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Date : 20141201


Dossier : A-336-13

Référence : 2014 CAF 280

CORAM :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 

 

ENTRE :

PATRICK JOSEPH BARRY

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 3 novembre 2014.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 1er décembre 2014.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE DAWSON

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 


Date : 20141201


Dossier : A-336-13

Référence : 2014 CAF 280

CORAM :

LA JUGE DAWSON

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 

 

ENTRE :

PATRICK JOSEPH BARRY

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE DAWSON

[1]               Au cours des années d’imposition 2008 et 2009, l’appelant exerçait deux emplois : un emploi permanent d’enseignant à temps plein et un emploi à temps partiel de conseiller de foyer de groupe auprès de l’Eastern Residential Support Board Inc. (ERSB). L’ERSB exploite un certain nombre de foyers de groupe dans la région de St. John’s et l’appelant pouvait être appelé à se présenter à l’un ou l’autre de ces foyers pour un quart de travail.

[2]               Le ministre du Revenu national a refusé certaines dépenses déclarées par l’appelant pour les années d’imposition 2008 et 2009, à savoir :

                    i.                   les frais afférents à un véhicule à moteur;

                  ii.                   les frais de téléphone cellulaire.

                iii.                   le remboursement de la TPS/TVH à l’intention des salariés et des associés relativement aux frais refusés.

[3]               Pour les motifs répertoriés sous 2013 CCI 221, 2013 DTC 1176, une juge de la Cour canadienne de l’impôt a rejeté l’appel interjeté par l’appelant à l’encontre de la nouvelle cotisation du ministre. Il s’agit donc d’un appel de cette décision.

[4]               Avant d’examiner les questions de fond soulevées dans le présent appel, j’aimerais souligner qu’au début de l’instruction de l’appel, l’appelant a présenté une requête orale, sans préavis, afin que la Cour admette de nouveaux éléments de preuve, lesquels sont les suivants :

                    i.                   une lettre datée du 10 mars 2011, envoyée par l’appelant au chef des Appels, dans laquelle il répondait aux nouvelles cotisations en cause et à laquelle il a joint des lettres échangées avec l’Agence du revenu Canada;  

                  ii.                   une série de courriels échangés entre l’appelant et l’ERSB en avril 2011, dans lesquels ils partagent leurs points de vue sur les nouvelles cotisations;

                iii.                   une lettre datée du 30 mai 2011, envoyée par l’appelant à la Direction des décisions en impôt à propos des alinéas 8(1)h) et (h.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.) (Loi).

[5]               Après avoir entendu les observations orales sur la requête, pour des raisons de gestion du temps, la Cour a pris en délibéré sa décision quant à l’admissibilité de la correspondance. Voici donc les raisons pour lesquelles je propose de rejeter la requête visant à admettre de nouveaux éléments de preuve.

[6]               Les lettres et les courriels ne sont que des prises de position de l’appelant, des représentants du ministre et de l’ERSB. Par conséquent, ils n’aident pas à régler les questions soulevées dans le présent appel. Ils ne satisfont pas au critère applicable à l’admission de nouveaux éléments de preuve (Shire Canada Inc. c. Apotex Inc., 2011 CAF 10, 414 N.R. 270, au paragraphe 17).

[7]               Dans le présent appel, l’appelant formule les questions de la façon suivante :  

                    i.                   La juge a commis une erreur lorsqu’elle a interprété l’alinéa 8(1)h.1) de la Loi.

                  ii.                   La juge a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que les frais de déplacement, que l’appelant a engagés pour se rendre depuis son domicile jusqu’aux foyers de groupe, n’ont pas été engagés dans l’accomplissement des fonctions de son emploi.

                iii.                   La juge a commis une erreur de droit ou a conclu de façon déraisonnable que le contrat de travail de l’appelant ne l’obligeait pas à avoir un téléphone cellulaire.

[8]               Pour les motifs qui suivent, je suis convaincue que la juge n’a pas commis l’erreur reprochée par l’appelant.

[9]               Premièrement, l’alinéa 8(1)h.1) est libellé comme suit :

8. (1) Sont déductibles dans le calcul du revenu d’un contribuable tiré, pour une année d’imposition, d’une charge ou d’un emploi ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu’il est raisonnable de considérer comme s’y rapportant :

 

8. (1) In computing a taxpayer’s income for a taxation year from an office or employment, there may be deducted such of the following amounts as are wholly applicable to that source or such part of the following amounts as may reasonably be regarded as applicable thereto

[. . .]

 

[…]

 

h.1) dans le cas où le contribuable, au cours de l’année, a été habituellement tenu d’accomplir les fonctions de son emploi ailleurs qu’au lieu d’affaires de son employeur ou à différents endroits et a été tenu, aux termes de son contrat d’emploi, d’acquitter les frais afférents à un véhicule à moteur qu’il a engagés dans l’accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, les sommes qu’il a dépensées au cours de l’année au titre des frais afférents à un véhicule à moteur pour se déplacer dans l’exercice des fonctions de son emploi, sauf s’il a, selon le cas :

(h.1) where the taxpayer, in the year,

(i) was ordinarily required to carry on the duties of the office or employment away from the employer’s place of business or in different places, and

