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Dossier : 2011-2561(IT)G

ENTRE :

Michel Marcogliese,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

____________________________________________________________________

Appel entendu le 15 octobre 2013, à Montréal (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Lucie Lamarre

 

Comparutions :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Mounes Ayadi

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

        L'appel de la cotisation datée du 8 avril 2010, établie en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu et portant le numéro 982014, est rejeté, avec dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de décembre 2013.

 

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 


 

 

 

 

Référence : 2013 CCI 388

Date : 20131205

Dossier : 2011-2561(IT)G

ENTRE :

Michel Marcogliese,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Lamarre

 

 

[1]             L’appelant en appelle d’une cotisation établie par le ministre du Revenu national (ministre) pour un montant de 30 215,44 $, en application de l’article 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR). Les passages pertinents de l’article 160 se lisent comme suit :

 

160. (1) Transfert de biens entre personnes ayant un lien de dépendance — Lorsqu’une personne a, depuis le 1er mai 1951, transféré des biens, directement ou indirectement, au moyen d’une fiducie ou de toute autre façon à l’une des personnes suivantes :

a) son époux ou conjoint de fait ou une personne devenue depuis son époux ou conjoint de fait;

b) une personne qui était âgée de moins de 18 ans;

cune personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance,

les règles suivantes s’appliquent :

d) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement d’une partie de l’impôt de l’auteur du transfert en vertu de la présente partie pour chaque année d’imposition égale à l’excédent de l’impôt pour l’année sur ce que cet impôt aurait été sans l’application des articles 74.1 à 75.1 de la présente loi et de l’article 74 de la Loi de l’impôt sur le revenu, chapitre 148 des Statuts révisés du Canada de 1952, à l’égard de tout revenu tiré des biens ainsi transférés ou des biens y substitués ou à l’égard de tout gain tiré de la disposition de tels biens;

ele bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d’un montant égal au moins élevé des montants suivants :

(i) l’excédent éventuel de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour le bien,

(ii) le total des montants représentant chacun un montant que l’auteur du transfert doit payer en vertu de la présente loi (notamment un montant ayant ou non fait l’objet d’une cotisation en application du paragraphe (2) qu’il doit payer en vertu du présent article) au cours de l’année d’imposition où les biens ont été transférés ou d’une année d’imposition antérieure ou pour une de ces années.

Toutefois, le présent paragraphe n’a pas pour effet de limiter la responsabilité de l’auteur du transfert en vertu de quelque autre disposition de la présente loi ni celle du bénéficiaire du transfert quant aux intérêts dont il est redevable en vertu de la présente loi sur une cotisation établie à l’égard du montant qu’il doit payer par l’effet du présent paragraphe.

[…]

(2) CotisationLe ministre peut, en tout temps, établir une cotisation à l’égard d’un contribuable pour toute somme à payer en vertu du présent article. Par ailleurs, les dispositions de la présente section, notamment celles portant sur les intérêts à payer, s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux cotisations établies en vertu du présent article comme si elles avaient été établies en vertu de l’article 152 relativement aux impôts à payer en vertu de la présente partie.

                                                                                               [Je souligne.]

 

[2]             Les faits tenus pour acquis par le ministre pour établir sa cotisation sont relatés au paragraphe 5 de la Réponse à l’avis d’appel modifié (Réponse) et sont reproduits ci-après avec les corrections apportées par l’avocat de l’intimée en début d’audience, que j’ai soulignées :

 

5. Pour établir la cotisation datée du 8 avril 2010 et portant le numéro 982014, en vertu de l'article 160 de la Loi, le ministre a tenu pour acquis les faits suivants :

 

a)   la compagnie La Garderie au Village des Poupons inc., ci-après appelée « la compagnie », a été constituée le 19 mai 1992; admis

b)   la compagnie opérait une garderie; admis

c)   pendant la période pertinente au présent litige, l'appelant était l'actionnaire majoritaire et l'administrateur de la compagnie; admis

d)   l'exercice financier de la compagnie débute le 1er avril pour se terminer le 31 mars; admis

e)   selon les états financiers de la compagnie annexés à ses déclarations de revenus T2, pour les exercices financiers terminés le 31 mars 2001 et le 31 mars 2002, l'appelant a reçu de la compagnie des dividendes réels de 21 000 $ et de 10 000 $, respectivement, pour un total de 31 000 $;

f)   en produisant ses déclarations de revenus pour les années d'imposition 2000 et 2001, l’appelant a déclaré des dividendes réels de 21 000 $ et de 10 000 $ respectivement pour un total de 31 000 $ et des dividendes imposables de 26 250 $ et de 12 500 $, respectivement;

