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Dossier : 2012‑1087(IT)G

ENTRE :

BIRCHCLIFF ENERGY LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu les 18, 19, 20 et 21 novembre 2013,

à Calgary (Alberta)

Jugement rendu par : L’honorable juge Robert J. Hogan


Comparutions :

Avocats de l’appelante :

Me Patrick Lindsay

Me Jean‑Philippe Couture

Avocats de l’intimée :

Me Robert Carvalho

Me Neva Beckie

Me Jonathan Wittig

JUGEMENT

L’appel interjeté de la nouvelle cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2006 est rejeté avec dépens, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour d’octobre 2015.

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de mai 2016.

François Brunet, réviseur


Référence : 2015 CCI 232

Date : 20151001

Dossier : 2012‑1087(IT)G

ENTRE :

BIRCHCLIFF ENERGY LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE JUGEMENT

Le juge Hogan

I. Aperçu

[1]             Birchcliff Energy Ltd. (l’« appelante ») interjette appel d’une nouvelle cotisation que le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établie pour l’année d’imposition 2006 de l’appelante. Le présent appel découle d’un différend au sujet du refus par le ministre d’une déduction de 16 226 489 $ que l’appelante a demandée au titre de pertes autres que des pertes en capital pour son année d’imposition 2006 dans les circonstances exposées ci‑dessous. Les pertes ont été subies par une société remplacée, Veracel Inc. (« Veracel »), qui a fusionné avec Birchcliff Energy Ltd. (« Birchcliff ») pour former l’appelante, laquelle mesure constituait la dernière étape d’une série d’opérations complexes (les « opérations de fusion ») mises en œuvre conformément aux conditions d’un plan d’arrangement approuvé par le tribunal.

[2]             Au soutien de la nouvelle cotisation, l’intimée fait valoir que le contrôle de Veracel a été acquis par une personne ou un « groupe de personnes » lors de sa fusion avec Birchcliff ou immédiatement avant celle‑ci. En conséquence, l’appelante ne peut pas utiliser les pertes en raison des restrictions (les « restrictions relatives au transfert des pertes ») énoncées au paragraphe 111(5) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), parce qu’elle n’exploitait pas l’entreprise qui a généré les pertes de Veracel. Subsidiairement, l’intimée soutient que l’appelante a contourné de manière abusive les restrictions relatives au transfert des pertes en évitant une règle spéciale selon laquelle le contrôle est réputé avoir été acquis, de sorte que la règle générale anti‑évitement de l’article 245 de la Loi (la « RGAÉ ») joue de manière similaire aux restrictions relatives au transfert des pertes.

[3]             Bien que le présent appel ait d’abord été instruit par le juge Jorré, de la Cour canadienne de l’impôt, avec le consentement des deux parties, c’est moi qui trancherai l’appel en me fondant sur la transcription et le dossier[1].

II. Faits et procédures

[4]             Les faits sont énoncés pour l’essentiel dans l’exposé conjoint partiel des faits, dont voici le texte :

[traduction]

Aux fins de la détermination des questions en litige aux présentes, les parties conviennent que les faits suivants peuvent être tenus pour avérés sans qu’il soit nécessaire d’en rapporter la preuve. Les nombres entre crochets renvoient à l’onglet correspondant de la liste conjointe de documents.

Veracel

1.      Veracel Inc. (« Veracel ») a été constituée en société le 10 août 1994, sous le nom de Morphometric Technologies Inc., sous le régime de la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario.

2.      L’activité de Veracel consistait en la conception, la fabrication et la commercialisation d’instruments de diagnostic automatisés pour des applications médicales (l’« entreprise médicale »).

3.      En avril 2001, la société a changé de nom pour celui de Veracel.

4.      Le 15 novembre 2002, Veracel a déposé, sous le régime de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, une proposition qui a été acceptée par la Cour supérieure de justice de l’Ontario [2]. Le 19 novembre 2003, le syndic a attesté que Veracel avait entièrement exécuté la proposition.

5.      Veracel a mis fin aux activités de son entreprise médicale en 2002. Nul revenu provenant de l’entreprise médicale n’a été gagné après 2002.

6.      En février 2004, Veracel a sollicité des propositions relativement à ses attributs fiscaux existants [4]. Peu après, Veracel a commencé à travailler avec David Tonken et Greg Matthews.

7.      Le 5 novembre 2004, Veracel, David Tonken, Greg Matthews et Emerging Equities Inc. ont signé une lettre d’entente relativement à une opération proposée [5]. L’opération proposée n’a pas été achevée.

8.      À la fin de 2004, Veracel possédait les attributs fiscaux suivants : des pertes autres que des pertes en capital de 16 226 489 $; des dépenses de 15 558 003 $ au titre d’activités de recherche scientifique et de développement expérimental et des crédits d’impôt à l’investissement de 1 874 979 $ (les « attributs fiscaux »).

9.      Au 31 décembre 2004, les actions émises et en circulation de Veracel se composaient de 10 280 461 actions ordinaires et de 7 299 424 actions privilégiées de catégorie A [9; 44, pièce B].

10.    Les titulaires d’actions privilégiées de catégorie A avaient le droit de recevoir les avis d’assemblées, d’assister aux assemblées en question et d’y voter à raison d’un vote par action avec les titulaires d’actions ordinaires [64].

11.    Les actionnaires de Veracel comprenaient la Banque de développement du Canada, la Société de développement de l’Ontario, AGF et HSBC [44, pièce B].

Birchcliff

12.    Le 6 juillet 2004, Birchcliff a été constituée en société sous le nom de 1116463 Alberta Ltd. Le 10 septembre 2004, cette société a changé son nom pour Birchcliff Energy Ltd.

13.    Le 18 janvier 2005, Scout Capital Corp. (« Scout »), société cotée en bourse, a fusionné avec la société qui portait alors le nom de Birchcliff Energy Ltd. (la « fusion de Scout »). La société fusionnée a adopté le nom de Birchcliff Energy Ltd. (« Birchcliff »). Lorsque Birchcliff et Veracel ont fusionné le 31 mai 2005, tel qu’il est mentionné ci‑dessous, cette société fusionnée a également adopté le nom de Birchcliff Energy Ltd. (la « société issue de la fusion »).

14.    Le 19 janvier 2005, les actions ordinaires de cette société nouvellement fusionnée ont été inscrites à la cote de la Bourse de croissance TSX sous le symbole « BIR ».

15.    Dans le cadre de la fusion de Scout, qui a été réalisée conformément à un plan d’arrangement approuvé par le tribunal, des reçus de souscription ont été remis [11].

16.    David Tonken a été le président et chef de la direction de Scout de 1998 à 2002.

17.    David Tonken est le frère de Jeff Tonken, ainsi que le président et chef de la direction de Birchcliff et de la société issue de la fusion.

Achat de premiers biens relatifs au pétrole et au gaz

18.    Le 14 février 2005, Birchcliff a signé une lettre d’entente visant l’achat de biens situés dans la région de Peace River Arch, en Alberta, pour la somme de 2,75 millions de dollars.

19.    La clôture de cet achat a eu lieu le 5 mai 2005.

Entente visant l’achat de biens importants relatifs au pétrole et au gaz

20.    Le 9 mars 2005, Birchcliff a signé une lettre d’entente relativement à l’achat de biens relatifs au pétrole et au gaz naturel dans la région de Peace River Arch, en Alberta, pour la somme 255 millions de dollars (les « biens de Devon ») [14]. Le contrat d’achat connexe a été signé le 29 mars 2005 et le prix d’achat s’élevait à 243 millions de dollars.

21.    La clôture de l’acquisition des biens de Devon devait avoir lieu au plus tard le 31 mai 2005.

22.    Afin de financer l’acquisition des biens de Devon, Birchcliff a approché plusieurs institutions financières, dont Scotia Capitaux.

23.    Le 29 mai 2005, Birchcliff et Scotia Capitaux ont signé une lettre d’engagement par laquelle Scotia Capitaux s’engageait à financer l’acquisition des biens de Devon au moyen d’un prêt renouvelable de 70 millions de dollars et d’un prêt‑relais de 149 millions de dollars [21]. Le montant du prêt‑relais n’a jamais été avancé.

24.    KPMG a préparé, à l’égard des biens de Devon, un relevé des revenus et dépenses montrant qu’en 2004, ces biens avaient généré des revenus de plus de 85 millions de dollars, ce qui avait donné lieu à un profit net de plus de 50 millions de dollars après le paiement des redevances et des dépenses d’exploitation. [10].

Signature d’une lettre d’entente par Veracel et Birchcliff

25.    David Tonken a réuni Veracel et Birchcliff en vue d’une éventuelle opération. Il a joint Jim Surbey chez Birchcliff et a discuté de la situation de Veracel avec lui [132, 133].

26.    Le 18 mars 2005, les administrateurs de Birchcliff ont approuvé la signature d’un contrat d’achat à l’égard des biens de Devon, ainsi qu’un projet d’entente relative à un arrangement avec Veracel [19].

27.    Dans le cadre des négociations entre Veracel et Birchcliff, des projets d’entente ont été échangés, ainsi que des révisions de ces documents, dans des lettres datées des 21, 23 et 29 mars 2005.

28.    Le 29 mars 2005, Birchcliff a annoncé, dans un communiqué de presse, qu’elle avait conclu une entente prévoyant l’achat des biens de Devon pour une somme d’environ 240 millions de dollars. Le communiqué de presse comportait une énumération des biens ainsi qu’une mention du fait que l’opération devait être achevée au plus tard le 31 mai 2005 [25].

29.    John Anderson, de Veracel, a envoyé aux actionnaires de celle‑ci une lettre datée du 29 mars 2005 au sujet de la « réorganisation de Veracel Inc. » [24].

30.    Le 1er avril 2005, Birchcliff et Veracel ont signé une lettre d’entente [27].

31.    Le 3 avril 2005, Birchcliff a publié un communiqué de presse annonçant que Veracel et elle‑même avaient signé la lettre d’entente [39].

32.    Le 4 avril 2005, le nouveau financement proposé dans la lettre d’entente était commercialisé [34].

Étapes de la mise en œuvre de la lettre d’entente

33.    Le 12 avril 2005, Olympia Trust Company (« Olympia »), qui intervenait pour le compte de Birchcliff, a avisé la Bourse de croissance TSX et les commissions des valeurs mobilières de la Colombie‑Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, de l’Ontario et de la Nouvelle‑Écosse que l’assemblée annuelle et extraordinaire devait avoir lieu le 24 mai 2005.

34.    Le 14 avril 2005, GMP Securities Ltd. a signé une lettre d’offre à l’intention de Veracel en ce qui concerne le placement de reçus de souscription [32].

35.    Le 14 avril 2005, la convention de placement conclue entre Veracel et GMP Securities Ltd., à titre de principal souscripteur, Sprott Securities Inc. et Scotia Capitaux Inc. (collectivement, les « souscripteurs »), qui concernait un financement par capitaux propres pouvant atteindre 136 000 000 $ ainsi qu’un autre financement accréditif distinct de 10 000 000 $, est entrée en vigueur [42].

36.    Le 18 avril 2005, Veracel et Birchcliff ont signé l’entente relative à l’arrangement. Le plan d’arrangement est joint à cette entente comme pièce A [44].

37.    En avril 2005, Veracel a obtenu l’autorisation des actionnaires afin de donner suite à l’entente relative à l’arrangement [40].

Avis et approbations

38.    Le 18 avril 2005, Birchcliff a avisé la Bourse de croissance TSX au sujet des opérations proposées [45].

39.    Le 18 avril 2005, Veracel a avisé les actionnaires de la tenue d’une assemblée extraordinaire concernant les opérations proposées [46].

40.    Le 19 avril 2005, Birchcliff a informé l’Alberta Securities Commission (« ASC ») que son avocat se présenterait devant la Cour de l’Alberta le 22 avril 2005 afin de solliciter une ordonnance provisoire concernant le plan d’arrangement.

41.    Le 21 avril 2005, les administrateurs de Veracel ont approuvé l’entente relative à l’arrangement, le placement privé, le « nouveau financement par capitaux propres » et d’autres questions [47].

42.    Le 21 avril 2005, les administrateurs de Birchcliff ont approuvé la circulaire d’information et d’autres questions [48].

43.    Le 21 avril 2005, conformément à l’entente relative à l’arrangement, Birchcliff a déposé auprès de la Cour de l’Alberta une requête en ordonnance provisoire exigeant la convocation d’une assemblée d’actionnaires pour la tenue du vote au sujet de l’arrangement proposé [49]. Un affidavit de Jim Surbey a été déposé relativement à cette requête [52].

44.    Le 21 avril 2005, un document de décision du Régime d’examen concerté (REC) a été établi [50].

45.    Le 22 avril 2005, la Cour de l’Alberta a rendu l’ordonnance provisoire.

46.    La copie de l’ordonnance provisoire et de documents connexes a été transmise à l’ASC au moyen d’une lettre datée du 22 avril 2005.

47.    Le 22 avril 2005, la circulaire d’information a été publiée [51].

48.    Un administrateur d’Olympia a déclaré, le 5 mai 2005, que la circulaire d’information et une procuration avaient été postées à chacun des actionnaires de Birchcliff le 26 avril 2005, et la confirmation de ce fait a été transmise à la Bourse de croissance TSX et aux commissions des valeurs mobilières de la Colombie‑Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan et de l’Ontario.

49.    Le 25 avril 2005, un communiqué de presse annonçant que les souscripteurs avaient exercé leur option de vendre les 8 millions de reçus de souscription supplémentaires de Veracel afin de porter le financement par capitaux propres jusqu’à 136 000 000 $ a été publié [54]. La confirmation de cette opération par les souscripteurs a été publiée le 4 mai 2005 [68].

50.    Le 26 avril 2005, Birchcliff a envoyé une lettre au Comitttee on Uniform Security Identification Procedures (« CUSIP ») afin de lui demander d’approuver un nouveau numéro CUSIP à l’égard des nouvelles actions ordinaires de la société issue de la fusion qui seraient émises en échange d’actions de Veracel et de Birchcliff lors de la fusion.

51.    Le nouveau numéro CUSIP a été attribué le 2 mai 2005. Un modèle de certificat d’action ordinaire de la société issue de la fusion comportant le nouveau numéro CUSIP et un modèle de certificat d’action privilégiée de série 1 de la société issue de la fusion ont été préparés le 20 mai 2005.

