ne demandent plus de peine d’emprisonnement et demandent plutôt que notre Cour modifie l’amende imposée, pour qu’elle soit augmentée de 200 000 $.

[26] À mon avis, cette somme n’est pas justifiée car l’amende de 40 000 $ imposée en l’espèce n’est pas manifestement disproportionnée par rapport aux amendes imposées dans d’autres affaires lorsque l’on évalue les faits dont avait connaissance la Cour fédérale en l’espèce.

[27] Cela dit, j’estime que, si les éléments de preuve supplémentaires que les appelantes voulaient produire en appel avaient été présentés devant la Cour fédérale, une pénalité plus sévère aurait pu être indiquée et aurait pu comprendre une incarcération ou une amende d’un montant beaucoup plus élevé. Toutefois, en l’absence de ces éléments de preuve, je suis d’avis que rien ne justifie que l’ordonnance de la Cour fédérale soit modifiée.

[28] Avant de conclure, je souhaite formuler quelques observations sur les motifs dissidents de ma collègue la juge Goyette, dont j’ai lu la version préliminaire.

[29] Je ne peux souscrire au dispositif qu’elle propose, car il est fondé sur une conception fondamentalement erronée du rôle et des pouvoirs de notre Cour. Je ne vois pas comment notre Cour pourrait augmenter les dépens adjugés par la Cour fédérale alors que les appelantes n’ont pas fait appel de cette adjudication et n’en ont pas demandé la modification, ni comment notre Cour pourrait imposer une peine d’emprisonnement alors que la question n’a jamais été soulevée devant nous. Bien que la jurisprudence de l’Ontario ait été discutée devant nous, les appelantes ne demandent plus cette peine, et il n’y a eu ni question ni discussion sur la possibilité que notre Cour puisse imposer une peine d’emprisonnement à M. Adwokat.

[30] Le dispositif proposé par la juge Goyette constituerait donc un manquement fondamental aux droits à l’équité procédurale des intimés. Les motifs dissidents auraient pour effet d’obliger les intimés à payer des dépens beaucoup plus élevés et d’assujettir M. Adwokat à un emprisonnement, alors que la possibilité que notre Cour ordonne ces mesures n’a jamais été en cause devant nous.

[31] Les tribunaux ne peuvent soulever dans leurs décisions de nouveaux points de droit qui n’ont été soulevés ni par les parties ni par implication nécessaire, et ils ne peuvent accorder de mesures de redressement qui n’ont pas été demandées sans d’abord en discuter avec les parties et leur donner le droit de formuler des observations : R. c. Mian, 2014 CSC 54, [2014] 2 R.C.S. 689 aux para. 41 et 54; Première Nation de Kahkewistahaw c. Taypotat, 2015 CSC 30, [2015] 2 R.C.S. 548 au para. 26; Adamson c. Canada (Commission des droits de la personne), 2015 CAF 153, [2016] 2 R.C.F. 75 au para. 89; CSX Transportation, Inc. c. ABB Inc., 2022 CAF 96, [2022] F.C.J. No. 870; Vidéotron Ltée c. Technologies Konek Inc., 2023 CAF 92 [2023] A.C.F. no 576).

[32] Par conséquent, notre Cour n’est pas en mesure d’accorder, de sa propre initiative, les mesures de redressement que ma collègue imposerait.

[33] Je suis également d’avis que les motifs dissidents traduisent une mauvaise compréhension du rôle des cours d’appel et les limites de leur pouvoir d’intervention dans les questions de fait.

[34] Nous n’avons pas pour tâche de tirer des inférences, ce qui est l’apanage du tribunal de première instance. Nous ne pouvons pas non plus annuler des conclusions de fait de la Cour fédérale uniquement parce que nous aurions tiré une conclusion différente. L’arrêt de la Cour suprême du Canada Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235 [Housen], aux paragraphes 19 à 35, établit clairement que les inférences de fait tirées – ou non tirées – par le tribunal de première instance ne peuvent pas être modifiées en l’absence d’erreur manifeste et dominante.

[35] La Cour fédérale n’a pas commis d’erreur de ce type en refusant de tirer l’inférence qu’il y avait eu comportement continu d’outrage de la part des intimés en l’espèce. La Cour fédérale n’était saisie d’aucun élément de preuve établissant directement que les intimés étaient impliqués dans ce que ma collègue appelle des sociétés imitatrices. En l’absence de ces éléments de preuve, la décision de la Cour fédérale de ne pas conclure à un comportement continu d’outrage de la part des intimés n’est pas une erreur manifeste et dominante.

[36] Comme notre Cour l’a fait observer dans l’arrêt Mahjoub c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CAF 157, s’abstenir de tirer une inférence, à moins qu’il y ait une erreur de logique ou qu’on ait omis de prendre en compte des éléments de preuve, n’est pas une erreur manifeste. La conclusion suivante tirée aux paragraphes 79 et 80 de cet arrêt s’applique tout autant en l’espèce :

Devant notre Cour, M. Mahjoub invite souvent la Cour à réévaluer et à soupeser à nouveau les éléments de preuve dont la Cour fédérale était saisie et à substituer sa recherche des faits et l’exercice de son pouvoir discrétionnaire à celui de la Cour fédérale […] Parfois, il demande à la Cour de tirer des inférences factuelles que la Cour fédérale a refusé de tirer […], afin de conclure à un préjudice plus grand selon les faits que celui auquel la Cour fédérale était prête à conclure […], à présumer que la Cour fédérale a négligé d’examiner les éléments de preuve qu’elle n’a pas mentionnés […], à alléguer que la Cour fédérale a mal interprété des éléments de preuve afin d’encourager la Cour à substituer sa propre conclusion factuelle à celle de la Cour fédérale […], et à contester les conclusions quant à la crédibilité […]

Il faut refuser ces invitations. Elles nous incitent à emprunter une voie que la loi nous interdit. À moins que nous constations une erreur juridique, la seule voie que nous pouvons emprunter est celle de l’erreur manifeste et dominante.