g)   la compagnie a émis à l’égard de l'appelant des feuillets T5 pour constater les dividendes mentionnés au paragraphe précédent; admis

h)   l'appelant n'a versé à la compagnie aucune contrepartie à l’encontre des dividendes qui lui ont été versés; admis

i)    le 12 décembre 2000, la compagnie a déposé une proposition concordataire en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité qui a été acceptée par les créanciers le 29 décembre 2000 et entérinée par le tribunal le 4 mai 2001; admis

j)    le 20 décembre 2000 et le 24 octobre 2001, le ministre a émis des avis de cotisation initiale à l’égard de la compagnie pour ses années d’imposition terminées le 31 mars 2000 et le 31 mars 2001 et a établi l’impôt payable par la compagnie tel que déclaré dans ses déclarations de revenu aux montants de 16 860 $ et de 17 408 $, respectivement;

k)   en date d'émission de la cotisation portant le numéro 982014, qui fait l’objet du présent appel, la dette fiscale de la compagnie envers le ministre en rapport avec les cotisations du 20 décembre 2000 et du 24 octobre 2001 totalisait la somme de 30 215,44 $;

l)    le ministre a déterminé que le transfert des sommes de 21 000 $ et de 10 000 $ effectués [sic] par la compagnie en faveur de l'appelant représente un transfert de biens entre personnes liées sans contrepartie, de sorte qu'il est solidairement responsable avec la compagnie du paiement de la dette fiscale de cette dernière au montant de 30 215,44 $.

 


 

Point en litige

 

[3]             L’alinéa 5 l) de la Réponse ci-dessus représente le point en litige. L’appelant considère qu’il n’est pas responsable du paiement de cette dette puisque, selon lui, la dette aurait été éteinte par suite de la proposition faite en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI).

 

 

Faits en preuve

 

[4]             Des documents déposés en preuve, il ressort ce qui suit. Le 12 décembre 2000, le conseil d’administration (CA) de Garderie au village des poupons inc. (Garderie) a décidé d’enregistrer une proposition en vertu de l’article 62 de la LFI (pièce I-1, onglet 2, page 5).

 

[5]             Un rapport a été fait au syndic, pour le surintendant des faillites, également le 12 décembre 2000, sur l’état de l’évolution de l’encaisse pour les mois de décembre 2000 et de janvier 2001, en conformité avec les paragraphes 50(6) et 50.4(2) de la LFI (pièce I-1, onglet 2, pages 6 à 9). On prévoyait dans l’état de l’évolution de l’encaisse les recettes et les dépenses de Garderie. Monsieur Marcogliese a expliqué en cour que le montant des salaires prévu dans cet état ne représentait que les salaires versés aux employés de Garderie. Aucune prévision n’a été faite pour sa propre rémunération, même s’il y travaillait également.

 

[6]             Une proposition a été formulée, à la même date, par laquelle les créanciers ordinaires (non garantis) ayant une réclamation prouvable, lesquels étaient indiqués sur la liste A, acceptaient un dividende total de 48 000 $, payable au prorata des réclamations sur une période de 24 mois (pièce I-1, onglet 2, pages 11 à 14).

 

[7]             Monsieur Marcogliese a fait remarquer en cour que l’Agence du revenu du Canada (ARC) n’a pas inscrit sa preuve de réclamation pour le montant de 30 215,44 $, lequel montant fait l’objet de la cotisation aujourd’hui. Selon la liste des créanciers non garantis (pièce I-1, onglet 2, page 11), le montant de 20 905 $ qui apparaît pour l’ARC aurait trait aux retenues à la source (RAS) non remises et non à la dette fiscale de Garderie que l’on réclame maintenant de l’appelant. Ceci a été confirmé par l’intimée. Madame Véronique Pagé, agente de recouvrement pour l’ARC, a mentionné que Garderie avait produit sa déclaration de revenus seulement le 20 décembre 2000, donc après la date du dépôt de la proposition, le 12 décembre 2000.

 

[8]             La proposition a été acceptée par les créanciers le 29 décembre 2000 et entérinée par la Cour supérieure du Québec le 4 mai 2001 (Réponse, alinéa 5 i) et pièce I-1, onglet 2, page 3).

