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Dossier : 2011-3419(GST)G

ENTRE :

COURTYARD TERRACE ASSISTED LIVING RESIDENCE LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Cartier House Care Centre Ltd., 2011‑3420(GST)G, les 10 et 11 décembre 2014, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

Devant : L'honorable juge B. Paris

Comparutions :

Avocats de l'appelante :

Me Kimberley Cook

Me Noah Sarna

Avocats de l'intimée :

Me Victor Caux

Me Sara Fairbridge

 

JUGEMENT

Les appels interjetés à l'encontre des cotisations établies le 18 janvier 2010 sous le régime de la Loi sur la taxe d'accise pour les périodes du 2 août 2007 au 31 octobre 2007 et du 1er novembre 2007 au 30 juin 2009 sont accueillis en partie, avec dépens, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de novembre 2015.

« B. Paris »

Le juge Paris


Dossier : 2011-3420(GST)G

ENTRE :

CARTIER HOUSE CARE CENTRE LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Courtyard Terrace Assisted Living Residence Ltd., 2011‑3419(GST)G, les 10 et 11 décembre 2014, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

Devant : L'honorable juge B. Paris

Comparutions :

Avocats de l'appelante :

Me Kimberley Cook

Me Noah Sarna

Avocats de l'intimée :

Me Victor Caux

Me Sara Fairbridge

 

JUGEMENT

Les appels interjetés à l'encontre des cotisations établies le 18 janvier 2010 sous le régime de la Loi sur la taxe d'accise pour les périodes du 1er août 2007 au 31 octobre 2007 et du 1er novembre 2007 au 30 juin 2009 sont accueillis en partie, avec dépens, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de novembre 2015.

« B. Paris »

Le juge Paris


Référence : 2015 CCI 278

Date : 20151105

Dossiers : 2011-3419(GST)G

2011-3420(GST)G

ENTRE :

COURTYARD TERRACE ASSISTED LIVING RESIDENCE LTD. et CARTIER HOUSE CARE CENTRE LTD.,

appelantes,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Paris

[1]             Les présents appels sont interjetés à l'encontre des cotisations établies sous le régime de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C., 1985, ch. E‑15 (la « Loi »), par lesquelles les demandes de remboursement de la taxe sur les produits et services (TPS) payée par erreur par les appelantes ont été rejetées. Les cotisations visant Courtyard Terrace Assisted Living Residence Ltd. (« CT ») couvrent les périodes de déclaration du 2 août 2007 au 31 octobre 2007 et du 1er novembre 2007 au 30 juin 2009. Les cotisations visant Cartier House Care Centre Ltd. (« CH ») couvrent les périodes de déclaration du 1er août 2007 au 31 octobre 2007 et du 1er novembre 2007 au 30 juin 2009.

[2]              Chaque appelante est l'exploitante à but lucratif d'une résidence pour personnes âgées et est une filiale de la société Park Place Senior Living Inc. (« Park Place »).

[3]             Les appelantes demandent le remboursement de la TPS payée par erreur sur des fournitures de « services ménagers à domicile » rendus par des tiers entrepreneurs lors de l'exploitation des résidences. Les « services ménagers à domicile » sont exonérés de la TPS en vertu de l'article 13 de la partie II de l'annexe V de la Loi.

[4]             Les montants des remboursements qui sont demandés par les appelantes à titre de TPS payée par erreur sont les suivants :

CT :

du 2 août 2007 au 31 octobre 2007

du 1er novembre 2007 au 30 juin 2009

 

5 253,00 $

43 290,34 $

 

CH :

du 1er août 2007 au 31 octobre 2007

du 1er novembre 2007 au 30 juin 2009

13 051,00 $

82 362,52 $

 

[5]             La Cour est appelée à décider i) si les services fournis par les tiers entrepreneurs correspondent à la définition de « service ménager à domicile » qui figure à l'article 1 de la partie II de l'annexe V, et, dans l'affirmative, ii) si certaines des autres conditions d'exonération prévues à l'article 13 de la partie II de l'annexe V ont été remplies, et iii) si certaines fournitures non exonérées réalisées par le tiers entrepreneur à CH sont accessoires à la fourniture de services exonérés.

[6]             Les appels ont été entendus sur preuve commune. M. Rizwan Gehlen, vice‑président aux finances de la société Park Place, a témoigné pour les appelantes.

Les faits

[7]             Au cours des périodes en cause, CH exploitait un établissement de soins de longue durée de 78 places dénommé Cartier House à Coquitlam (Colombie‑Britannique), et CT exploitait une résidence avec services de soutien de 47 places dénommée Courtyard Terrace à Burnaby (Colombie‑Britannique).

