Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20141007


Dossiers : A-147-14

A-148-14

Référence : 2014 CAF 222

CORAM :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

LE JUGE BOIVIN

 

 

Dossier : A-147-14

ENTRE :

HAROLD COOMBS,

JOAN COOMBS et

PERCY G. MOSSOP

appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

Dossier : A-148-14

ET ENTRE :

HAROLD COOMBS,

JOAN COOMBS,

JOHN F. COOMBS,

OLEG VOLOCHKOV et

ANNE VOLOCHKOV

appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 6 octobre 2014

Jugement rendu à Toronto (Ontario), le 7 octobre 2014

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE BOIVIN

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

 


Date : 20141007


Dossiers : A-147-14

A-148-14

Référence : 2014 CAF 222

CORAM :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

LE JUGE BOIVIN

 

 

Dossier :A-147-14

ENTRE :

HAROLD COOMBS,

JOAN COOMBS et

PERCY G. MOSSOP

appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

Dossier :A-148-14

ET ENTRE :

HAROLD COOMBS,

JOAN COOMBS,

JOHN F. COOMBS,

OLEG VOLOCHKOV et

ANNE VOLOCHKOV

appelants

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE BOIVIN

[1]               La Cour est saisie de l’appel de deux décisions rendues le 10 mars 2014 par la juge Kane (la juge) de la Cour fédérale.

[2]               Les deux décisions découlent du même ensemble de faits et les deux affaires sont connexes et ont été instruites en même temps.

[3]               Dans le dossier A-147-14, les appelants interjettent appel de la décision de la juge de confirmer la décision du 2 juillet 2013 par laquelle le protonotaire Aalto a radié une de leurs demandes de contrôle judiciaire au motif qu’elle était futile et vexatoire et qu’elle constituait un abus de procédure.

[4]               La question en litige devant le protonotaire avait trait à une fouille, une perquisition et une saisie apparemment illégales menées par des fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) et autorisée par un mandat décerné par la Cour de justice de l’Ontario. Lors d’une audience tenue en 2008 devant la Cour canadienne de l’impôt (CCI) (2008 CCI 289, 2008 DTC 4004), les appelants ont soutenu que la saisie avait constitué un déni de justice fondamentale et porté atteinte aux droits qu’ils tirent des articles 7, 8 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11 (la Charte). Ils sollicitaient un jugement déclaratoire et une réparation non précisée sur le fondement du paragraphe 24(1) de la Charte.

[5]               Devant le protonotaire, les appelants n’ont contesté ni la légalité ni la validité du mandat de perquisition, mais plutôt les agissements des fonctionnaires de l’ARC qui l’ont exécuté. Le protonotaire a conclu que le recours intenté par les appelants équivalait à une attaque indirecte de la décision de 2008 de la CCI et ne relevait pas, de ce fait, de la compétence de la Cour fédérale. De plus, selon le protonotaire, il avait déjà été statué sur toutes les questions liées au mandat et, en conséquence, [traduction] « l’avis de demande constituait un abus de procédure et était futile et vexatoire », et la demande [traduction] « n’avait aucune chance d’être accueillie » (ordonnance du protonotaire, à la page 5).

[6]               Les appelants ont interjeté appel de l’ordonnance du protonotaire en application de l’article 51 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106. La Cour fédérale a rejeté l’appel au motif que les appelants n’avaient pas démontré que le protonotaire s’était appuyé sur un mauvais principe ou une appréciation fondamentalement erronée des faits au sens de l’arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 R.C.F. 425 (C.A.F.), aux pages 462 et 463, 149 N.R. 273, et de l’arrêt Merck & Co c. Apotex Inc, 2003 CAF 488, [2004] 2 R.C.F. 459.

[7]               La Cour suprême a énoncé la norme de contrôle devant être appliquée par la Cour lorsqu’un appel est interjeté de la décision d’un juge siégeant en appel de la décision d’un protonotaire dans l’arrêt Z.I. Pompey Industrie c. ECU-Line N.V., 2003 CSC 27, [2003] 1 R.C.S. 450, au paragraphe 18 :

[…] Une cour d’appel ne peut intervenir que si le juge des requêtes n’avait aucun motif de modifier la décision du protonotaire ou, advenant l’existence d’un tel motif, si la décision du juge des requêtes était mal fondée ou manifestement erronée : Jian Sheng Co. c. Great Tempo S.A., [1998] 3 C.F. 418 (C.A.), le juge Décary, p. 427‑428, autorisation de pourvoi refusée, [1998] 3 R.C.S. vi.

[8]               Devant notre Cour, les appelants n’ont pas su me convaincre que la juge avait commis une erreur quelconque. La juge a fait l’examen complet des mêmes questions que celles soulevées devant le protonotaire et, ainsi, les appelants ont eu droit à un examen de novo. S’il est vrai qu’on ne doit radier les demandes de contrôle judiciaire que dans des circonstances exceptionnelles, les appelants avaient présenté en l’espèce quatorze demandes et intenté deux actions en date du 10 mars 2014, en s’appuyant sur les mêmes faits et en alléguant les mêmes violations (motifs de la juge, au paragraphe 3). La juge a conclu que ces multiples instances, y compris cinq déjà rejetées étaient effectivement des « circonstances exceptionnelles » et qu’elles justifiaient de radier la demande (motifs de la juge, au paragraphe 49). Je suis du même avis.