[Mon soulignement]

[37] En l’espèce, la Cour fédérale a soigneusement examiné les éléments de preuve produits par les appelantes pour démontrer le lien allégué entre les sociétés imitatrices et les intimés. Elle a considéré ces éléments de preuve à la lumière de son appréciation de la crédibilité de M. Adwokat et des doutes qu’elle a exprimés à l’égard de la crédibilité de M. Adwokat, mais elle a néanmoins conclu que l’outrage continu n’avait pas été établi selon la prépondérance des probabilités (motifs de la Cour fédérale, aux para. 47-50).

[38] À mon avis, il est particulièrement important que la Cour fédérale a apprécié les éléments de preuve sur lesquels se fonde la juge Goyette par rapport à des excuses présentées par M. Adwokat, dans lesquelles il a reconnu que sa conduite était fautive. La Cour fédérale a noté, au paragraphe 45 : « M. Adwokat a répété ces excuses lorsqu’il a témoigné devant moi le 10 mars 2021. Il a ajouté qu’il s’excusait également d’avoir agi de façon à ce que les demanderesses aient de la difficulté à lui signifier des documents dans le cadre de la présente affaire. » La Cour fédérale a ensuite ajouté, malgré certains doutes quant à la crédibilité de M. Adwokat, qu’elle « estim[ait] qu’il était sincère lorsqu’il a déclaré qu’il reconnaît maintenant les erreurs qu’il a commises, qu’il n’a pas contrevenu à l’injonction depuis novembre 2019 et qu’il ne recommencera pas » (motifs de la Cour fédérale, au para. 50). La Cour fédérale a donc conclu qu’il fallait accorder un certain poids aux regrets exprimés, même au regard d’un lien possible avec les sociétés imitatrices.

[39] Les motifs dissidents proposent que l’examen et l’appréciation de ces éléments de preuve par la Cour fédérale soient infirmés. Ils ne démontrent pas la retenue dont doit faire preuve la cour d’appel envers la cour de première instance, et ils ne prennent pas note de l’avantage qu’a eu la Cour fédérale d’entendre les témoignages de vive voix. Au contraire, les motifs dissidents font comme si notre Cour était aussi bien placée que la Cour fédérale pour apprécier l’important dossier de preuve en l’espèce et pour réévaluer le poids donné aux divers éléments du dossier pour tirer une inférence que la Cour fédérale a refusé de tirer. À mon avis, cette approche va directement à l’encontre des enseignements de l’arrêt Housen, aux paragraphes 10 à 14, qui mettent en évidence la position relativement désavantageuse des cours d’appel lorsqu’il s’agit de tirer des conclusions de fait, ce qui est le fondement de la norme de l’erreur manifeste et dominante.

[40] Pour ces motifs, j’estime que « l’erreur » dont il est question dans les motifs dissidents ne peut pas être considérée à bon droit par notre Cour comme étant une erreur, encore moins une erreur qui serait manifeste et dominante. Comme l’ont dit avec concision les juges majoritaires de la Cour suprême dans l’arrêt Salomon c. Matte-Thompson, 2019 CSC 14, au paragraphe 33, « [l]e fait qu’une conclusion de fait différente aurait pu être tirée sur la base du poids attribué à différents éléments de preuve ne signifie pas qu’une erreur manifeste et déterminante a été commise ».

[41] Par conséquent, nous ne pouvons tirer une inférence que la Cour fédérale a refusé de tirer. Sans cette inférence, on ne peut conclure que la peine imposée par la Cour fédérale était nettement disproportionnée.

III. Dispositif proposé

[42] Ainsi, je rejetterais le présent appel avec dépens et la requête avec dépens.

[43] Les intimés peuvent signifier et déposer des observations sur les dépens d’au plus dix pages dans les dix jours suivant la date des présents motifs, et les appelantes peuvent déposer des observations en réponse de la même longueur dans les dix jours suivant la réception des observations des intimés. Les intimés peuvent déposer une réplique aux observations en réponse des appelantes d’au plus trois pages dans les cinq jours suivant la réception des observations en réponse des appelantes.

« Mary J.L. Gleason »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Richard Boivin, j.c.a. »


LA JUGE GOYETTE (motifs dissidents)

[44] Je ne parviens pas au même résultat que mes collègues.

[45] Les cours d’appel peuvent modifier une peine dans les deux cas suivants :

(1) le juge ayant imposé la peine a commis une erreur de principe, c’est-à-dire qu’il a commis une erreur de droit, a omis de tenir compte d’un facteur important ou a erronément pris en considération un facteur, et cette erreur a eu une incidence sur la détermination de la peine; ou

(2) la peine n’est manifestement pas indiquée.

(R. c. Friesen, 2020 CSC 9, [2020] 1 R.C.S. 424 [Friesen] au para. 26.)

[46] En l’espèce, la peine imposée par la Cour fédérale doit être modifiée.

[47] L’objectif principal des sanctions pour outrage civil est d’assurer le respect des ordonnances des tribunaux : Carey c. Laiken, 2015 CSC 17, [2015] 2 R.C.S. 79 aux para. 31 et 41; Canadian Standards Association c. P.S. Knight Co. Ltd., 2021 CF 1346 [P.S. Knight] au para. 15. À cette fin, la dissuasion spécifique et générale sont des facteurs clés à considérer, particulièrement dans les affaires de piratage de contenu : Apotex Inc. c. Merck & Co. Inc., 2003 CAF 234 [Merck] aux para. 85 à 89, autorisation de pourvoi refusée [2003] C.S.C.R. no 366 (C.S.C.); Dish Network LLC et al. v. Gill et al. (27 avril 2018), Hamilton CV-13-40368 (C.S. Ont.) [Dish Network] aux pp. 3, 16 et 17; Trans-High Corporation c. Hightimes Smokeshop and Gifts Inc., 2015 CF 919 au para. 25; Louis Vuitton S.A. c. Tokyo-Do Enterprises Inc., [1990] A.C.F. no 1010 (QL) (C.F. 1re inst.) aux para. 23 et 24; DIRECTV Inc. v. Boudreau, 2005 CarswellOnt 7026 (C.S. Ont.) [DIRECTV] au para. 7, modifiée par [2006] O.J. No. 1583, 2006 CarswellOnt 2391 (C.A. Ont.); Echostar Communications Corporation v. Rodgers, 2010 ONSC 2164 aux para. 60 à 63.