[8]             Les deux établissements sont régis par la province en vertu de la loi intitulée Community Care and Assisted Living Act (Loi sur les soins communautaires et les services de soutien), S.B.C. 2002, ch. 75. Les résidences avec services de soutien sont tenues de s'inscrire et les établissements de soins de longue durée doivent obtenir un permis aux termes de cette loi.

[9]             Les résidents emménagent dans les résidences avec services de soutien et dans les établissements de soins de longue durée parce qu'ils ne sont pas capables, en raison de leur âge, d'une infirmité ou d'une invalidité, d'exécuter seuls une partie ou l'ensemble des activités de la vie quotidienne. Les résidences avec services de soutien offrent une étape intermédiaire entre la vie à domicile et la vie dans un établissement de soins de longue durée; les résidents de ce genre d'établissement ont besoin de services de soutien moins nombreux que les résidents des établissements de soins de longue durée.

[10]        La résidence Courtyard Terrace comporte 36 appartements de genre studio et 11 appartements à une chambre à coucher; tous les appartements ont une cuisinette et une salle de bain attenante. Il y a également des salles à manger communes où des repas préparés par le personnel sont servis ainsi qu'une salle de séjour centrale.

[11]        L'établissement Cartier House offrait à ses résidents des chambres meublées privées ou semi‑privées ainsi que des salles à manger communes, une salle de loisirs, des salons et des terrasses.

[12]        CH et 639385 B.C. Ltd. (« 639385 »), société remplacée par CT, ont conclu des ententes avec la régie de la santé Fraser Health Authority (« FHA ») pour la prestation de certains services aux résidents de Cartier House et de Courtyard Terrace. L'entente entre la FHA et 639385 était intitulée [TRADUCTION] « Convention de vie autonome », et l'entente entre la FHA et CH, [TRADUCTION] « Contrat de service et entente de fourniture de services de soins de longue durée ». Par souci de commodité, je désignerai l'entente entre la FHA et 639385 par le terme « entente FHA‑CT » et l'entente entre la FHA et CH par le terme « entente FHA‑CH ».

[13]        La FHA est une régie régionale de la santé qui a été créée en vertu de la loi britanno‑colombienne intitulée Health Authorities Act (Loi sur les régies de la santé), R.S.B.C. 1996, ch. 180. La FHA est responsable de la gestion des services de santé dans la région où les résidences exploitées par les appelantes sont situées.

[14]        Selon son mandat, la FHA est autorisée par le ministre de la Santé de la C.‑B. à conclure des ententes avec des exploitants privés pour la prestation de services aux termes du programme de soins continus de la Colombie‑Britannique. Les ententes avec CH et CT ont été conclues en vertu de ce programme. Ces ententes sont visées par la loi britanno‑colombienne intitulée Continuing Care Act (Loi sur les soins continus), R.S.B.C. 1996, ch. 70, qui décrit comme des [TRADUCTION] « soins continus » certains services de santé fournis aux personnes affaiblies ou ayant une maladie aiguë ou chronique ou une invalidité. Les [TRADUCTION] « services de résidence de longue durée » et les [TRADUCTION] « services de soutien » sont prescrits à titre de services à fournir aux termes du programme de soins continus.

Courtyard Terrace

[15]        L'entente FHA‑CT, contractée le 6 juillet 2005, prévoyait que la FHA subventionnerait la prestation de services d'aide et de santé à 40 des 47 résidents de Courtyard Terrace. Je désignerai les 40 résidents visés par l'entente les « résidents subventionnés » et les sept autres résidents, les « résidents non subventionnés ». L'admission des résidents subventionnés à la résidence Courtyard Terrace était établie uniquement par la FHA.

[16]        Il est stipulé dans l'entente FHA‑CT que CT devait fournir des services d'hébergement ainsi que des [TRADUCTION] « services d'accueil » et des [TRADUCTION] « services de santé » aux résidents subventionnés et que la FHA subventionnerait les « services de santé » fournis par CT à ces résidents. Selon la définition du terme « services d'accueil » dans l'entente, ces services n'étaient pas subventionnés par la FHA.

[17]        Le terme « services de santé » était défini comme suit dans l'entente :

[TRADUCTION]

« Services de santé » désigne les services subventionnés par la FHA et fournis aux locataires par le fournisseur de services de vie autonome, y compris l'aide personnelle, la sécurité, les évaluations médicales, les médicaments et le soutien social, comme décrit en détail à l'annexe A.

