Date : 20251121
Dossier : A-302-23
Référence : 2025 CAF 207
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CORAM : |
LE JUGE LOCKE LA JUGE GOYETTE LE JUGE PAMEL |
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SA MAJESTÉ LE ROI |
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QUÉBECOR INC. |
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intimée |
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Audience tenue à Montréal (Québec), le 12 mars 2025.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 21 novembre 2025.
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MOTIFS DU JUGEMENT : |
LA JUGE GOYETTE |
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Y ONT SOUSCRIT : |
LE JUGE LOCKE LE JUGE PAMEL |
Date : 20251121
Dossier : A-302-23
Référence : 2025 CAF 207
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CORAM : |
LE JUGE LOCKE LA JUGE GOYETTE LE JUGE PAMEL |
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ENTRE : |
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SA MAJESTÉ LE ROI |
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QUÉBECOR INC. |
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intimée |
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MOTIFS DU JUGEMENT
LA JUGE GOYETTE
[1] Durant les années 2000, Québecor inc. et une société qu’elle contrôlait indirectement, 3662527 Canada inc. (366), se trouvaient dans des situations opposées. Québecor possédait des actions d’Abitibi Consolidated inc. dont le coût fiscal était minime et la valeur élevée. De ce fait, si Québecor avait disposé de ses actions, elle aurait dû s’imposer sur un gain en capital de 191,8M$. À l’inverse, 366 détenait des actions de Vidéotron Télécom ltée dont le coût fiscal était élevé mais la valeur faible. Conséquemment, si 366 avait disposé de ses actions, elle aurait réalisé une perte en capital de 200,5M$. Une série d’opérations a donc été mise en œuvre afin de profiter de la perte latente reliée aux actions détenues par 366 pour augmenter le coût des actions détenues par Québecor.
[2] Considérant que cette série d’opérations constitue un abus de la Loi de l’impôt sur le revenu (L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.) (la Loi)), le ministre du Revenu national a établi des avis de détermination par lesquels il a refusé l’augmentation du coût fiscal des actions que Québecor détenait dans Abitibi et procédé aux ajustements corrélatifs.
[3] Québecor a interjeté appel de cette décision à la Cour canadienne de l’impôt. Celle-ci a accueilli l’appel considérant que la Couronne—représentante du ministre—ne s’était pas déchargée de son fardeau de prouver que les opérations en question sont abusives : Québecor inc. c. Le Roi, 2023 CCI 142 (décision de la CCI). Même si la Couronne a présenté des arguments différents devant notre Cour, je considère qu’elle ne s’est toujours pas déchargée de son fardeau et rejetterais donc son appel.
I. Contexte législatif
[4] La Couronne avance que la série d’opérations en litige contrevient à deux régimes de règles de la Loi de l’impôt sur le revenu : le régime de gains et pertes en capital et le régime applicable à la liquidation des sociétés par actions canadiennes. Afin de faciliter la compréhension de la position de la Couronne et des présents motifs, il convient de décrire sommairement ces régimes. Les dispositions législatives citées sont celles de la Loi de l’impôt sur le revenu.
A. Régime des gains et pertes en capital
[5] Un gain ou une perte en capital, selon le cas, correspond au gain ou à la perte économique qu’un contribuable réalise lorsqu’il dispose d’un bien en capital : alinéas 39(1)a) et b). Le gain ou la perte en capital est obtenu en soustrayant le prix de base rajusté (le coût fiscal, ci-après appelé le « coût »
) du bien de son produit de disposition (ou « produit »
) : paragraphe 40(1). Par exemple, si un contribuable a acheté un bien pour 100 $ et qu’il le vend subséquemment pour 50 $, il réalise une perte en capital de 50 $, soit le produit de disposition de 50 $ moins le coût de 100 $. Seule la moitié du gain en capital est imposable et seule la moitié de la perte en capital est déductible: alinéas 38a) et b). Ainsi, dans notre exemple, le contribuable a une perte en capital déductible de 25 $, soit la moitié de la perte en capital de 50 $. Enfin, une perte en capital déductible peut être déduite du montant d’un gain en capital imposable réalisé durant la même année d’imposition, durant les trois années précédentes ou durant n’importe laquelle année subséquente : alinéa 111(1)b).