[48] La dissuasion spécifique et générale permettent d’éviter que l’auteur de l’outrage et quiconque serait tenté de ne pas respecter une ordonnance judiciaire s’imaginent que les ordonnances des tribunaux peuvent être violées sans conséquence : Merck au para. 89; Bell Canada et al. c. Vincent Wesley DBA MtlFreeTV.com (28 août 2018), Ottawa T-759-16, Doc. 395 (C.F.) au para. 31; 9038-3746 Quebec Inc. c. Microsoft Corporation, 2010 CAF 151 aux para. 18 et 19, autorisation de pourvoi refusée, Carmelo Cerrelli c. Microsoft Corporation, 2010 CanLII 77120 (C.S.C.).

[49] En l’espèce, j’estime que la Cour fédérale n’a pas appliqué le principe de dissuasion ou n’avait pas, en droit, la bonne compréhension de ce principe. Ce manquement a eu une incidence sur la peine. Autrement, étant donné les circonstances aggravantes déplorables devant la Cour fédérale, une peine beaucoup plus importante aurait été imposée à M. Eric Adwokat – la tête dirigeante de Red Rhino Entertainment Inc. (Red Rhino). L’amende de 40 000 $ imposée par la Cour fédérale n’est manifestement pas indiquée.

[50] Cette erreur de droit et la peine manifestement non indiquée permettent à cette Cour de procéder à sa propre analyse afin de fixer une peine juste en fonction des conclusions de fait de la Cour fédérale, dans la mesure où ces conclusions ne sont pas entachées d’une erreur de principe : Friesen aux para. 26 à 28; Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, c. F-7, sous-alinéa 52b)(i).

[51] La conduite des intimés était évasive, insolente et flagrante. Ils ont continué à contrevenir à l’injonction de la Cour fédérale même après que celle-ci les ait déclarés coupables d’outrage. Dans ces circonstances, une amende est dépourvue de sens. La peine appropriée est l’incarcération : Dish Network; DIRECTV.

I. La conduite des intimés était évasive, insolente et flagrante

[52] Nous sommes en présence d’une conduite évasive, insolente et flagrante. Pour reprendre les mots de la Cour fédérale, la conduite des intimés se situe à la limite supérieure de l’échelle de la gravité objective et de la culpabilité morale : Bell Canada c. Red Rhino Entertainment Inc., 2021 CF 895 [Décision sur la peine] aux para. 25 et 32. Je note ce qui suit :

  • Les intimés ont créé leur entreprise sur le fondement d’une activité illégale : configurer, commercialiser et vendre des appareils (des boîtiers décodeurs) ainsi que des abonnements à des services privés IPTV fournissant l’accès non autorisé à la programmation télévisuelle des appelantes, en direct et sur demande : Bell Canada c. Red Rhino Entertainment Inc., 2019 CF 1460 [Décision sur l’outrage] aux para. 8, 28 et 47;

  • En juin 2016, la Cour fédérale a rendu une injonction interlocutoire interdisant les activités exercées par les intimés : Décision sur l’outrage aux para. 5 et 71;

  • Motivés par l’appât du gain, les intimés ont délibérément choisi de faire fi de l’injonction en exerçant des activités commerciales complexes et de grande envergure donnant une impression de légitimité injustifiée et trompeuse à une activité illégale : Décision sur la peine aux para. 28 et 29. Les boîtiers décodeurs de Red Rhino, dont le prix de détail se situait entre 350 $ et 499 $, étaient vendus avec l’aide d’environ 16 vendeurs dans au moins deux magasins traditionnels, d’au moins deux sites Web, d’au moins trois distributeurs tiers et de kiosques de vente dans de nombreuses foires commerciales très courues dans environ 32 villes d’Amérique du Nord (les foires) auxquelles M. Adwokat et les vendeurs se rendaient en avion [traduction] « relax en première classe » (chilling in first class) : Captures d’écran de la page Facebook de M. Eric Adwokat, dossier d’appel, vol. 4, TX-145, pièce NS-1, p. 1293;

  • Ils l’ont fait au vu de tous pendant au moins 32 mois : Décision sur l’outrage aux para. 28 et 68.

[53] En outre, les intimés ont fait un effort concerté pour miner la capacité des appelantes de faire valoir leurs droits et de protéger leurs intérêts économiques légitimes, notamment en faisant ce qui suit :

  • Éviter la signification de documents judiciaires plus de 30 fois en 28 mois : Décision sur l’outrage au para. 68; Décision sur la peine au para. 34; voir Affidavits de tentative de signification, dossier d’appel, vol. 5, TX-162 à TX-165, p. 1739 à 1753, et TX-169 à TX-174, p. 1777 à 1814;

  • À la dernière minute avant l’audience relative à l’outrage, déposer des avis d’intention de présenter une proposition sous le régime de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. 1985, c. B-3 (la LFI), dans une « tentative […] mal conçue pour contrecarrer l’exercice, par la Cour [fédérale], de son obligation d’assurer le respect de ses ordonnances » : Décision sur l’outrage au para. 68 in fine;

  • Prendre des mesures pour empêcher les victimes de leurs actes d’outrage de demander des dommages-intérêts compensatoires en indiquant ne posséder que 201 $ d’actifs et aucun argent en banque : Bilan de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-27, p. 2338 à 2351; Déclarations de revenus de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-30, p. 2362 à 2382; et

  • Mentir constamment à la Cour fédérale : Décision sur l’outrage aux para. 51, 57 et 64; Décision sur la peine aux para. 32, 35 à 37, 46, 47, 50, 65 et 67.