Approbations supplémentaires données par Veracel

52.    Le 29 avril 2005, les actionnaires et les investisseurs de Veracel se sont réunis et ont adopté les résolutions suivantes [56] :

a.       élire Robert Allan, John Anderson et David Tonken à titre d’administrateurs;

b.      émettre 3 775 000 [actions ordinaires] à David Tonken ainsi qu’à Greg Matthews, pourvu que l’arrangement soit conclu (le « placement privé »);

c.       modifier, puis résilier la convention unanime des actionnaires;

d.      autoriser la lettre d’entente avec Birchcliff;

e.       approuver la modification des statuts constitutifs afin de créer des actions ordinaires de catégorie B;

f.       transférer tous les éléments d’actif à la nouvelle société en échange d’actions de la nouvelle société, puis distribuer ces actions aux actionnaires de Veracel;

g.      transférer la société en Alberta;

h.      autoriser l’entente relative à l’arrangement avec Birchcliff;

i.       autoriser le « nouveau financement par capitaux propres »;

j.       renoncer aux droits, privilèges et conditions rattachés aux actions privilégiées de catégorie A.

53.    Le 29 avril 2005, les administrateurs de Veracel ont adopté les résolutions suivantes [55] :

a.       approuver la lettre d’entente et l’arrangement avec Birchcliff;

b.      transférer tous les éléments d’actif à la nouvelle société en échange d’actions de la nouvelle société, puis distribuer ces actions aux actionnaires de Veracel;

c.       autoriser David Tonken et John Anderson à mettre en œuvre l’arrangement;

d.      émettre 3 775 000 [actions ordinaires] à David Tonken ainsi qu’à Greg Matthews;

e.      autoriser le « nouveau financement par capitaux propres ».

54.    Le 29 avril 2005, Veracel a déposé des statuts de modification des statuts afin de permettre l’émission d’actions ordinaires de catégorie B;

55.    Le 29 avril 2005, des certificats d’actions de Veracel représentant 3 775 000 [actions ordinaires] ont été émis en faveur de David Tonken et de Greg Matthews conformément au placement privé [57].

56.    Le 2 mai 2005, Veracel a été transférée de l’Ontario en Alberta [64].

Financement pour obtenir une somme de 136 000 000 $

57.    Le 2 mai 2005, Veracel a rempli le « questionnaire sur la diligence raisonnable » pour les souscripteurs au sujet de l’opération conclue avec Birchcliff [61].

58.    Le 2 mai 2005, Birchcliff a rempli le « questionnaire sur la diligence raisonnable » pour les souscripteurs au sujet de l’opération conclue avec Veracel [62].

59.    Le 4 mai 2005, l’acte d’émission des reçus de souscription conclu entre Veracel, les souscripteurs et Olympia est entré en vigueur [69].

60.    Le 4 mai 2005, l’accord de représentation conclu entre Birchcliff et les souscripteurs est entré en vigueur [70].

61.    Selon une note de service délivrée au sujet du transfert de 130 500 000 $ que les souscripteurs recevraient en contrepartie de la vente de 32 625 000 reçus de souscription, une fois que toutes les parties et les avocats auraient convenu que les documents de clôture avaient été déposés, cette somme serait transférée par virement électronique du compte des souscripteurs à celui d’Olympia [73]. L’autre partie, soit la somme de 5 500 000 $, serait versée par les souscripteurs figurant sur la liste du président [67].

62.    Le 4 mai 2005, le financement des reçus de souscription a été conclu et 34 000 000 reçus de souscription ont été remis à 133 investisseurs [111].

63.    Le 4 mai 2005, la clôture du financement de 136 000 000 $ a été annoncée [71].

64.    Chacun des 133 investisseurs a signé une entente relative aux reçus de souscription [60, 80, 81] et s’est vu remettre un reçu de souscription [58, 66, 77, 78, 82].

65.    Le 4 mai 2005, conformément à un ordre de trésorerie, Veracel a demandé à Olympia de remettre les reçus de souscription [74].

66.    Le 4 mai 2005, Veracel et Olympia ont reconnu que celle‑ci avait reçu une somme globale de 136 000 000 $ des souscripteurs (130 500 000 $) et des souscripteurs figurant sur la liste du président (5 500 000 $) [75, 76, 79].

Approbations supplémentaires données par Birchcliff

67.    Le 10 mai 2005, les titulaires de bons de souscription d’actions et d’options d’achat d’actions de Birchcliff ont approuvé l’arrangement et l’entente relative à l’arrangement [84, 85].

68.    Le 16 mai 2005, Birchcliff a avisé l’ASC que Birchcliff avait l’intention de présenter à la Cour, le 24 mai 2005, une demande en ordonnance définitive.

69.    Le 24 mai 2005, l’assemblée d’actionnaires de Birchcliff a eu lieu et, en qualité de scrutatrice, Olympia a établi un rapport selon lequel les titulaires de plus de 50 % des actions en circulation de Birchcliff avaient assisté à l’assemblée en personne ou par fondé de pouvoir et selon lequel 100 % des 54 voix exprimées étaient en faveur de la fusion et de l’acquisition des biens de Devon.

Mise au point du plan d’arrangement et questions connexes

70.    Le 24 mai 2005, un affidavit a été signé à l’appui de l’ordonnance définitive [90].

71.    Le 24 mai 2005, la Cour a approuvé l’ordonnance définitive, qui portait que l’arrangement était autorisé et entrerait en vigueur conformément à ses dispositions et qu’il lierait toutes les personnes concernées dès le dépôt des clauses d’arrangement. Une copie de l’ordonnance a été transmise à l’ASC.

72.    Le 25 mai 2005, les administrateurs de Veracel ont approuvé la forme et la répartition des actions ordinaires de catégorie B de Veracel et d’autres questions [91].

73.    Le 25 mai 2005, Veracel et les souscripteurs ont demandé à Olympia de déposer la somme de 136 000 000 $ dans le compte de celle‑ci à la Banque de Nouvelle‑Écosse [92].

74.    Le 30 mai 2005, les administrateurs de Birchcliff ont approuvé le dépôt de statuts de modification afin de créer les actions privilégiées de série 1 portant la même date [95].

75.    Le 30 mai 2005, les statuts de modification prévoyant la création d’actions privilégiées de série 1 ont été déposés et le registraire des sociétés de l’Alberta (le « registraire ») a délivré un certificat de modification [96].

76.    Les actions privilégiées de série 1 devaient être rachetées à un prix égal à 1 500 000 $, déduction faite de certaines dettes, divisé par le nombre total d’actions ordinaires de Veracel et d’actions privilégiées de catégorie A de Veracel en circulation avant le dépôt des clauses d’arrangement [96].

77.    Le 30 mai 2005, la convention de dépositaire conclue entre Veracel et Olympia est entrée en vigueur [97].

78.    Veracel et Birchcliff ont confirmé conjointement pour Olympia que le prix de rachat des actions privilégiées de série 1 de la société issue de la fusion s’élevait à 0,05969 $ et que le rapport d’échange d’actions pour chaque titulaire d’actions ordinaires de Veracel et d’actions privilégiées de catégorie A de Veracel ayant choisi de recevoir des actions ordinaires de la société issue de la fusion serait de 1:0,01492 [114].

79.    Les actionnaires de Veracel ont fait parvenir des lettres d’envoi afin de préciser s’ils choisissaient de recevoir des actions ordinaires de la société issue de la fusion ou des actions privilégiées de série 1 de la société issue de la fusion [94].

80.    Le 31 mai 2005, Veracel et les souscripteurs ont fait parvenir le document intitulé « Transaction Notice and Direction » (avis d’opération et directives) qu’Olympia a reçu [102, 103].

81.    Le 31 mai 2005, Birchcliff a délivré un certificat dont Olympia a accusé réception et dans lequel Birchcliff a confirmé que, à la clôture des activités le 30 mai 2005, le capital‑actions de Birchcliff se composait encore de 20 248 337 actions ordinaires.

82.    Le 31 mai 2005, Veracel a délivré un certificat confirmant que les actions émises et en circulation de Veracel se composaient encore de 17 830 461 actions ordinaires et de 7 299 424 actions privilégiées de catégorie A, soit un total de 25 129 885 actions en circulation [108].

83.    Le 31 mai 2005, Veracel et Birchcliff ont déposé les clauses d’arrangement et le registraire a confirmé ces dépôts.

84.    Le 31 mai 2005, Gordon Cameron, Werner Siemens, Larry Shaw et Jeffery Tonken ont signé des documents par lesquels ils consentaient à agir en qualité d’administrateurs de la société issue de la fusion.

85.    Le 31 mai 2005, John Anderson, Robert Allan et David Tonken ont démissionné de leurs postes d’administrateurs et de dirigeants de Veracel et ont signé, ainsi que Veracel, des décharges mutuelles qui sont entrées en vigueur le même jour [107, 109, 110].

86.    Le 31 mai 2005, Olympia a accusé réception de l’ordre de trésorerie [116, 117].

87.    Le 31 mai 2005, les souscripteurs ont reçu le paiement de leurs honoraires de 6 580 475 $ et ont accusé réception de ce paiement, conformément à l’entente qu’ils avaient conclue avec Veracel [99].

88.    Le 31 mai 2005, Olympia a reçu 1 031 884,87 $, soit le prix de rachat des actions privilégiées de série 1 en circulation de la société issue de la fusion [100].

89.    Le 31 mai 2005, la société issue de la fusion a déposé les clauses d’arrangement [115], l’ordonnance définitive, le plan d’arrangement et les statuts de fusion auprès de la Bourse de croissance TSX et des commissions des valeurs mobilières de la Colombie‑Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, de l’Ontario et du Québec.

90.    Le 3 juin 2005, la société issue de la fusion a publié un communiqué de presse dans lequel elle a annoncé qu’elle avait achevé le financement accréditif [122].

91.    Le 3 juin 2005, la société issue de la fusion a publié un bulletin de la Bourse de croissance TSX afin d’annoncer que des actions de la société issue de la fusion étaient émises en échange d’actions de Veracel et de Birchcliff et de préciser que les actions ordinaires de la société issue de la fusion seraient cotées à la Bourse de croissance TSX à compter du 6 juin 2005 [123].

Nouvelle cotisation et questions connexes

92.    L’appelante a demandé une partie des attributs fiscaux pour son année d’imposition 2006.

93.    Dans un avis de nouvelle cotisation daté du 30 novembre 2011, le ministre a établi une nouvelle cotisation à l’encontre de Birchcliff afin refuser la déduction de 16 226 489 $ au titre de pertes autres que des pertes en capital (la « nouvelle cotisation ») qui avait été demandée pour l’année d’imposition 2006.

94.    La nouvelle cotisation était fondée sur des hypothèses liées aux allégations de trompe‑l’œil et d’acquisition de contrôle. Elle n’était pas fondée sur la RGAÉ.

95.    L’appelante a déposé un avis d’opposition daté du 2 décembre 2011.

96.    Dans un avis d’appel déposé le 13 mars 2012, l’appelante a interjeté appel de la nouvelle cotisation relative à l’année d’imposition 2006 devant la Cour canadienne de l’impôt.

[5]             Sauf indication contraire, tous les mots définis employés aux présentes ont le sens qui leur est donné dans l’exposé conjoint partiel des faits.

[6]             L’exposé sommaire des opérations qui figure dans l’exposé conjoint partiel des faits ne sera pas utile si le contexte général des opérations en question n’est pas bien compris. À cet égard, l’appelante et l’intimée brossent un tableau très différent des circonstances et des objectifs sous‑jacents aux opérations qui ont mené à la fusion de Veracel et de Birchcliff. La thèse de chacune des parties au sujet du contexte factuel est résumée ci‑dessous.

III. Thèse de l’intimée

[7]             L’intimée signale qu’il n’est pas controversé entre les parties que Veracel était une société inactive qui avait accumulé un montant élevé de pertes autres que des pertes en capital, de dépenses au titre d’activités de recherche scientifique et de développement expérimental et de crédits d’impôt à l’investissement (les « attributs fiscaux ») de l’entreprise médicale qu’elle avait précédemment exploitée. Il ressort des preuves que Veracel a envoyé une demande de proposition en vue de vendre ses attributs fiscaux au profit de ses actionnaires existants. L’intimée soutient qu’au début de 2004, David Tonken et son associé, Greg Matthews, ont été retenus à titre de conseillers de Veracel afin de commercialiser les attributs fiscaux.

[8]             David Tonken et Greg Matthews étaient les administrateurs délégués de Cavalon Capital Partners Ltd. (« Cavalon »). L’intimée affirme que Cavalon se spécialisait dans la monétisation de pertes fiscales.

[9]             David Tonken a recherché des associés éventuels qui pourraient souhaiter faire l’acquisition des attributs fiscaux de Veracel. Il a organisé une première opération avec Emerging Equities Inc. (« EEI »), mais cette opération n’a finalement pas été conclue. David Tonken a ensuite joint Jim Surbey, le vice‑président de l’expansion et secrétaire général de Birchcliff, afin de l’informer des attributs fiscaux de Veracel et de l’intention de celle‑ci d’offrir les attributs en question à une société rentable[2].

[10]        Birchcliff, l’autre société remplacée lors de la fusion, était une entité publique qui avait conclu une entente en vue de faire l’acquisition des biens de Devon. À l’époque, elle était déjà en bonne voie d’établir son entreprise pétrolière et gazière. Avant la fusion, Birchcliff avait obtenu un engagement relatif au financement de l’acquisition des biens de Devon, notamment au moyen du prêt‑relais. Birchcliff n’avait pas l’intention d’utiliser le prêt‑relais. Elle voulait plutôt réunir des capitaux ou se servir du produit du financement par capitaux propres pour rembourser le prêt‑relais si l’acquisition des biens de Devon devait avoir lieu avant la clôture du financement par capitaux propres.

[11]        L’intimée fait valoir que David Tonken savait très bien comment mettre en œuvre une opération permettant d’utiliser des pertes fiscales. L’acquisition directe des actions émises et en circulation de Veracel par Birchcliff ne constituait pas une option, parce qu’elle donnerait lieu à une acquisition du contrôle de Veracel. Les restrictions relatives au transfert des pertes auraient donc empêché l’appelante d’utiliser les pertes autres que les pertes en capital de Veracel, parce que l’appelante n’exploitait pas l’entreprise médicale ayant généré les pertes en question dans une attente raisonnable de profit.

[12]        L’intimée ajoute que, si Birchcliff et Veracel avaient simplement fusionné sans que d’autres mesures de planification fiscale aient été prises, Veracel aurait été réputée, en raison de la règle déterminative spéciale énoncée au sous‑alinéa 256(7)b)(iii) de la Loi, avoir fait l’objet d’une acquisition de contrôle avant la fusion.