 

[9]             Ce n’est que le 31 juillet 2003 qu’un bordereau de dividende et l’état définitif des recettes et des débours ont été établis par le syndic, dans lesquels on voit que les RAS payables aux gouvernements fédéral et provincial ont été versées. Dans la demande de libération du syndic dans l’affaire de la proposition de Garderie aux termes de l’alinéa 152(5) c) de la LFI, en date du 12 juillet 2004, le syndic indique qu’aucun dividende de faillite n’avait à être payé (pièce I-1, onglet 2, pages 2-4).

 

[10]        Ceci a fait dire à madame Pagé que cela était une autre raison de ne pas déposer une preuve de réclamation de la dette fiscale de Garderie, puisqu’aucun paiement n’était prévu en remboursement des dettes, autres que les RAS, des créanciers non garantis. L’appelant a confirmé qu’aucun créancier figurant sur la liste A n’avait reçu quoi que ce soit en lien avec la proposition (à l’exception des gouvernements, pour les RAS, et la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) en vertu d’une entente séparée).

 

[11]        Au moment de finaliser les états financiers de Garderie le 31 mars 2001, l’appelant a expliqué en cour, lui et sa comptable ont pris la décision conjointe de ne pas déclarer de salaire à l’appelant pour que les dépenses de Garderie n’excèdent pas le montant prévu à la proposition. L’appelant et sa comptable étaient pleinement conscients que si on déclarait un salaire, un boni ou un prêt à l’actionnaire, cela augmenterait les dépenses prévues dans la proposition, au risque de voir celle-ci se faire annuler. Le seul choix qui restait pour que l’appelant reçoive un revenu était la déclaration d’un dividende, d’où un dividende déclaré de 21 000 $ pour l’année financière de Garderie se terminant le 31 mars 2001 et un dividende imposable de 26 250 $ (pièce I-1, onglets 4 et 6 et pièce A-1). L’appelant a inclus ce dividende dans sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2000.

 

[12]        Pour l’année financière de Garderie se terminant le 31 mars 2002, il y avait assez de revenus pour que Garderie puisse déclarer un salaire de 11 560 $ pour l’appelant (pièce I-1, onglet 4, 1ère page, et pièce A-1), mais un dividende de 10 000 $ (dividende imposable de 12 500 $) lui a aussi été octroyé (pièce I-1, onglet 4, 3e page et onglet 6, 2e page). L’appelant a inclus ces revenus dans sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2001 (pièce I-1, onglet 4, 1ère page et pièce A-1).

 

[13]        L’appelant dit qu’il a fait la proposition pour éviter que Garderie ne fasse faillite et ainsi préserver l’emploi de ses employés. Il ne comprend pas pourquoi l’ARC n’a pas fait valoir sa preuve de réclamation en même temps que les autres créanciers au moment de la proposition. Il ne comprend pas pourquoi l’ARC se retourne contre lui maintenant alors qu’elle aurait pu faire valoir son point au moment de la proposition, ou du moins lors du 2e versement de dividende en mars 2002.

 

 

Analyse

 

 

I  Existence d’un transfert

 

[14]        Il est clair qu’un dividende versé par une société à son actionnaire constitue un transfert sans contrepartie au sens du paragraphe 160(1) de la LIR (Gilbert c. Canada, 2007 CAF 136, 2007 A.C.F. no 483 (QL), 2007 DTC 5270), et ce, même si l’actionnaire a rendu des services à la société dont il est actionnaire (Neuman c. M.R.N., [1998] 1 R.C.S. 770; Côté c. Canada, [2002] A.C.L. no 76 (QL), 2002 DTC 1348; Pauzé c. Canada, [1998] A.C.I. no 560) (QL), 98 DTC 2109.

 

[15]        Par ailleurs, l’argument voulant que le contribuable se soit payé un salaire dans le fond et non un dividende ne tient pas non plus. L’appelant savait pertinemment que c’est un dividende qu’il se versait puisqu’un salaire aurait eu pour effet d’augmenter les dépenses, ce qu’il ne souhaitait pas pour ne pas mettre en péril la proposition. Ainsi, le fait pour la société d’établir des feuillets T-5 et ainsi déclarer officiellement des dividendes, et pour l’appelant de déclarer des dividendes dans ses déclarations de revenus, démontre qu’il ne pouvait s’agir d’un salaire ou boni ou d’une avance, mais bien d’un dividende (Piuze c. Canada, [2002] A.C.I. no 630) (QL), 2003 DTC 45).

 


 

II  Montant de la dette fiscale de Garderie aux termes de la LIR

 

[16]        La question qui se pose maintenant est celle de savoir quel était le total des montants que Garderie devait payer en vertu de la LIR au cours des années d’imposition où les transferts ont eu lieu ou des années d’imposition antérieures.