II. Les intimés ont continué à contrevenir à l’injonction

[54] En plus de la conduite évasive, insolente et flagrante décrite ci-dessus, la seule inférence logique que l’on peut tirer de la preuve circonstancielle devant la Cour fédérale, inférence que celle-ci n’a pas tirée, est que les intimés ont continué à contrevenir à l’injonction. Par conséquent, je ne souscris pas à la conclusion selon laquelle les intimés avaient fait amende honorable pour l’outrage.

[55] Peu de temps après avoir été déclaré coupable d’outrage, M. Adwokat a quitté le pays. Il a assisté à l’audience relative à la peine en mars 2021 du Costa Rica, où il habitait depuis un an : Décision sur la peine au para. 65; Contre-interrogatoire de M. Eric Adwokat, dossier d’appel, vol. 11, p. 3926, lignes 10 à 18, et p. 3930 à 3939. En parallèle, entre juin 2019 et le milieu de 2020, des sociétés imitatrices (copycat companies) de Red Rhino sont apparues, c’est-à-dire des sociétés vendant les mêmes produits sur des sites Web quasi identiques et utilisant la même stratégie de commercialisation. Le site Web de Red Rhino redirigeait automatiquement l’utilisateur vers le site Web d’une société imitatrice, et deux de ces sociétés imitatrices acceptaient les identifiants de Red Rhino. Ces sociétés imitatrices, à une exception près (Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1887, aux para. 110 et 111, renvoyant à la pièce AM-58, p. 2707 à 2730), ont été constituées en société à l’étranger, partagent le même numéro de téléphone et cachent l’identité de leurs exploitants au public. La seule société imitatrice constituée au Canada appartient, par une « coïncidence […] inexplicable », à un ami du frère de M. Adwokat et est exploitée du Costa Rica par l’intermédiaire d’une filiale : Décision sur la peine aux para. 47 et 48; voir généralement l’annexe B.

[56] La Cour fédérale a constaté un lien entre ces sociétés imitatrices et les intimés : Décision sur la peine aux para. 47 à 49. Elle a également constaté que M. Adwokat a menti en niant ce lien : Décision sur la peine au para. 47 in fine. Cependant, parce qu’elle ne pouvait se prononcer, « selon la prépondérance des probabilités, sur la nature exacte de ce lien », la Cour fédérale a conclu que « [r]ien ne prouve [que M. Adwokat] a eu une conduite fautive depuis [la décision sur l’outrage] » : Décision sur la peine aux para. 47 et 49. Je ne suis pas d’accord.

[57] Dès que la preuve révèle (1) que des sociétés ont continué les activités de Red Rhino après la décision sur l’outrage et (2) qu’il existe un lien entre ces sociétés et M. Adwokat, je ne vois pas ce qu’il faut de plus pour conclure que les activités constituant un outrage ont continué : voir l’annexe C. Cela est d’autant plus vrai lorsque la personne la mieux placée pour éclairer sur ce lien, M. Adwokat, ment au sujet de ce lien : Décision sur la peine au para. 47 in fine; voir Barendregt c. Grebliunas, 2022 CSC 22 [Barendregt] au para. 60. Par conséquent, en ne tirant pas la bonne inférence de la preuve, la Cour fédérale a commis une erreur de fait manifeste qui l’a amenée à faire fi du fait que l’outrage se poursuivait – un facteur aggravant. Cette erreur manifeste est inextricablement liée à l’omission de la Cour fédérale d’appliquer le principe de la dissuasion. Il s’ensuit que notre Cour n’a pas à faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de la Cour fédérale sur la question de la poursuite de l’outrage : Friesen au para. 28; R. v. Makokis, 2020 ABCA 330 au para. 15 in fine; R. v. Batstone, 2022 BCCA 171 au para. 49; R. v. Stevic, 2022 BCCA 45 au para. 11; R. v. R.O., 2023 BCCA 65 au para. 35. La poursuite de l’outrage démontre un mépris flagrant des ordonnances judiciaires et fait fortement pencher la balance en faveur de l’incarcération : Dish Network aux pp. 2 et 14; Telewizja Polsat S.A. c. Radiopol Inc., 2006 CF 137 au para. 42 [Polsat]; P.S. Knight aux para. 19(ix) et 20.

III. Le principe de modération ne peut s’appliquer

[58] Malgré le principe de modération dans le recours à l’incarcération comme sanction (Code criminel, L.R.C. 1985, c. C-46, al. 718.2d) et e); Clayton Ruby, Sentencing, 10e éd., Toronto, LexisNexis, 2020 au para. 13.9; R. c. Sharma, 2022 CSC 39 au para. 60; Tremaine c. Canada (Commission des droits de la personne), 2014 CAF 192 [Tremaine] au para. 36), l’analyse ci-dessus démontre que les éléments militant en faveur d’une peine d’incarcération sont présents : DIRECTV; Dish Network. Selon toute vraisemblance, les tribunaux ontariens auraient infligé une peine d’incarcération à M. Adwokat si la présente affaire leur avait été soumise : Dish Network à la p. 14; DIRECTV. Les cours fédérales, y compris notre Cour, se montrent beaucoup plus indulgentes. À ma connaissance, dans des affaires d’outrage civil concernant le droit d’auteur, les cours fédérales ont infligé une peine d’incarcération à trois reprises, et seulement si certaines conditions n’étaient pas satisfaites : Lari c. Canadian Copyright Licensing Agency, 2007 CAF 127 [Lari]; P.S. Knight; Polsat. Cette divergence d’approche entre les tribunaux doit cesser. La Cour fédérale ne doit pas être un refuge pour les personnes coupables d’outrage au tribunal.