[18]        Le terme « services d'accueil » était défini comme suit :

[TRADUCTION]

« Services d'accueil » désigne les services non subventionnés par la FHA et fournis aux locataires par le fournisseur de services de vie autonome, y compris les programmes sociaux et récréatifs, les repas, la lessive, les services ménagers et les services connexes, comme décrit en détail dans la partie 2 de l'annexe A.

[19]        Les services de santé consistaient en une aide aux résidents subventionnés pour les activités de la vie quotidienne, notamment l'aide pour prendre un bain, pour s'habiller ou pour faire sa toilette, l'aide au déplacement, les soins de la peau, des ongles et de la bouche, l'aide pour se nourrir, l'aide pour aller aux toilettes et pour prendre des médicaments, le traitement de l'incontinence, le soutien social et psychologique, les interventions de sécurité et d'urgence et la lessive des vêtements personnels si les résidents étaient incapables de le faire.

[20]        Les services d'accueil consistaient en deux repas par jour, des goûters et boissons, la lessive hebdomadaire de la literie et des serviettes et les services hebdomadaires d'entretien ménager dans l'unité du résident. L'entretien ménager consistait en un léger nettoyage quotidien et en un nettoyage hebdomadaire en profondeur de la chambre du résident.

[21]        La FHA subventionnait les services de santé fournis aux termes de l'entente FHA‑CT en fonction d'un nombre préétabli [TRADUCTION] d'« heures de soins directs » par résident subventionné par jour. CT était tenue de fournir à la FHA des rapports trimestriels indiquant les heures de soins directs aux résidents subventionnés. Ces rapports indiquaient le nombre de travailleurs fournissant les services et le nombre d'heures de travail et divisaient le nombre total d'heures par le nombre de résidents subventionnés et le nombre de jours pour obtenir les heures de soins directs par résident par jour.

[22]        CT était autorisée à imposer un [TRADUCTION] « loyer de base » pour ses services d'hébergement et d'accueil et était tenue d'obtenir une contribution mensuelle de chaque résident subventionné égale à 70 p. 100 du revenu net d'impôt du résident, jusqu'à concurrence de ce loyer de base. La société était également tenue d'obtenir de BC Housing une subvention au loyer pour chaque résident subventionné à revenu faible ou moyen de Courtyard Terrace.

[23]        Selon le paragraphe 6.5 de l'entente FHA‑CT, si la somme de la contribution du résident et de la subvention au loyer versée par BC Housing était inférieure au loyer de base, la FHA devait payer la différence à CT.

[24]        D'après les sommaires préparés par CT, pour 13 des 40 résidents subventionnés, la somme de la contribution mensuelle du résident et de la subvention au loyer versée par BC Housing était inférieure au loyer de base pour l'appartement du résident. Cette différence était comblée par la FHA, conformément à l'entente FHA‑CT. Tandis que, selon l'entente, la FHA ne subventionnait pas les services d'accueil fournis aux résidents, celle‑ci finançait donc en fait une partie de ces services pour certains des résidents subventionnés.

[25]        Aux termes de l'entente FHA‑CT, CT pouvait utiliser ses propres employés ou des entrepreneurs indépendants pour fournir les services aux résidents de Courtyard Terrace.

[26]        Tous les services fournis par CT aux résidents de Courtyard Terrace étaient rendus par des travailleurs de la société Simpe « Q » Care Inc. (« SimpeQ »). Dans l'entente conclue le 28 février 2006 entre CT et SimpeQ, la société SimpeQ acceptait de fournir des services de soins, des services d'accueil et des services ménagers à Courtyard Terrace. Ces services de soins étaient fournis par des aides à domicile et M. Gehlen a estimé que ces travailleurs consacraient environ 85 p. 100 de leur temps à ces services. Ils consacraient le reste de leurs heures de travail aux services de lessive et d'entretien ménager.

[27]        SimpeQ a facturé à CT les services qu'elle lui a fournis et a perçu la TPS sur ces services. CT a par la suite présenté au ministre des demandes de remboursement de la taxe payée par erreur.

Cartier House

[28]        Dans l'entente FHA‑CH conclue le 7 août 2003, CH s'engageait à fournir des services de soins de longue durée à 78 résidents de Cartier House choisis par la FHA et celle‑ci a convenu de financer ces services.

[29]        Les services de soins de longue durée fournis aux résidents de Cartier House consistaient en une aide pour les activités de la vie quotidienne, notamment l'aide pour prendre un bain, pour s'habiller ou pour faire sa toilette, l'aide au déplacement, les soins de la peau, des ongles et de la bouche, la préparation des repas et l'aide pour se nourrir, l'aide pour aller aux toilettes et pour prendre des médicaments, le traitement de l'incontinence, le soutien social et psychologique, les interventions de sécurité et d'urgence, la lessive, l'entretien ménager et l'aide relative aux traitements et aux médicaments.