[6] En parallèle, la Loi contient des dispositions communément appelées « règles de minimisation de pertes »
(«
stop-loss rules »
en anglais) qui affectent la reconnaissance des pertes en capital de façon permanente ou temporaire : voir notamment les articles 13, 40, 69, 93 et 112; Jim Samuel, «
Stopping the Losses:
The Application of Stop-Loss Rules to Transactions Involving Foreign Affiliates »
(2010) 58:4 Rev. fiscale can. 897 aux pp. 901-902. Ces règles s’appliquent aux personnes qui ont un certain lien entre elles—des personnes affiliées—telles deux sociétés contrôlées par la même société : alinéa 251.1(1)(c)(i). Par exemple, en vertu du paragraphe 40(3.4), lorsqu’une société dispose d’un bien en faveur d’une personne affiliée et réalise une perte, la perte sera réputée nulle. En général, cette perte sera suspendue et ne pourra être réclamée que lorsque le bien aura fait l’objet d’une disposition à l’extérieur du groupe affilié. La prémisse qui sous-tend les règles de minimisation de pertes est que ce ne sera qu’au moment où le bien fera l’objet d’une disposition à l’extérieur du groupe qu’il y aura une « véritable »
réalisation de la perte pour le groupe : Canada c. Cascades, 2009 CAF 135 au para. 34. Autrement, il serait possible de tirer parti de la baisse de valeur d’un bien en le transférant à une personne affiliée de manière à réaliser une perte déductible à l’encontre d’un gain tout en conservant la possibilité de bénéficier subséquemment d’une augmentation de valeur du bien.
B. Régime applicable aux liquidations de sociétés canadiennes
[7] Le régime de liquidation des sociétés canadiennes est en réalité composé de deux sous-régimes : celui des liquidations régies par le paragraphe 88(1) et celui des liquidations auxquelles le paragraphe 88(1) ne s’applique pas.
(1) Sous-régime des liquidations libres d’impôt régies par le paragraphe 88(1)
[8] Le paragraphe 88(1) s’applique lorsque trois conditions sont réunies : 1) une filiale est liquidée; 2) avant la liquidation, au moins 90% des actions émises de chaque catégorie de son capital-actions appartenaient à une société canadienne imposable—la « société mère »
; et 3) toutes les actions qui n’appartenaient pas à la société mère appartenaient à des personnes avec lesquelles la société mère n’avait pas de lien de dépendance.
[9] Lorsque ces trois conditions sont remplies, la liquidation est « libre d’impôt »
tant pour la filiale que pour la société mère. Métaphoriquement, c’est comme si la filiale disparaissait et que la mère prenait sa place. Cela se produit parce que les biens qui sont attribués à la société mère sont réputés avoir fait l’objet d’une disposition par la filiale pour un produit de disposition égal au coût de ces biens pour la filiale et ce coût devient le coût de la société mère à l’égard de ces biens : alinéas 88(1)a) et c). Il n’y a donc ni gain ni perte pour la filiale. De plus, les actions de la filiale que la société mère possédait sont généralement réputées faire l’objet d’une disposition au coût avec la conséquence qu’il n’y a ni gain ni perte pour la société mère : alinéa 88(1)b).
(2) Sous-régime des liquidations imposables non régies par le paragraphe 88(1)
[10] Lorsque le paragraphe 88(1) ne s’applique pas, la liquidation est régie par plusieurs dispositions de la Loi et engendre des conséquences fiscales. Les présents motifs parleront de « liquidation imposable »
.
[11] Dans de telles situations, la société liquidée est réputée avoir disposé de ses biens pour un produit de disposition égal à leur juste valeur marchande : alinéa 69(5)a). Elle réalise donc un gain ou une perte en capital selon le rapport entre la juste valeur marchande et le coût des biens qu’elle distribue à ses actionnaires. Les actionnaires à qui la société liquidée distribue ses biens sont réputés acquérir ces biens à leur juste valeur marchande : alinéa 69(5)b).
[12] Fait important: si la société liquidée est affiliée à l’actionnaire (ou aux actionnaires) à qui elle distribue ses biens et que cette distribution donne lieu à une perte en capital, la règle de minimisation de pertes du 40(3.4) discutée ci-dessus ne s’applique pas : alinéa 69(5)d). La société liquidée peut donc déduire la perte du montant d’un gain en capital réalisé durant sa dernière année d’imposition ou durant les trois années d’imposition antérieure, et ce, même si les biens restent dans le groupe affilié : sous-alinéa 3b)(ii) et alinéa 111(1)b).
[13] En ce qui a trait aux actionnaires qui possédaient des actions d’une société qui fait l’objet d’une liquidation imposable, ils sont réputés avoir reçu un dividende correspondant à l’excédent de la valeur des fonds ou des biens qui leur sont distribués sur le montant du capital versé de leurs actions, le capital versé correspondant généralement au montant payé lorsque les actions ont été émises : paragraphes 84(2) et 89(1).
II. Contexte factuel.
[14] La décision de la Cour canadienne de l’impôt contient un compte rendu complet des faits. Les paragraphes qui suivent focalisent sur les faits essentiels, les simplifient et arrondissent les nombres. Sauf indication contraire, les faits sont tirés de l’entente conjointe sur les faits.