[13]        L’intimée soutient qu’un montage fiscal élaboré visant à surmonter cet obstacle a été conçu et a mené à la fusion de Veracel et de Birchcliff. De l’avis de l’intimée, la règle déterminative énoncée au sous‑alinéa 256(7)b)(iii), selon laquelle le contrôle d’une société remplacée donnée est réputé avoir été acquis lors d’une fusion, ne joue pas lorsque les actionnaires de cette société reçoivent ensemble une majorité des actions avec droit de votre de l’entité fusionnée (le « critère de la participation majoritaire ») comme contrepartie en échange de leurs actions dans la société remplacée[3]. Selon l’intimée, c’est à cette étape qu’une planification fiscale astucieuse, mais néanmoins inefficace a eu lieu. Afin qu’il soit possible d’éviter l’acquisition du contrôle de Veracel, les opérations de fusion ont été mises en œuvre de façon à permettre à l’appelante de soutenir, du moins sur papier, que les actionnaires de Veracel avaient reçu une majorité des actions avec droit de vote de l’appelante. À cette fin, le financement par capitaux propres dont Birchcliff avait besoin pour acquérir les biens de Devon a été organisé par l’entremise de Veracel, avec l’aide des représentants de Birchcliff. Un plan d’entreprise de Birchcliff a ensuite été présenté aux nouveaux investisseurs (les « nouveaux investisseurs »)[4], qui ont investi en se fondant sur la solidité de l’entreprise de Birchcliff. Conformément au montage fiscal, c’est Veracel plutôt que Birchcliff qui a remis les reçus de souscription aux nouveaux investisseurs. Ces reçus ont ensuite été échangés contre des actions ordinaires de catégorie B de Veracel (les « actions de catégorie B ») immédiatement avant la fusion de celle‑ci avec Birchcliff. Les actions de catégorie B ont ensuite été échangées contre des actions ordinaires de l’appelante dès la fusion. Étant donné que les nouveaux investisseurs voulaient avoir l’assurance qu’ils détiendraient des actions dans la société qui exploitait l’entreprise pétrolière et gazière, les opérations de fusion ont été effectuées par ordre séquentiel conformément aux modalités d’un plan d’arrangement approuvé par le tribunal et mis en œuvre uniquement après que toutes les approbations relatives aux valeurs mobilières et les autres approbations eurent été obtenues. Aux termes du plan d’arrangement, les nouveaux investisseurs sont devenus des actionnaires de Veracel pendant un moment fugace.

[14]        L’intimée soutient énergiquement que l’appelante n’a pas réussi à éviter l’application des restrictions relatives au transfert des pertes, parce que l’émission des actions de catégorie B par Veracel immédiatement avant la fusion était un trompe‑l’œil. À cet égard, l’intimée soutient que les parties aux opérations ayant abouti à la fusion ne voulaient pas que les nouveaux investisseurs acquièrent des droits d’actionnaire dans Veracel. En conséquence, les actions de catégorie B doivent être ignorées. Dans ces circonstances, la fusion a donné lieu à une acquisition de contrôle de Veracel, parce que les actionnaires de celle‑ci n’ont pas reçu d’actions représentant une participation majoritaire dans l’appelante.

[15]        Subsidiairement, si la Cour conclut que la théorie du trompe‑l’œil ne joue pas et que, par conséquent, les actions de catégorie B ont effectivement été émises, l’intimée fait valoir qu’il y a néanmoins eu acquisition du contrôle de Veracel, parce que les nouveaux investisseurs constituaient un « groupe de personnes » qui a acquis le contrôle de Veracel immédiatement avant la fusion de celle‑ci avec Birchcliff.

[16]        Enfin, subsidiairement, l’intimée soutient que la RGAÉ joue de façon à l’emporter sur les opérations de fusion qui visaient à éviter une acquisition du contrôle de Veracel. Le moyen tiré de la RGAÉ n’a été soulevé qu’après que le ministre eut ratifié la nouvelle cotisation.

IV. Thèse de l’appelante

[17]        Se fondant principalement sur le témoignage de David Tonken et de Jim Surbey, l’appelante allègue que la mission de David Tonken et de Greg Matthews ne se limitait pas à la monétisation des attributs fiscaux de Veracel. Elle comprenait également la mise en œuvre d’une opération de « relance » dans le cadre de laquelle Veracel réunirait de nouveaux capitaux afin d’exploiter une nouvelle possibilité commerciale. Étant donné que les capitaux ont été obtenus d’un grand nombre d’investisseurs non liés entre eux qui intervenaient de manière indépendante, il n’y a pas eu d’acquisition du contrôle de Veracel. Il est ainsi supposé que c’est par pur hasard que le plan de relance de Veracel, qui, d’après l’appelante, a été conçu avant la première réunion de David Tonken avec les cadres de Birchcliff, faisait écho à l’intention de celle‑ci de réunir de nouveaux capitaux pour acquérir les biens de Devon.

[18]        En se fondant sur cet ensemble de faits, l’appelante soutient que l’émission des actions de catégorie B par Veracel en faveur des nouveaux investisseurs ne peut être ignorée sur le fondement de la théorie du trompe‑l’œil. Pour qu’il y ait trompe‑l’œil, il doit y avoir supercherie. Les nouveaux investisseurs avaient l’intention de devenir titulaires d’actions de catégorie B de Veracel et le sont bel et bien devenus.

[19]        De plus, les nouveaux investisseurs ne sont pas intervenus à titre de « groupe de personnes » ayant fait l’acquisition du contrôle de Veracel. L’intimée soutient qu’ils constituent un « groupe de personnes », parce qu’ils ont conclu la convention de souscription, laquelle avait pour effet d’appuyer le plan d’arrangement et d’accorder à Jeff Tonken ou à Jim Surbey une procuration prévoyant l’exercice du droit de vote afférent à tous les reçus de souscription ou à toutes les actions de catégorie B en faveur du plan d’arrangement. Selon l’appelante, cela ne suffit pas pour faire des nouveaux investisseurs un « groupe de personnes ». Les nouveaux investisseurs sont intervenus de manière indépendante lorsqu’ils ont acquis leurs actions et accordé la procuration.

[20]        Enfin, l’appelante a invoqué un certain nombre d’arguments pour réfuter l’allégation de l’intimée selon laquelle la RGAÉ s’applique au soutien de la nouvelle cotisation établie par le ministre.

V. Conclusions relatives à la crédibilité et aux faits

[21]        Il existe entre le témoignage de David Tonken et les éléments de preuve documentaire que l’intimée a invoqués des incohérences importantes qui minent la crédibilité de M. Tonken. La première incohérence concerne la nature de l’entreprise de Cavalon et la participation de celle‑ci aux opérations en cause dans le présent appel. David Tonken a soutenu que la monétisation des pertes fiscales ne constituait qu’une petite partie des activités de consultation de Cavalon. En contre‑interrogatoire, il lui a été présenté le contenu d’une note que John Anderson avait envoyée aux actionnaires originaux de Veracel. M. Anderson était l’ancien chef des finances de Veracel. Il a été engagé pour intervenir en qualité de consultant pour Veracel au sujet des opérations proposées par M. Tonken et l’associé de celui‑ci. Voici un extrait de la note que M. Anderson a rédigée :

[traduction]

Les faits qui ont mené au plan d’arrangement proposé sont les suivants. L’opération entre Veracel et XYZ a été organisée par Cavalon Capital Partners Ltd. (« Cavalon »). Cavalon est une société fermée qui se spécialise dans la monétisation des pertes fiscales dans le cadre de la réorganisation de sociétés ouvertes et fermées; elle a réuni les parties à l’opération proposée et surveillera le déroulement de celle‑ci [...][5]

[Non souligné dans l’original.]

[22]        M. Tonken a maintenu que le contenu de la note était inexact et que Cavalon était une [traduction] » partie non liée » aux opérations.

[23]        Cependant, M. Anderson nomme explicitement Cavalon à titre de partie qui a organisé l’opération initiale proposée entre Veracel et EEI :

[traduction]

Cavalon a d’abord proposé d’associer Veracel à des actifs pétroliers et gaziers et à un groupe de gestion afin de maximiser la valeur pour les actionnaires de Veracel [...] Très récemment, Cavalon a organisé une opération avec une société d’entretien de puits de pétrole par l’entremise d’Emerging Equities Inc. (« EEI »), laquelle opération a été décrite dans une note précédemment envoyée aux actionnaires de Veracel [...]

[24]        Le témoignage de M. Tonken selon lequel Cavalon n’a pas participé aux démarches est également miné par une série de courriels qui ont été échangés entre M. Tonken, M. Anderson, Bob Allan[6] et qui vont en sens contraire. Voici un extrait d’un courriel que David Tonken a envoyé à M. Allan :

[traduction]

Messieurs,

Nous travaillons sur une lettre d’intention avec Birchcliff Energy Ltd.

[...]

Ils souhaitent utiliser Veracel dans le cadre d’un financement sur lequel ils travaillent. Un projet sera fourni probablement d’ici jeudi. Birchcliff couvrira tous les frais de réorganisation et les retranchera sur une valeur totale de 1 984 200 $ pour Veracel. Les actionnaires actuels recevront 70 % et Cavalon, 30 %, en espèces ou en actions de Birchcliff, selon le choix que fera chaque actionnaire.

John, j’aimerais que vous m’appeliez pour que nous discutions [...]

[...]

Cordialement,

David[7]

[Non souligné dans l’original.]

[25]        Lorsque ce courriel a été montré à David Tonken, celui‑ci a reconnu que c’était bel et bien ce qui était écrit dans le courriel et n’a formulé aucune autre observation[8].

[26]        Les raisons qui poussaient Veracel à engager les démarches relatives aux opérations de fusion constituent une autre incohérence. Au cours de son témoignage, M. Tonken soutenait que Veracel souhaitait réorienter son entreprise dans le domaine du pétrole et du gaz et a minimisé l’importance de la monétisation des comptes fiscaux de Veracel. Il a nié l’affirmation selon laquelle Veracel souhaitait liquider son entreprise et monétiser ses attributs fiscaux. Il lui a ensuite été présenté une autre lettre, que M. Anderson avait envoyée à Beverley Philipp, l’agente des appels de l’Agence du revenu du Canada, et avec laquelle il a également pris ses distances. Voici quelques passages de cette lettre :

[traduction]

[...] Dans le cadre de cette opération, j’ai d’abord conseillé les membres du conseil d’administration de Veracel au sujet de leur démarche visant à monétiser les comptes fiscaux de la société. La situation de la société était telle que le conseil souhaitait liquider l’entreprise [...]

[...] Elle avait accumulé des comptes fiscaux de plus de 30 millions de dollars et souhaitait monétiser d’une façon ou d’une autre la valeur de ces comptes[9].

[Non souligné dans l’original.]

[27]        Au cours de son témoignage, M. Tonken a expliqué que cette lettre traduisait peut‑être la position et les convictions de M. Anderson, mais qu’elle ne coïncidait pas avec la propre idée qu’il se faisait de l’intention de Veracel, soit que celle‑ci voulait relancer son entreprise dans l’industrie du pétrole et du gaz. L’explication de M. Tonken est incompatible avec celle que M. Anderson a donnée à l’agente des appels.

[28]        Il ressort d’autres éléments de preuve documentaire établissent que la monétisation des attributs fiscaux était un facteur de motivation beaucoup plus important que ce qu’a laissé soutenu M. Tonken.

[29]        Il ressort des preuves que David Tonken et les représentants de Veracel ont lié connaissance peu après le 24 février 2004, lorsque M. Tonken a reçu une demande de proposition[10] rédigée par Veracel au sujet de l’utilisation des pertes fiscales de celle‑ci. La lettre est ainsi libellée :

[traduction]

La présente lettre est une demande de proposition visant l’utilisation des pertes fiscales de Veracel Inc.

[...]

Après plusieurs années de travaux préparatoires et d’essais précliniques, les actionnaires ont décidé que, à moins qu’il ne soit possible de trouver un partenaire approprié pour assurer le développement clinique, la société devra suspendre ses activités. [...]

À l’heure actuelle, la société est inactive; elle demeure toujours propriétaire de sa propriété intellectuelle, de ses systèmes prototypes et de ses données. Les dossiers, documents et matérialisations sont entreposés en lieu sûr dans un établissement suffisamment protégé. La société n’exerce pas d’activités à l’heure actuelle.

Des pertes fiscales totalisant environ 34,8 millions de dollars, y compris des reports de dépenses de recherche et de développement, ainsi que des crédits d’impôt à l’investissement de 1,9 million de dollars sont disponibles et les actionnaires de la société veulent obtenir des propositions concernant l’utilisation de ces pertes.

[...]

Les actionnaires examineront uniquement les propositions qui ne dépendent pas de l’utilisation des pertes futures et qui prévoient une indemnisation, y compris le versement d’une première avance en espèces et l’apport de capitaux propres dans le cadre de l’opération.

Les actionnaires actuels sont disposés à appuyer un arrangement et une opération qui donneraient lieu à l’utilisation des pertes.

[30]        Je constate que la demande de proposition ne comporte pas la moindre allusion à une intention de la part de Veracel de « relancer » son entreprise. Il est simplement signalé dans la lettre que Veracel sollicite des offres relatives à l’utilisation de ses comptes fiscaux.

[31]        Le 2 mars 2005, David Tonken a fait parvenir à M. Allan un courriel[11] dans lequel il a signalé que Birchcliff était à la recherche d’une [traduction] « société déficitaire » et que tel était le rôle que Veracel jouerait dans l’opération :

[traduction]

Bonjour Robert,

Nous avons un autre groupe qui examine les comptes de Veracel. Ils ont fait une offre à l’égard d’un ensemble d’actifs de 200 millions de dollars et veulent faire intervenir une société déficitaire. Ils sont au courant de l’émission faite aux États‑Unis et leurs avocats chez BLG ont demandé une copie du plus récent document signé à cet égard aux États‑Unis ainsi que la déclaration de revenus fédérale de 2001.

Nous croyons que nous devrions examiner plus à fond cette possibilité. J’aimerais bien que vous me téléphoniez [...] pour que nous en discutions.

[...]

David

[Non souligné dans l’original.]

[32]        Lorsque ce courriel lui a été montré en contre‑interrogatoire, David Tonken a confirmé que les comptes étaient des comptes fiscaux, que le groupe était Birchcliff et que la [traduction] « société déficitaire » était Veracel.

