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Dossier : 2013‑1264(IT)G

ENTRE :

CAROLINE M. McDONALD,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 9 mars 2015, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

Devant : L’honorable juge Gerald J. Rip

Comparutions :

Avocat de l’appelante :

Me Harald Mattson

 

Avocat de l’intimée :

Me Max Matas

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté de la cotisation établie en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, dont l’avis est daté du 23 septembre 2011 et porte le numéro 1518327, est rejeté avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de mars 2015.

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de juillet 2015.

François Brunet, réviseur.


Référence : 2015 CCI 73

Date : 20150330

Dossier : 2013‑1264(IT)G

ENTRE :

CAROLINE M. McDONALD,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Rip

[1]             Le présent appel est interjeté par Mme Caroline M. McDonald d’une cotisation établie en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). Selon cette cotisation, Mme McDonald doit 30 235,68 $ au titre de l’impôt qui lui a été transféré par M. Douglas Chapman en 2004, dont la dette au titre de la Loi ne s’élevait alors à pas moins de 72 425,62 $.

[2]             M. Chapman, qui est décédé en 2011, a reçu des avis de cotisation datés du 7 avril 2005 pour les années 1999, 2000 et 2001, ainsi qu’un avis de cotisation daté du 1er novembre 2004 pour l’année 2002.

[3]             Mme McDonald et M. Chapman ont cohabité à partir [traduction] d’« environ » 2001 jusqu’au décès de ce dernier, en 2011.

[4]             En mai et en juin 2004, M. Chapman a transféré 30 235,68 $ à Mme McDonald. À l’époque, Mme McDonald savait que M. Chapman avait des [traduction] « problèmes » avec l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). Il exerçait l’activité d’entrepreneur indépendant et n’avait jamais payé d’impôt pour son entreprise, qui lui assurait un revenu d’environ 2 000 $ à 3 000 $ par mois. Il avait également omis de produire des déclarations de revenus pendant plusieurs années. Quelque temps avant 2004, M. Chapman avait commencé à recevoir des prestations au titre du Régime de pensions du Canada (le « RPC ») et de la Sécurité de la vieillesse (« SV »). Il avait également un régime enregistré d’épargne‑retraite (« REER »).

[5]             Les sommes que M. Chapman a transférées à Mme McDonald sont précisées ci‑dessous.

Date du chèque

Somme

27 avril 2004

             4 500,00 $

28 avril 2004

                         4 500,00 $

29 avril 2004

                         4 500,00 $

30 avril 2004

                         4 500,00 $

3 mai 2004

                         4 500,00 $

4 mai 2004

                         4 500,00 $

6 mai 2004

                         3 235,68 $

TOTAL

                      30 235,68 $

[6]             Voici le texte du paragraphe 160(1) de la Loi :

Lorsqu’une personne a, depuis le 1er mai 1951, transféré des biens, directement ou indirectement, au moyen d’une fiducie ou de toute autre façon à l’une des personnes suivantes :

Where a person has, on or after May 1, 1951, transferred property, either directly or indirectly, by means of a trust or by any other means whatever, to

a)         son époux ou conjoint de fait ou une personne devenue depuis son époux ou conjoint de fait;

(a)        the person’s spouse or common‑law partner or a person who has since become the person’s spouse or common‑law partner,

[…]

c)         une personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance,

(c)        a person with whom the person was not dealing at arm’s length,

les règles suivantes s’appliquent :

the following rules apply :

[…]

e)         le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d’un montant égal au moins élevé des montants suivants :

(e)        the transferee and transferor are jointly and severally liable to pay under this Act an amount equal to the lesser of

(i) l’excédent éventuel de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour le bien,

(i) the amount, if any, by which the fair market value of the property at the time it was transferred exceeds the fair market value at that time of the consideration given for the property, and

(ii) le total des montants dont chacun représente un montant que l’auteur du transfert doit payer en vertu de la présente loi au cours de l’année d’imposition dans laquelle les biens ont été transférés ou d’une année d’imposition antérieure ou pour une de ces années;

(ii) the total of all amounts each of which is an amount that the transferor is liable to pay under this Act in or in respect of the taxation year in which the property was transferred or any preceding taxation year,

aucune disposition du présent paragraphe n’est toutefois réputée limiter la responsabilité de l’auteur du transfert en vertu de quelque autre disposition de la présente loi.

but nothing in this subsection shall be deemed to limit the liability of the transferor under any other provision of this Act.