[15] Avant la série d’opérations en cause, la situation était la suivante :
[16] Comme l’illustre l’organigramme, et comme mentionné au début de ces motifs, si Québecor avait disposé de ses actions d’Abitibi, elle aurait dû reconnaître un gain en capital de 191,8M$ (produit de 191,8M$ moins un coût de 1$). À l’inverse, si 366 avait disposé de ses actions de Vidéotron, elle aurait réalisé une perte en capital de 200,6M$ (Actions A : produit de 138,1M$ moins coût de 344,2M$ = perte de 206M$ et Actions C : produit de 11,8M$ moins coût de 6,3M$ = gain de 5,5M$ pour une perte nette de 200,6M$). Une série d’opérations fut donc mise en œuvre visant à profiter de la perte reliée aux actions de Vidéotron pour augmenter le coût des actions d’Abitibi détenues par Québecor: lettre de KPMG à Québecor en date du 31 août 2005, dossier d’appel, aux pp. 186, 208. Pour que cette série d’opérations se réalise, Québecor devait obtenir l’accord de l’autre actionnaire indirect de 366, Capital d’Amérique CDPQ inc., ce qu’elle a obtenu moyennant compensation.
[17] Même si plusieurs des opérations de cette série ont eu lieu le 14 décembre 2005, certaines ont eu lieu dans les années précédentes. Entre autres, en 2003, une société nouvellement constituée, 9101-0827 Québec inc. (9101), a émis des actions à Québecor Média inc. (Média). Aussi en 2003, lorsque l’opportunité d’acheter les 5 000 actions privilégiées de catégorie C de 366 alors détenues par un tiers (Groupe Carlyle) s’est présentée, c’est 9101 qui a fait l’acquisition plutôt que Média. À la suite de cette acquisition, Média ne détenait pas au moins 90% des actions émises de chaque catégorie du capital-actions de 366. Par conséquent, le sous-régime de liquidations libres d’impôt du paragraphe 88(1) de la Loi ne pouvait pas régir une liquidation de 366. Le diagramme suivant illustre la détention d’actions après l’acquisition par 9101 :
[18] Quant aux opérations du 14 décembre 2005, elles peuvent se diviser en deux groupes. Le premier groupe inclut les opérations qui augmentent le prix des actions de Québecor dans Abitibi. Le deuxième groupe inclut les opérations qui matérialisent la perte latente de 366 à l’égard de ses actions de Vidéotron.
A. Augmentation du prix des actions de Québecor dans Abitibi
[19] En premier lieu, Québecor a transféré ses actions d’Abitibi à 366. Tel que la Loi le lui permettait, Québecor a choisi un produit de disposition de 1$ : alinéas 85(1)b) et c). Elle n’a donc réalisé ni gain ni perte (produit de 1$ moins coût de 1$) et ce montant de 1$ est devenu le coût des actions de Québecor pour 366 : alinéa 85(1)a). En contrepartie du transfert, 366 a émis à Québecor 1 000 actions privilégiées de catégorie D avec un coût et un capital versé de 1$ et une juste valeur marchande de 191,8M$. Cette première opération s’illustre de la manière suivante :
[20] 366 a immédiatement racheté les actions de catégorie D qu’elle venait d’émettre à Québecor en contrepartie d’un billet à demande au montant de 191,8M$. Puisque ce montant était supérieur au capital versé des actions (1$), plutôt que d’imposer un gain en capital, la Loi a réputé Québecor comme ayant reçu un dividende imposable de 191,8M$ : paragraphe 84(3) et article 54, définition de « produit de disposition »
. Mais parce qu’il s’agissait d’un dividende entre sociétés, Québecor a pu déduire le dividende de son revenu : paragraphe 112(1). Le résultat de la deuxième opération s’illustre de la façon suivante :
[21] Québecor a par la suite échangé son billet à demande contre les 44 821 024 actions ordinaires d’Abitibi que 366 détenait. Parce que Québecor a échangé un billet d’une valeur de 191,8M$ pour obtenir les actions d’Abitibi, son coût pour ces actions s’est établi à 191,8M$. Par ailleurs, en remettant les actions d’Abitibi à Québecor, 366 a disposé de ces actions pour un produit de disposition égal à leur juste valeur marchande, soit 191,8M$ : alinéa 69(1)b). Puisque son coût pour ces actions était de 1$, 366 a réalisé un gain en capital de 191,8M$.
[22] Tel que l’illustre l’organigramme ci-dessous, les trois opérations précitées ont augmenté le coût des actions d’Abitibi détenues par Québecor de 1$ à 191,8M$:
B. Matérialisation de la perte latente reliée aux actions de Vidéotron
[23] Les trois opérations ont aussi généré un gain en capital de 191,8M$ pour 366. Or, on se rappellera qu’une perte en capital peut être déduite à l’encontre d’un gain en capital. On se rappellera aussi que 366 possède une perte latente de 200,6M$ à l’égard des actions de Vidéotron qu’elle détient. Il fallait donc matérialiser cette perte et c’est ce qu’a accompli la liquidation de 366.
