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Date : 20140218


Dossier :

A‑367‑12

 

Référence : 2014 CAF 47

CORAM :     

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE NEAR

 

 

ENTRE :

ZOLTAN ANDREW SIMON

 

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

DU CHEF DU CANADA

représentée par

le procureur général,

le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences (comprenant Service Canada),

et

l’honorable Diane Finley, et Sharon Shanks

(ces dernières personnes en tant que représentantes du gouvernement/titulaires d’une charge publique et à titre personnel),

et

l’autorité fédérale* qui a approuvé le site Web

http://www.scc‑csc.gc.ca/ar‑lr/gl‑ld/gl‑ld‑eng.asp#1

[*M. Roger Bilodeau, selon la plaidoirie de Mme Janice Cheney]

 

intimées

 

 

Audience tenue à Calgary (Alberta), le 26 novembre 2013.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 18 février 2014.

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                  LE JUGE NEAR

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                  

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

                                                                                                                                                           

 

 


Date : 20140218


Dossier :

A‑367‑12

 

Référence : 2014 CAF 47

CORAM :     

LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE NEAR

 

 

ENTRE :

ZOLTAN ANDREW SIMON

 

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

DU CHEF DU CANADA

représentée par

le procureur général,

le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences (comprenant Service Canada),

et

l’honorable Diane Finley, et Sharon Shanks

(ces dernières personnes en tant que représentantes du gouvernement/titulaires d’une charge publique et à titre personnel),

et

l’autorité fédérale* qui a approuvé le site Web

http://www.scc‑csc.gc.ca/ar‑lr/gl‑ld/gl‑ld‑eng.asp#1

[*M. Roger Bilodeau, selon la plaidoirie de Mme Janice Cheney]

 

intimées

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NEAR

[1]               Zoltan Simon interjette appel des ordonnances du 20 juillet 2012 de la Cour fédérale dans lesquelles la juge Tremblay‑Lamer a radié sa déclaration sans autorisation de la modifier.

 

I. Faits et historique procédural

[2]               M. Simon a parrainé son ancienne épouse afin qu’elle vienne au Canada en 1999. Cette dernière aurait reçu, sans y avoir droit, des prestations d’assistance sociale du gouvernement de la Colombie‑Britannique. M. Simon s’est inquiété de la possibilité que cette situation lui crée une dette envers la province de la Colombie‑Britannique pour le montant correspondant aux prestations versées à tort.

 

[3]               En 2009, M. Simon a écrit à Sharon Shanks, directrice générale du Régime de pensions du Canada (RPC) – Division de la sécurité de la vieillesse, pour s’informer de la possible saisie‑arrêt de ses futures prestations de retraite, compte tenu de la dette éventuelle envers la province de la Colombie‑Britannique découlant de son parrainage. La réponse de Mme Shanks, à savoir qu’il était possible que des mesures de saisie‑arrêt soient prises une fois qu’il deviendrait admissible aux prestations au titre du RPC et commencerait à recevoir ces prestations, n’a pas satisfait M. Simon. Il a donc écrit, en 2011, une autre lettre sur le même sujet à la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences de l’époque, l’honorable Diane Finley. M. Simon affirme qu’il n’a reçu de réponse ni à cette lettre, ni à une lettre subséquente qu’il a écrite à la ministre sur le même sujet.

 

[4]               M. Simon a alors tenté d’« introduire un appel » directement devant la Cour suprême du Canada concernant ce qu’il considérait être une conduite inappropriée de la part de Mme Shanks et de la ministre Finley. M. Simon a été informé par Mary Ann Achakji, fonctionnaire du greffe de la Cour suprême du Canada, qu’il n’était pas possible de procéder de cette manière. M. Simon déclare que Mme Achakji a consulté Roger Bilodeau, c.r., registraire de la Cour suprême du Canada, au sujet de cette affaire. On a remis à M. Simon des documents concernant la procédure à suivre et on l’a référé au site Web de la Cour suprême.

 

[5]               M. Simon a ensuite intenté une action contre le ministère du Procureur général, le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, la ministre Finley et Mme Shanks (désignés collectivement par l’expression la Couronne intimée), contre le greffe de la Cour suprême du Canada, Mme Achakji, M. Bilodeau et l’autorité fédérale qui a approuvé le site Web http://www.scc-csc.gc.ca/ar-lr/gl-ld-eng.asp#1 (désignés collectivement par l’expression la Cour suprême intimée). Les quatre personnes ont été nommées en tant que représentantes du gouvernement/titulaires d’une charge publique et à titre personnel.