[30]        L'aide financière de la FHA pour les services de soins de longue durée fournis par CH à Cartier House était calculée chaque année et indiquée dans une lettre d'engagement de financement à CH. Le financement des services par la FHA était fondé sur un nombre minimal d'heures de soins directs que CH devait fournir. Pour l'exercice terminé le 31 mars 2008, CH a fourni environ 2,32 heures de soins directs par jour aux résidents de Cartier House. Pour l'exercice terminé le 31 mars 2009, ce chiffre était d'environ 2,39 heures.

[31]        Les résidents de Cartier House étaient tenus de contribuer au coût de leurs soins jusqu'à concurrence de 80 p. 100 de leur revenu net d'impôt. Le montant de leur contribution a été calculé par la FHA, perçu par CH et déduit des sommes devant être versées par la FHA.

[32]        L'entente FHA‑CH autorisait CH à utiliser du personnel contractuel ou des employés pour fournir les services. Pendant les périodes visées, CH a signé un contrat avec la société Health and Recreational Personnel Services Inc. (« HARPS ») pour fournir des soins, faire l'entretien ménager et la lessive et organiser des loisirs à Cartier House. HARPS a facturé CH pour les services et a perçu la TPS sur ces services. CT a par la suite présenté au ministre des demandes de remboursement de la taxe payée par erreur.

[33]        De façon générale, les préposés aux soins fournissaient tous les services de soins personnels, qui représentaient la majeure partie des soins aux résidents payés par la FHA. Selon les éléments de preuve, les préposés aux soins consacraient environ 1,8 heure par jour par résident aux services de soins personnels. Le reste des heures de soins directs représentait l'entretien ménager, la lessive et les loisirs. Les préposés à l'entretien ménager effectuaient l'entretien ménager dans les chambres des résidents ainsi que dans les aires communes et les postes des soins infirmiers et les bureaux. Les préposés à la lessive recueillaient les vêtements dans les chambres des résidents, les nettoyaient et les retournaient, ainsi que le linge utilisé ailleurs dans l'établissement, et enfin les préposés aux loisirs organisaient et animaient des activités sociales pour les résidents.

Les dispositions légales

[34]        L'article 165 de la Loi prévoit le paiement de la TPS sur les « fournitures taxables ». Le terme « fourniture taxable » est défini au paragraphe 123(1) de la Loi comme une fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale.

[35]        La définition du terme « activité commerciale » qui figure au paragraphe 123(1) exclut la réalisation de « fournitures exonérées », qui sont définies à l'annexe V de la Loi. La partie II de l'annexe V prévoit l'exonération des services de santé. L'article 13 de la partie II de l'annexe V prévoit quant à lui l'exonération de certains services ménagers à domicile.

[36]        L'article 13 de la partie II de l'annexe V disposait ce qui suit pendant les périodes de déclaration visées :

13. La fourniture d'un service ménager à domicile rendu à un particulier à son lieu de résidence et dont l'acquéreur est le particulier ou une autre personne, si, selon le cas :

a) le fournisseur est un gouvernement ou une municipalité;

b) un gouvernement, une municipalité ou un organisme administrant un programme gouvernemental ou municipal de services ménagers à domicile verse un montant au fournisseur pour la fourniture ou à une personne en vue de l'acquisition du service;

c) une autre fourniture de services ménagers à domicile rendus au particulier est effectuée dans les circonstances visées aux alinéas a) ou b).

[37]        Pour les périodes en question, le terme « service ménager à domicile » était défini de la façon suivante à l'article 1 de la partie II de l'annexe V :

 « service ménager à domicile » Service ménager ou personnel, notamment le ménage, la lessive, la préparation des repas et la garde des enfants, rendu à un particulier qui, en raison de son âge, d'une infirmité ou d'une invalidité, a besoin d'aide.

[38]        Il est établi à l'article 138 de la Loi que certaines livraisons ou prestations de biens ou de services considérées comme accessoires sont réputées faire partie de la fourniture principale de biens ou de services :

138. Pour l'application de la présente partie, le bien ou le service dont la livraison ou la prestation peut raisonnablement être considérée comme accessoire à la livraison ou à la prestation d'une autre bien ou service est réputé faire partie de cet autre bien ou service s'ils ont été fournis ensemble pour une contrepartie unique.

