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Date : 20140224


Dossier :

A‑221‑13

 

Référence : 2014 CAF 50

CORAM :     

LE JUGE EVANS

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

 

 

ENTRE :

VALEANT CANADA LP/VALEANT CANADA S.E.C. et VALEANT INTERNATIONAL BERMUDA

 

appelantes

et

LE MINISTRE DE LA SANTÉ et
COBALT PHARMACEUTICALS COMPANY

 

intimés

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 13 novembre 2013.

Jugement rendu à Toronto (Ontario), le 24 février 2014.

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                           LE JUGE STRATAS

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                         

LE JUGE EVANS

                                                                                                                      LA JUGE GAUTHIER


Date : 20130224


Dossier :

A‑221‑13

 

Référence : 2013 CAF 50

CORAM :     

LE JUGE EVANS

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

 

 

ENTRE :

VALEANT CANADA LP/VALEANT CANADA S.E.C. et VALEANT INTERNATIONAL BERMUDA

 

appelantes

et

LE MINISTRE DE LA SANTÉ et
COBALT PHARMACEUTICALS COMPANY

 

intimés

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE STRATAS

 

[1]               Valeant Canada LP/Valeant Canada S.E.C. et Valeant International Bermuda (appelées collectivement « Valeant ») font appel de l’ordonnance du 27 juin 2013 rendue par la Cour fédérale (le juge O’Keefe) : 2013 CF 720. Cobalt Pharmaceuticals Company (Cobalt) interjette un appel incident.

 

[2]               La Cour fédérale a prononcé l’ordonnance en cause après avoir été saisie d’une requête en déclaration d’inhabilité présentée par Valeant dans le cadre de sa demande d’interdiction au titre du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93‑133 (le Règlement AC). Cette demande fait suite à l’avis d’allégation que Cobalt a signifié à Valeant.

 

[3]               La Cour fédérale a accueilli la requête de Valeant et a déclaré l’avocat interne de Cobalt inhabile à occuper dans l’instance relative à la demande présentée à la Cour au motif que l’on pouvait présumer qu’il détenait des renseignements confidentiels concernant Valeant.

 

[4]               Cependant, Valeant voulait davantage que l’exclusion de l’avocat interne. Elle a demandé à la Cour de déclarer invalide l’avis d’allégation de Cobalt préparé par le cabinet d’avocats Deeth Williams Wall LLP (Deeth). Elle a également demandé des mesures de réparation à cet égard. La Cour fédérale a invoqué des motifs liés à la compétence pour refuser à Valeant tout autre redressement que l’exclusion de l’avocat interne.

 

[5]               Insatisfaite, Valeant se pourvoit en appel. Elle affirme que le juge aurait dû aller plus loin et radier l’avis d’allégation. Cobalt interjette un appel incident et soutient que la Cour fédérale a eu tort d’exclure son avocat interne.

 

[6]               Pour les motifs qui suivent – et qui diffèrent de ceux de la Cour fédérale – je rejetterais à la fois l’appel et l’appel incident.

 

A.        Les faits fondamentaux

 

[7]               Le 17 août 2012, Cobalt a signifié à Valeant un avis d’allégation au titre du Règlement AC à l’égard des brevets canadiens nos 2 242 224 et 2 307 547 et du chlorhydrate de diltiazem, l’ingrédient médicinal contenu dans les comprimés à libération prolongée à 180, 240, 300 et 360 mg, par comparaison avec le TIAZAC® XC de Valeant.

 

[8]               Peu après, Valeant a appris que Deeth était appelé à représenter Cobalt et que ce cabinet avait participé à la rédaction de l’avis d’allégation.

 

[9]               Valeant s’en est inquiété, car Deeth est le cabinet d’avocats qui a représenté son précédesseur, Biovail, durant de nombreuses années, et ce, jusqu’en 2008. Avant 2008, Deeth avait représenté Biovail dans cinq instances introduites devant la Cour fédérale concernant le chlorhydrate de diltiazem, le même ingrédient médicinal visé par l’avis d’allégation.

 

[10]           Les instances relatives au chlorhydrate de diltiazem ont fait l’objet d’ordonnances de confidentialité. Hormis les questions visées par ces ordonnances, Valeant estimait que Deeth détenait d’autres renseignements confidentiels concernant ses affaires et stratégies commerciales. Comme ce cabinet l’avait représentée pendant de nombreuses années, Valeant estimait également que Deeth disposait encore de renseignements confidentiels protégés par le secret professionnel de l’avocat et le privilège relatif aux litiges.