[24] En effet, étant donné que Média ne détenait pas 90% de chacune des catégories d’actions de 366, les règles de liquidations imposables se sont appliquées. Conformément à ces règles, 366 a disposé de ses actifs à leur juste valeur marchande : paragraphe 69(5). Cela n’a eu aucune conséquence à l’égard de la somme d’argent de 46,5M$ que 366 a distribuée—le « coût »
de cet argent étant égal à sa valeur. Cependant, en ce qui a trait aux actions A de Vidéotron, 366 a déclaré une perte en capital de 206M$ (produit de 138,1M$ moins coût de 344,2M$). Elle a déduit cette perte à l’encontre du gain de 5,5M$ réalisé sur les actions C (produit de 11,8M$ moins coût de 6,3M$) et—plus important encore—à l’encontre du gain de 191,8M$ réalisé lorsqu’elle a disposé des actions d’Abitibi afin de payer le billet à demande à Québecor.
[25] Il s’ensuit que 366 a tiré sa révérence avec aucun impôt à payer.
[26] Parce que ce n’est pas pertinent pour trancher la question dont la Cour est saisie, il n’y a pas lieu de détailler les conséquences fiscales de la liquidation pour les actionnaires de 366. Il suffit de mentionner :
- qu’en tant que détentrice des actions privilégiées dont la valeur (195,6M$) équivalait la valeur des biens que 366 détenait (45,6M$ en argent plus 150M$ d’actions dans Vidéotron), 9101 a reçu la totalité des actifs de 366 et cette distribution n’a donné lieu à aucun impôt; et
- que Média n’a rien reçu et a réalisé une perte en capital de 400M$ correspondant aux coûts de ses actions de 366 (40,2M$ pour les votantes et 359,8M$ pour les non-votantes) moins leur produit de disposition (1$ dans les deux cas).
[27] Après la liquidation de 366, la situation était celle-ci :
[28] En 2007 et 2010, Québecor a disposé de ses actions d’Abitibi et de celles qu’elle avait obtenues à la suite d’une fusion entre Abitibi et une autre société. Étant donné le coût élevé de ses actions et le fait que ces actions avaient alors une valeur nominale, Québecor a réalisé des pertes.
C. Avis de détermination
[29] S’appuyant sur la règle générale anti-évitement, le ministre du Revenu national a établi un avis de détermination par lequel il a réduit de 191,8M$ à 1$ le coût des actions d’Abitibi détenues par Québecor, refusé les pertes et procédé à des ajustements corrélatifs.
III. Décision de la Cour canadienne de l’impôt
[30] La Cour canadienne de l’impôt devait déterminer si la règle générale anti-évitement s’appliquait aux opérations en cause.
[31] La règle générale anti-évitement est énoncée à l’article 245 de la Loi. Elle s’applique lorsque les trois questions suivantes reçoivent une réponse affirmative : 1) Y a-t-il un avantage fiscal? 2) Est-ce qu’au moins une des opérations ayant donné lieu à l’avantage fiscal est une opération d’évitement? 3) L’évitement fiscal est-il abusif? Magren Holdings Ltd. c. Canada, 2024 CAF 202 au para. 175; Hypothèques Trustco Canada c. Canada, 2005 CSC 54 au para. 66; Copthorne Holdings Ltd. c. Canada, 2011 CSC 63 au para. 33; Deans Knight Income Corp. c. Canada, 2023 CSC 16 au para. 51. Il y a abus lorsque le résultat de la série d’opérations contrecarre l’objet et l’esprit d’une disposition de la Loi ou de la Loi dans son ensemble : Trustco au para. 44; Copthorne aux para. 69–71; Deans Knight au para. 58.
[32] Malgré l’admission de Québecor (décision de la CCI aux paras. 53–54), la Cour canadienne de l’impôt a tout de même examiné la question de savoir si elle était en présence d’opérations d’évitement ayant donné lieu à un avantage fiscal. Elle a conclu que c’était le cas : l’objectif des opérations en cause était d’augmenter le coût des actions d’Abitibi détenues par Québecor, et cette augmentation constitue un avantage fiscal : décision de la CCI aux paras. 225–231.
[33] En ce qui a trait à la question d’abus, la Couronne faisait valoir que Québecor a abusé de deux régimes discutés ci-dessus : le régime des gains et pertes en capital et celui du régime de liquidation des sociétés que la Couronne appelait le régime de « calcul du revenu des sociétés résidant au Canada et de leurs actionnaires »
: décision de la CCI au para. 127.
[34] La Couronne alléguait que le régime des gains et pertes en capital vise à imposer les gains économiques et alléger les pertes économiques établis en tenant compte du coût du bien pour le contribuable, c’est-à-dire de la somme payée pour acquérir le bien, laquelle somme est constituée de montants qui ont été assujettis à l’impôt : décision de la CCI aux para. 131–143. Toujours selon la Couronne, les opérations en cause contrecarrent ce régime parce qu’elles ont augmenté le coût des actions d’Abitibi détenues par Québecor d’un montant qui n’a pas été assujetti à l’impôt : décision de la CCI aux para. 169–170, 283.