 

[7]             Le président Thorson a expliqué le mot « transfert » à l’occasion de l’affaire Fasken Estate c. M.N.R.[1] :

[traduction]

Le mot « transfert » n’est pas un terme technique et n’a pas un sens technique. Il n’est pas nécessaire qu’un transfert de biens par un mari à son épouse revête une forme particulière ni qu’il se fasse directement. Il suffit que le mari agisse de façon à se dessaisir des biens et les faire acquérir à son épouse, c’est‑à‑dire transmettre les biens de lui à elle. Les moyens par lesquels il arrive à cette fin, qu’ils soient directs ou détournés, peuvent être à juste titre appelés un transfert […]

[8]             Mme McDonald a expliqué que M. Chapman lui avait transféré cet argent, car il avait des problèmes avec l’ARC. Il négociait un règlement concernant l’impôt dû. Il croyait qu’en fin de compte, il n’aurait rien à payer. Il craignait que l’ARC saisisse ses biens et qu’elle ne lui rembourse pas l’argent dû si une entente de règlement était passée ultérieurement; l’ARC recevait déjà ses prestations au titre du RPC et de la SV, et il endossait ses chèques de TPS qu’il retournait à l’ARC. Il a donc demandé à Mme McDonald d’ouvrir un compte à la Banque Nationale du Canada. Il endosserait, et il a bel et bien endossé, les chèques émis à son nom par la Banque Nationale et portant sur des fonds provenant de son REER, puis Mme McDonald déposerait les chèques dans un nouveau compte bancaire à son nom à elle, à la même banque.

[9]             Ce sont les sept chèques qu’elle a ainsi déposés qui ont donné lieu à la cotisation dont l’avis est daté du 23 septembre 2011 et qui est visée par l’appel.

[10]        Le 30 juin 2005, Mme McDonald a retiré tous les fonds déposés dans ce compte bancaire et a remis l’argent à M. Chapman. Elle a effectué des retraits chaque mois de mai à novembre 2004. Le dernier retrait a été effectué le 30 juin 2005; le solde du compte s’élevait alors à 53,34 $. Ce compte a été clôturé le 9 février 2010.

[11]        L’avocat de Mme McDonald m’a renvoyé à l’arrêt La Reine c. Jean Livingston de la Cour d’appel fédérale[2], qui, selon lui, a changé la jurisprudence en ce qui a trait au paragraphe 160(1). Dans l’affaire Livingston, la contribuable a ouvert un compte bancaire à son seul nom à la demande d’une certaine Mme Davies. Tandis que Mme Davis devait payer de l’impôt au titre de la Loi, elle déposait de l’argent dans le compte bancaire de la contribuable et demandait à d’autres personnes de déposer l’argent qu’elles lui devaient dans ce même compte. Mme Davis avait la possibilité de retirer de l’argent du compte et recevait les relevés bancaires. Elle connaissait donc le solde du compte, bien que la contribuable ait le droit de retirer de l’argent du compte et de recevoir les relevés bancaires.

[12]        Dans les motifs de son jugement, le juge de première instance a reconnu que Mme Livingston était tout à fait au courant des problèmes de son amie avec le fisc, mais a souligné que cette contribuable n’avait tiré aucun avantage du compte bancaire[3]. Le juge de première instance a conclu que Mme Livingston avait donné une contrepartie à Mme Davis et que cette contrepartie pouvait être qualifiée de relation contractuelle. En contrepartie du dépôt de fonds dans le compte, Mme Livingston a remis à son amie une carte de débit et des chèques en blanc signés lui permettant d’effectuer à sa guise des retraits de ce compte. Le juge de première instance a accueilli l’appel. La Couronne a interjeté appel auprès de la Cour d’appel fédérale.