 

[11]           D’après Valeant, après avoir représenté son prédécesseur pendant des années, Deeth l’attaquait maintenant et attaquait l’ingrédient médicinal qu’il avait auparavant défendu, et utilisait abusivement des renseignements confidentiels. Valeant a notifié Deeth de son opposition

 

[12]           Peu après avoir reçu l’opposition, Deeth a renoncé à représenter Cobalt.

 

[13]           Valeant a présenté une demande visant à interdire au ministre de délivrer un avis de conformité à Cobalt (dossier T‑1805‑12). Deeth a décidé de ne plus représenter Cobalt et de ne plus l’assister de quelque manière dans le cadre de la demande.

 

[14]           Je m’abstiendrai de tout commentaire sur la conduite de Deeth ou d’autres intéressés dans les circonstances. Comme je l’expliquerai plus loin dans les présents motifs, la Cour ne dispose pas d’un dossier factuel satisfaisant pour déterminer si et dans quelle mesure des renseignements confidentiels ont été utilisés à mauvais escient. Par ailleurs, d’autres recours sont ouverts à Valeant pour empêcher ou corriger l’utilisation abusive de renseignements confidentiels, et il appartiendra à d’autres tribunaux d’évaluer la conduite des parties concernées.

 

[15]           Dans l’affaire qui nous occupe, j’estime qu’il suffit de dire que le fait que Deeth ait renoncé à représenter Cobalt et se soit engagé à ne plus la représenter ou l’assister de quelque manière n’a pas satisfait Valeant. Selon cette dernière, deux problèmes subsistent :

 

                     premièrement, Cobalt a employé un certain Me Migus comme avocat interne. Durant les deux dernières années où Deeth a représenté le prédécesseur de Valeant, Biovail, dans le cadre de litiges en matière de brevet (2006‑2008), Me Migus était employé par Deeth comme stagiaire puis comme avocat. D’après Valeant, Me Migus a eu accès à des renseignements confidentiels la concernant et était en situation de conflit d’intérêts. À son avis, il doit être déclaré inhabile à occuper pour la suite de la demande;

 

                     deuxièmement, selon Valeant, l’avis d’allégation de Cobalt résultait directement de l’usage abusif par Deeth des renseignements confidentiels recueillis lorsque le cabinet représentait le prédécesseur de Valeant, Biovail. Par conséquent, l’avis d’allégation doit être déclaré invalide.

 

[16]           Valeant a présenté une requête en vue d’obtenir une ordonnance déclarant que Me Migus est inhabile à occuper et que l’avis d’allégation est invalide, et lui accordant d’autres mesures de réparation afférentes à la déclaration.

 

B.        La décision de la Cour fédérale

 

[17]           La Cour fédérale a déclaré Me Migus inhabile à occuper dans l’instance relative à la demande. Ce dernier avait souscrit un affidavit selon lequel il n’avait travaillé que sur un dossier réglementaire concernant le prédécesseur de Valeant, Biovail, et qu’il ne détenait aucun renseignement confidentiel à son sujet du fait de son emploi chez Deeth. Pour la Cour fédérale, cela n’était pas suffisant. Elle a jugé que les avocats qui travaillent ensemble dans un cabinet sont présumés échanger des renseignements confidentiels. Pour réfuter cette présomption, il faut démontrer qu’il existe des mécanismes et des mesures assurant la non‑divulgation des renseignements confidentiels.

 

[18]           La Cour fédérale a refusé de déclarer invalide l’avis d’allégation et d’accorder les mesures de réparation connexes, ne s’estimant pas compétente pour ce faire. Elle a cité l’arrêt de la Cour Pharmacia Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien‑être social) (1994), 58 C.P.R. (3d) 207 (C.A.F.).

 

[19]           Comme je l’ai mentionné, Cobalt interjette appel de la déclaration d’inhabilité de Me Migus, tandis que Valeant se pourvoit contre le refus de la Cour fédérale de déclarer invalide l’avis d’allégation et d’accorder des mesures de réparation connexes.

 

C.        Analyse : la déclaration d’inhabilité de Me Migus

 

[20]           Cobalt fait valoir que la Cour devrait infirmer l’ordonnance déclarant Me Migus inhabile à agir, parce que la Cour fédérale a commis une erreur de principe. Plus précisément, Cobalt soutient que la Cour fédérale a mal interprété et mal appliqué le critère relatif à l’inhabilité énoncé dans l’arrêt Succession MacDonald c. Martin, [1990] 3 R.C.S. 1235, confirmé dans l’arrêt Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. McKercher LLP, 2013 CSC 39.