[35] La Cour canadienne de l’impôt a rejeté cet argument. À son avis, l’augmentation du coût des actions d’Abitibi a eu lieu lorsque 366 a remis le billet à demande à Québecor—l’opération décrite au paragraphe 20 ci-dessus. Pour la Cour canadienne de l’impôt, le fait que cette remise ait résulté en un dividende en capital imposable pour Québecor, lequel dividende était déductible parce qu’entre sociétés, ne signifie pas que le dividende n’est pas assujetti à l’impôt. En l’absence de preuve contraire, il est toujours possible que le dividende soit éventuellement transféré à des « destinataires ultimes »
qui paieront de l’impôt : décision de la CCI aux para. 286–289.
[36] Concernant l’abus du régime de liquidation de sociétés, la Couronne alléguait que si 9101 n’avait pas été constituée, le sous-régime de la liquidation libre d’impôt du paragraphe 88(1) aurait régi la liquidation de 366 et cette dernière aurait été réputée avoir disposé de ses actions de Vidéotron pour un produit de disposition équivalant à leur coût. Ainsi, 366 n’aurait pas eu de perte en capital. En évitant l’application du paragraphe 88(1), 366 a eu droit à perte de 206M$. Or, cette perte était déjà reflétée dans la perte de 400M$ que Média a réalisée lors de la liquidation de 366. Enfin, la perte de 206M$ a aussi permis d’augmenter le coût des actions d’Abitibi détenues par Québecor—le tout sans imposition : décision de la CCI aux para. 176–181.
[37] Ces arguments n’ont pas convaincu la Cour canadienne de l’impôt. Tout d’abord, celle-ci a déterminé que la Couronne n’avait pas démontré que le législateur a voulu empêcher la constitution d’une société afin d’éviter qu’une liquidation soit régie par le paragraphe 88(1) plutôt que par les autres dispositions de la Loi : décision de la CCI aux paras. 294–300. Quant à l’argument selon lequel la perte de 206M$ réalisée par 366 était reflétée dans la perte de 400M$ réalisée par Média, la Cour canadienne de l’impôt semble l’avoir rejeté sur le fondement que la perte de Média était réelle puisqu’elle résultait d’un ralentissement des activités de Média et de l’économie en général et par conséquent, qu’elle se reflétait dans la diminution de la valeur des actions détenues par 366: décision de la CCI au para. 301.
IV. Question en litige et norme de contrôle
[38] Étant donné que Québecor reconnaît avoir bénéficié d’un avantage fiscal et que les opérations en cause sont des opérations d’évitement, la seule question en litige devant cette Cour est celle de savoir si cette série d’opérations est abusive.
[39] La norme de contrôle pour les affaires concernant la règle générale anti-évitement dépend de l’étape de l’analyse du caractère abusif qu’une partie conteste. L’analyse du caractère abusif se fait en deux étapes. La première étape consiste à cerner l’objet et l’esprit des dispositions en cause. Cette première étape est une question de droit si bien que les cours d’appel doivent appliquer la norme de la décision correcte : Deans Knight au para. 78 ; Canada c. Alta Energy Luxembourg S.A.R.L., 2021 CSC 49 au para. 50; Trustco au para. 44 ; Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33 aux para. 8, 26–37. La deuxième étape consiste à déterminer si les opérations en cause sont abusives. Cette analyse « dépend nécessairement des faits »
et est donc susceptible de révision seulement en cas d’erreur manifeste et déterminante, en l’absence d’une erreur de droit isolable : Deans Knight au para. 121; Trustco au para. 44; Canada c. Oxford Properties Group Inc., 2018 CAF 30 au para. 39; Housen au para. 10.
[40] Devant notre Cour, la Couronne adopte une position qui diffère de celle qu’elle défendait devant la Cour canadienne de l’impôt. Il n’y a donc pas lieu de se prononcer sur certaines conclusions de la Cour de l’impôt concernant la question d’abus et les présents motifs ne devraient pas être interprétés comme approuvant toutes les conclusions de cette Cour. Cela dit, comme la Cour canadienne de l’impôt, je suis d’avis que les opérations d’évitement en cause ne sont pas abusives des dispositions invoquées par la Couronne. S’il y a abus, ce n’est pas ce que la Couronne allègue.
V. Analyse
[41] Dans la présente instance, l’argument principal de la Couronne s’articule autour du nombre de pertes que la Loi reconnaît lors des liquidations de sociétés.
A. Il n’y a pas abus du régime applicable aux liquidations
[42] Selon la Couronne, qu’il s’agisse d’une liquidation imposable ou libre d’impôt, l’objet et l’esprit des dispositions législatives applicables aux liquidations consistent à ne reconnaître qu’une seule perte « pour le même intérêt économique, soit sur les actions de la filiale détenues par la société mère, soit sur les actifs de la filiale »
: mémoire des faits et du droit de la Couronne aux para. 58–84.
[43] Au soutien de son affirmation, la Couronne donne deux exemples : celui d’une société qui souscrit à des actions d’une filiale pour 100$ et celui de deux sociétés non liées qui souscrivent à des actions d’une filiale pour respectivement 15$ et 85$. Dans les deux exemples, la filiale a utilisé le montant de 100$ pour acheter un bien, bien qui a perdu toute sa valeur au moment où la filiale fait l’objet d’une liquidation.