[39]        Le remboursement de la taxe payée par erreur est prévu au paragraphe 261(1) de la Loi :

261(1) Dans le cas où une personne paie un montant au titre de la taxe, de la taxe nette, des pénalités, des intérêts ou d'une autre obligation selon la présente partie alors qu'elle n'avait pas à le payer ou à le verser, ou paie un tel montant qui est pris en compte à ce titre, le ministre lui rembourse le montant, indépendamment du fait qu'il ait été payé par erreur ou autrement.

Les questions à trancher

1)      Les services fournis par les travailleurs des sociétés SimpeQ et HARPS à Courtyard Terrace et à Cartier House correspondent-ils à la définition du terme « service ménager à domicile » qui figure à l'article 1 de la partie II de l'annexe V de la Loi?

2)      Les fournitures réalisées par SimpeQ à CT et par HARPS à CH étaient-elles des fournitures de services de personnel, plutôt que des fournitures de « services ménagers à domicile »?

3)      Les services fournis par SimpeQ et HARPS étaient-ils rendus aux résidents de Courtyard Terrace et de Cartier House à leur lieu de résidence?

4)      La FHA administrait-elle un programme de services ménagers à domicile?

5)      Les montants payés par la FHA à CT et à CH étaient-ils versés en vue de l'acquisition des services fournis par SimpeQ et HARPS?

6)      La fourniture de services de loisirs par HARPS à CH était-elle considérée, aux termes de l'article 138 de la Loi, faire partie des services de soins fournis par HARPS à CH?

Le sens du terme « service ménager à domicile »

[40]        L'intimée soutient que le terme « service ménager à domicile » aurait pour sens ordinaire « un service qui aide une personne à exécuter les tâches domestiques qui se rattachent à l'entretien d'un foyer ». La version anglaise de la loi utilise le terme « homemaker service » (service de personne au foyer), et l'intimée se fie à la définition du mot « homemaker » (personne au foyer) dans le dictionnaire Oxford English Dictionary, troisième édition (Oxford University Press, 2014) :

[TRADUCTION]

1. Personne qui gère son foyer; personne douée pour les tâches domestiques; femme ou homme au foyer.

2. Am. du N. Personne employée pour aider plus particulièrement une personne malade, âgée ou invalide dans l'exécution des tâches domestiques. Aussi (et selon l'usage le plus ancien) adjectif, p. ex. service ménager.

[41]        L'intimée fait valoir que le « service personnel » dont il est fait mention dans la définition de « service ménager à domicile » ne comprendrait pas le genre de soins personnels et de services de santé fournis par les travailleurs de SimpeQ et de HARPS qui constituent la majeure partie des fournitures en question. L'avocat de l'intimée affirme que, selon la règle d'interprétation légale noscitur a sociis, le terme « service personnel » serait limité à des services de nature semblable aux exemples fournis dans la définition : le ménage, la lessive, la préparation des repas et la garde des enfants. En vertu de la règle d'interprétation noscitur a sociis, il est possible de trouver le sens d'un mot dans une loi en se référant à des mots qui y sont associés dans la loi.

[42]        L'intimée soutient également qu'une modification récente à la partie II de l'annexe V, qui a consisté à remplacer le terme « service ménager à domicile » figurant à l'article 13 par le terme « service de soins à domicile » et l'ajout correspondant de la définition de l'expression « service de soins à domicile » à l'article 1, a eu pour effet d'élargir l'application de l'article 13 de sorte qu'il couvre les services de soins personnels comme ceux que fournissent SimpeQ et HARPS dans les présentes affaires. Voici le libellé de la définition de « service de soins à domicile » à l'article 1 de la partie II de l'annexe V :

« service de soins à domicile » Service ménager ou de soins personnels, notamment l'aide au bain, l'aide pour manger ou s'habiller, l'aide à la prise de médicaments, le ménage, la lessive, la préparation des repas et la garde des enfants, rendu à un particulier qui, en raison de son âge, d'une infirmité ou d'une invalidité, a besoin d'aide.

[43]        L'avocat de l'intimée soutient que, comme mentionné dans le document gouvernemental intitulé « Plan d'action économique de 2013 », ces modifications ont pour effet évident d'élargir l'éventail des services admissibles à l'exonération de la TPS :

[TRADUCTION]

Le fait que la Loi ait été expressément modifiée afin d'élargir l'exonération de la TPS afin que celle‑ci vise des services comme l'aide au bain, l'aide pour manger ou s'habiller et l'aide à la prise de médicaments indique clairement que ces services n'étaient pas exonérés avant la modification.