[33]        Tel qu’il est signalé plus haut dans l’exposé de la position de l’intimée, un accord avait précédemment été négocié entre EEI et Veracel, mais cet accord était finalement tombé à l’eau. De la même façon, M. Tonken a sous‑estimé l’importance des attributs fiscaux dans le cadre de l’opération négociée avec EEI. Il a affirmé que celle‑ci avait des problèmes de financement et que l’accord avait échoué parce qu’EEI ne pouvait pas obtenir de dépôt. Cependant, selon la note que M. Anderson a envoyée aux actionnaires originaux de Veracel le 29 mars 2005[12], l’opération négociée avec EEI a échoué en raison de problèmes concernant les attributs fiscaux de Veracel :

[traduction]

[...]

Très récemment, Cavalon a organisé une opération avec une société d’entretien de puits de pétrole par l’entremise d’Emerging Equities Inc. (« EEI »), laquelle opération a été décrite dans une note précédemment envoyée aux actionnaires de Veracel. Cavalon a pleinement divulgué à EEI les problèmes concernant les comptes fiscaux de Veracel et les risques financiers connexes ont été mentionnés dans les conditions de l’opération proposée. Néanmoins, l’opération négociée avec EEI ne s’est pas concrétisée, parce que les professionnels qui ont procédé à l’examen des comptes fiscaux pour le compte de la société d’entretien de puits de pétrole ont souligné qu’il n’était pas possible de résoudre les problèmes en question à temps pour conclure l’opération [...] De plus, Cavalon a consacré beaucoup de temps et d’énergie à l’examen et à la clarification des questions concernant les comptes fiscaux de Veracel.

Cavalon croit que l’opération XYZ peut être conclue malgré les difficultés associées aux comptes fiscaux et à la structure organisationnelle de Veracel.

[Non souligné dans l’original.]

[34]        Lorsque cette lettre lui a été montrée en contre‑interrogatoire, David Tonken a nié que l’opération négociée avec EEI avait échoué en raison de problèmes liés aux attributs fiscaux et a affirmé que l’échec était imputable à des problèmes de financement. Or, il a été incapable de citer le moindre élément de preuve documentaire dont il ressort que l’opération avait échoué en raison de problèmes de financement. Cependant, il a admis que des questions et des problèmes concernant les comptes fiscaux de Veracel avaient été soulevés dans le cadre de l’accord avec Birchcliff, en l’occurrence, l’existence de documents justificatifs établissant les dépenses et les incidences fiscales possibles de la convention unanime des actionnaires conclue entre les actionnaires originaux de Veracel.

[35]        Après l’échec de l’opération négociée avec EEI, David Tonken s’est remis à l’oeuvre afin de tenter d’organiser une autre opération. Il a finalement entamé des discussions avec Birchcliff, par suite desquelles Veracel et Birchcliff ont signé, le 1er avril 2005[13], une lettre d’entente faisant état de l’accord entre les deux sociétés en ce qui concerne la réorganisation de Veracel et sa fusion avec Birchcliff. Dans la lettre d’entente, Veracel s’engageait à déployer tous les efforts commerciaux voulus raisonnables pour obtenir un nouveau financement par capitaux propres. Le financement serait effectué par la délivrance de reçus de souscription qui seraient échangeables contre des actions de catégorie B de Veracel, lesquelles seraient ensuite échangées contre des actions ordinaires de la société issue de la fusion. Par ailleurs, les actions privilégiées de la société issue de la fusion pourraient être rachetées moyennant des espèces à la clôture du plan d’arrangement, jusqu’à concurrence d’une somme de 1 500 000 $. Les actionnaires originaux de Veracel pourraient choisir ces actions privilégiées dans le cas où ils ne voudraient pas suivre Birchcliff dans le domaine du pétrole et du gaz. Il ressort des preuves que tous les actionnaires originaux de Veracel, sauf trois, ont choisi cette option[14], ce qui remet en question le témoignage de M. Tonken selon lequel les opérations avec Birchcliff devaient constituer le point de départ d’une « relance ».

[36]        Le 14 avril 2005, Veracel a conclu une convention de placement[15] avec les souscripteurs qui devaient obtenir des fonds en vendant 26 000 000 reçus de souscription au prix de 4 $ le reçu. L’intimée a soulevé différentes exigences imposées à Veracel en matière de communication et de déclaration, lesquelles exigences démontraient la préoccupation des souscripteurs au sujet de la capacité de l’appelante d’utiliser les attributs fiscaux. Dans la convention de placement, Veracel a déclaré qu’elle n’avait pas fait l’objet d’une acquisition de contrôle auparavant et que l’entente relative à l’arrangement ne donnerait pas lieu à une acquisition de contrôle, que ce soit de manière directe ou indirecte, qui empêcherait la société issue de la fusion d’avoir accès aux attributs fiscaux de Veracel.

[37]        Après avoir engagé les souscripteurs, Veracel a dû remplir un questionnaire sur la diligence raisonnable[16] afin d’assurer une divulgation entière et honnête. Plusieurs sections du questionnaire concernaient l’accessibilité des attributs fiscaux de Veracel et l’intimée les a citées au cours de son contre‑interrogatoire de David Tonken, notamment la question 9, qui est ainsi libellée :

[traduction]

9.      Veuillez confirmer qu’avant la date d’entrée en vigueur de l’arrangement, Veracel n’aura aucun élément d’actif de Veracel, que les seuls éléments d’actif de Veracel seront les comptes fiscaux divulgués dans les états financiers de Veracel qui figurent dans la circulaire d’information de Birchcliff et que, à la date d’entrée en vigueur de l’arrangement, Veracel n’aura aucune dette, à l’exception des frais de l’opération mentionnés à l’alinéa 4.1s) de l’arrangement.

Réponse

Confirmé.

[38]        L’intimée a également cité les questions 11 et 12, dont voici le texte :

[traduction]

11.    Veuillez confirmer que les pertes disponibles aux fins de l’impôt sur le revenu canadien, les crédits d’impôt à l’investissement non remboursables et les dépenses admissibles au titre des activités de recherche scientifique et de développement que Veracel a engagées et qui figurent dans les états financiers de celle‑ci seront accessibles de façon que la société issue de la fusion puisse les utiliser pour réduire l’impôt sur le revenu ultérieur ou, dans le cas des dépenses admissibles au titre des activités de recherche scientifique et de développement, qu’elles pourront être déduites du revenu imposable de la société issue de la fusion pour les années à venir.

Réponse

Veracel confirme qu’à sa connaissance, les pertes disponibles aux fins de l’impôt sur le revenu canadien, les crédits d’impôt à l’investissement non remboursables et les dépenses admissibles au titre des activités de recherche scientifique et de développement que Veracel a supportées et qui figurent dans les états financiers vérifiés du 31 décembre 2004 de Veracel devraient être accessibles de façon que la société issue de la fusion puisse les utiliser pour réduire son impôt sur le revenu ultérieur ou, dans le cas des dépenses admissibles au titre des activités de recherche scientifique et de développement, qu’elles pourront être déduites du revenu imposable de la société issue de la fusion pour les années à venir, sous réserve de la possibilité que l’Agence du revenu du Canada et les autorités fiscales provinciales canadiennes établissent des cotisations et prennent des décisions arbitraires et imposent arbitrairement des règles anti‑évitement en ce qui concerne la déductibilité des pertes fiscales.

12.    Veuillez confirmer que le financement des reçus de souscription de Veracel ne donnera pas lieu à une acquisition du contrôle de celle‑ci aux fins de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada).

Réponse

Veracel ne connaît pas les personnes qui deviendront les propriétaires bénéficiaires des reçus de souscription de Veracel et des actions de catégorie B de celle‑ci et n’a donc aucun moyen de déterminer l’effet qu’aura le financement des reçus de souscription de Veracel sur le contrôle de celle‑ci.

[39]        Je constate que Veracel devait également, dans l’entente relative à l’arrangement avec Birchcliff, formuler des déclarations et fournir des garanties au sujet de l’accessibilité de ses attributs fiscaux et de son statut comme société inactive n’ayant aucune dette[17]. Veracel a déclaré et garanti que, avant l’arrangement, elle n’aurait aucun élément d’actif et de passif et que, depuis sa constitution en société, elle n’avait pas fait l’objet d’une acquisition de contrôle, que ce soit de manière directe ou indirecte. L’entente relative à l’arrangement comportait également une clause qui permettait à Birchcliff de résilier unilatéralement le plan d’arrangement si la Cour suprême du Canada rendait une décision qui compromettrait sérieusement l’accessibilité des attributs fiscaux de Veracel en vue de leur utilisation par l’appelante. Je suppose que Veracel a dû formuler ces déclarations et fournir ces garanties parce qu’une partie du financement par capitaux propres a servi, directement ou indirectement, au paiement de ses attributs fiscaux.

[40]        L’appelante soutient que la participation de Veracel au financement par capitaux propres ne s’expliquait pas simplement par l’utilisation des attributs fiscaux de celle‑ci. L’appelante soutient que la participation de Veracel était également nécessaire pour assurer la réussite de l’opération de financement par capitaux propres. Je conclus que cette thèse n’est pas convaincante, pour plusieurs raisons.

[41]        À mes yeux, il ressort de la preuve documentaire que les nouveaux investisseurs voulaient avoir l’assurance qu’ils obtiendraient ce qu’ils avaient négocié, soit une participation sous forme d’actions dans l’entreprise pétrolière et gazière de Birchcliff. Ma conclusion à cet égard s’appuie sur le fait que, d’après la preuve, c’est l’entreprise de Birchcliff qui a été présentée aux investisseurs éventuels comme occasion d’investissement. Les documents de promotion ont été préparés par Birchcliff et présentés par les cadres et dirigeants de celle‑ci[18]. David Tonken a affirmé au cours de son témoignage que les investisseurs voulaient investir dans l’entreprise de Birchcliff, et non dans Veracel[19]. Il a ajouté que les questions que les investisseurs se posaient au sujet de Veracel concernaient uniquement les attributs fiscaux de celle‑ci et que la [traduction] « participation [de Veracel] résidait dans les comptes fiscaux[20] ». Lorsqu’il a été interrogé au sujet de la valeur que Veracel a ajoutée au financement par capitaux propres, Jim Surbey n’a pu souligner autre chose que les attributs fiscaux[21].

[42]        Au cours de sa plaidoirie, l’appelante a soutenu que Birchcliff avait bénéficié de la participation de Veracel au financement par capitaux propres, qui lui permettait d’avoir accès aux capitaux sans devoir utiliser des ressources ou déployer des efforts pour réunir les fonds elle‑même et sans être exposée au risque d’un échec dans le cadre d’une offre[22]. Je ne suis pas convaincu que le fait de passer par Veracel pour effectuer le financement par capitaux propres a simplifié les choses pour Birchcliff à cet égard. Il ressort des preuves que Birchcliff a participé de façon importante au processus, tant lorsqu’elle a présenté l’occasion aux investisseurs éventuels que lorsqu’elle a rédigé les documents connexes, comme les conventions de souscription[23]. De plus, à la lumière des preuves, je crois que la direction de Birchcliff avait déjà un plan visant à réunir des capitaux propres sans la participation de Veracel avant d’être approchée par David Tonken. Birchcliff connaissait bien la technique de financement par reçus de souscription et comptait une expérience dans ce domaine, parce qu’elle avait déjà participé à une offre similaire lors de la fusion de Scout[24]. De plus, lorsque Birchcliff a organisé le prêt‑relais avec Scotia Capitaux, celle‑ci avait la conviction que Birchcliff pourrait réunir les capitaux[25]. Il y a lieu de se poser des questions sur l’existence d’un risque d’échec entourant une offre, étant donné que Scotia Capitaux avait la conviction que Birchcliff était en mesure de réunir des capitaux propres et que celle‑ci avait déjà participé à une offre de reçus de souscription dans le cadre des opérations mettant en cause Scout, au cours desquelles les reçus de souscription avaient été remis au nom de Birchcliff plutôt qu’au nom de Scout[26].

[43]        La thèse de l’appelante selon laquelle Veracel avait l’intention de conclure une opération de « relance » n’est tout simplement pas crédible. Je déduis des preuves que Birchcliff avait l’intention d’augmenter son capital‑actions afin de financer l’acquisition des biens de Devon. Si Birchcliff n’avait pas été approchée par David Tonken pour conclure les opérations de « monétisation des pertes » en cause dans le présent appel, elle aurait remis les reçus de souscription directement aux nouveaux investisseurs. Je conclus également, à la lumière des preuves, que les actionnaires originaux de Veracel désiraient uniquement monétiser les attributs fiscaux de Veracel pour leur propre avantage. Ils n’avaient nullement l’intention de conclure une opération de relance.

[44]        Eu égard à ce qui précède, je conclus que le financement des reçus de souscription a été « implanté » dans Veracel de manière à éviter les restrictions relatives à l’acquisition de contrôle, lequel plan aurait permis à Birchcliff, s’il avait réussi, d’avoir accès aux attributs fiscaux de Veracel. Je dois maintenant rechercher si ce plan a réussi ou échoué.

VI. Analyse

A. Trompe‑l’œil

[45]        L’intimée soutient que la création et l’émission des actions de catégorie B constituaient un trompe‑l’œil, parce que les nouveaux investisseurs ne bénéficieraient pas des droits et privilèges rattachés à ces actions. Elle ajoute que les actions n’ont jamais été émises en bonne et due forme. Selon la réponse de l’intimée, le plan d’arrangement prévoyait l’émission d’actions de catégorie B pour faire croire que les nouveaux investisseurs étaient des actionnaires de Veracel avant la fusion. En d’autres termes, ils n’étaient titulaires d’actions de catégorie B que sur papier.

[46]        À la toute fin de son contre‑interrogatoire par l’intimée, David Tonken a formulé une observation qui a constitué un fondement important de l’argument de l’intimée au sujet du trompe‑l’œil. L’intimée a posé une série de questions visant à savoir pourquoi les actions de catégorie B avaient été créées et pourquoi elles étaient censées avoir été émises aux nouveaux investisseurs. L’on peut utilement reproduire les questions et les réponses suivantes :

[traduction]

Q         Alors [...], selon le plan d’arrangement, c’est une nouvelle catégorie d’actionnaires qui est née conformément [...] à ce que je comprends selon le plan [...] à ce que le plan donne à penser, et il s’agit des titulaires d’actions de catégorie B, n’est‑ce pas?

R         C’est exact.

Q         Et les administrateurs ou actionnaires préexistants de Veracel souhaitaient‑ils que le contrôle de celle‑ci soit modifié par la création et l’émission de ces actions?

R         Non.