[44] Dans le premier exemple, lequel implique une seule société mère et, par conséquent, une liquidation libre d’impôt, la filiale est réputée avoir disposé du bien pour un montant égal à son coût (100$) et la société mère est réputée avoir disposé des actions de la filiale aussi pour un montant égal à son coût (100$) : paragraphe 88(1). Il s’ensuit que ni la filiale ni la mère ne réalisent de perte. Cependant, la mère pourra réclamer une perte si elle dispose éventuellement du bien et que ce bien a alors une faible valeur. La Couronne qualifie cette situation comme donnant lieu à « une seule perte préservée »
.
[45] Dans le deuxième exemple, celui des deux sociétés mères dont aucune ne possède 90% des actions—la liquidation imposable—il y a disposition de biens à la juste valeur marchande. Partant, la filiale réalise une perte de 100$ et les sociétés mères réalisent des pertes respectives de 15$ et 85$ pour un total de 100$. Toutefois, selon la Couronne, il n’y a qu’ « une seule perte réalisée »
: celle des sociétés mères. Quant à la perte réalisée par la filiale à l’égard de son bien, la Couronne prétend qu’elle n’existe pas parce que les sociétés mères ne pourront l’utiliser et parce que la perte va disparaître à moins que la filiale ne puisse l’utiliser durant sa dernière année d’imposition : mémoire des faits et du droit de la Couronne au para. 81.
[46] Se fondant sur ses deux exemples, la Couronne soutient que les opérations en cause sont abusives car leur « résultat global […] brise le principe d’appariement prévu par le régime de liquidation en permettant […] deux niveaux de pertes pour un même intérêt économique »
: 1) la perte de 206M$ réalisée par 366, laquelle a servi à augmenter le coût des actions d’Abitibi pour Québecor et 2) la perte de 400M$ réalisée par Média, laquelle perte comprend la perte sous-jacente de 206M$ : mémoire des faits et du droit de la Couronne aux para. 85–87.
[47] À mon avis, cet argument est non fondé.
[48] Tout d’abord, la prémisse « d’une seule perte »
ou « d’appariement »
ne semble pas trouver appui dans la Loi. Dans l’exemple qu’elle donne de la filiale avec deux sociétés mères, la Couronne elle-même reconnaît qu’en plus des pertes des sociétés mères, la filiale aura droit à la « perte réalisée »
à l’égard de ses biens lors de la liquidation si elle peut l’utiliser durant sa dernière année d’imposition : mémoire des faits et du droit de la Couronne aux para. 79 et 81. Or, c’est précisément la situation qui nous occupe : durant sa dernière année d’imposition, 366 a réalisé un gain de 191,8M$ résultant de la disposition du billet à demande et elle a pu déduire ou « utiliser »
sa perte en capital afin d’éponger ce gain.
[49] Deuxièmement, dans Canada c. Produits Forestiers Donohue Inc. (2002 CAF 422), notre Cour a rejeté l’argument selon lequel la Loi lue dans son ensemble envisagerait une forme d’appariement entre la valeur des biens d’une société et la valeur des actions de cette société : Produits Forestiers Donohue au para. 13. Ce faisant, notre Cour a déclaré :
Selon le droit des sociétés, les biens d’une société par actions appartiennent à la société et non pas aux actionnaires. La Loi reconnaît cette réalité juridique comme elle reconnaît celle issue du droit privé. Tout le système d’imposition des sociétés et de leurs actionnaires est conçu en fonction de cette réalité juridique. C’est ce qui explique, comme le fait remarquer le premier juge, qu’un gain ou une perte peut être réalisé à un même moment par un actionnaire à l’égard de ses actions et par la société à l'égard de ses propres biens (motifs, paragraphe 76). Il n’existe pas de principe qui permettrait de consolider l’effet de ces transactions en les appariant. Le principe qui sous-tend la Loi, s’il en est un, est contraire à celui invoqué par le ministre.
(Produits Forestiers Donohue au para. 18 – soulignement ajouté)
[50] Notre Cour a noté qu’il est loisible au législateur de s’éloigner du droit des sociétés et de tenir compte des actifs d’une filiale afin de modifier les conséquences fiscales pour l’actionnaire résultant de la vente des actions de la filiale. C’est d’ailleurs ce que le législateur a fait en adoptant l’alinéa 40(2)h) qui réduit la perte de l’actionnaire pour tenir compte de certaines dispositions de biens effectuées par la filiale : Produits Forestiers Donohue au para. 19. Mais en l’absence d’une telle intervention législative, l’appariement auquel la Couronne réfère ne semble pas exister.
[51] La Couronne affirme que la décision Produits Forestiers Donohue n’est pas utile en l’espèce parce qu’elle a été rendue avant que la Cour suprême du Canada n’établisse le cadre d’analyse qui doit guider l’application de la règle générale anti-évitement : mémoire des faits et du droit de la Couronne au paragraphe 97. La Couronne n’explique toutefois pas en quoi l’analyse effectuée dans Produits Forestiers Donohue déroge au cadre d’analyse établi par la Cour suprême.