(ii) was required under the contract of employment to pay motor vehicle expenses incurred in the performance of the duties of the office or employment,

amounts expended by the taxpayer in the year in respect of motor vehicle expenses incurred for travelling in the course of the office or employment, except where the taxpayer

 

(i) reçu une allocation pour frais afférents à un véhicule à moteur qui, par l’effet de l’alinéa 6(1)b), n’est pas incluse dans le calcul de son revenu pour l’année,

(iii) received an allowance for motor vehicle expenses that was, because of paragraph 6(1)(b), not included in computing the taxpayer’s income for the year, or

 

(ii) demandé une déduction pour l’année en application de l’alinéa f);

(iv) claims a deduction for the year under paragraph 8(1)(f);

[10]           La juge n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle quand elle a affirmé que, selon l’alinéa 8(1)(h.1), l’appelant devait être tenu aux termes de son contrat d’emploi avec l’ERSB d’acquitter personnellement les frais afférents à un véhicule à moteur. L’interprétation qu’a donnée la juge de l’alinéa était conforme au sens clair de la disposition et à la jurisprudence de notre Cour (La Reine c. Henry Cival, [1983] 2 C.F. 830). Selon l’interprétation de l’appelant, il faudrait ajouter des mots au sous-alinéa 8(1)h.1)(ii) pour démontrer que le contribuable [traduction] « était tenu, aux termes de son contrat d’emploi, d’acquitter les frais afférents à un véhicule à moteur ou de choisir d’utiliser son propre véhicule quand son emploi l’oblige à utiliser son propre véhicule ».

[11]           Enfin, à cet égard, les documents administratifs de l’Agence du revenu Canada invoqués par l’appelant représentent l’interprétation que donne l’Agence du revenu Canada à la disposition pertinente de la Loi, mais de telles déclarations ne remplacent pas l’interprétation faite par les tribunaux.

[12]           Deuxièmement, la juge a conclu que le contrat d’emploi de l’appelant ne l’obligeait pas à avoir un véhicule. Cette conclusion mixte de fait et de droit était largement étayée par les modalités énoncées dans la convention collective pertinente et par le témoignage du directeur des services corporatifs de l’ERSB, M. English.

[13]           J’ai attentivement examiné la décision de la Cour fédérale, Rozen c. Canada, [1985] A.C.F. n° 1002, 85 DTC 5611, sur laquelle l’appelant s’est fondé. Cependant, comme la juge l’a souligné au paragraphe 22 de ses motifs, la décision Rozen se distingue de l’espèce. Dans cette décision, la Cour fédérale a souligné qu’« il faut étudier les modalités du contrat d’emploi […] » pour voir si le contribuable était tenu de payer les frais de déplacement. En l’absence d’une condition écrite expresse, la Cour fédérale a laissé entendre que le contribuable était tenu de payer les frais de déplacement. En l’espèce, les conditions de la convention collective sont expresses et ont été étayées par le témoignage de M. English selon lequel l’appelant n’était pas tenu de payer les frais afférents à un véhicule à moteur.

[14]           Troisièmement, la juge n’a commis aucune erreur lorsqu’elle a conclu que les frais afférents à un véhicule à moteur, que l’appelant a engagés pour se rendre de son domicile au foyer de groupe où il travaillait et pour revenir chez lui à la fin de son quart de travail, n’étaient pas engagés dans l’accomplissement des fonctions de l’appelant. Ce dernier n’a pas réussi à montrer qu’il fournissait des services ou qu’il s’acquittait d’obligations professionnelles pendant ses déplacements. Il se rendait simplement au travail. C’est cette absence de preuve qui distingue le présent appel de l’affaire Evans c. La Reine, 1998 CanLII 148 (C.C.I.), 99 DTC 168, une autre décision invoquée par l’appelant.

[15]           Les frais de déplacement engagés par un contribuable pour se rendre de son domicile à son lieu de travail sont habituellement considérés comme des dépenses personnelles. De façon générale, ce ne sont pas des frais de déplacement engagés dans le cadre de l’accomplissement des fonctions d’emploi du contribuable.

[16]           Quatrièmement, la juge n’a commis aucune erreur en interprétant le sous-alinéa 8(1)i)(iii) de la Loi puisqu’il s’appliquait aux frais afférents aux téléphones cellulaires. La juge a eu raison de dire qu’un employé doit être « tenu aux termes de son contrat d’emploi » d’acquitter les frais pour que ceux-ci soient déductibles en vertu de cette disposition.

[17]           Enfin, la juge n’a commis aucune erreur manifeste et dominante lorsqu’elle a conclu que l’employeur de l’appelant ne l’obligeait pas à avoir un téléphone cellulaire. Cette conclusion était étayée par le témoignage de M. English.

[18]           Pour ces motifs, je rejetterais l’appel avec dépens.

« Eleanor R. Dawson »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Wyman W. Webb, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

A.F. Scott, j.c.a. »

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-336-13

 

 

INTITULÉ :

PATRICK JOSEPH BARRY c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

St. John’s (TERRE-NEUVE-ET-LABRADOR)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 3 NOVEMBRE 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE DAWSON

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE WEBB

LE JUGE SCOTT

 

DATE DES MOTIFS :

LE 1ER DÉCEMBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Patrick Joseph Barry

 

POUR L’APPELANT

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Amy Kendell

 

POUR l’INTIMÉE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada  

 

POUR l’INTIMÉE

 

 

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