Q         Non? D’accord [...][27]

[47]        L’intimée invoque cette dernière réponse pour soutenir que les documents concernant les actions de catégorie B constituaient un trompe‑l’œil. Dans son plaidoyer final, l’intimée a soutenu :

[traduction]

Si nous pouvions passer à la thèse du trompe‑l’œil à la page 41; selon cette thèse, [...] en réalité, ils n’ont pas créé d’actions. Ils n’avaient pas l’intention de créer d’actions de catégorie B comportant de véritables droits de contrôle.

En ce qui a trait à la question de l’acquisition de contrôle, ils n’ont pas réussi là non plus, mais, dans ce cas‑ci, il n’y a aucune intention de créer ou d’émettre d’actions comportant de véritables droits de contrôler la société, mais des actions de cette nature sont néanmoins créées pour montrer, en apparence, que leurs titulaires possèdent le contrôle. La soi‑disant création de la nouvelle catégorie d’actions avec droit de vote est un trompe‑l’œil.

Dans la présente affaire, les actionnaires et administrateurs préexistants de Veracel ne voulaient pas que les titulaires d’actions de catégorie B aient le droit d’exercer le moindre contrôle sur Veracel.

Savez‑vous qui nous a fourni cette explication? C’est M. Tonken. Il a dit, je crois que c’est en réponse à la dernière question, aux deux dernières questions de son contre‑interrogatoire. Il s’est fait demander si les administrateurs ou les actionnaires préexistants de Veracel voulaient que le contrôle de Veracel soit modifié par la création et l’émission des actions de catégorie B. Il a répondu non.

Vous vous apprêtez à créer 34 millions de nouvelles actions avec droit de vote et vous ne voulez pas qu’elles modifient le contrôle de Veracel?[28]

[48]        À mon avis, l’intimée n’a pas invoqué la réponse de David Tonken au regard du contexte pertinent. Il me semble évident que, aux yeux de David Tonken, la question visait à savoir si les administrateurs de Veracel voulaient que la création et l’émission des actions de catégorie B donnent lieu à une acquisition du contrôle de Veracel. Bien entendu, ce n’était pas prévu. L’appelante soutient qu’un grand groupe d’investisseurs non liés se sont engagés, après avoir été sollicités, à faire un investissement dans Veracel pour des raisons qui étaient propres à chacun d’eux. Dans les circonstances, David Tonken avait de bonnes raisons de dire que l’intention n’a jamais été de faire en sorte que les nouveaux investisseurs soient considérés comme un « groupe de personnes » qui, à ce titre, agiraient de manière concertée en ce qui concerne le contrôle de Veracel. La réponse de David Tonken ne signifie pas que l’intention était de ne pas permettre aux nouveaux investisseurs de bénéficier des attributs découlant de la propriété de ces actions, ne serait‑ce que pour un bref instant.

[49]        Le sens des mots « trompe‑l’œil » ne semble pas être controversé entre les parties. Dans leurs longues observations présentées de vive voix et par écrit, les parties renvoient à la définition classique du trompe‑l’œil qui est énoncée dans l’arrêt Snook v. London & West Riding Investments, Ltd.[29], qui est souvent cité et dans lequel lord Diplock a affirmé que les mots « trompe‑l’œil » :

[traduction]

[...] désignent des actions faites ou des documents signés par les parties au « trompe‑l’œil » et destinés à créer l’impression, dans l’esprit des tiers ou du tribunal, de l’existence entre les parties de droits et d’obligations juridiques autres que ceux et celles (s’il en est) que les parties ont l’intention de créer. Il y a une chose, cependant, qui est très claire à mon avis en ce qui concerne les principes juridiques, la morale et la jurisprudence [...] : pour que des actions ou des documents constituent un « trompe‑l’œil », avec les conséquences juridiques qui en découlent, ceux qui y sont parties doivent tous bien entendre que les actes ou les documents ne créent pas les droits et les obligations juridiques qu’ils donnent l’impression de créer. Aucune intention non exprimée de l’auteur d’un « trompe‑l’œil » n’a d’effet sur les droits d’un tiers qu’il a dupé. [...][30].

[50]        La jurisprudence canadienne a retenu la définition du trompe‑l’œil consacrée par la jurisprudence Snook en 1972[31]. Par la suite, la Cour suprême du Canada a confirmé et suivi cette définition à l’occasion de l’affaire Stubart Investments Ltd. c. La Reine[32]. Par l’arrêt Stubart, le juge Estey a défini le trompe‑l’œil comme « une opération assortie d’un élément de tromperie de manière à créer une illusion destinée à cacher au percepteur le contribuable ou la nature réelle de l’opération, ou un faux‑semblant par lequel le contribuable crée une apparence différente de la réalité qu’elle sert à masquer[33] ».

[51]        La question du trompe‑l’œil est discutée dans deux arrêts plus récents du juge Noël, de la Cour d’appel fédérale. Dans l’arrêt Antle c. Canada[34], le juge Noël s’est exprimé ainsi dans une observation incidente : « [l]’intention ou l’état d’esprit requis n’équivaut pas à une intention coupable et ne saurait aller jusqu’à constituer ce qui, en common law, est le délit de dol [...]. Il suffit que les parties à une opération la présentent comme différente de la réalité qu’elles connaissent[35] ». Par ailleurs, dans l’arrêt 2529‑1915 Québec Inc. c. Canada[36], le juge Noël s’est exprimé en ces termes :

59 L’existence d’une frime en droit canadien exige donc en vue des définitions qui précèdent un élément de déception qui se manifeste règle générale par une fausse représentation par les parties de la transaction réelle intervenue entre elles. Dans ces circonstances, les tribunaux retiendront la transaction réelle et mettront de côté celle qui fut représentée comme étant la vraie.

[52]        Comme l’appelante le relève, selon l’essentiel de la thèse de l’intimée, un nombre élevé d’investisseurs indépendants ont orchestré une supercherie massive. Nul élément de preuve ne permet de dire que les nouveaux investisseurs ont commis un dol. Je suppose que l’intimée conteste le fait que les actions de catégorie B ont été émises pour un très court moment, alors que cette émission représentait une étape critique d’une chaîne préétablie d’opérations, de sorte que les nouveaux investisseurs n’auraient pas l’occasion d’exercer leurs droits afférents à la propriété des actions. En pratique, ce genre de situation se produit souvent lorsque des opérations sont conclues conformément aux modalités d’un plan d’arrangement. Les parties à une opération veulent avoir l’assurance que l’opération sera réalisée d’une certaine manière. Elles ne veulent pas s’engager à conclure une première opération sans être certaines que les opérations subséquentes seront également conclues. C’est là une caractéristique fréquemment observée, par exemple, dans les plans d’arrangement utilisés en matière de règlements de dettes. Les créanciers ne veulent pas que leurs créances soient compromises ou réglées sans avoir l’assurance qu’ils recevront la contrepartie qui leur a été promise.

[53]        Dans la présente affaire, les nouveaux investisseurs ont reçu la promesse qu’ils obtiendraient des actions de catégorie B de Veracel en échange de leurs reçus de souscription et que ces actions de catégorie B deviendraient des actions de l’appelante après la fusion de Birchcliff et de Veracel. Voilà ce qui s’est produit. La courte durée de la propriété des actions ne permet pas de dire que les nouveaux investisseurs ne sont pas devenus actionnaires de Veracel.

[54]        Qui plus est, je rejette la thèse de l’intimée portant que les actions n’ont jamais été émises. Il ressort de la preuve documentaire que, sans l’ombre d’un doute, que les actions de catégorie B ont été émises en contrepartie de l’acquisition des reçus de souscription par les investisseurs. Susan Mak, la directrice adjointe des services à la clientèle chez Olympia, l’agent des reçus de souscription représentant Veracel, a expliqué au cours de son témoignage qu’Olympia avait reçu les fonds provenant de la vente des reçus de souscription. Elle a confirmé qu’Olympia avait reçu le certificat représentant 34 000 000 actions de catégorie B de Veracel en fiducie pour les nouveaux investisseurs. Elle a également confirmé qu’Olympia avait reçu comme directive d’échanger le certificat représentant 34 000 000 actions de catégorie B de Veracel contre 34 000 000 actions ordinaires de l’appelante après la fusion. Son contre‑interrogatoire n’a révélé aucune incohérence ou contradiction avec son témoignage en interrogatoire principal.

[55]        Eu égard à l’ensemble des preuves, je conclus que les actions de catégorie B ont effectivement été émises et qu’on ne peut faire abstraction de leur existence en droit, selon la doctrine du trompe‑l’œil.

B. Les titulaires d’actions de catégorie B constituaient‑ils un « groupe de personnes » qui a acquis le contrôle de Veracel?

[56]        L’intimée soutient que les titulaires d’actions de catégorie B ont acquis le contrôle de Veracel en qualité de « groupe de personnes » du fait qu’ils se sont concertés en tant que membres d’un groupe en signant la convention de souscription et en donnant à Jeff Tonken et à Jim Surbey une procuration irrévocable afin qu’ils approuvent le plan d’arrangement. Avec égards, je rejette cette thèse. Une conclusion en faveur de l’intimée sur ce point aurait des conséquences importantes pour les pratiques commerciales courantes et entraverait celles‑ci.

[57]        Les procurations sont devenues monnaie courante dans la pratique moderne du droit des sociétés. Il arrive souvent que la direction d’une société demande aux actionnaires institutionnels de leur donner des procurations afin, par exemple, de faire approuver une liste de candidats au conseil d’administration. Il est raisonnable d’en déduire que les actionnaires acceptent de donner ces procurations parce que cette façon de procéder leur simplifie la vie et que la liste concorde avec leurs intérêts individuels. Les sociétés peuvent aussi décider d’engager des entreprises spécialisées dans la sollicitation de procurations afin de solliciter l’approbation de certaines opérations, et freiner ainsi les élans des actionnaires activistes.

[58]        Les plans d’arrangement sont également fréquemment employés dans la pratique moderne du droit des sociétés. Dans un contexte public, ils sont utilisés pour toutes les opérations, sauf celles qui sont très simples. Ainsi, lorsque des parties envisagent une réorganisation d’actions dans le but d’offrir un choix aux actionnaires existants (différentes catégories d’actions, actions échangeables contre des actions d’une société mère, etc.), elles ont recours à un plan afin de s’assurer que les opérations se déroulent dans l’ordre voulu et que les actionnaires obtiennent en fin de compte ce qu’ils ont négocié. Les plans d’arrangement sont également régulièrement utilisés pour la mise en œuvre d’opérations appelées « opérations papillon ouvertes ». L’exemple le plus remarquable est le fractionnement des actions de Canadien Pacifique Ltée qui a été effectué pour éliminer la décote de la société de portefeuille en 2001. Si des actionnaires devaient être considérés comme un « groupe de personnes » simplement parce qu’ils donnent à la même personne une procuration pour qu’elle exerce le droit de votre afférent à leurs actions ou parce qu’ils acceptent de conclure l’opération papillon conformément à un plan d’arrangement, cela signifierait que la plupart de ces types d’opérations deviendraient entièrement imposables[37].

[59]        Il arrive souvent qu’un plan d’arrangement approuvé par le juge serve à mettre en œuvre un règlement de dettes pour l’application de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Les créanciers veulent avoir l’assurance que toutes les mesures menant à la reconstitution du capital de leurs créances seront prises. Constituent‑ils pour autant un « groupe de personnes »? Compte tenu des principes construit par la jurisprudence discutée ci‑dessous, tel n’est pas mon avis.

[60]        A l’occasion de l’affaire Silicon Graphics Ltd. c. Canada[38], la Cour d’appel fédérale a décidé qu’un lien ou une communauté d’intérêts entre les actionnaires d’une société donnée doit être présente avant que ceux‑ci puissent être considérés comme un « groupe de personnes » en ce qui concerne le contrôle d’une société donnée. À cet égard, la Cour d’appel fédérale a formulé les observations suivantes :

36 Selon ces décisions, je souscris à l’argument de l’appelante selon lequel la simple possession d’une majorité mathématique d’actions par un ensemble d’actionnaires pris au hasard dans une corporation à grand nombre d’actionnaires ayant certains éléments communs identificateurs (p. ex. le lieu de résidence) mais sans un lien commun ne constitue pas un contrôle de droit ainsi que le terme a été défini par la jurisprudence. Je souscris également à l’argument de l’appelante selon lequel pour que plus d’une personne soit en position d’exercer un contrôle, il est nécessaire qu’il y ait un lien suffisant entre les actionnaires. Ce lien doit inclure, notamment, une entente de vote, une entente pour agir de concert ou des liens commerciaux ou familiaux.

37 En l’espèce, on n’a présenté aucune preuve qui suggérerait que les actionnaires non résidents voteront en bloc lors de l’élection des administrateurs d’Alias ou d’autres questions importantes liées au contrôle de cette société. La résidence des actionnaires ne fournit à elle seule aucune indication quant à la question de savoir s’ils étaient d’accord quant aux questions importantes liées au contrôle d’une société. Le fait que plus de la moitié des actionnaires d’Alias résident aux États‑Unis alors qu’il n’y a pas de preuve qu’ils ont un lien ou qu’ils connaissent l’identité des autres ne fournit aucune indication quant à savoir s’ils pourraient être d’accord au sujet d’une question liée au contrôle de la société.

[61]        Dans la présente affaire, il ne ressort de nul élément de preuve que les nouveaux investisseurs se connaissaient ou qu’ils avaient un plan en vue de contrôler la société ensemble. J’en déduis qu’ils ont signé la convention de souscription et donné une procuration à Jeff Tonken ou à Jim Surbey pour que ceux‑ci exercent les droits de vote afférents à leurs actions en faveur du plan, au besoin, parce que cette façon de procéder concordait avec leurs propres intérêts. Je suppose qu’ils l’ont fait sans discuter de la question avec les autres investisseurs. En conséquence, je souscris à l’argument de l’appelante selon lequel l’octroi de la procuration dans ces circonstances est insuffisant pour démontrer l’existence d’un lien entre les nouveaux investisseurs, et je conclus que ceux‑ci ne constituaient pas un « groupe de personnes » ayant acquis le contrôle de Veracel.

VII. Règle générale anti‑évitement

[62]        Je me pencherai maintenant sur la question de savoir si la RGAÉ joue de manière à donner lieu au refus de la déduction des pertes autres que des pertes en capital que l’appelante a demandée. A l’occasion de l’affaire Hypothèques Trustco Canada c. Canada[39], la Cour suprême du Canada a établi une démarche en trois étapes à suivre pour rechercher si la RGAÉ s’applique à une opération ou à une série d’opérations. La Cour suprême du Canada a ensuite réaffirmé cette démarche à l’occasion des affaires Lipson c. Canada[40] et Copthorne Holdings Ltd. c. Canada[41].

