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Date : 20250610


Dossier : A-281-24

Référence : 2025 CAF 113

CORAM :

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

 

 

ENTRE :

KRISTINA TAKHMI JOSEPH

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

Audience tenue à Montréal (Québec), le 10 juin 2025.

Jugement rendu à Montréal (Québec), le 10 juin 2025.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE BOIVIN

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

 


Date : 20250610


Dossier : A-281-24

Référence : 2025 CAF 113

CORAM :

LE JUGE BOIVIN

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

 

 

ENTRE :

KRISTINA TAKHMI JOSEPH

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE BOIVIN

[1] Dans sa demande de contrôle judiciaire, la demanderesse conteste la décision de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la Commission) rendue le 27 août 2024 (2024 CRTESPF 119) (la Décision). La Commission, donnant droit aux objections préliminaires du défendeur, a rejeté la plainte de pratique déloyale déposée par la demanderesse en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, L.C. 2003, ch. 22, art. 2 (la Loi), alléguant que le défendeur l’avait intimidée, menacée ou avait eu recours à des mesures coercitives à son endroit, contrevenant ainsi à l’alinéa 186(2)a)iv) et à l’article 189 de la Loi. La Commission a statué, qu’à sa face même, les allégations de la demanderesse ne démontraient aucune cause défendable des violations alléguées de la Loi et, au surplus, une partie des allégations était prescrite.

[2] La norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65).

[3] La seule question qui se pose en l’espèce est la suivante : la décision de la Commission est-elle raisonnable?

[4] Après examen du dossier et après avoir considéré les prétentions des parties, je suis d’avis que la demanderesse, dont c’était le fardeau, n’a pas démontré que la décision de la Commission est déraisonnable.

[5] Premièrement, pour ce qui est de la question de la prescription, je suis d’avis qu’au regard de la preuve dont disposait la Commission, elle n’avait pas compétence pour entendre une partie de la plainte relativement à des mesures coercitives qu’aurait prises l’employeur en août 2021, puisque la plainte a été déposée au-delà du délai prévu de 90 jours à l’alinéa 190(2) de la Loi. Il était donc raisonnable pour la Commission de conclure que la plainte était prescrite.

[6] Deuxièmement, relativement au fardeau de la preuve, la Commission a expressément traité de cette question en s’appuyant sur la jurisprudence pertinente pour ensuite raisonnablement conclure que le renversement du fardeau, prévu au paragraphe 191(3) de la Loi - en lien avec les plaintes déposées en vertu du paragraphe 186(2) de la Loi - n’a lieu que dans les cas où la partie plaignante établit une cause défendable dans sa plainte.

[7] Troisièmement, en ce qui a trait à la plainte déloyale en lien avec la correction du contrat de travail de la demanderesse, la Commission a soigneusement analysé les observations et les arguments de chacune des parties relativement à l’objection du défendeur quant à l’absence de cause défendable. Plus spécifiquement, aux paragraphes 32 à 35 de sa Décision, la Commission a considéré les allégations de la demanderesse en lien avec l’alinéa 186(2)a) de la Loi qui interdit les représailles de l'employeur à l'encontre d'un employé qui exerce certains droits, notamment le droit de déposer un grief contre son employeur. En d’autres termes, l’action reprochée à l’employeur doit être en réponse à un droit prévu par la Loi. En l’espèce, la Commission a noté que la demanderesse a déposé deux griefs le 13 mars 2023, exerçant ainsi les droits protégés par la disposition susmentionnée. La Commission a cependant aussi observé que les allégations contre le défendeur ont eu lieu en février 2023, soit avant - et non après - le dépôt des griefs, et que « [l]a plaignante [demanderesse] ne précise pas comment les actions reprochées constituent des représailles à la suite des griefs qu’elle a déposés ». Puisque les actions reprochées à l’employeur précèdent le dépôt des griefs, les conditions d’application de l’article 186 ne sont pas rencontrées. Il était donc loisible à la Commission de conclure que « [la] plainte ne révèle pas que le défendeur a pris des mesures interdites par l’alinéa 186(2)a) en réponse à l’exercice par la plaignante d’un droit prévu aux parties 1, 2 ou 2.1 de la Loi. » (Décision au para. 33).

[8] Quatrièmement, la Commission a raisonnablement conclu que l’article 189 de la Loi ne trouve pas application puisque les faits reprochés par la demanderesse au défendeur ne visent pas une organisation syndicale. Je ne décèle pas d’erreur.

[9] Finalement, je ne suis pas convaincu qu’il y ait eu quelque manquement que ce soit à l’équité procédurale de la part de la Commission.

[10] Bien que la demanderesse ait soulevé un certain nombre d’arguments et d’allégations au soutien de ses prétentions, il n’est pas nécessaire d’en traiter dans leur entièreté pour disposer de l’affaire.

[11] Pour tous ces motifs, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire sans dépens. L’intitulé de la cause est amendé afin de refléter que le Procureur général est le seul désigné à tire de défendeur.

« Richard Boivin »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

René LeBlanc j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Sylvie E. Roussel j.c.a. »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-281-24

 

INTITULÉ :

KRISTINA TAKHMI JOSEPH c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 juin 2025

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE BOIVIN

 

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE LEBLANC

LA JUGE ROUSSEL

 

 

DATE DES MOTIFS :

LE 10 juin 2025

 

 

COMPARUTIONS :

Kristina Takhmi Joseph

 

Pour SON PROPRE COMPTE

 

Me Marc Séguin

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shalene Curtis-Micallef

Sous-procureure générale du Canada

 

Pour le défendeur

 

 

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