[44]        La question en litige est le sens à donner au terme « service personnel » qui se trouve dans la définition du terme « service ménager à domicile ».

[45]        Les règles qui régissent l'interprétation des lois fiscales ont été établies par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Hypothèques Trustco Canada c. La Reine, 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601, au paragraphe 10 :

Il est depuis longtemps établi en matière d'interprétation des lois qu'« il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur » : voir 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50. L'interprétation d'une disposition législative doit être fondée sur une analyse textuelle, contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s'harmonise avec la Loi dans son ensemble. Lorsque le libellé d'une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d'interprétation. Par contre, lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d'un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important. L'incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l'objet sur le processus d'interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d'une loi comme formant un tout harmonieux.

[46]        À mon avis, il est clair que le sens normal et ordinaire du terme « service personnel » comprendrait des services d'aide aux activités de la vie quotidienne comme ceux qui étaient fournis aux résidents de Courtyard Terrace et de Cartier House, en raison de leur âge, d'une infirmité ou d'une invalidité. En fait, je ne peux imaginer des services plus personnels que ceux‑là. J'estime qu'il y a peu d'ambiguïté dans les mots « service personnel » et que le sens ordinaire de ces mots devrait donc jouer un rôle dominant dans leur interprétation.

[47]        Je rejette l'argument de l'intimée selon lequel le sens du terme « service personnel » qui figure dans la définition de « service ménager à domicile » est limité aux services de nature semblable à celle des exemples qui suivent le terme « service ménager ou personnel » dans la définition. L'utilisation d'exemples précis après un terme général dans la loi ne limite pas le sens du terme général à des cas semblables aux exemples précis. Il faut plutôt supposer qu'en utilisant ces exemples précis, le législateur avait l'intention d'élargir le sens du terme général pour inclure ce qui n'aurait pas ordinairement été considéré comme correspondant au terme général. La Cour suprême du Canada a discuté de ce principe d'interprétation dans l'arrêt Banque nationale de Grèce (Canada) c. Katsikonouris, [1990] 2 R.C.S. 1029, aux pages 1040 et 1041 :

[...] Quel que soit le document particulier qui est interprété, lorsque l'on trouve une clause qui énonce une liste de termes précis suivie d'un terme général, il conviendra normalement de limiter le terme général au genre de l'énumération restreinte qui le précède. Toutefois, il serait illogique de procéder de la même manière lorsqu'un terme général précède une énumération d'exemples précis. Dans ce cas, il est logique de déduire que l'énumération d'exemples précis tirés d'une vaste catégorie générale a pour but d'écarter toute ambiguïté relativement à la question de savoir si ces exemples sont en fait compris dans la catégorie. Il serait contraire à l'intention du rédacteur du document de considérer les illustrations précises comme une définition exhaustive de la catégorie plus vaste dont elles font partie.

[...]

Comme je l'ai souligné, il est naturel de déduire que le rédacteur donnera une illustration précise d'un sous-ensemble d'une catégorie de choses donnée pour montrer clairement que cette catégorie comprend des choses dont, par ailleurs, on pourrait s'attendre à ce qu'elles n'en fassent pas partie. [...]

[48]        Selon moi, la règle noscitur a sociis n'est pas applicable dans la présente affaire, parce qu'elle est normalement appliquée à l'interprétation des termes énumérés dans une liste : R. c. Daoust, [2004] 1 R.C.S. 217, 2004 CSC 6, au paragraphe 60. Ici, les mots « service personnel » sont des mots généraux qui font partie du terme « service ménager ou personnel », qui est suivi d'une liste d'exemples. Le terme « service ménager ou personnel » ne fait pas partie de cette liste d'exemples.

[49]        La Cour suprême a également conclu dans l'affaire Daoust que l'utilisation du mot « ou » pour séparer deux termes d'une loi indiquait l'intention du législateur d'établir une distinction entre les deux termes et que la règle noscitur a sociis ne s'appliquait pas dans ce cas. La Cour a établi ce qui suit au paragraphe 61 :

En l'espèce, les mots « cacher » et « convertir » ne font pas partie d'une énumération. Au contraire, ce sont deux termes distincts qui ont des sens différents. Cela est démontré par l'emploi par le législateur de l'expression « dans l'intention de les cacher ou de les convertir », puisque l'emploi du mot « ou » démontre une intention de disjoindre les deux termes. Conséquemment, ceux‑ci ne devraient pas être lus ensemble et la règle noscitur a sociis n'est pas applicable.