[63]        La première étape consiste à rechercher si un « avantage fiscal » au sens du paragraphe 245(1) de la Loi est présent. Pour qu’il y ait avantage fiscal, une opération, ou une série d’opérations dont l’opération fait partie, doit aboutir à « [une] réduction, [un] évitement ou [un] report d’impôt ou d’un autre montant exigible » en application de la Loi ou de toute autre source pertinente de droit fiscal, ou encore à une « augmentation du remboursement d’impôt ou d’un autre montant » visé par la Loi ou par une autre source pertinente de droit fiscal.

[64]        Selon la deuxième étape de la démarche consacrée par l’arrêt Trustco Canada, l’opération qui génère l’avantage fiscal doit être une « opération d’évitement » au sens du paragraphe 245(3).

[65]        La troisième étape de la démarche consiste à rechercher si l’opération d’évitement était abusive au sens du paragraphe 245(4). Une opération d’évitement est jugée abusive s’il « n’est pas raisonnable de conclure qu’un avantage fiscal serait conforme à l’objet ou à l’esprit des dispositions invoquées par le contribuable[42] ».

[66]        L’intimée soutient que les opérations suivantes sont des opérations d’évitement qui font partie d’une chaîne préétablie d’opérations (les « opérations de Veracel ») :

a)       le transfert de tous les éléments d’actif de Veracel à une société nouvellement constituée;

b)      la vente de reçus de souscription par Veracel plutôt que par Birchcliff;

c)       l’échange des reçus de souscription contre des actions de catégorie B;

d)      la fusion de Veracel et de Birchcliff.

[67]        L’intimée soutient que l’avantage fiscal réside dans la préservation et l’utilisation des attributs fiscaux par l’appelante sans les restrictions découlant des règles relatives au transfert des pertes.

[68]        A l’occasion de l’affaire Copthorne, la Cour suprême du Canada a affirmé qu’il était possible de déterminer l’existence d’un avantage fiscal en comparant la situation du contribuable à celle qu’aurait produit un autre mécanisme qui aurait été employé n’eût été l’avantage fiscal[43].

[69]        Dans la présente affaire, Birchcliff aurait pu remettre les reçus de souscription directement aux nouveaux investisseurs afin d’obtenir le financement par capitaux propres. C’est plutôt Veracel qui a remis les reçus de souscription aux nouveaux investisseurs. Les reçus de souscription ont été échangés contre des actions de catégorie B de Veracel, après quoi Veracel et Birchcliff ont fusionné. Étant donné que Veracel avait remis les reçus de souscription aux nouveaux investisseurs, il n’y a pas eu d’acquisition du contrôle de Veracel lors de la fusion de celle‑ci et de Birchcliff et les attributs fiscaux n’ont pas été assujettis aux restrictions relatives au transfert des pertes. En conséquence, je reconnais, comme l’affirme l’intimée, que l’avantage fiscal en l’espèce réside dans la préservation et l’utilisation des attributs fiscaux.

[70]        La deuxième étape de la démarche à suivre pour appliquer la RGAÉ consiste à rechercher si l’opération générant l’avantage fiscal constitue une opération d’évitement. Selon le paragraphe 245(3) de la Loi, l’opération d’évitement est une opération dont découle un avantage fiscal et qui n’est pas effectuée principalement pour des objets véritables non fiscaux[44]. L’application du critère prescrit par le paragraphe 245(3) nécessite une évaluation objective de l’importance relative des motivations auxquelles obéissait l’opération[45].

[71]        À la lumière de l’ensemble des preuves, je conclus que la vente des reçus de souscription par Veracel plutôt que par Birchcliff constituait une « opération d’évitement ». À cet égard, je conclus que les opérations de Veracel font partie de la même série d’opérations. Comme je l’ai souligné dans mes constats de fait, je conclus que Birchcliff a accepté de participer aux opérations de Veracel, y compris le transfert à celle‑ci du financement par capitaux propres dont Birchcliff avait besoin, dans le but principal de permettre à l’appelante de se prévaloir des attributs fiscaux de Veracel sans restriction.

[72]        L’appelante soutient que l’objet premier des opérations de Veracel, notamment la vente des reçus de souscription par celle‑ci plutôt que par Birchcliff, était la réunion des capitaux propres pour l’acquisition des biens de Devon.

[73]        Même si l’objet général des opérations de Veracel et de la vente de reçus de souscription par celle‑ci était la réunion des capitaux propres pour l’acquisition des biens de Devon, il ne s’agit pas d’un objet véritable non fiscal qui justifie la délivrance des reçus de souscription aux nouveaux investisseurs par Veracel plutôt que par Birchcliff. Comme je l’ai signalé plus haut, je rejette la version de l’appelante selon laquelle Veracel avait l’intention de relancer son entreprise dans le domaine du pétrole et du gaz et je conclus que Birchcliff aurait remis les reçus de souscription directement aux nouveaux investisseurs si les parties n’avaient pas cru qu’il était possible d’éviter les restrictions relatives au transfert des pertes en transférant le financement par capitaux propres à Veracel afin de bénéficier de l’exception prévue à la division 256(7)b)(iii)(B). Je conviens avec l’intimée que le principal objet de la participation de Veracel au financement par capitaux propres était de préserver et d’utiliser les attributs fiscaux.

[74]        L’issue du présent appel dépend donc du résultat de la troisième étape de la démarche établie dans l’arrêt Trustco Canada, qui consiste à rechercher si les opérations d’évitement sont abusives au sens du paragraphe 245(4)[46]. Dans le cadre de cette démarche, pour répondre à cette question, il faut d’abord interpréter les dispositions de la Loi générant l’avantage fiscal pour en déterminer l’objet et l’esprit et ensuite rechercher si les opérations attaquées sont conformes à l’objet des dispositions en question ou si elles le contrecarrent[47]. Ainsi que la Cour suprême du Canada l’a expliqué à l’occasion de l’affaire Copthorne :

69 Pour conclure au caractère abusif d’une opération, la cour doit d’abord déterminer « l’objet ou l’esprit des dispositions [...] qui sont invoquées pour obtenir l’avantage fiscal, eu égard à l’économie de la Loi, aux dispositions pertinentes et aux moyens extrinsèques admissibles » (Trustco, par. 55). Un auteur assimile cet objet ou cet esprit à la [traduction] « raison d’être qui sous‑tend des dispositions particulières ou interdépendantes de la Loi » (V. Krishna, The Fundamentals of Income Tax Law (2009), p. 818).

70 L’objet ou l’esprit peuvent être circonscrits grâce à la méthode qu’emploie notre Cour pour toute interprétation législative, à savoir une méthode « textuelle, contextuelle et téléologique unifiée » (Trustco, par. 47; Lipson c. Canada, 2009 CSC 1, [2009] 1 R.C.S. 3, par. 26). Bien que la méthode d’interprétation soit la même dans le cas de la RGAÉ, l’analyse vise en l’espèce à dégager un aspect différent de la loi. Dans un cas classique d’interprétation législative, la cour applique l’analyse textuelle, contextuelle et téléologique pour établir le sens du texte de la loi. Dans le cas de la RGAÉ, l’analyse textuelle, contextuelle et téléologique vise à établir l’objet ou l’esprit d’une disposition. Il est alors possible que le sens des mots employés par le législateur soit suffisamment clair. La raison d’être de la disposition peut ne pas ressortir de la seule signification des mots eux‑mêmes. Il ne faut cependant pas confondre la détermination de la raison d’être des dispositions applicables de la Loi avec le jugement de valeur quant à ce qui est bien ou mal non plus qu’avec les conjectures sur ce que devrait être une loi fiscale ou sur l’effet qu’elle devrait avoir.

[Non souligné dans l’original.]

[75]        L’opération est abusive lorsqu’elle contourne l’application de certaines dispositions, comme des règles anti‑évitement, d’une manière contraire à l’objet ou à l’esprit de ces dispositions[48].

[76]        L’existence d’un évitement fiscal abusif doit être claire. Si elle ne l’est pas, il faut laisser le bénéfice du doute au contribuable. De plus, il incombe au ministre d’établir l’existence d’un évitement fiscal abusif[49].

[77]        Tant dans l’affaire Trustco Canada que dans l’affaire Copthorne, la Cour suprême du Canada rappelle que la planification fiscale n’est pas abusive en soi aux fins de l’application du paragraphe 245(4). Voici les observations qu’elle a formulées à ce sujet par l’arrêt Trustco Canada :

61 Une interprétation correcte du libellé des dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu ainsi que le contexte factuel pertinent d’une affaire donnée permettent d’établir un équilibre entre la nécessité de prévenir l’évitement fiscal abusif et celle de maintenir la certitude, la prévisibilité et l’équité en droit fiscal afin que les contribuables puissent organiser leurs affaires en conséquence. Le législateur souhaite que les contribuables profitent pleinement des dispositions de la Loi qui confèrent des avantages fiscaux. Il n’a pas voulu que la RGAÉ mine ce précepte fondamental du droit fiscal.

[78]        Dans la même veine, par l’arrêt Copthorne, la Cour suprême du Canada a affirmé que « le contribuable peut opter pour les avenues ou les opérations qui sont propres à réduire son obligation fiscale[50] ». En conséquence, le contribuable qui choisit une avenue propre à réduire son obligation fiscale n’a pas nécessairement conclu une opération d’évitement fiscal abusif au sens du paragraphe 245(4).

[79]        Je dois maintenant mener l’analyse en deux étapes pour savoir si la vente des reçus de souscription par Veracel plutôt que par Birchcliff constituait un évitement fiscal abusif.

[80]        L’intimée soutient que les opérations de Veracel ont contourné l’application du paragraphe 111(5) de la Loi ou sont contraires à l’objet et l’esprit de cette disposition. À cet égard, elle fait valoir que le paragraphe 111(5) s’inscrit dans la politique générale de la loi qui interdit l’échange de pertes entre sociétés et que permettre à l’appelante d’utiliser les attributs fiscaux de Veracel serait contraire à l’objet et à l’esprit de cette politique générale et des restrictions relatives au transfert des pertes.

[81]        L’intimée ajoute que l’émission d’actions de catégorie B aux nouveaux investisseurs, qui a fait d’eux des actionnaires de Veracel pour un court instant, constituait une utilisation abusive de l’exception reconnue par la division 256(7)b)(iii)(B) et allait à l’encontre de l’objet et de l’esprit de cette exception à la règle générale énoncée dans le préambule de cette disposition.

[82]        Pour sa part, l’appelante soutient que le paragraphe 111(5) reprend un critère de common law applicable à l’échelle des actionnaires en vue de savoir si les pertes autres que les pertes en capital sont restreintes et que la RGAÉ ne peut pas s’appliquer à un critère de common law. Le contrôle de droit, au sens des principes généraux, doit être acquis par une personne ou par un « groupe de personnes » avant que les restrictions relatives au transfert des pertes puissent jouer.

[83]        A l’appui de sa thèse, l’appelante invoque également un certain nombre de considérations de politique générale :

a)       L’élimination des attributs fiscaux est inéquitable.

b)      Le législateur a opté pour un critère de démarcation nette, soit le critère de l’« acquisition du contrôle », à l’égard de la perte de valeur des attributs fiscaux d’une société.

c)       Les règles anti‑évitement donnant lieu à une acquisition de contrôle réputée ne s’appliquent pas aux opérations examinées en l’espèce.

d)      Le législateur a modifié les règles concernant la fusion afin de donner effet à une annonce du budget de 2013.

[84]        L’appelante soutient qu’il ressort du texte et du contexte de l’alinéa 256(7)b) que le législateur ne souhaitait pas que l’on examine les détentions d’actions des sociétés remplacées par l’entité fusionnée, sauf immédiatement avant la fusion, pour savoir si le critère de la participation majoritaire a été suivi. En conséquence, étant donné que les nouveaux investisseurs sont devenus des titulaires d’actions de catégorie B de Veracel avant la fusion, ne serait‑ce que pour un court instant, le critère de la participation majoritaire a été suivi, comme l’exige l’exception à cette règle spécifique de l’acquisition de contrôle réputée.

[85]        Pour trancher la présente affaire, je ne suis pas tenu de décider s’il existe une politique générale concrétisée par les dispositions de la Loi qui interdit l’échange des pertes entre des parties non liées. À mon avis, l’issue du présent appel dépend d’une question plus circonscrite, soit celle de savoir si la vente des reçus de souscription par Veracel a contourné le sous‑alinéa 256(7)b)(iii) ou si, dans le cadre de la vente, l’exception énoncée à la division 256(7)b)(iii)(B) a été utilisée d’une manière qui était contraire à l’objet et à l’esprit de cette disposition. En conséquence, je préfère que la question de l’existence possible, dans la Loi, d’une interdiction générale visant les échanges de pertes soit tranchée dans une affaire qui ne porte pas sur l’application d’une règle déterminative précise[51].

[86]        J’entreprends la première étape de l’analyse relative à l’abus par l’examen textuel des parties pertinentes de l’alinéa 256(7)b), dont voici le texte :

256(7) [...]

b) dans le cas où plusieurs sociétés (chacune étant appelée « société remplacée » au présent alinéa) ont fusionné pour former une seule société (appelée « nouvelle société » au présent alinéa), les présomptions suivantes s’appliquent :

(i) le contrôle d’une société n’est réputé avoir été acquis par une personne ou un groupe de personnes du seul fait de la fusion que s’il est réputé par les sous‑alinéas (ii) ou (iii) avoir été ainsi acquis,

(ii) la personne ou le groupe de personnes qui contrôle la nouvelle société immédiatement après la fusion, mais qui ne contrôlait pas une société remplacée immédiatement avant la fusion est réputé avoir acquis, immédiatement avant la fusion, le contrôle de la société remplacée et de chaque société que celle‑ci contrôlait immédiatement avant la fusion, sauf dans le cas où la personne ou le groupe de personnes n’aurait pas acquis le contrôle de la société remplacée s’il avait acquis l’ensemble des actions de celle‑ci immédiatement avant la fusion,

(iii) le contrôle d’une société remplacée et de chaque société qu’elle contrôle immédiatement avant la fusion est réputé avoir été acquis immédiatement avant la fusion par une personne ou un groupe de personnes, sauf si l’un des faits suivants se vérifie :

(A) immédiatement avant la fusion, la société remplacée était liée à chaque autre société remplacée, autrement qu’à cause d’un droit visé à l’alinéa 251(5)b),

(B) si une seule personne avait acquis, immédiatement après la fusion, l’ensemble des actions du capital‑actions de la nouvelle société que les actionnaires de la société remplacée ou d’une autre société remplacée qui contrôlait celle‑ci ont acquis lors de la fusion en contrepartie de leurs actions de la société remplacée ou de l’autre société remplacée, selon le cas, cette personne aurait acquis le contrôle de la nouvelle société par suite de l’acquisition de ces actions,

(C) le contrôle de chaque société remplacée serait, en l’absence de la présente division, réputé par le présent sous‑alinéa avoir été acquis lors de la fusion, dans le cas où il s’agit de la fusion :

(I) de deux sociétés,

(II) de deux sociétés (appelées « sociétés mère » à la présente subdivision) et d’une ou de plusieurs autres sociétés (chacune étant appelée « filiale » à la présente subdivision) qui, si les actions du capital‑actions de chaque filiale détenues par les sociétés mères immédiatement avant la fusion avaient été détenues par une seule personne, auraient été contrôlées par cette personne;

[...]