[13]        Au paragraphe 12 de ses motifs, le juge Sexton s’est exprimé en ces termes : « [la contribuable] avait pour but, en ouvrant le compte bancaire, de permettre à Mme Davies de soustraire son argent à ses créanciers, y compris l’ARC. Il est même allé jusqu’à conclure (au paragraphe 6) que l’auteur et la bénéficiaire du transfert avaient comploté pour léser l’ARC. Il a aussi conclu que Mme Davies était la seule personne à avoir utilisé le compte, c’est‑à‑dire que l’intimée n’y avait jamais fait de dépôts ni n’en avait jamais opéré de retraits. »

[14]        Aux paragraphes 18 et 19, le juge Sexton a fait les observations suivantes :

[18]      L’application de ces critères dépend dans une mesure particulièrement importante de l’objet du paragraphe 160(1). Dans l’arrêt Medland c. Canada, 98 DTC 6358 (C.A.F.) (Medland), notre Cour a conclu que l’objet et l’esprit de ce paragraphe « consistent à empêcher un contribuable de transférer ses biens à son conjoint [ou encore à un mineur ou à une personne avec qui il a un lien de dépendance] afin de faire échec aux efforts déployés par le ministre pour percevoir l’argent qui lui est dû ». Voir aussi le paragraphe 10 de Heavyside c. Canada, [1996] A.C.F. no 1608 (C.A.) [QL] (Heavyside). De façon encore plus pertinente pour la présente espèce, la Cour canadienne de l’impôt a posé en principe qu’il serait contraire à l’objet du paragraphe 160(1) que l’auteur d’un transfert permette au bénéficiaire de celui‑ci d’utiliser les sommes transférées pour payer les dettes dudit auteur en favorisant des créanciers déterminés aux dépens de l’ARC; voir le paragraphe 19 de Raphael c. Canada, 2000 DTC 2434.

[19]      Comme il sera expliqué plus loin, étant donné l’objet du paragraphe 160(1), l’intention de l’auteur et du bénéficiaire du transfert de frustrer l’ARC en tant que créancier peut se révéler pertinente pour l’examen du caractère suffisant ou non de la contrepartie. Cependant, je ne voudrais pas que l’on en conclue qu’il doive y avoir intention de frustrer l’ARC pour déclencher l’application du paragraphe 160(1). En effet, ce paragraphe peut s’appliquer au bénéficiaire d’un transfert qui n’a pas l’intention d’aider le débiteur fiscal principal à éviter de payer ses impôts; voir le paragraphe 3 de Wannan c. Canada, 2003 CAF 423.

[15]        Mme Livingston a soutenu que le dépôt de sommes dans son compte bancaire ne constituait pas en soi un transfert de biens. L’auteur du transfert doit se dessaisir des sommes déposées sur le compte, ce qui ne s’est jamais produit.

[16]        La Cour d’appel a rejeté la thèse de Mme Livingston. Le juge Sexton a donné les explications suivantes (aux paragraphes 21 et 22) :

[21]      Le dépôt de sommes sur le compte bancaire d’une autre personne constitue un transfert de biens. Rappelons, pour lever toute ambiguïté, que le dépôt de sommes par Mme Davies sur le compte de l’intimée permettait à cette dernière de les en retirer n’importe quand. Le bien transféré était le droit d’exiger de la banque qu’elle remette à l’intimée la totalité des sommes déposées. La valeur de ce droit était la valeur totale desdites sommes.

[22]      En outre, il y a transfert de biens pour l’application de l’article 160 même si la propriété bénéficiaire ou effective n’a pas été transférée. Le paragraphe 160(1) s’applique à tout transfert de biens – « au moyen d’une fiducie ou de toute autre façon ». Par conséquent, ce paragraphe définit le transfert à une fiducie comme un transfert de biens. Il est certain que, même si l’auteur du transfert est le bénéficiaire de la fiducie, le titre juridique a été transféré au fiduciaire. Il s’agit donc là d’un transfert de biens pour l’application du paragraphe 160(1), qui, après tout, a entre autres pour objet d’empêcher l’auteur du transfert de cacher ses biens, y compris derrière une fiducie, pour éviter que l’ARC ne les saisisse. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner l’argument de l’intimée selon lequel Mme Davies a conservé le titre de bénéficiaire des sommes déposées.

[17]        La Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel de ce jugement interjeté par la Couronne.

[18]        Selon les observations formulées par le juge Sexton au paragraphe 22 de l’arrêt Livingston et celles formulées par le juge Noлl de la Cour d’appel fédérale (tel était alors son titre) au paragraphe 53 de l’arrêt 9101‑2310 Québec Inc. c. Canada[4] (« 9101 »), il a été soutenu que le bénéficiaire du transfert est responsable au sens du paragraphe 160(1) uniquement si le transfert a pour objet d’empêcher l’auteur du transfert de cacher ses biens pour éviter que l’ARC ne les saisisse.