[50]        Dans la présente affaire, l'utilisation du mot « ou » entre « ménager » et « personnel » dans le terme « service ménager ou personnel » appuie l'opinion que le législateur avait l'intention d'établir une distinction entre les services ménagers et les services personnels et qu'il avait l'intention d'inclure des services d'une nature plus large que les services habituellement considérés comme des services ménagers.

[51]        Le fait que l'exonération des services ménagers à domicile figure à la partie II de l'annexe V, qui porte sur les services de santé, fournit un autre appui contextuel à la conclusion que l'aide fournie à des personnes âgées ou infirmes pour les activités de la vie quotidienne serait incluse dans le concept de « service personnel ». Ce fait appuie aussi la conclusion selon laquelle les exemples utilisés dans la définition de « service ménager à domicile » — le ménage, la lessive, la préparation des repas et la garde des enfants — sont inclus parce que, sinon, ils pourraient ne pas être considérés comme des services de santé.

[52]        Puisque l'exonération figure à la partie II de l'annexe V, il semblerait aussi que l'article 13 a pour objet d'exonérer les services personnels ayant la nature de services de santé, comme l'aide aux activités de la vie quotidienne ainsi que les services ménagers.

[53]        Étant donné ma conclusion au sujet du sens ordinaire des mots « service personnel », j'accorde très peu de poids, comme source d'interprétation, à la modification subséquente de l'article 13 de la partie II de l'annexe V ou au document du « Plan d'action économique de 2013 » dont l'avocat de l'intimée a fait mention. Je suis d'accord avec les observations suivantes du juge Bowman dans la décision Glaxo Wellcome Inc. c. La Reine, [1996] A.C.I. no 6 (QL), conf. par [1998] A.C.F. no 1476 (QL), au sujet de l'utilisation d'éléments extrinsèques dans l'interprétation d'une loi :

Il faut se rappeler que c'est le législateur qui édicte les lois, et que c'est au moyen du libellé de la loi que le législateur parle. Une loi du Parlement représente la volonté collective du Parlement. On ne saurait être certain qu'il soit possible de dire la même chose au sujet d'éléments extrinsèques. Tenter de déterminer le but d'une disposition législative en se reportant à un discours prononcé par un membre du gouvernement, un discours qu'il n'a peut-être pas rédigé, ou à des notes techniques ou explicatives préparées par les agents du ministère des Finances, ou encore à d'autres documents budgétaires, comporte, à mon avis, un danger. Le tribunal qui s'efforce d'attribuer à un libellé raisonnablement compréhensible un sens étendu qui est conforme à ce que, à son avis, compte tenu d'éléments extrinsèques, le législateur cherchait à atteindre risque de franchir la ligne de démarcation qui sépare la fonction judiciaire de la fonction législative.

[54]        Je conclus que l'interprétation proposée par les appelantes est plus compatible avec le texte, le contexte et l'objet de la définition du terme « service ménager à domicile ».

Les sociétés SimpeQ et HARPS fournissaient-elles des services ménagers à domicile ou des services de personnel aux appelantes?

[55]        Dans son argument suivant, l'intimée a soutenu que les fournitures réalisées par SimpeQ à CT et par HARPS à CH étaient des fournitures de services de personnel ou de dotation générale, plutôt que de services ménagers à domicile.

[56]        Cet argument n'est toutefois pas étayé par les éléments de preuve dont je suis saisi. Les contrats entre SimpeQ et CT et entre HARPS et CH prévoient clairement la fourniture de services, y compris les services de soins, les services d'accueil et les services d'entretien ménager. Il y a également le témoignage non contredit de M. Gehlen selon lequel ces services ont été fournis par SimpeQ et HARPS. La tentative de l'intimée de redéfinir les fournitures comme des fournitures de services de personnel n'est donc pas fondée.

Les services ont-ils été rendus à des particuliers à leur lieu de résidence?

[57]        Le libellé du début de l'article 13 de la partie II établit l'exigence que les services ménagers à domicile soient rendus à un particulier à son lieu de résidence. L'intimée reconnaît que Courtyard Terrace et Cartier House étaient les seuls lieux de résidence des résidents de ces établissements, mais soutient que les services faisant l'objet du litige étaient rendus dans chacun de ces établissements « dans leur ensemble », tandis que le lieu de résidence des résidents se limitait à leur appartement individuel, dans le cas de Courtyard Terrace, ou à leur chambre, dans le cas de Cartier House.