[87]        Le texte du sous‑alinéa 256(7)b)(i) est clair. Dans le cas où les sociétés remplacées A et B ont fusionné, il n’y a pas acquisition de contrôle du seul fait de cette fusion, à moins que le contrôle ne soit réputé avoir été ainsi acquis par le sous‑alinéa 256(7)b)(ii) ou (iii). Il faut davantage.

[88]        Le texte du sous‑alinéa 256(7)b)(ii) est un peu plus complexe, parce qu’il comporte à la fois une règle générale et une exception. La meilleure façon d’expliquer la règle générale consiste à utiliser un exemple. Supposons que les sociétés remplacées A et B ont fusionné. La société remplacée A a un actionnaire contrôlant, tandis que la société remplacée B est une société ouverte à grand nombre d’actionnaires. La société remplacée A vaut deux fois plus que la société remplacée B, de sorte que l’actionnaire contrôlant de la société A obtient en fin de compte le contrôle de droit de la société fusionnée. Dans cet exemple, l’actionnaire contrôlant est réputé avoir acquis le contrôle de la société remplacée B immédiatement avant la fusion des deux sociétés.

[89]        Pour expliquer l’exception à la règle générale énoncée au sous‑alinéa 256(7)b)(ii), il convient maintenant de modifier légèrement l’exemple qui précède. La société remplacée A et la société remplacée B ont toutes les deux des actionnaires contrôlants qui sont liés du fait qu’ils ont une même société mère. Si l’actionnaire contrôlant de la société remplacée A se retrouve avec le contrôle de l’entité fusionnée, la règle générale ne joue pas, parce que cet actionnaire est réputé ne pas avoir acquis le contrôle de la société remplacée B s’il a acquis l’ensemble des actions de celle‑ci avant la fusion. L’exception est nécessaire afin de faciliter les réorganisations de sociétés entre parties liées.

[90]        Le sous‑alinéa 256(7)b)(iii) est d’une importance particulière en l’espèce. C’est l’euphémisme : cette disposition est difficile à comprendre. La complexité découle du fait que la règle générale énoncée dans le préambule du sous‑alinéa 256(7)b)(iii) est suivie de trois exceptions distinctes prévues par chacune des divisions 256(7)b)(iii)(A), (B) et (C). Selon la règle générale, le contrôle d’une société remplacée est réputé avoir été acquis immédiatement avant une fusion, à moins que l’une des exceptions ne s’applique.

[91]        L’exception la plus facile à comprendre est énoncée dans la division 256(7)b)(iii)(A). Encore là, il est préférable de donner un exemple pour illustrer le sens de cette disposition. Supposons que les sociétés remplacées A et B sont liées en raison du fait qu’elles ont une même société mère. Selon quelques‑unes des autres exceptions prévues au paragraphe 256(7), la fusion de sociétés liées n’entraîne pas une acquisition de contrôle; cette exception vise à faciliter les réorganisations de sociétés entre des parties liées.

[92]        L’exception prévue à la division 256(7)b)(iii)(B) est fondée sur le critère de la participation majoritaire. Encore là, c’est un exemple qui illustre le mieux cette exception. Si les sociétés remplacées A et B ont fusionné et que toutes les deux sont des sociétés ouvertes à grand nombre d’actionnaires sans être liées entre elles, le contrôle de la société remplacée A est réputé avoir été acquis, à moins que les actionnaires de celle‑ci n’obtiennent en fin de compte une majorité des actions avec droit de vote de l’entité fusionnée. Selon le libellé de la disposition, pour déterminer l’existence d’un contrôle de droit, il faut avoir recours à l’hypothèse suivante. D’abord, il faut supposer que toutes les actions de l’entité fusionnée qu’ont reçues les actionnaires d’une société remplacée donnée, en l’occurrence, la société remplacée A, ont été acquises par une seule personne hypothétique. Dans le cas où cette personne aurait acquis le contrôle de l’entité fusionnée en raison du fait que les actionnaires de la société remplacée A ont reçu au total une majorité des actions avec droit de vote de l’entité fusionnée, le contrôle de la société remplacée B, dont les actionnaires ont reçu des actions représentant moins qu’une participation majoritaire, est réputé avoir été acquis immédiatement avant la fusion.

[93]        La division 256(7)b)(iii)(C) vise le cas où deux sociétés fusionnent et où les actionnaires de chaque société remplacée reçoivent exactement 50 % des actions avec droit de vote de l’entité fusionnée. En l’absence de cette exception, le contrôle des deux sociétés serait réputé avoir été acquis. Dans cette situation restreinte de détention d’un nombre égal d’actions avec droit de vote, la règle de l’acquisition de contrôle réputée ne s’appliquera pas.

[94]        L’appelante se fonde sur un pur argument de texte en ce qui concerne la division 256(7)b)(iii)(B) pour soutenir que la règle de l’acquisition de contrôle réputée énoncée dans le préambule de cette disposition ne vise pas Veracel, parce que les actionnaires de celle‑ci, y compris les titulaires des actions de catégorie B, ont reçu une majorité des actions avec droit de vote de l’appelante lors de la fusion de Birchcliff et de Veracel.

[95]        Il va sans dire que, dans le cadre de l’application de la RGAÉ, il faut procéder à une analyse textuelle, contextuelle et téléologique pour savoir si le recours à cette exception contrevient de manière abusive à l’objet et à l’esprit de la disposition.

[96]        À mon avis, c’est à cette étape de l’analyse que l’appelante doit être déboutée. L’analyse du contexte suppose l’examen d’autres dispositions pertinentes, laquelle pertinence tient au « regroupement » des dispositions en question ou à leur « interaction pour la mise en œuvre d’un plan plausible et cohérent[52] ». Le contexte immédiat de l’alinéa 256(7)b) est le paragraphe 256(7), qui définit les cas dans lesquels le contrôle d’une société est réputé ne pas avoir été acquis et les circonstances dans lesquelles il est réputé l’avoir été. Dans le premier cas, de façon générale, il y a continuité des intérêts des actionnaires que le législateur estime suffisante pour écarter l’acquisition du contrôle de droit. En pareil cas, même si le contrôle de droit est, au sens strict, acquis par une personne ou un « groupe de personnes », le législateur présume qu’il n’a pas été acquis. Ainsi, le législateur autorise un échange d’une majorité des actions avec droit de vote entre des parties liées afin de faciliter les réorganisations des sociétés. Dans la présente affaire, le critère de la participation majoritaire figurant à la division 256(7)b)(iii)(B) vise à ce qu’il soit tenu compte d’une continuité des intérêts des actionnaires qui justifierait une exception à la règle de l’acquisition de contrôle réputée lors de la fusion.

[97]        Je constate qu’un critère semblable a été employé dans la règle de la prise de contrôle inversée énoncée à l’alinéa 256(7)c) qui jouait pendant l’année d’imposition 2006[53]. Voici le texte de cette disposition :

256(7) [...]

c) sous réserve de l’alinéa a), dans le cas où plusieurs personnes (appelées « cédants » au présent alinéa) disposent d’actions du capital‑actions d’une société donnée en échange d’actions du capital‑actions d’une autre société (appelée « acquéreur » au présent alinéa), le contrôle de l’acquéreur et de chaque société qu’elle contrôlait immédiatement avant l’échange est réputé avoir été acquis au moment de l’échange par une personne ou un groupe de personnes, sauf si l’un des faits suivants se vérifie :

(i) la société donnée et l’acquéreur étaient liés l’un à l’autre immédiatement avant l’échange, autrement qu’à cause d’un droit visé à l’alinéa 251(5)b),

(ii) si l’ensemble des actions du capital‑actions de l’acquéreur qui ont été acquises par les cédants lors de l’échange étaient acquises au moment de l’échange par une seule personne, celle‑ci ne contrôlerait pas l’acquéreur;

[...]

[98]        Selon cette disposition, lorsqu’une société fait l’acquisition d’une autre société dans le cadre d’un échange d’actions, le contrôle de l’acquéreur est réputé avoir été acquis, à moins que l’une des deux exceptions prévues au sous‑alinéa 256(7)c)(i) ou (ii) ne s’applique.

[99]        Il ressort des notes techniques concernant l’alinéa 256(7)c) que la règle vise à empêcher le recours à la technique de « prise de contrôle inversée » pour contourner le résultat qui serait obtenu si une société publique rentable appelée dans les notes (« Publique Ltée »), soit la plus grande des deux sociétés, qui compte un grand nombre d’actionnaires, avait simplement acquis une société déficitaire (« Perte Ltée »). Voici les exemples donnés dans les notes techniques :

Le nouvel alinéa 256(7)c) de la Loi porte sur les opérations de prise de contrôle inversée, illustrées dans les exemples ci‑après.

EXEMPLE A :

Un particulier, M. X, est propriétaire de l’ensemble des actions d’une société, Perte Ltée, d’une juste valeur marchande totale de 100 000 $. Une société publique rentable, Publique Ltée, qui n’est pas contrôlée par une personne ou un groupe de personnes voudrait avoir accès aux pertes autres qu’en capital reportées de Perte Ltée. Si Publique Ltée devait acquérir les actions de Perte Ltée auprès de M. X, les règles sur la minimisation des pertes énoncées dans la Loi auraient pour effet de limiter la déductibilité de ces pertes. Aussi, les actionnaires de Publique Ltée choisissent‑ils d’échanger leurs actions de Publique Ltée contre des actions de Perte Ltée, d’une valeur de 10 000 000 $. M. X renonce au contrôle de Perte Ltée par suite de l’échange.

EXEMPLE B :

Mêmes faits que dans l’exemple A, sauf que, au lieu de transférer leurs actions de Publique Ltée à Perte Ltée dans le cadre d’un échange d’actions au pair, les actionnaires de Publique Ltée reçoivent des actions de Perte Ltée en contrepartie de la disposition de leurs actions de Publique Ltée dans le cadre de la fusion triangulaire de cette dernière et d’une filiale à cent pour cent de Perte Ltée.

Dans chacun de ces exemples, il n’y a d’acquisition de contrôle de Perte Ltée en vertu des règles actuelles que s’il existe un groupe d’actionnaires qui contrôle cette société après la prise de contrôle. Toutefois, si le nouvel alinéa 256(7)c) était appliqué à chacun de ces exemples, le contrôle de Perte Ltée serait réputé avoir été acquis par une personne ou un groupe de personnes étant donné que les actions de Perte Ltée émises aux actionnaires de Publique Ltée dans chaque cas sont telles que, si elles avaient été acquises par une seule personne, cette personne aurait acquis le contrôle de Perte Ltée. Cet alinéa s’applique aux fusions effectuées après le 26 avril 1995, sauf dans certains cas précis[54].

[100]   En l’absence de cette règle, il serait possible d’éviter une acquisition du contrôle de Perte Ltée en incitant celle‑ci à acquérir Publique Ltée dans le cadre d’une opération de prise de contrôle inversée. La règle fait jouer l’acquisition de contrôle réputée, à moins que Perte Ltée et Publique Ltée ne soient liées entre elles ou que les actionnaires de Publique Ltée ne détiennent pas ensemble, en fin de compte, une participation majoritaire dans Perte Ltée une fois l’échange d’actions effectué.

[101]   Je reconnais que la règle renvoie effectivement à la participation des actionnaires de Publique Ltée dans Perte Ltée. S’ils reçoivent, en qualité de cédants, des actions qui, ensemble, représentent une participation majoritaire dans Perte Ltée, le contrôle de celle‑ci est alors réputé avoir été acquis. La règle ne s’applique pas si les actionnaires originaux de Perte Ltée possèdent au total des actions qui représentent une participation majoritaire dans Perte Ltée une fois l’opération réalisée. Ce critère est semblable à celui qui est appliqué en manière de fusion. Tel qu’il est signalé plus haut, si les actionnaires de Perte Ltée ne possèdent pas au total des actions représentant une participation majoritaire dans l’entité fusionnée, le contrôle de Perte Ltée est réputé avoir été acquis immédiatement avant la fusion. Vu ces règles, je suis d’avis que le législateur souhaitait qu’il y ait une continuité importante de l’intérêt des actionnaires de Perte Ltée dans l’entreprise fusionnée pour que le contrôle ne soit pas réputé avoir été acquis dans ces circonstances. Dans la présente affaire, il ressort des preuves qu’il n’y a aucune continuité d’intérêt des actionnaires originaux de Veracel en qualité d’actionnaires de l’appelante.

[102]   À mon avis, en exigeant l’application du critère de la participation majoritaire pour déterminer les circonstances dans lesquelles la règle déterminative s’appliquerait, le législateur ne s’attendait pas à ce que les contribuables contournent la règle en mettant en œuvre des stratégies ayant pour effet de fausser la participation des actionnaires de la société déficitaire remplacée dans l’entité fusionnée ou de faire en sorte que des personnes deviennent artificiellement des actionnaires d’une société déficitaire remplacée uniquement pour assurer le respect de la lettre du critère. Comme je l’ai déjà mentionné, je conclus que c’est effectivement ce qu’ont fait les parties lorsqu’elles ont « implanté » le financement par capitaux propres exigé dans Veracel, de sorte que les nouveaux investisseurs sont devenus titulaires d’actions de catégorie B de Veracel pour un bref instant de façon à assurer le respect du libellé de la disposition.

[103]   Selon l’arrêt Trustco Canada, « on peut conclure à l’existence d’un évitement fiscal abusif si les rapports et les opérations décrits dans la documentation pertinente sont dénués de fondement légitime relativement à l’objet ou à l’esprit des dispositions censées conférer l’avantage fiscal, ou si ces rapports et opérations diffèrent complètement de ceux prévus par les dispositions[55] ». J’estime que tel est le cas en l’espèce.