[52] La Couronne allègue aussi que Produits Forestiers Donohue n’est pas utile parce que la série d’opérations dans cette affaire ne contenait pas d’opérations cherchant à éviter les règles de la liquidation libre impôt du paragraphe 88(1) comme c’est le cas en l’espèce : mémoire des faits et du droit de la Couronne au para. 97. Pour que cet argument soit persuasif, il aurait fallu que la Couronne présente un argument selon lequel le régime de liquidation—à l’instar de l’alinéa 40(2)(h) discuté ci-dessus—crée une forme d’appariement en éliminant la perte de la filiale à l’égard de ses biens lorsque cette perte se reflète dans la valeur des actions de la filiale. Or, ce n’est pas ce que la Couronne a présenté.
B. Il n’y a pas abus du régime des gains et pertes en capital
[53] En plus de l’abus du régime de liquidation, la Couronne prétend que la série d’opérations en cause a produit un résultat qui va à l’encontre du régime d’imposition des gains et pertes en capital en ce qu’il a permis à Québecor de bénéficier d’une majoration artificielle du coût de ses actions d’Abitibi. Selon la Couronne, cette majoration artificielle et l’évitement d’un gain en capital qui en découle, seraient attribuables à la perte de 366 laquelle « aurait dû disparaître suite à la liquidation »
: mémoire des faits et du droit de la Couronne aux para. 88–95.
[54] Tel que mentionné ci-dessus, la Couronne elle-même reconnaît que 366 pouvait déduire sa perte durant sa dernière année d’imposition. Il n’est donc pas question d’une majoration artificielle résultant d’une perte qui aurait dû disparaître. Au surplus, personne n’allègue que la perte de 366 était artificielle : les actions de Vidéotron avaient perdu de la valeur.
C. Il n’est pas possible de conclure à un autre abus dans les circonstances
[55] Dans son mémoire, la Couronne demande à cette Cour de tenir compte du résultat global de la série d’opérations. C’est non seulement une demande légitime, mais une tâche qui doit être entreprise pour déterminer si des opérations constituent un abus de la Loi : Lipson c. Canada, 2009 CSC 1 au para. 34; Copthorne au para. 71 ; Canada c. Landrus, 2009 CAF 113 aux para. 66–67; Birchcliff Energy Ltd. c. Canada, 2019 CAF 151 aux para. 27–28 ; Oxford Properties aux para. 106–110, 118–119; 3295940 Canada Inc. c. Canada, 2024 CAF 42 au para. 46.
[56] En l’espèce, lorsqu’on procède à cet exercice, on ne peut acquiescer aux arguments de la Couronne. Par contre, on pose deux constats.
(1) Il y a transfert ou consolidation de pertes
[57] Le premier constat est que les opérations en cause ont pour résultat de transférer des pertes entre personnes liées. À cet égard, il suffit de mentionner qu’en plus d’être affiliées, Québecor, 9101, Média, 366 et Vidéotron étaient liées : alinéa 251(2)b). Les opérations de transferts de pertes entre personnes liées sont aussi appelées « opérations de consolidation de pertes »
.
[58] Dans les notes explicatives qui accompagnaient l’article 245 lorsqu’il a été proposé pour ajout à la Loi, le ministre des Finances écrivait que le transfert de pertes entre personnes liées, même lorsque motivé principalement par des raisons fiscales, ne résulte généralement pas en un abus de la Loi : Canada, Ministère des Finances, Notes explicatives de l’avant-projet de législation et de règlement concernant la réforme fiscale, Ottawa, Ministère des Finances, Avril 1988, à la p. 361. Se fondant sur ces notes, le ministre du Revenu national a fréquemment affirmé que les opérations de consolidation de pertes ne sont pas assujetties à la règle générale anti-évitement : voir notamment ITTN-22 -- Nouvelles techniques en matière d'impôt sur le revenu du 11 janvier 2002; ITTN-30 -- Nouvelles techniques en matière d'impôt sur le revenu Date: le 21 mai 2004, ITTN-34 -- Nouvelles techniques en matière d'impôt sur le revenu Date: le 27 avril 2006; et ITTN-44 -- Nouvelles techniques en matière d'impôt sur le revenu Date: 14 avril 2011; Folio de l’impôt sur le revenu S3-F6-C1, Déductibilité des intérêts (Date de modification: 2024-08-08) au para. 1.71.