[19]        Il s’agit là de la thèse de l’appelante : elle n’a rien fait pour faire échec aux mesures prises par l’ARC pour recouvrer les sommes dues par Chapman.

[20]        En l’espèce, l’avocat de l’appelante a soutenu que, contrairement à Mme Livingston, sa cliente n’était pas tout à fait au courant des problèmes de M. Chapman avec le fisc. À son avis, il s’agissait d’une différence considérable entre les deux appels.

[21]        L’avocat de l’appelante a également cité deux appels tranchés en faveur de contribuables ayant reçu une cotisation établie au titre du paragraphe 160(1) de la Loi, soit 9101 et Lemire c. Canada[5] (« Lemire »). Dans ces deux appels, les tribunaux se sont appuyés sur le droit civil applicable au Québec, où les prétendus transferts avaient eu lieu.

[22]        Dans ces deux affaires, l’argent de chacune des appelantes, qui étaient alors tenues de verser des sommes à l’État, était déposé par chèque libellé au nom d’un autre contribuable dans le compte bancaire de celui‑ci. Dans l’affaire 9101, l’actionnaire contrôlant de l’appelante était au courant de l’obligation de cette autre personne. Dans l’affaire Lemire, le juge de première instance avait conclu que la contribuable ignorait la situation financière de son conjoint de fait. La Cour avait accueilli ces appels.

[23]           La Cour d’appel fédérale a rejeté les deux appels interjetés par le ministre. Dans les deux cas, elle a conclu que la relation de l’appelante avec l’autre personne était de la nature d’un mandat et que les dépôts et les retraits éventuels entraient dans les prévisions de l’article 2130 du Code civil du Québec  (le « C.C.Q. »). Les appelantes intervenaient toutes deux pour le compte de l’autre personne et étaient tenues de rendre à celle ci l’argent qu’elles retiraient. Les appelantes n’étaient pas autorisées à utiliser l’argent qui se trouvait dans leur propre compte. Conformément à l’article 2146 du C.C.Q., les autres personnes demeuraient toujours propriétaires des fonds déposés. Comme l’a signalé le juge Noлl de la Cour d’appel fédérale (tel était alors son titre) au paragraphe 30 de l’arrêt Lemire :

C’est à bon droit que le juge de la CCI a analysé la relation entre les parties en fonction du droit civil et qu’il a refusé de donner effet à la décision de notre Cour dans Livingston. En effet, la règle énoncée dans cette affaire est issue de la common law, et le juge de la CCI devait rendre sa décision en fonction du droit civil. Sous l’angle du droit civil, il est clair que les sommes déposées dans le compte de l’intimée sont demeurées celles de monsieur Dupuis. Il est aussi clair que le droit de retrait que s’était vu conféré l’intimée n’avait aucune valeur compte tenu de l’obligation qu’elle avait de remettre les sommes à ce dernier. Il s’ensuit qu’aucun transfert de bien n’a eu lieu aux fins du paragraphe 160(1). J’adopte à cet égard le raisonnement de notre Cour dans Sa Majesté la Reine c. 9101‑2310 Québec Inc., 2013 CAF 241, aux paragraphes 42 à 63.

[24]        Malheureusement, le concept du mandat n’existe pas en common law, soit le droit applicable en Colombie‑Britannique. Dans un mandat, il n’y a pas de retranchement de la propriété de biens. Aux paragraphes 42 à 49 inclusivement de l’arrêt 9101, le juge Noлl s’est penché sur les concepts de la propriété en droit civil et en common law. Ces jurisprudences ne sont d’aucune utilité pour l’appelante, qui réside en Colombie‑Britannique.

[25]        À la lecture du paragraphe 160(1), il est évident que l’intention du législateur était d’empêcher l’auteur d’un transfert devant de l’argent à l’État de cacher ses biens à l’État. C’est ce à quoi les juges Sexton et Noлl font référence dans leurs motifs.