 

[21]           Je conviens que la Cour fédérale n’a pas exactement appliqué le critère de l’arrêt Martin tel que l’a énoncé la Cour suprême. Elle est néanmoins parvenue au bon résultat.

 

[22]           Dans l’arrêt Martin, précité, la Cour suprême a indiqué que, dans le cadre d’une requête en déclaration d’inhabilité, il faut répondre à deux questions :

 

1)                  L’avocat a‑t‑il appris, grâce à des rapports antérieurs d’avocat à client, des faits confidentiels relatifs à l’objet du litige?

 

2)                  Y a‑t‑il un risque que ces renseignements soient utilisés au détriment du client?

 

[23]           S’agissant de la première question, la Cour suprême a déclaré que certaines circonstances autorisent la Cour à déduire que l’avocat a reçu des renseignements confidentiels (à la page 1260) :

 

À mon avis, dès que le client a prouvé l’existence d’un lien antérieur dont la connexité avec le mandat dont on veut priver l’avocat est suffisante, la Cour doit en inférer que des renseignements confidentiels ont été transmis, sauf si l’avocat convainc la Cour qu’aucun renseignement pertinent n’a été communiqué.

 

[24]           Après avoir examiné la première question énoncée dans l’arrêt Martin, la Cour fédérale a conclu que Deeth, le cabinet d’avocats, avait reçu des renseignements confidentiels. Pour la citer (au paragraphe 18), [traduction] « le cabinet d’avocats [Deeth] était au fait de renseignements confidentiels concernant certains des enjeux de la présente instance ». Cependant, la Cour fédérale ne s’est pas demandé si Me Migus, l’avocat, avait reçu des renseignements confidentiels. Elle a plutôt imputé à Me Migus la connaissance des renseignements détenus par Deeth en inférant que les avocats échangent des renseignements confidentiels, et a noté que des mesures empêchant l’usage abusif de renseignements confidentiels n’avaient pas été mises en œuvre (paragraphes 19 et 20).

 

[25]           À mon avis, la Cour fédérale n’aurait pas dû tirer cette inférence. Elle disposait d’éléments de preuve montrant que Me Migus avait reçu des renseignements confidentiels concernant le prédécesseur de Valeant, Biovail, lorsqu’il travaillait chez Deeth. Me Mingus avait examiné des renseignements confidentiels de Biovail concernant le diltiazem et une affaire liée au brevet 224 – le même ingrédient médicinal et le même brevet dont il est question dans l’avis d’allégation de Cobalt dans la présente instance. Voir le contre‑interrogatoire de Me Migus, dossier d’appel, volume II, aux pages 828 à 830. Me Migus a d’ailleurs admis avoir consulté les dossiers de Biovail lorsqu’il était chez Deeth pour les besoins d’une demande d’accès à l’information déposée au sujet du diltiazem.

 

[26]           Quant à la seconde question énoncée dans l’arrêt Martin – à savoir s’il existe un risque que les renseignements confidentiels détenus par Me Migus soient utilisés dans la demande au détriment de Valeant –, la Cour suprême a indiqué que, dans certaines circonstances, l’inhabilité sera automatique (à la page 1261) :

 

Un avocat qui a appris des faits confidentiels pertinents ne peut pas agir contre son client ou son ancien client. Il sera automatiquement déclaré inhabile à agir. Peu importe qu’il donne l’assurance ou qu’il promette de ne pas utiliser les renseignements.

 

 

[27]           En l’espèce, Me Migus était en possession de renseignements confidentiels, son inhabilité est donc automatique.

 

[28]           Il s’ensuit qu’il n’existe aucun motif d’infirmer l’ordonnance de la Cour fédérale déclarant Me Migus inhabile à agir. Pour ces motifs, je rejetterais l’appel incident de Cobalt.

 

D.        Analyse : demande de Valeant concernant d’autres mesures de réparation

 

[29]           Dans l’appel qu’elle interjette devant la Cour, Valeant fait valoir que la Cour fédérale n’aurait pas dû se contenter d’exclure Me Migus : elle aurait dû déclarer invalide l’avis d’allégation et lui accorder des mesures de réparation à cet égard.