[59] Une amende n’est pas une alternative appropriée lorsque la conduite de la personne commettant l’outrage, en plus d’être flagrante, évasive et continue, entrave la capacité de la cour de déterminer le montant d’une amende qui aurait véritablement un effet dissuasif : Borer v. Nelson, 2020 ONSC 4259 au para. 22; Majormaki Holdings LLP v. Wong, 2009 BCCA 349 aux para. 8 et 25; Cellupica v. Di Giulio, 2011 ONSC 1715 aux para. 15, 41 et 48. « Entraver » décrit parfaitement la conduite des intimés. Ils ont choisi de ne produire aucun renseignement financier devant la Cour fédérale : Décision sur la peine au para. 64 in fine. Malgré les nombreuses demandes des appelantes, les intimés ne se sont pas acquittés de l’obligation que leur impose l’alinéa 158b) de la LFI de fournir au syndic, et par le fait même aux appelantes, tous les livres et registres se rattachant à leurs biens ou affaires : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1868 et 1869, aux para. 74 à 76; Courriels échangés entre les avocats des appelantes et le syndic de faillite, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-28, p. 2352.

[60] En contraste avec ce refus de produire des renseignements financiers, M. Adwokat lançait un message clair sur les médias sociaux et à quiconque observait les activités des intimés que l’entreprise des intimés était hautement profitable, que l’argent n’était pas un obstacle pour eux : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1867 et 1868, aux para. 70 et 71; Voyages de M. Adwokat affichés sur Facebook, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-25, p. 2325 à 2332; Utilisation de véhicules par M. Adwokat affichée sur Facebook, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-26, p. 2333 à 2336.

[61] Les appelantes ont présenté, par l’entremise d’affidavits de nombreux enquêteurs, étayés par des centaines de pièces, toute la preuve à laquelle elles avaient accès pour prouver l’ampleur des activités des intimés constituant un outrage et le train de vie somptueux que ces activités ont procuré à M. Adwokat. Cependant, cette preuve ne permet pas de déterminer un montant d’amende qui aurait un effet dissuasif. Cette détermination nécessite des renseignements financiers qui sont exclusivement en possession des intimés et que ces derniers ont choisi de ne pas produire.

[62] Étant donné le choix des intimés de ne pas produire les renseignements financiers requis, leur conduite déplorable et l’outrage continu, je conclus que la seule peine juste qui aurait un effet dissuasif et qui ne laisserait aucun doute à l’égard du fait que les tribunaux canadiens imposent le respect de leurs ordonnances est une peine d’incarcération pour M. Adwokat.

[63] Bien que la preuve ne permette pas de déterminer un montant d’amende qui aurait un effet dissuasif, il est clair que l’amende de 40 000 $ imposée par la Cour fédérale n’est manifestement pas indiquée. En effet, ce montant semble correspondre à celui des ventes que les intimés réalisaient dans une foire en une seule journée : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1868, aux para. 57 à 59; Photos de l’équipe des ventes de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-20, p. 2282 à 2298; Photos de conteneurs remplis de boîtiers décodeurs de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-21, p. 2299 à 2301; Énoncé des faits décrivant l’achat d’un boîtier décodeur de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 3, pièce TX-130, p. 1097 à 1109.

[64] En d’autres mots, 40 000 $ n’est « [qu’]une simple redevance de licence que d’autres [individus et] sociétés, dans la perspective d’un acte similaire, pourraient simplement prévoir à leur budget » : Merck au para. 89.

IV. Compétence pour ordonner l’incarcération

[65] Devant notre Cour, les appelantes demandent [traduction] « toute autre réparation que […] la Cour peut estimer juste » : Avis d’appel des appelantes au para. 4; voir Canada (Commission des droits de la personne) c. Nation crie de Saddle Lake, 2018 CAF 228 aux para. 41 à 42. Après avoir appliqué de nouveau les principes de détermination de la peine aux faits, la peine que j’estime juste est l’incarcération : Friesen au para. 27; Tremaine au para. 19.

[66] Je reconnais qu’en appel, les appelantes ne demandent plus une peine d’incarcération. Cependant, la peine d’incarcération demeure une réparation qu’elles ont demandée dans leur avis de requête ex parte (voir dossier d’appel, vol. 1, p. 207, au para. 2b)), sur lequel notre Cour doit se prononcer puisqu’elle rend maintenant le jugement que la Cour fédérale aurait dû rendre : Loi sur les Cours fédérales, sous-alinéa 52b)(i). Bien que notre Cour doive déterminer la peine à la lumière des représentations des parties, elle doit également considérer l’intérêt public et le respect des ordonnances de la Cour fédérale. En d’autres mots, la nature publique de l’outrage civil exige que j’ordonne une peine qui transcende les intérêts des parties : Droit de la famille — 21819, 2021 QCCA 759 [Droit de la famille] au para. 56; Vidéotron Ltée. c. Industries Microlec Produits Électroniques Inc., [1992] S.C.J. No. 79, [1992] 2 R.C.S. 1065 à la p. 1076; Business Development Bank of Canada v. Cavalon Inc., 2017 ONCA 663 au para. 79, autorisation de pourvoi refusée Robyrt Regan c. Banque de développement du Canada, 2018 CanLII 71041 (C.S.C.). Par ailleurs, les parties ont eu l’opportunité de produire de la preuve et elles ont débattu pleinement les questions relatives à la peine d’incarcération que les appelantes demandaient en premier lieu. Par conséquent, l’équité procédurale a été respectée : Droit de la famille au para. 57; Brégaint c. Daoust, 2016 QCCA 721 aux para. 27 à 28.