 

[6]               La déclaration contient plusieurs prétentions et allégations. Toutefois, il semblerait que la principale prétention visant la Couronne intimée concerne l’éventuelle saisie‑arrêt des futures prestations de pension de retraite de M. Simon. La principale prétention visant la Cour suprême intimée est qu’elle ne s’est pas acquittée de ses obligations aux termes de la loi et qu’elle n’a pas accepté le dépôt de son pourvoi direct. M. Simon sollicite des dommages‑intérêts de 900 000 $.

 

[7]               La Couronne intimée et la Cour suprême intimée ont intenté des actions en vue de faire radier la déclaration au motif qu’elle ne révélait pas de cause d’action et qu’elle n’exposait pas de faits substantiels suffisants à l’appui des prétentions formulées.

 

[8]               Le 20 juillet 2012, la juge a rendu deux ordonnances radiant la déclaration, après s’être demandée si, aux termes de l’article 221 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, la déclaration constituait un acte de procédure acceptable et énonçait une cause d’action fondée.

 

[9]               La juge a estimé qu’à l’égard de Mme Shanks et de la ministre Finley visées en leur qualité personnelle, elle n’avait pas compétence, en l’absence d’un ensemble de règles de droit fédérales, pour statuer sur ce qu’elle estimait être essentiellement des délits en common law. Elle ne s’est pas prononcée sur la question de savoir si la Cour fédérale avait compétence à l’égard de Mme Shanks et de la ministre Finley en leur qualité de représentantes du gouvernement fédéral. De plus, la juge s’est dite d’avis qu’en ce qui concerne la Couronne intimée, il était évident et manifeste, compte tenu des faits allégués, que l’action était vouée à l’échec étant donné que la [traduction] « principale prétention dans l’acte de procédure a trait à la conséquence alléguée d’une éventuelle décision administrative qui pourrait être assujettie à un mécanisme de contrôle; des allégations concernant des décisions hypothétiques ne révèlent aucune cause d’action raisonnable » (Operation Dismantle c. Canada, [1985] 1 R.C.S. 441, aux paragraphes 30 et 31) [soulignement supprimé]. La juge s’est également dite préoccupée du fait que la déclaration ne renfermait pas un minimum de faits divulgués.

 

[10]           La juge a rendu une ordonnance distincte à l’égard de la Cour suprême intimée. Elle a estimé que [traduction] « la Cour fédérale n’a pas compétence pour déclarer qu’un pourvoi interjeté devant la Cour suprême du Canada constitue un appel de plein droit, et [que] l’action de M. Simon en dommages‑intérêts et en jugement déclaratoire n’est pas fondée sur le droit du Canada ». Elle a donc conclu que la Cour fédérale n’avait pas compétence à l’égard de l’action et qu’il était évident et manifeste que l’action était vouée à l’échec.

 

[11]           De façon générale, la juge a estimé que la déclaration était vexatoire, qu’elle constituait un abus de procédure et qu’elle était dépourvue de bien‑fondé puisqu’elle ne soulevait pas de cause d’action valable.

 

[12]           M. Simon interjette maintenant appel devant notre Cour. Pour ce qui est de la Cour suprême intimée, l’appel de M. Simon ne vise que l’autorité fédérale qui a approuvé le site Web http://www.scc-csc.gc.ca/ar-lr/gl-ld-eng.asp#1.

 

II. Norme de contrôle

[13]           Pour faire infirmer les ordonnances de la juge, l’appelant doit démontrer que la juge s’est fondée sur un mauvais principe de droit, qu’elle a très mal apprécié les faits, ou encore qu’une injustice évidente serait causée. Voir l’arrêt Apotex Inc. c. Gouverneur en Conseil, 2007 CAF 374.

 

III. Analyse

[14]           Au début de l’audience devant notre Cour, M. Simon a expliqué que son action contre les personnes nommées dans sa déclaration concernait leurs actions en tant que préposés de l’État et non à titre personnel. Ainsi, pour ce qui est de la question précise de savoir si la Cour fédérale a compétence pour se prononcer sur la négligence alléguée de préposés de l’État, conformément aux dispositions de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, L.R.C. 1985, ch. C‑50, la Cour fédérale a effectivement compétence pour chercher à savoir si l’État est responsable du fait d’autrui pour les actes de ses préposés. L’avocat de la Couronne intimée a admis que c’était le cas à l’audience devant notre Cour. Dans la mesure où la juge n’a pas tenu compte de la possibilité que les personnes étaient poursuivies à titre officiel ainsi qu’à titre personnel, ce qui était évident au vu de l’intitulé, elle a commis une erreur. Toutefois, cette erreur n’a à mon sens aucune incidence sur l’issue du présent appel, puisqu’il doit exister une cause d’action valable dans toute action intentée devant la Cour fédérale.