 

[30]           La Cour fédérale a refusé d’accorder ces mesures de réparation, ne s’estimant pas compétente pour ce faire. Elle a invoqué l’arrêt Pharmacia, précité, de la Cour. Valeant soutient que la Cour fédérale a eu tort : l’affaire Pharmacia se distingue de la présente espèce.

 

[31]           Je suis d’accord.

 

[32]           Dans l’arrêt Pharmacia, précité, la Cour était saisie d’une demande de contrôle judiciaire au titre du paragraphe 6(1) du Règlement AC, et a estimé que cette procédure légale visait uniquement à interdire au ministre d’accorder un avis de conformité. Dans un contexte aussi restreint, une requête en radiation de l’avis d’allégation était irrecevable.

 

[33]           La présente affaire est différente. En l’espèce, Valeant a présenté une requête en déclaration d’inhabilité – de crainte que l’avocat soit en situation de conflit d’intérêts –, une question que la Cour peut toujours examiner, dans le contexte d’une procédure légale restreinte ou pas. En guise de mesure de réparation liée à sa demande, Valeant veut obtenir une déclaration portant que le produit d’un conflit d’intérêts, l’avis d’allégation, est invalide. La véritable question dont nous sommes saisis est de savoir si cette mesure peut et doit être accordée pour remédier au conflit d’intérêts. Sur la foi du dossier, elle ne devrait pas l’être. Mais j’irais plus loin en affirmant qu’elle ne peut l’être.

 

[34]           Valeant fait valoir que la Cour a le pouvoir plénier de « repérer et d’examiner les cas d’abus de [sa] propre procédure et, si nécessaire, d’y remédier » : Ministre du Revenu national c. Compagnie d’assurance‑vie RBC, 2013 CAF 50, au paragraphe 36. Elle ajoute que, dans les circonstances, la Cour peut et doit invalider l’avis d’allégation, un document qui lui a été présenté et qui résulte de l’usage abusif de renseignements et d’un conflit d’intérêts inapproprié.

 

[35]           L’observation de Valeant échoue en partie sur ce dernier point : nous ne sommes pas convaincus, compte tenu du dossier dont nous disposons, que l’avis d’allégation résulte de l’usage abusif de renseignements ou d’un conflit d’intérêts. Je noterai en particulier que :

 

                     rien dans le dossier n’indique que les renseignements confidentiels de Valeant ont effectivement servi à la préparation de l’avis d’allégation. À ce stade, tout n’est que conjectures et inférences;

 

                     je ne suis pas convaincu, après avoir examiné l’avis d’allégation lui‑même, qu’il y a effectivement eu usage abusif des renseignements confidentiels. À première vue, une grande partie de ce document semble se rapporter à des faits objectivement connus et pouvant être communiqués, et à des questions de droit. Cela ne veut pas dire que des renseignements confidentiels n’ont pas été utilisés abusivement. Plus simplement, je ne suis convaincu ni dans un sens ni dans l’autre;

 

                     même si je pouvais conclure que des renseignements confidentiels ont été utilisés abusivement, le dossier ne me permet aucunement de savoir dans quelle mesure ils ont servi à la préparation de l’avis d’allégation. Dans les circonstances, une déclaration portant que l’avis d’allégation est invalide serait une mesure de réparation excessive;

 

                     le dossier dont nous disposons est constitué de documents, ce n’est pas le type de dossier complet qu’on introduirait dans le cadre d’une action pour violation du devoir fiduciaire ou pour usage abusif de renseignements confidentiels – instance qui aurait l’avantage d’une communication intégrale et d’un procès.

 

[36]           J’ajouterais que les arrêts Martin et McKercher, précités, confirment tous deux que les requêtes en déclaration d’inhabilité donnent droit à la déclaration d’inhabilité en guise de mesure de réparation et non au type de redressement que sollicite Valeant.

 

[37]           Premièrement, satisfaire au critère relatif à l’inhabilité énoncé dans l’arrêt Martin n’entraîne pas inexorablement l’octroi de la mesure corrective souhaitée par Valeant – c’est‑à‑dire l’invalidation de l’avis d’allégation. La seconde question qu’il faut se poser selon le critère établi dans l’arrêt Martin consiste seulement à se demander s’il existe un risque que les renseignements confidentiels aient été utilisés au détriment du client, et non s’ils l’ont effectivement été.