V. La requête en présentation de nouveaux éléments de preuve n’est pas nécessaire

[67] Compte tenu de la conclusion tirée ci-dessus, il n’est pas nécessaire que je me prononce sur la requête en présentation de nouveaux éléments de preuve présentée par les appelantes. Pendant combien de temps les intimés peuvent-ils nous forcer à jouer au chat et à la souris? Dans les circonstances, je rejetterais la requête, elle n’est pas nécessaire : Barendregt au para. 29, citant Palmer c. La Reine, 106 D.L.R. (3d) 212 (C.S.C.), [1980] 1 R.C.S. 759 à la p. 775.

VI. Adjudication des dépens

[68] En ce qui a trait aux dépens, les appelantes ont engagé 690 620,51 $ (sans les taxes) de frais juridiques et 39 423,12 $ de débours à l’égard des procédures d’outrage : Décision sur la peine au para. 73. À la Cour fédérale, elles n’ont pas réclamé les dépens sur la base avocat-client même s’il est habituel que de tels dépens soient adjugés dans les affaires d’outrage : Décision sur la peine au para. 74; voir Lari au para. 38, et la jurisprudence qui y est citée. Plutôt, elles ont demandé une indemnisation partielle, soit une somme globale de 400 000 $ : Décision sur la peine au para. 73. Je ne vois aucune raison pour laquelle les appelantes n’auraient pas droit à des dépens de ce montant.

[69] La Cour fédérale a adjugé des dépens de 35 000 $ : Décision sur la peine au para. 79. Cette somme ne couvre même pas les débours des appelantes, lesquels sont en grande partie imputables à la conduite des intimés (Dreco Energy Services Ltd. v. Wenzel, 2005 ABCA 185 au para. 11), par exemple en évitant la signification de documents à plus de 30 reprises. Je suis d’accord avec la Cour fédérale que les dépens ne devraient pas dissuader une personne ayant des moyens limités de se défendre contre une accusation d’outrage : Décision sur la peine aux para. 75 et 76. Cependant, les intimés ne sont pas des personnes ayant des moyens limités. De plus, imposer des dépens peu élevés à des personnes coupables d’outrage dans une situation semblable à celle en l’espèce envoie aux victimes, particulièrement les titulaires de droits d’auteur ayant des moyens limités (par exemple, les jeunes entreprises de technologie), le message qu’il ne vaut pas la peine de défendre leurs droits d’auteur ni d’aider la Cour fédérale à assurer le respect de ses ordonnances : voir Lari au para. 38, et la jurisprudence qui y est citée.

VII. Dispositif proposé

[70] J’accueillerais l’appel, j’infirmerais le jugement rendu par la Cour fédérale le 1er septembre 2021 dans le dossier T-759-16 et, rendant le jugement que la Cour fédérale aurait dû rendre, j’ordonnerais en partie la peine d’emprisonnement demandée par les appelantes dans leur requête pour outrage civil en émettant un mandat d’incarcération à l’endroit de M. Eric Adwokat, qui sera arrêté et incarcéré pour une période de quinze (15) jours, à purger consécutivement : voir Loi sur les Cours fédérales, sous-alinéa 52b)(i); voir Avis de requête ex parte, dossier d’appel, vol. 1, p. 207, au para. 2b); Décision sur la peine au para. 3.

[71] Étant donné que j’annulerais le jugement sur la peine, l’adjudication des dépens dans ce jugement devrait également être annulée. Par conséquent, j’accorderais aux appelantes les dépens de 400 000 $ qu’elles ont demandés devant la Cour fédérale et des dépens de 50 000 $ pour l’instance devant notre Cour : Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, para. 400(1); Loi sur les Cours fédérales, sous-alinéa 52b)(i); Eli Lilly Canada Inc. c. Novopharm Limited, 2010 CAF 219 au para. 13d.

« Nathalie Goyette »

j.c.a.


ANNEXE A

Décision

Contexte

Peine

Fédéral

Baxter Travenol Laboratories of Canada Ltd c. Cutter (Can.) Ltd., [1987] 2 C.F. 557, [1987] A.C.F. no 205

Après qu’a été rendue une injonction dans une affaire de contrefaçon de brevet, la défenderesse n’a pas livré les biens contrefaits (poches pour le sang) et les a vendus pour un million de dollars.

50 000 $

valeur en 2023 : 114 850,75 $

Louis Vuitton S.A. c. Tokyo-Do Enterprises Inc., [1990] A.C.F. no 1010 (QL) (C.F. 1re inst.)

La défenderesse a vendu des produits d’une marque de luxe (sacs) en violation d’une ordonnance interdisant la contrefaçon de la marque de commerce.

5 000 $

valeur en 2023 : 10 032,59 $

Canada (Procureur général) c. de l’Isle, [1994] AC.F. no 955 (C.A.F.)

Les défendeurs ont violé une injonction permanente en continuant à commettre des infractions à la Loi sur les aliments et drogues, c.-à-d. en publiant un répertoire de drogues (pour les médecines non conventionnelles).

3 mois d’emprisonnement pour l’individu

50 000 $ pour la société

valeur en 2023 : 89 372,82 $

Manufacturers Life Insurance Co. c. Guaranteed Estate Bond Corp., [2000] A.C.F. no 172 (C.F. 1re inst.)

La défenderesse a continué de contrefaire des marques de commerce en vendant des produits d’assurance et de services financiers connexes.

5 000 $

valeur en 2023 : 8 229,95 $

Lyons Partnership, L.P. c. MacGregor, [2000] A.C.F. no 341 (C.F. 1re inst.)

Le défendeur a porté un costume de Barney dans des spectacles malgré une injonction le lui interdisant (violation du droit d’auteur) et avait des articles en violation de cette injonction.

3 000 $

valeur en 2023 : 4 937,97 $

Desnoes & Geddes Ltd. c. Hart Breweries Ltd., 2002 CFPI 632, [2002] A.C.F. no 869

La société a contrefait des marques de commerce enregistrées en distribuant et vendant des boissons alcoolisées dont l’étiquette comportait certains mots et dessins.