 

[17]        L’appelant a reçu un dividende de 21 000 $ au cours de l’année d’imposition 2001 de Garderie (1er avril 2000 au 31 mars 2001) et un dividende de 10 000 $ au cours de l’année d’imposition 2002 de Garderie (1er avril 2001 au 31 mars 2002).

 

[18]        La dette fiscale de Garderie pour l’année d’imposition 2000 (1er avril 1999 au 31 mars 2000) était de 16 860 $ selon la cotisation du 20 décembre 2000. Sa dette fiscale pour l’année d’imposition 2001 (1er avril 2000 au 31 mars 2001) était de 17 408 $ selon la cotisation du 24 octobre 2001. (Voir l’alinéa 5 j) de la Réponse.)

 

[19]        J’en conclus qu’au moment du premier versement de dividende de 21 000 $ au cours de l’année d’imposition se terminant le 31 mars 2001, la dette fiscale (établie selon les cotisations de Garderie du 20 décembre 2000 et du 24 octobre 2001), totalisait 34 268 $[1] (16 860 $ + 17 408 $). En effet, même si la deuxième cotisation, celle du 24 octobre 2001 pour l’année d’imposition 2001 (1er avril 2000 au 31 mars 2001), est postérieure au 31 mars 2001, il est un principe établi que la dette existe et prend naissance dès le moment où le revenu est gagné, et cela même si la cotisation survient après la fin de l’année d’imposition. La cotisation ne fait que confirmer l’existence de la dette, laquelle est due au plus tard à la fin de chacune des années en cause (Electrocan Systems Ltd. v. The Queen, 1988 CarswellNat 494, [1989] 1 C.T.C. 244, 89 DTC 5079, 95 N.R. 281 (CAF); La Reine c. Simard-Beaudry Inc., [1971] C.F. 396, 1971 CarswellNat 239F, 71 DTC 5511 (CAF).

 

 

III  Effet de la proposition déposée en vertu de la LFI sur la responsabilité de l’appelant en vertu de l’article 160 de la LIR

 

[20]        La proposition a eu lieu le 12 décembre 2000; elle a été acceptée par les créanciers le 29 décembre 2000 et entérinée par le tribunal le 4 mai 2001.

 

[21]        La date du dépôt de la proposition auprès du séquestre officiel constitue le moment pour déterminer les réclamations prouvables des créanciers (paragraphe 62(1.1), article 121 LFA). Toutefois, l’ARC n’a pas l’obligation de scinder sa réclamation pour l’année fiscale durant laquelle une proposition a été présentée (Canada c. Marchessault, 2007 CAF 345, 2007 DTC 5749; voir également Jacques Deslauriers, La faillite et l’insolvabilité au Québec, 2e édition, Montréal, Wilson & Lafleur, 2011, paragraphe 520).

 

[22]        Dans le cas présent, le dépôt de la proposition a eu lieu dans l’année d’imposition se terminant le 31 mars 2001. En vertu de Marchessault, la cotisation du 24 octobre 2001 pour l’année d’imposition 2001 n’est donc pas visée par la proposition, puisque le dépôt de celle-ci le 12 décembre 2000 a été fait antérieurement à la fin de l’année d’imposition 2001 (l’ARC étant autorisée à ne pas scinder l’année d’imposition en deux périodes, préproposition et postproposition).

 

[23]        Quant à la dette fiscale établie pour l’année 2000, elle faisait bien partie de la proposition, même si l'ARC n’est pas intervenue dans le processus (n’ayant pas déposé sa preuve de réclamation[2]). Toutefois, Garderie, la débitrice fiscale, n’a pas été libérée de sa dette en vertu de la proposition avant que celle-ci soit entérinée par le tribunal le 4 mai 2001[3]. Or, l’appelant a reçu son premier dividende de 21 000 $ dans l’année d’imposition se terminant le 31 mars 2001, avant que Garderie ne soit libérée de sa dette pour l’année fiscale 2000.

 

[24]        Au moment où l’appelant a reçu le premier dividende de 21 000 $, Garderie était donc déjà endettée de 34 268 $ (pour les deux années d’imposition 2000 et 2001) et celle-ci n’était pas encore libérée pour la partie de la dette fiscale incluse dans la proposition. La dette était donc existante au moment du transfert et l’appelant est donc devenu solidairement responsable du paiement de la dette jusqu’à concurrence du montant de 21 000 $ reçu à titre de dividende (sous‑alinéa 160(1) e) (i) LIR).