 

[15]           La juge a convenablement tenu compte de l’article 221 des Règles des Cours fédérales, et elle a radié la déclaration dans son intégralité, estimant qu’il était évident et manifeste, au vu des faits allégués, que l’action était vouée à l’échec. Elle s’est dite d’avis que les demandes faites par M. Simon concernant la Couronne intimée étaient fondées sur [traduction] « la conséquence alléguée d’une éventuelle décision administrative » et a estimé qu’aucun dommage possible ne s’était [traduction] « concrétisé jusqu’ici ». Elle a donc conclu que ces allégations ne révélaient pas l’existence d’une cause d’action valable. Elle a en outre conclu, en ce qui concerne la Cour suprême intimée, que la Cour fédérale n’avait pas compétence pour déclarer qu’un pourvoi interjeté devant la Cour suprême du Canada constitue un appel de plein droit et a donc conclu qu’aucune cause d’action valable n’avait été soulevée. M. Simon n’a démontré aucune faille dans ce raisonnement qui justifierait l’intervention de notre Cour sur la base du paragraphe 13 des présents motifs.

 

[16]           Il n’y a rien dans le dossier dont notre Cour a été saisie qui justifie notre intervention. La juge a examiné la déclaration et l’a jugée gravement lacunaire et dépourvue de cause d’action valable.

 

[17]           Dans son avis d’appel, M. Simon allègue aussi qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale envers lui, mais il ne fournit ni détails ni explication à ce sujet dans son mémoire des faits et du droit. Il l’a fait brièvement dans sa plaidoirie. Après que les intimées eurent déposé leur requête en radiation en Cour fédérale, M. Simon n’a pas produit de dossier de requête en réponse dans le délai imparti. Il n’a pas non plus présenté de requête en prorogation pour déposer son dossier. La juge a donc donné la directive de ne pas accepter le dépôt de son dossier. Le paragraphe 369(2) des Règles dispose que l’intimé qui répond à une requête qui doit être jugée sur dossier doit déposer son dossier de réponse dans les 10 jours suivant la signification. L’omission de M. Simon de se conformer à cette règle n’entraîne pas un manquement à l’équité procédurale.

 

[18]           M. Simon a aussi allégué que la juge a fait preuve de partialité. Il n’y a rien au dossier qui donne à penser qu’« une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique », conclurait que la juge a affiché un quelconque signe de partialité dans la présente affaire (Committee for Justice and Liberty et autres c. L’Office national de l’énergie et autres, [1978] 1 R.C.S. 369, à la page 394).

 

[19]           Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale envers M. Simon susceptible de justifier l’intervention de notre Cour.

 

IV. Conclusion

[20]           Par conséquent, je rejetterais l’appel avec dépens, lesquels sont fixés à 1 500 $, dont 750 $ devront être versés à la Couronne intimée, et 750 $, à l’autre intimée, la Cour suprême.

 

« David G. Near »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

   J.D. Denis Pelletier, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

   David Stratas, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DoSSIER :

                                                                                                A‑367‑12

 

APPEL INTERJETÉ CONTRE LES ORDONNANCES DE MADAME LA JUGE TREMBLAY‑LAMER DATÉES DU 20 JUILLET 2012

 

INTITULÉ :

ZOLTAN ANDREW SIMON c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA et autre.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                                                                Calgary (Alberta)

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                                                                LE 26 NovembRe 2013

MOTIFS DU JUGEMENT :

                                                                                                LE JUGE NEAR

Y ONT SOUSCRIT :                                                           LE JUGE PELLETIER

LE JUGE STRATAS

 

DATE DU JUGEMENT :

                                                                                                LE 18 FÉVRIER 2014

COMPARUTIONS :

Zoltan Andrew Simon

AGISSANT pour son propre compte

 

Jaxine Oltean

 

 

POUR l’intimée, sa majesté la reine

 

Janice E. Cheney

pour l’intiméE, L’AUTORITÉ fédéralE qui a approuvé le site web de la Cour suprême

 


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

pour les intiméEs

 

 

 

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