[59] L’arrêt Deans Knight semble aller dans le même sens. Dans cette affaire, il était question de savoir si la règle générale anti-évitement s’appliquait à une série d’opérations dont le but était d’éviter les dispositions selon lesquelles une société qui a fait l’objet d’une acquisition de contrôle ne peut déduire ses pertes pré-acquisition de contrôle à l’encontre de ses gains post-acquisition de contrôle. Dans ses motifs, la majorité de la Cour suprême a remarqué qu’une disposition de la Loi, le paragraphe 256(7), décrit certaines circonstances dans le cadre desquelles le contrôle d’une société est réputé ne pas avoir été acquis. Selon la majorité, cette disposition « garantit que des transferts entre
parties liées peuvent survenir sans que les déductions pour pertes inutilisées soient perdues à cause d’un [traduction]
“changement technique dans le contrôle de la société
” »
: Deans Knight au para. 97 [italiques dans l’original]. La Cour suprême semble donc reconnaître qu’en général, le transfert de pertes entre personnes liées ne constitue pas un abus de la Loi. La Cour canadienne de l’impôt a exprimé un avis similaire dans la présente affaire : décision de la CCI au para. 280.
[60] Dans ce contexte, il est difficile de reprocher à Québecor d’avoir été partie à une série d’opérations dont le résultat était de lui transférer la perte de 366, une société à laquelle elle était liée, afin d’augmenter le coût de ses actions d’Abitibi et ainsi réduire le gain en capital lors de la disposition de ces actions.
(2) 366 a réclamé une perte à l’égard d’un bien toujours détenu par le groupe
[61] Le deuxième constat qui résulte de l’examen du résultat global de la série d’opérations est que les biens à l’égard desquels 366 a réalisé une perte—les actions de Vidéotron—sont toujours détenus par le groupe affilié après la série d’opérations. Plus spécifiquement, suite aux opérations, c’est 9101, une personne qui était affiliée à 366 (sous-alinéa 251.1(1)c)(i)), qui détient les actions de Vidéotron. Et la règle de minimisation de pertes du paragraphe 40(3.4) ne s’est pas appliquée pour suspendre la perte parce que l’alinéa 69(5)d) prévoit que cette règle ne s’applique pas aux biens dont il a été disposé lors d’une liquidation imposable.
[62] Ce constat soulève une question : était-il abusif de faire détenir les actions C de 366 par 9101 afin que 366 puisse faire l’objet d’une liquidation imposable et ainsi réaliser une perte qui autrement aurait été assujettie à la règle de minimisation de pertes du paragraphe 40(3.4)?
[63] À l’audience, la Cour a posé cette question à la Couronne à plus d’une reprise. À chaque fois, la Couronne a répondu par la négative.
[64] Peut-être la Couronne considère-t-elle qu’il n’est pas contraire à l’objet et à l’esprit de la Loi de procéder à une liquidation imposable afin d’éviter l’application des règles de minimisation de pertes parce que la Loi permet ce résultat. À cet égard, il est intéressant de noter que 366 aurait pu, avant sa liquidation, disposer de ses actions de Vidéotron en faveur d’une autre personne affiliée, Vidéotron par exemple, et la Loi lui aurait permis de réclamer la perte au moment de sa liquidation imposable: clause 40(3.4)b)(v)(B).
[65] Quoiqu’il en soit, la Cour n’a aucune information qui lui permettrait de déterminer s’il y a abus des règles de minimisation de pertes. Or, tel que l’enseigne la Cour Suprême du Canada :
Il appartient au ministre qui tente d’invoquer la RGAÉ de décrire l’objet ou l’esprit des dispositions qui auraient été contournées, selon une interprétation textuelle, contextuelle et téléologique des dispositions de la Loi. Le ministre est mieux placé que le contribuable pour présenter des observations sur l’intention du législateur dans le but d’interpréter les dispositions de façon harmonieuse avec le régime législatif général qui s’applique à l’opération en cause.
(Trustco, au para. 65)
[66] En l’espèce, la Couronne n’a rien présenté en ce qui concerne l’abus des règles de minimisation de pertes car elle considère qu’un tel abus n’existe pas. En ce qui a trait à l’abus qu’elle invoque, elle ne s’est pas déchargée de son fardeau. En conséquence, notre Cour n’a d’autre choix que de conclure que la règle générale anti-évitement ne s’applique pas aux opérations en cause. Pour ces motifs, je rejetterais l’appel avec dépens.
« Nathalie Goyette »
j.c.a.
"Je suis d’accord.
George R. Locke J.A."
"Je suis d’accord.
Peter G. Pamel J.A."
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
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DOSSIER : |
A-302-23 |
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INTITULÉ : |
SA MAJESTÉ LE ROI c. QUÉBECOR INC. |
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
Montréal (Québec) |
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DATE DE L’AUDIENCE : |
LE 12 mars 2025 |
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MOTIFS DU JUGEMENT : |
LA JUGE GOYETTE |
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Y ONT SOUSCRIT : |
LE JUGE LOCKE LE JUGE PAMEL |
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DATE DES MOTIFS : |
LE 21 NOVEMBRE 2025 |
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COMPARUTIONS :
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Sara Jahanbakhsh Marie-Aimée Cantin |
Pour l'appelant |
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Wilfrid Lefebvre Catherine Dubé |
Pour l'intimée |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
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Shalene Curtis-Micallef Sous-procureure générale du Canada |
Pour l'appelant |
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Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L., s.r.l. Montréal (Québec) |
Pour l'intimée |