 

[25]        Quand l’appelant a reçu le deuxième dividende, de 10 000 $, au cours de l’année d’imposition se terminant le 31 mars 2002, la dette fiscale de 17 408 $ établie par la cotisation du 24 octobre 2001 pour l’année d’imposition 2001, postérieurement au dépôt de la proposition, ne faisait pas partie de cette dernière et était donc toujours existante. L’appelant était donc solidairement responsable du paiement de cette dette fiscale jusqu’à concurrence du montant de 10 000 $ reçu à titre de dividende (sous-alinéa 160(1) e) (i) LIR).

 

[26]        L’appelant, en recevant les deux montants de dividendes totalisant 31 000 $, est donc devenu solidairement responsable avec Garderie du montant dû par celle-ci en vertu des deux cotisations établies pour les années d’imposition 2000 et 2001, jusqu’à concurrence du montant de ces dividendes. Puisqu’au moment de l’établissement de la cotisation de l’appelant en vertu de l’article 160 LIR, la dette due par Garderie s’établissait à 30 215,44 $, l’ARC a établi à l’égard de l’appelant une cotisation pour ce montant en application du sous-alinéa 160(1) e) (ii) LIR.

 

 

IV  Cotisation en vertu de l’article 160 établie seulement le 8 avril 2010

 

[27]        Comme le disait la Cour d’appel fédérale dans Heavyside c. Canada, [1996] A.C.F. no 1608 (QL), au paragraphe 9, le ministre pouvait établir « à une date quelconque » une cotisation à l’égard de l’appelant, le bénéficiaire du transfert (voir également paragraphe 160(2) LIR, qui prévoit que le ministre peut, en tout temps, établir une cotisation à l’égard d’un contribuable pour toute somme à payer en vertu de l’article 160).

 

[28]        Ainsi, cela répond à l’argument de l’appelant, qui soutient que le ministre aurait dû réagir au moment de la déclaration du dividende pour soulever l’application du paragraphe 160(1).

 

[29]        La Cour d’appel fédérale disait ceci au paragraphe 10 de l’arrêt Heavyside:

 

10     La date choisie par le ministre pour établir la cotisation d'impôt à l'égard de la bénéficiaire du transfert n'entraîne aucune conséquence. Il est bien établi que la responsabilité fiscale découle de la Loi et non pas de la cotisation et qu'en l'espèce c'est le transfert qui a donné naissance à la responsabilité. Par conséquent, l'intimée était personnellement responsable, pour son année d'imposition 1989, de l'impôt sur le revenu à l'égard des gains tirés de la disposition du bien qui lui a été transféré et comme sa responsabilité est solidaire avec celle de son conjoint, cette responsabilité est indépendante de celle de son conjoint et elle ne s'est pas éteinte en même temps que la propre obligation fiscale de son conjoint quand celui-ci a fait faillite en 1994. Le fait que la cotisation à son égard n'ait été établie qu'en 1994 et uniquement après la libération de son conjoint n'a aucun effet sur sa propre obligation fiscale.

 

[30]        En conséquence, l’appelant est redevable d’un montant de 30 215,44 $, par application de l’article 160 de la LIR.

 

[31]        L’appel est rejeté, avec dépens.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de décembre 2013.

 

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 388

 

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :    2011-2561(IT)G

 

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :            Michel Marcogliese c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Montréal (Québec)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 15 octobre 2013

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :     L'honorable juge Lucie Lamarre

 

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 5 décembre 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Mounes Ayadi

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant:

 

                     Nom :                          

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 



[1]           Toutefois, cette dette s’établissait à 30 215,44 $ au moment de la cotisation en vertu de l’article 160 LIR (pièce I-1, onglet 1 et alinéas 5 k) et l) de la Réponse).

[2]           Voir Frank Bennett, Bennett on Bankruptcy, 15e éd., Toronto, CCH, 2012, à la page 252: « A proposal accepted by the creditors and approved by the court is binding on all unsecured creditors even though a creditor has not participated in the process ».

 

[3]           Voir L. W. Houlden, G. B. Morawetz et Janis Sarra, Bankruptcy and Insolvency Law of Canada, 4e éd., vol. 1, feuilles mobiles,Toronto, Carswell, 2013, page 2-316, cité dans Martel c. La Reine, 2010 CCI 634 : « When a proposal is accepted by creditors and approved by the court, the debtor receives the same relief as he or she would receive from a discharge from bankruptcy, i.e., a release of all debts and liabilities to unsecured creditors, except those listed in s. 178 [...] ». [Je souligne.]

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