[26]        La juge Sharlow a défini le poids du paragraphe 160(1) au paragraphe 3 de l’arrêt Wannan c. Canada[6] :

L’article 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu est un instrument important de recouvrement des impôts, parce qu’il contrarie les tentatives d’un contribuable de mettre de l’argent ou d’autres biens hors de la portée du fisc en les transférant censément à des amis. C’est cependant une disposition draconienne. Les recours à l’article 160 ne sont pas tous injustifiés ou injustes, mais un résultat inique est toujours possible. Il n’existe pas de défense de diligence raisonnable à l’encontre de l’application de l’article 160. Cet article peut s’appliquer au cessionnaire de biens qui n’a pas l’intention d’aider le débiteur fiscal primaire à se soustraire à l’impôt. Il peut même s’appliquer au cessionnaire qui n’a pas connaissance de la situation fiscale du débiteur fiscal primaire. Cependant, l’article 160 a été validement promulgué comme partie des lois du Canada. Si la Couronne entend se fonder sur l’article 160 dans un cas donné, elle doit être autorisée à le faire pour autant que les conditions prévues soient remplies.

[27]        Dans la décision Woodland c. Canada[7], la juge Campbell s’est exprimée en ces termes au paragraphe 27 :

Toutefois, il n’existe aucune mention d’« l’intention » dans ce texte. Les jurisprudences Livingston et Wannan de la Cour d’appel fédérale enseignent que l’application du paragraphe 160(1) n’exige pas l’intention de frustrer les créanciers. Au paragraphe 3 de l’arrêt Wannan, il est souligné clairement que la diligence raisonnable à [sic] n’est pas un moyen de défense que l’on peut opposer à la cotisation établie en application du paragraphe 160(1) et que ce texte peut s’appliquer au bénéficiaire « qui n’a pas l’intention d’aider le débiteur fiscal primaire à se soustraire à l’impôt » et « qui n’a pas connaissance de la situation fiscale du débiteur fiscal primaire ».

[28]        Mme McDonald savait pertinemment que M. Chapman avait des [traduction] « problèmes » avec l’ARC et elle a ouvert un compte bancaire à son seul nom pour y déposer l’argent de M. Chapman, dans l’objectif d’aider celui‑ci à cacher des sommes à l’ARC. À titre de titulaire du compte bancaire, elle contrôlait les dépôts et les retraits. La possibilité qu’elle ait gardé les fonds en fiducie pour M. Chapman de l’aide pas; le paragraphe 160(1) est assez clair à cet égard. Comme la thèse selon laquelle elle aurait gardé les fonds à titre mandataire de M. Chapman n’a pas été plaidé, il ne fait pas partie de la preuve. Lorsque Mme McDonald a reçu les transferts, M. Chapman devait de l’impôt au titre de la Loi. Il a endossé un certain nombre de chèques qu’il a remis à Mme McDonald afin qu’elle les dépose dans son propre compte. M. Chapman et Mme McDonald étaient conjoints de fait à l’époque, celle‑ci connaissait les [traduction] « problèmes » de M. Chapman avec le fisc et elle n’a donné aucune contrepartie à M. Chapman pour les fonds.

[29]        Par conséquent, l’appel est rejeté avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de mars 2015.

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de juillet 2015.

François Brunet, réviseur.


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 73

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2013‑1264(IT)G

INTITULÉ :

Caroline M. McDonald c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie‑Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 9 mars 2015

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Gerald J. Rip

DATE DU JUGEMENT :

Le 30 mars 2015

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelante :

Me Harald Mattson

 

Avocat de l’intimée :

Me Max Matas

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

Harald Mattson, avocat

Kitchener (Ontario)

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1]           [1948] Ex.C.R. 580; 49 D.T.C. 491, à la page 497.

[2]           2008 CAF 89.

[3]           2007 CCI 303.

[4]           91012310 Québec Inc. c. Canada (« 9101 »), [2012] A.C.I. no 299 (QL), [2013] A.C.F. no 1128 (QL), 2013 CAF 241, 2013 D.T.C. 5170 (Fr), 2013 D.T.C. 5172 (Eng.).

[5]           Lemire c. Canada, 2012 D.T.C. 1302 (Fr.), 2013 D.T.C. 1065 (Eng.) (C.C.I.), 2013 CAF 242, 2013 CAF 242, 2013 D.T.C. 242 (Fr.), 2013 D.T.C. 5171 (Eng.).

[6]           [2003] A.C.F. no 1693 (QL), 2003 CAF 423.

[7]           [2009] A.C.I. no 350 (QL), 2009 CCI 434.

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