L’individu a prêté assistance à la société.

2 000 $ pour l’individu

valeur en 2023 : 3 153,69 $

4 000 $ pour la société

valeur en 2023 : 6 307,38 $

Apotex Inc. c. Merck & Co. Inc., 2003 CAF 234, [2003] A.C.F. no 837

La défenderesse a vendu des drogues en contravention d’une conclusion tirée dans les motifs d’un jugement avant que le jugement soit rendu et certifié, d’une valeur de 9 000 000 $.

125 000 $

valeur en 2023 : 188 602,94 $

Chum Ltd. c. Stempowicz, 2004 CF 611, [2004] A.C.F. no 732

Les défendeurs ont commis un outrage en continuant de vendre et d’entretenir de l’équipement et des appareils permettant d’avoir accès à DIRECTV.

25 000 $

valeur en 2023 : 37 245,89 $

Brilliant Trading Inc. c. Wong, 2005 CF 1214, [2005] A.C.F. no 1480

Les défendeurs n’ont pas respecté une ordonnance par laquelle ils devaient cesser d’utiliser, d’annoncer, de commercialiser et de vendre des biens associés avec la marque de commerce de la plaignante.

10 000 $

valeur en 2023 : 14 615,38 $

Telewizja Polsat S.A. c. Radiopol Inc., 2006 CF 137, [2006] A.C.F. no 257

Les défendeurs ont décodé sans autorisation des signaux d’abonnement.

10 000 $ et 6 mois d’emprisonnement (pas d’emprisonnement si le site Web est fermé dans les cinq jours) pour l’individu

valeur en 2023 : 14 223,66 $

25 000 $ pour la société

valeur en 2023 : 35 559,15 $

Dursol-Fabrik Otto Durst GmbH Co. c. Dursol North America Inc., 2006 CF 1115, [2006] A.C.F. no 1411

Les défendeurs ont violé des ordonnances interdisant la commercialisation, la vente et la livraison d’encaustique pour métaux et d’autres biens.

20 000 $ pour l’individu et la société, solidairement

valeur en 2023 : 28 447,32 $

Canadian Copyright Licensing Agency c. U-Compute, 2007 CAF 127, [2007] A.C.F. no 479

Les défendeurs ont violé pour la troisième fois une ordonnance Anton Piller interdisant la copie et la vente sans autorisation de manuels scolaires; ils ont également bloqué l’accès aux locaux de l’entreprise pour inspection.

6 mois d’emprisonnement, avec sursis si les injonctions permanentes sont respectées et 400 heures de services communautaires

Bell Canada c. Wesley dba MtlFreeTV.com, 2016 CF 1379

Le défendeur a violé une injonction interlocutoire en continuant à vendre des boîtiers décodeurs facilitant l’accès non autorisé à du contenu protégé par des droits d’auteur.

15 000 $

valeur en 2023 : 18 205,84 $

Bell Canada c. Vincent Wesley dba MtlFreeTV.com, 2018 CF 861

Pour la seconde fois, le défendeur a violé une injonction interlocutoire en continuant à vendre des boîtiers décodeurs facilitant l’accès non autorisé à du contenu protégé par des droits d’auteur.

30 000 $

valeur en 2023 : 35 056,95 $

Canadian Standards Association v. P.S. Knight Co. Ltd., 2021 FC 1346, 193 C.P.R. (4th) 236

Les défendeurs sont accusés de trois chefs d’outrage pour n’avoir pas respecté les conditions d’un jugement rendu dans une affaire de violation de droit d’auteur (au para. 6), soit vendre des biens protégés par le droit d’auteur et ne pas avoir livré les biens (au para. 11).

100 000 $ et emprisonnement de six mois pour l’individu, avec sursis si l’outrage est purgé dans les dix jours

valeur en 2023 : 111 360,35 $

Ontario

DIRECTV Inc. v. Boudreau, [2006] O.J. No. 1583, 2006 CarswellOnt 2391 (C.A. Ont.)

Le défendeur a violé une injonction en exploitant une entreprise de piratage de signal satellite et d’une ordonnance enjoignant à assister à l’audience sur la détermination de la peine.

Emprisonnement de 3 mois

Dish Network L.L.C. v. Ramkissoon, 2010 ONSC 5205, 194 A.C.W.S. (3d) 463 (C.S. Ont.)

Un couple commet un outrage de deux ordonnances Anton Piller relatives à un vol sérieux de signal satellite.

Emprisonnement de 4 mois pour un individu et 2 mois pour un autre individu

Dish Network L.L.C. v. Gill, motifs non publiés datés du 27 avril 2018, dossier CV-13-40368 (C.S. Ont.)

Le défendeur a violé une injonction permanente en faisant de la publicité pour une technologie de piratage et d’abonnements illégaux, en vendant un appareil illégal donnant accès à un signal encodé de télévision par satellite et en aidant des tiers à utiliser le seul appareil vendu (p. 1)

Emprisonnement de 4 mois

Dish Network L.L.C. et al. v. Butt et al., 2022 ONSC 1710

Les défendeurs ont commis un outrage pour avoir diffusé en continu des émissions de télévision et des films sous le nom « Shava TV », qui appartenait à Dish Network, en vendant des boîtiers décodeurs

Absolution conditionnelle sous réserve d’une probation de deux ans moins un jour

Nota : Les valeurs en 2023 ont été calculées avec la feuille de calcul de l’inflation de la Banque du Canada, à l’adresse https://www.banqueducanada.ca/taux/renseignements-complementaires/feuille-de-calcul-de-linflation. Cet outil est basé sur les données mensuelles de l’indice des prix à la consommation de 1914 jusqu’à maintenant.