[104]   En matière d’échange de pertes, en l’absence de la division 256(7)b)(iii)(B), les actionnaires de Perte Ltée qui cherchent à monétiser leurs pertes après que la société en question a abandonné l’entreprise en difficulté détiendraient en fin de compte moins qu’une majorité des actions avec droit de vote de l’entité fusionnée[56]. Leur participation dans l’entité fusionnée traduirait la valeur marchande des pertes. Les actionnaires de Publique Ltée se retrouveraient avec une participation majoritaire[57] dans l’entité fusionnée.

[105]   À mon avis, il ressort du critère de la participation majoritaire que le législateur ne voulait pas que les fusions et les prises de contrôle inversées servent de techniques permettant d’éviter une acquisition du contrôle dans les cas où les actionnaires originaux de Perte Ltée ne reçoivent pas ensemble des actions représentant une participation majoritaire dans l’entreprise fusionnée.

[106]   En conséquence, il m’apparaît évident que le législateur a retenu le critère de la participation majoritaire afin d’empêcher que Perte Ltée soit intégrée dans Publique Ltée sans qu’il y ait acquisition du contrôle de la première. Suivant une analyse textuelle, contextuelle et téléologique du sous‑alinéa 256(7)b)(iii), le respect artificiel[58] du critère de la participation majoritaire constitue une utilisation abusive de la disposition lorsque l’opération est dénuée de fondement approprié en ce qui concerne l’objet ou l’esprit de ce critère.

[107]   Il convient ici de formuler de brèves observations au sujet de la jurisprudence Copthorne[59]. Copthorne Holdings Ltd. (« Copthorne ») était une société canadienne qui était la société mère de VHHC Holdings Ltd. (« VHHC »). Dans le cadre d’une série d’opérations qui se sont étalées sur plusieurs années, Copthorne a vendu les actions de VHHC à une société non résidente apparentée. En conséquence, Copthorne et VHHC sont devenues des sociétés « sœurs ». Copthorne et VHHC ont ensuite fusionné « horizontalement » pour former la société remplaçante, également appelée Copthorne.

[108]   Copthorne soutenait que, étant donné que la fusion était « horizontale », le capital versé de ses actions comprenait le montant du capital versé des actions des deux sociétés remplacées. Si les deux sociétés remplacées avaient encore été une société mère et une filiale, le capital versé de VHHC aurait été annulé par une fusion « verticale ».

[109]   Confirmant la décision de la Cour canadienne de l’impôt, la Cour suprême du Canada a conclu que, dans les circonstances, la fusion horizontale de Copthorne et de VHHC était assujettie à l’application de la RGAÉ. Le capital versé de VHHC a été éliminé lors du calcul du capital versé de Copthorne.

[110]   À mon avis, la nature « abusive » des opérations analysées à l’occasion de l’affaire Copthorne est moins évidente que dans le cas de l’abus constaté relativement aux opérations examinées en l’espèce. Je constate que, dans l’affaire Copthorne, la série d’opérations ayant donné lieu à l’avantage a été effectuée sur une longue période. Il ne ressortait pas clairement des preuves non plus que toutes les opérations de la série avaient été entièrement planifiées lorsque les premières ont été conclues. Ces difficultés n’ont pas empêché la Cour suprême du Canada d’examiner la situation au point de départ de la série d’opérations, lorsque Copthorne était la société mère de VHHC.

[111]   En revanche, dans la présente affaire, les nouveaux investisseurs n’étaient pas des actionnaires de Veracel au début de la série d’opérations. Ils sont devenus actionnaires de passage de Veracel dans le seul but d’assurer le respect artificiel du critère de la participation majoritaire exigé par la division 256(7)b)(iii)(B). De plus, les opérations de Veracel ont été soigneusement planifiées avant d’être mises en œuvre. Elles ont été exécutées rapidement et par ordre séquentiel. Les nouveaux investisseurs sont devenus actionnaires de Veracel sur papier pour un très court instant. Le financement a été « implanté » dans Veracel de manière à contourner la règle déterminative du sous‑alinéa 256(7)b)(iii), dans le cadre d’une démarche visant à faire en sorte que les opérations soient visées par l’exception énoncée dans la division 256(7)b)(iii)(B) sans pour autant aller à l’encontre de l’objet et de l’esprit de cette exception. Bien que la planification fiscale ne donne pas nécessairement lieu à l’application de la RGAÉ, la planification examinée en l’espèce va au‑delà des limites permises.

[112]   Le paragraphe 245(2) permet au ministre de déterminer les conséquences fiscales qui sont raisonnables dans les circonstances de façon à supprimer un avantage fiscal. Tel qu’il est signalé plus haut, les opérations de Veracel ont été planifiées de façon à être visées par l’exception prévue dans la division 256(7)b)(iii)(B). En conséquence, il y a lieu d’ignorer, à mon avis, l’émission des actions de catégorie B par Veracel, de sorte que le contrôle de celle‑ci a été acquis lors de sa fusion avec Birchcliff. Dans ce contexte, selon les conséquences fiscales raisonnables découlant de l’application de la RGAÉ, les restrictions relatives au transfert des pertes s’appliquent de manière à empêcher l’appelante d’utiliser les attributs fiscaux de Veracel.

VIII. Conclusion

[113]   Par tous les motifs exposés ci‑dessus, l’appel est rejeté et la nouvelle cotisation établie par le ministre à l’égard de l’année d’imposition 2006 de l’appelante est ratifiée. Les dépens sont adjugés à l’intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour d’octobre 2015.

« Robert J. Hogan »

Juge Hogan

Traduction certifiée conforme

ce 25e jour de mai 2016.

François Brunet, réviseur


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 232

 

N° DU DOSSIER DE LA COUR :

2012‑1087(IT)G

 

INTITULÉ :

BIRCHCLIFF ENERGY LTD. c. LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 18, 19, 20 et 21 novembre 2013

 

OBSERVATIONS ÉCRITES SUPPLÉMENTAIRES REÇUES DES PARTIES :

Le 10 septembre 2015

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Robert J. Hogan

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 1er octobre 2015

 

 

COMPARUTIONS :

 

 

Avocats de l’appelante :

Me Patrick Lindsay

Me Jean‑Philippe Couture

 

Avocats de l’intimée :

Me Robert Carvalho

Me Neva Beckie

Me Jonathan Wittig

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

Me Patrick Lindsay

PwC Cabinet d’avocats S.E.N.C.R.L./s.r.l.

(auparavant chez Borden Ladner Gervais)

Calgary (Alberta)

 

 

Me Jean‑Philippe Couture

Borden Ladner Gervais

Calgary (Alberta)

 

Pour l’intimée :

Me William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1] Le consentement des parties a été donné dans une lettre datée du 16 juillet 2015.

[2] Transcription du 18 novembre 2013, aux pages 70, 71 et 123.

[3] Selon la division 256(7)b)(iii)(B), le lecteur doit supposer que les actions de l’entité fusionnée acquises par les actionnaires d’une société remplacée donnée ont toutes été acquises par une seule personne hypothétique. Le lecteur doit ensuite rechercher si cette personne hypothétique aurait acquis le contrôle de droit de l’entité fusionnée dans cette situation hypothétique. Si la réponse est négative, le contrôle de l’entité remplacée donnée est réputé avoir été acquis immédiatement avant la fusion. Si la réponse est positive (auquel cas nous sommes en présence de ce qui est appelé ci‑après une « participation majoritaire »), le contrôle de l’entité remplacée donnée n’est pas réputé avoir été acquis. J’expose aux paragraphes 96 à 106 de mes motifs ma perception de l’objet de la disposition.

[4] Les actionnaires de Veracel immédiatement avant l’arrivée des nouveaux investisseurs à titre de titulaires d’actions de catégorie B sont appelés aux présentes les « actionnaires originaux de Veracel ».

[5] Note du 29 mars 2005 envoyée aux actionnaires de Veracel, pièce A‑1, onglet 24, cahier conjoint de documents.

[6] Bob Allan était le président et un administrateur de Veracel à l’époque (pièce A‑1, onglet 17, cahier conjoint de documents).

[7] Pièce A‑1, onglet 17, cahier conjoint de documents.

[8] Transcription du 18 novembre 2013, à la page 128.

[9] Pièce A‑3, onglet 131.

[10] Pièce A‑1, onglet 4.

[11] Pièce A‑1, onglet 13.

[12] Pièce A‑1, onglet 24, note de John Anderson aux actionnaires de Veracel.

[13] Pièce A‑1, onglet 27.

[14] Pièce A‑3, onglet 124.

[15] Pièce A‑1, onglet 42.

[16] Pièce A‑2, onglet 61.

[17] Pièce A‑1, onglet 44.

[18] Transcription du 18 novembre 2013, aux pages 82, 83 et 157.

[19] Transcription du 18 novembre 2013, aux pages 82 et 83.

[20] Transcription du 18 novembre 2013, à la page 157.

[21] Transcription du 20 novembre 2013, à la page 96.

[22] Transcription du 20 novembre 2013, à la page 194.

[23] Transcription du 19 novembre 2013, à la page 96.

[24] Transcription du 20 novembre 2013, aux pages 3 et 4.

[25] Pièce A‑1, onglet 16.

[26] Transcription du 20 novembre 2013, à la page 7.

[27] Transcription du 18 novembre 2013, à la page 176.

[28] Transcription du 21 novembre 2013, aux pages 65 et 66.

[29] [1967] 1 All ER 518.

[30] Snook, à la page 528.

[31] M.R.N. c. Cameron, [1974] R.C.S. 1062.

[32] [1984] 1 R.C.S. 536.

[33] Stubart, aux pages 545 et 546.

[34] 2010 CAF 280.

[35] Antle, au paragraphe 20.

[36] 2008 CAF 398.

[37] Il ne peut y avoir d’acquisition de contrôle par suite d’un placement d’actions d’une filiale dans le cadre d’une opération « papillon ».

[38] 2002 CAF 260.

[39] 2005 CSC 54.

[40] 2009 CSC 1.

[41] 2011 CSC 63.

[42] Trustco Canada, au paragraphe 66.

[43] Copthorne, au paragraphe 35.

[44] Copthorne, au paragraphe 39.

[45] Trustco Canada, au paragraphe 28.

[46] Trustco Canada, au paragraphe 36.

[47] Trustco Canada, au paragraphe 44.

[48] Trustco Canada, au paragraphe 45.

[49] Trustco Canada, au paragraphe 66. Ce fardeau est souvent appelé le « fardeau de persuasion » et découle du concept de « l’équité procédurale ». Le contribuable doit connaître le moyen soulevé contre lui. Fait intéressant à souligner, ce fardeau n’a pas été interprété comme un obstacle empêchant les appelants de soulever en appel des moyens qui n’avaient pas été invoqués devant la Cour canadienne de l’impôt, comme ce qui a été fait dans l’affaire Global Equity Fund Ltd. c. La Reine, 2011 CCI 507, pourvu que, en pareil cas, la partie intimée n’ait pas été lésée par le fait que l’appelante a invoqué tardivement les nouveaux moyens de droit. Dans cette affaire‑là, la juge Woods a accueilli l’appel, parce que la Couronne ne l’a pas convaincue que la RGAÉ jouait. En appel, la Couronne a soulevé différentes thèses au sujet de l’objet et de l’esprit des dispositions que le plan fiscal de l’appelante avait violées. La Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel pour ces motifs aux paragraphes 66 à 68 de l’arrêt Canada c. Global Equity Fund Ltd., 2012 CAF 272. La détermination de l’objet et de l’esprit d’une disposition législative est, après tout, une question de droit.

[50] Copthorne, au paragraphe 65.

[51] J’ai constaté que l’appelante n’a pas discuté, dans ses observations écrites, la question de l’application de la règle de détermination précise. Conscient de l’exigence plus élevée qui s’appliquait en matière d’équité procédurale en raison du fait que ce n’est pas moi qui ai instruit l’appel, j’ai donné aux deux parties la possibilité de déposer des observations écrites supplémentaires. Les deux parties ont déposé des observations écrites supplémentaires portant sur cette question précise.

[52] Copthorne, au paragraphe 91.

[53] En 1997, le gouvernement fédéral a édicté le sous‑alinéa 256(7)b)(iii), qui visait à modifier l’ancien alinéa 256(7)b), ainsi que l’alinéa 256(7)c), qui constituait une nouvelle disposition de la Loi. Le sous‑alinéa 256(7)b)(iii) a eu pour effet d’élargir la portée des règles de l’acquisition de contrôle réputée dans le contexte des fusions, tandis que l’alinéa 256(7)c) a eu pour effet d’introduire une règle de l’acquisition de contrôle réputée dans une situation de prise de contrôle inversée. Les notes explicatives accompagnant les modifications donnent à penser que les dispositions relatives à l’« actionnaire hypothétique » de la division 256(7)b)(iii)(B) et du sous‑alinéa 256(7)c)(ii) ont été édictées parce que, avant les modifications, certaines sociétés pouvaient échapper à l’application des règles d’acquisition de contrôle réputée au motif qu’elles étaient des sociétés à grand nombre d’actionnaires qui ne comptaient pas d’actionnaires majoritaires, de sorte que l’entité fusionnée n’était pas, en fin de compte, contrôlée par une personne ou un « groupe de personnes ». Il semble donc que ces dispositions ont été édictées pour faciliter l’application des règles d’acquisition de contrôle réputée.

[54] Canada, ministère des Finances, Notes explicatives concernant l’impôt sur le revenu (Ottawa, Ministère des Finances, 1997), aux pages 570 et 571.

[55] Trustco Canada, au paragraphe 60.

[56] Dans ce contexte, en l’absence d’une intention de contourner les restrictions relatives au transfert des pertes, il serait normal que les droits de vote des parties concordent avec leur participation économique dans l’entité.

[57] Selon la définition énoncée plus haut, note 3 qui précède.

[58] Dans la présente affaire, il ressort des preuves que les nouveaux investisseurs ont assumé un risque minime en tant que détenteurs d’actions de catégorie B, parce qu’ils n’ont été actionnaires que pendant un très court moment. Ils avaient l’assurance, conformément à un plan d’arrangement approuvé par le tribunal, qu’ils se retrouveraient avec des actions de la société issue de la fusion. Il ressort des faits que cette stratégie visait à assurer le respect textuel de la division 256(7)b)(iii)(B).

[59] 2011 CSC 63.

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