[9]               Dans le dossier A-148-14, les appelants font appel de la décision de la juge de rejeter une demande de contrôle judiciaire au motif qu’elle était futile et vexatoire et qu’elle constituait un abus de procédure, et d’accueillir les requêtes présentées par l’intimé pour faire radier deux autres demandes de contrôle judiciaire estimées être [traduction] « manifestement irrégulière[s] au point de n’avoir aucune chance d’être accueillie[s] » (motifs de la juge, au paragraphe 78, citation omise).

[10]           Les appelants font essentiellement valoir les mêmes arguments que ceux avancés dans le dossier A‑147‑14. Toutefois, ils contestent également la conclusion de la juge selon laquelle il n’existait aucune [traduction] « crainte raisonnable de partialité » de la part du protonotaire (motifs de la juge, au paragraphe 24). Ils soutiennent que la juge a [traduction] « mal interprété ou mal compris » la directive donnée le 13 février 2014 par le protonotaire (mémoire des faits et du droit des appelants, aux paragraphes 48, 50, 70 et 71), soit la directive suivante qu’il a donnée de vive voix et formulée par l’entremise du greffe : [traduction] « Toutes les requêtes doivent être instruites par la juge Kane – la Couronne devrait présenter les requêtes en irrecevabilité qu’elle entend intenter dans le cadre des deux s’ajoutant à sa liste ».

[11]           Les appelants soutiennent également que les protonotaires ne peuvent exercer les fonctions de juges de la Cour fédérale (mémoire des faits et du droit des appelants, au paragraphe 56). Ils ajoutent à ce titre que la juge a [traduction] « défendu farouchement » les agissements apparemment irréguliers du protonotaire et qu’ainsi l’ambiance à l’audience n’était [traduction] « pas propice à une instruction équitable en raison des échanges conflictuels entre la juge et l’appelant » (mémoire des faits et du droit des appelants, aux paragraphes 76 et 77).

[12]           Ni l’une ni l’autre partie ne conteste que la décision correcte est la norme de contrôle qui s’applique lorsque la crainte de partialité est alléguée.  

[13]           Après avoir examiné avec soin l’argumentation orale et écrite des parties, je suis d’avis qu’une personne raisonnable, pleinement informée et comprenant bien les questions devant la Cour, n’en viendrait pas à une conclusion de partialité (R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484, 151 D.L.R. (4th) 193). En effet, la directive donnée le 13 février 2014 par le protonotaire faisait suite à une lettre du 9 janvier 2014 de l’intimé concernant la procédure suivie par la Cour, et j’estime en fonction du contexte que, si on l’interprète correctement, le mot [traduction] « devrait » utilisé par le protonotaire visait, non pas à inciter la Couronne à présenter des requêtes en radiation, mais plutôt à indiquer devant qui – la juge – les requêtes devaient être présentées.

[14]           En outre, les appelants s’en sont pris à plusieurs reprises à l’intégrité du protonotaire, de la juge et de la Cour fédérale (mémoire des faits et du droit des appelants dans le dossier A‑148‑14, aux paragraphes 28, 34 à 46, 50, 54, 56, 60, 63 à 65, 69 et 72 à 79; mémoire des faits et du droit des appelants dans le dossier A‑147‑14, aux paragraphes 48, 77 et 78). Les allégations des appelants sont très graves, et elles ne doivent pas être prises à la légère. Une allégation de partialité met en effet en cause le fondement même du système judiciaire. Les allégations des appelants remettent en question non seulement l’intégrité personnelle du protonotaire et de la juge, mais aussi celle de l’administration de la justice tout entière (R. c. S. (R.D.), précité, au paragraphe 113).

[15]           Au vu du dossier présenté à la Cour, les graves allégations des appelants, en plus d’être inopportunes et inutiles, ne sont pas étayées par la preuve et ne reposent sur aucun fondement quelconque.

[16]           Pour les motifs qui précèdent, je suis d’avis de rejeter l’appel dans le dossier A‑147‑14, sans frais, et de rejeter l’appel dans le dossier A‑148‑14, avec dépens. Une copie des présents motifs sera versée dans chacun de ces dossiers.

« Richard Boivin »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Johanne Trudel, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Wyman W. Webb, j.c.a. »

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-147-14

 

 

INTITULÉ :

HAROLD COOMBS, JOAN COOMBS et PERCY G. MOSSOP c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 OCTOBRE 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE BOIVIN

 

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

 

DATE DES MOTIFS :

LE 7 OCTOBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Harold Coombs

 

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Sonia Singh

 

POUR L’INTIMÉ,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉ,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-148-14

 

INTITULÉ :

HAROLD COOMBS, JOAN COOMBS, JOHN F. COOMBS, OLEG VOLOCHKOV et ANNE VOLOCHKOV c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 OCTOBRE 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE BOIVIN

 

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE WEBB

 

DATE DES MOTIFS :

LE 7 OCTOBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Harold Coombs

 

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Sonia Singh

 

POUR L’INTIMÉ,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

pour l’intimé,

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

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