 

[38]           Deuxièmement, ni l’arrêt Martin ni l’arrêt McKercher ne suggèrent ni ne sous‑entendent que les requêtes en déclaration d’inhabilité peuvent servir à remédier à un véritable usage abusif de renseignements confidentiels et remplacer les actions en violation du devoir fiduciaire et abus de renseignements confidentiels – actions instruites sur la base des avantages et des protections associées à la communication intégrale et au procès. D’ailleurs, dans l’arrêt Martin, la Cour suprême notait que « [l]’utilisation de renseignements confidentiels » est « habituellement impossible à prouver » dans le cadre d’une demande comme celle‑ci (à la page 1259).

 

[39]           Troisièmement, si l’on se reporte au texte même de l’arrêt Martin, cette décision concernait seulement « la norme qui régit la conduite des avocats en matière de conflit d’intérêts. Il s’agit de déterminer dans quel cas l’avocat sera inhabile à occuper pour son client », et non si le type de mesure de réparation voulue en l’espèce par Valeant peut être accordé dans le cadre d’une demande de déclaration d’inhabilité : arrêt Martin, à la page 1239; voir aussi les pages 1243 et 1249. L’arrêt McKercher va encore plus loin. Dans cet arrêt, la Cour suprême faisait observer (au paragraphe 62) que de telles demandes visent à « empêcher l’utilisation à mauvais escient de renseignements confidentiels » [non souligné dans l’original]. D’ailleurs, dans l’arrêt McKercher (au paragraphe 62), la Cour suprême a reconnu que « la déclaration d’inhabilité à occuper est généralement la seule réparation appropriée, si l’on ne peut recourir à des mécanismes prévus par les règles du barreau pour écarter ce risque. »

 

[40]           Je laisse ouverte la question de savoir si, dans un cas exceptionnel, la Cour pourra exercer son pouvoir plénier de remédier à un abus de procédure et accorder le type de redressement additionnel demandé en l’espèce : Compagnie d’assurance‑vie RBC, précité. Cependant, comme nous le mentionnions plus haut au paragraphe 35, le dossier de preuve en l’espèce est insuffisant pour justifier l’exercice de ce pouvoir.

 

[41]           En conclusion, la Cour fédérale a eu raison de rejeter la demande d’invalidation de l’avis d’allégation et de mesures de réparation connexes présentée par Valeant – mais pour des motifs différents.

 

E.        Post‑scriptum

 

[42]           Sous réserve des délais de prescription applicables, Valeant est libre de se prévaloir des autres recours disponibles pour empêcher ou corriger l’usage abusif allégué de ses renseignements confidentiels. Les présents motifs ne doivent pas être interprétés comme l’expression d’une opinion sur le bien‑fondé de ces recours, si l’on s’en prévalait.

 

F.         Décision

 

[43]           Pour les motifs qui précèdent, je rejetterais l’appel et l’appel incident. En Cour fédérale, chaque partie a eu partiellement gain de cause, si bien que la Cour n’a adjugé aucuns dépens.


Aucune partie n’a contesté cet exercice du pouvoir discrétionnaire devant la Cour. Ici encore, chaque partie a gain de cause. Par conséquent, je n’adjugerais pas de dépens.

 

« David Stratas »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord.
John M. Evans, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.
Johanne Gauthier, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


Dossier :

            A‑221‑13

 

APPEL D’UNE ORDONNANCE PRONONCÉE PAR MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE EN DATE DU 12 JUIN 2013, DOSSIER No T‑1805‑12

 

INTITULÉ :

VALEANT CANADA LP/VALEANT CANADA S.E.C.
et VALEANT INTERNATIONAL BERMUDA c. LE MINISTRE DE LA SANTÉ et COBALT PHARMACEUTICALS COMPANY

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                                                                Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                                                                LE 13 NOVEMBRE 2013

MOTIFS DU JUGEMENT :

                                                                                                LE JUGE STRATAS

Y ONT SOUSCRIT :                                                          

LES JUGES EVANS et GAUTHIER

DATE DES MOTIFS :

                                                                                                LE 24 FÉVRIER 2014

COMPARUTIONS :

Andrew Skodyn

 

pour les appelantes

 

Paula Bremner

 

POUR L’INTIMÉE, COBALT PHARMACEUTICALS

 


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lenczner Slaght Royce Smith Griffin LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LES appelantES

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉ, LE MINISTRE DE LA SANTÉ

Sim, Lowman, Ashton & McKay LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR L’INTIMÉE, COBALT PHARMACEUTICALS

 

 

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