 

ANNEXE B

Éléments de preuve montrant que les intimés ont continué à commettre l’outrage par l’intermédiaire de sociétés imitatrices

B.1 Les sociétés imitatrices de Red Rhino qui sont apparues :

B.2 Le site Web de Red Rhino redirige automatiquement l’utilisateur vers le site Web d’une société imitatrices, et deux des sociétés imitatrices acceptent les identifiants de Red Rhino :

B.3 Les sociétés imitatrices ont été constituées à l’étranger :

B.4 Les sociétés imitatrices partagent le même numéro de téléphone :

B.5 Les sociétés imitatrices cachent l’identité de leurs exploitants au public :

B.6 Une autre société imitatrice est exploitée du Costa Rica :

Warranty Services Ltd : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1877, au para. 92; similitudes entre le site Web de Red Rhino et celui de Warranty Services Ltd., dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-41, p. 2485 à 2490;

New Pay Group LLC : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1879, aux para. 96 et 97; similitudes entre le site Web de Red Rhino et celui de New Pay Group LLC, dossier d’appel, vol. 7, pièces AM-44.1 à 44.12, p. 2504 à 2528;

Lime Juice Box : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1882, au para. 104 à 107, renvoyant aux similitudes entre le site Web de Red Rhino et ceux de Lime Juice Box, dossier d’appel, pièce AM-53, p. 2701 à 2707.

Warranty Services Ltd : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1875, aux para. 88 et 89, et p. 1878, au para. 93, renvoyant aux copies d’écran de l’accès au site Web de Warranty Services Ltd. utilisant les identifiants de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièces AM-42.1 à AM-42.5, p. 2491 à 2501;

New Pay Group LLC : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1880, au para. 98, renvoyant aux copies d’écran de l’accès au site Web de New Pay Group LLC utilisant les identifiants de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièces AM-45.1 à AM 45.5, p. 2529 à 2539.

Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1879, au para. 95, p. 1881 au para. 97, et p. 1880, au para. 100, renvoyant à la pièce AM-47, vol. 7, p. 2540; voir également les pièces AM-40.1, p. 2459, à AM-40.9, p. 2477.

Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1881, aux para. 101 et 102, renvoyant à la pièce AM-40.1, vol. 7, p. 2459 à 2461, pièce AM-44.1, vol. 7, p. 2504 à 2506, et pièce AM-48, vol. 7, p. 2572 à 2573.

Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1878, au para. 94 (renvoyant à la pièce AM-43, dossier d’appel, vol. 7, p. 2503), p. 1881, au para. 99, et 1886, au para. 108 (renvoyant aux pièces AM-54 à AM-56, dossier d’appel, p. 2708 à 2714).

Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1887 et 1888, aux para. 111 à 115, renvoyant aux pièces AM-59 à AM-62 du dossier d’appel, p. 2731 à 2967; voir la page Facebook de Lime Juice Box Costa Rica, dossier d’appel, pièce AM-62, p. 2966.


ANNEXE C

Éléments de preuve montrant que des sociétés ont continué à exercer les activités de Red Rhino après la décision sur l’outrage

21 novembre 2019 : Le site Web de garantie de Red Rhino redirigeait automatiquement l’utilisateur vers le site Web de Warranty Services Ltd. : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1875, au para. 89, renvoyant au dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-38, p. 2455; voir également le dossier de Whois sur Warranty Services, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-43, p. 2503;

20 janvier 2020 : Création de la page Facebook de Lime Juice Box Costa Rica, l’activité la plus récente étant datée du 1er juillet 2020, et étant encore affichée en ligne le 15 décembre 2020 : dossier d’appel, pièce AM-62, p. 2965;

23 mars 2020 : Création des sites Web de Lime Juice Box : Rapport d’enquête d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, pièce AM-63, p. 2972; voir également les pièces AM-54 à AM-56, p. 2709, 2712 et 2714; et mise en ligne le 8 juillet 2020 : pièces AM-57.1 à AM-57.3, p. 2715 à 2726;

26 mars 2020 : Constitution en société de Lime Juice Box USA : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1888, au para. 114, renvoyant au dossier d’appel, pièce AM-61, p. 2962;

16 juin 2020 : Possibilité d’accéder aux sites Web de Warranty Services Ltd., de New Pay Group LLC et de Lime Juice Box : Affidavit de Jason Vallée Buchanan, dossier d’appel, vol. 9, p. 2975 à 2980, aux para. 2 à 6, renvoyant aux pièces JFV-1.1 à JFV-4.15, p. 2982 à 3127;

10 juillet 2020 : Possibilité d’accéder aux sites Web de Warranty Services Ltd. et de New Pay Group LLC en utilisant les identifiants de Red Rhino : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1878, aux para. 93 et 98, renvoyant au dossier d’appel, vol. 7, pièces AM-42.1 à 42.2, p. 2492 et 2494, et pièces AM-45.1 à 45.2, p. 2530 et 2532;

12 décembre 2020 : M. Adwokat était encore le seul administrateur de Red Rhino : Affidavit d’Anthony J. Martin, dossier d’appel, vol. 6, p. 1875, au para. 87, renvoyant au rapport du profil de la société de Red Rhino, dossier d’appel, vol. 7, pièce AM-37, p. 2451.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-285-21

 

INTITULÉ :

BELL CANADA ET AL. c.

ERIC ADWOKAT ET AL.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 FÉVRIER 2023

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GLEASON

Y A SOUSCRIT :

LE JUGE BOIVIN

MOTIFS DISSIDENTS :

LA JUGE GOYETTE

DATE DES MOTIFS :

LE 18 MAI 2023

COMPARUTIONS :

François Guay

Guillaume Lavoie Ste-Marie

Etienne Lacroix-Couillard

POUR LES APPELANTES

Brian N. Radnoff

David Z. Seifer

POUR LES INTIMÉS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Biggar S.E.N.C.R.L.

Montréal (Québec)

POUR LES APPELANTES

Dickinson Wright LLP

Toronto (Ontario)

POUR LES INTIMÉS

 

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