[58]        Encore une fois, il y a peu de raisons de réduire les limites spatiales de la résidence des résidents comme l'intimée a tenté de le faire. La zone à l'extérieur des appartements ou des chambres était composée soit d'aires communes à tous les résidents et utilisées exclusivement par eux comme lieu de résidence dans le contexte ordinaire de leur séjour à Courtyard Terrace ou à Cartier House, soit de cuisines, de buanderies ou de bureaux qui étaient utilisés entièrement et directement pour répondre aux besoins courants et soutenir les activités quotidiennes des résidents utilisant Courtyard Terrace ou Cartier House comme leur lieu de résidence. D'après ma compréhension de la preuve, les établissements Courtyard Terrace et Cartier House étaient tous deux uniquement utilisés comme lieux de résidence pour les résidents. Il semble donc artificiel d'établir une distinction entre les appartements ou les chambres des résidents et le reste des locaux pour établir quel était leur lieu de résidence.

[59]        Je conclus donc que les services en litige ont été fournis aux résidents à leur lieu de résidence, qu'ils aient été fournis à l'intérieur de leur appartement ou de leur chambre ou dans les autres aires des établissements.

La FHA administrait-elle un programme de services ménagers à domicile?

[60]        Selon l'article 13 de la partie II de l'annexe V, pour que la fourniture de services ménagers à domicile soit exonérée, le fournisseur des services doit être un gouvernement ou une municipalité (alinéa 13a)), ou un gouvernement, une municipalité ou un organisme administrant un programme de services ménagers à domicile doit verser un montant au fournisseur (premier volet de l'alinéa 13b)), ou un gouvernement, une municipalité ou un organisme administrant un programme de services ménagers à domicile doit verser un montant à une personne en vue de l'acquisition du service (deuxième volet de l'alinéa 13b)).

[61]        L'alinéa 13a) ne s'applique pas en l'espèce, parce que SimpeQ et HARPS, les fournisseurs des services ménagers à domicile, n'étaient ni l'une ni l'autre un gouvernement ou une municipalité. Le premier volet de l'alinéa 13b) ne s'applique pas, parce que les paiements des fournitures étaient effectués par CT et CH, et qu'aucun des deux établissements n'était un gouvernement, une municipalité ou un organisme administrant un programme de services ménagers à domicile.

[62]        L'intimée est d'avis que les conditions du deuxième volet de l'alinéa 13b) ne sont pas remplies non plus, parce que la FHA n'administrait pas un programme de services ménagers à domicile et que les montants versés aux appelantes par la FHA n'avaient pas été versés en vue de l'acquisition du service.

[63]        L'intimée soutient que le programme administré par la FHA, aux termes duquel des paiements ont été versés à CT et à CH, était un programme visant à fournir des services de santé et non des services ménagers à domicile.

[64]        L'argument de l'intimée repose en grande partie sur l'interprétation étroite du terme « service ménager à domicile » que j'ai déjà rejetée. Puisque j'ai conclu que les services de soins personnels fournis par CT et CH aux résidents de Courtyard Terrace et de Cartier House étaient des « services personnels » qui correspondaient à la définition de « services ménagers à domicile », il en découlerait que le programme en vertu duquel la FHA a payé ces services de soins personnels, c.‑à‑d. le programme de soins continus de la Colombie‑Britannique, est un programme de « services ménagers à domicile ».

[65]        Selon mon opinion, le deuxième volet de l'alinéa 13b) n'exige pas que le programme aux termes duquel l'aide financière est fournie ait pour unique objectif de subventionner les services ménagers à domicile. Selon la version anglaise de la loi, le programme gouvernemental qu'administre l'organisme doit être « in respect of » (à l'égard de) services ménagers. La Cour suprême du Canada a soutenu, dans l'arrêt Nowegijik c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, à la page 39, que l'expression anglaise « in respect of » avait « la portée la plus large possible » et que cette expression était probablement la plus large « parmi toutes les expressions qui servent à exprimer un lien quelconque entre deux sujets connexes ».

[66]        Il suffit donc de montrer qu'il existe un certain lien entre le programme de soins continus de la Colombie‑Britannique et la prestation de services ménagers à domicile par SimpeQ et HARPS. Puisque les services de soins personnels à Courtyard Terrace et les services de soins de longue durée à Cartier House (au sujet desquels j'ai établi qu'ils pouvaient être considérés comme des services ménagers à domicile) étaient subventionnés en vertu du programme de soins continus administré en partie par la FHA, je conclus que la FHA administrait un programme gouvernemental de services ménagers à domicile.

La FHA a‑t-elle versé des montants à CT et à CH en vue de l'acquisition des services ménagers à domicile?

[67]        L'intimée soutient que les montants payés par la FHA à CT et à CH n'avaient pas été versés dans l'objectif précis d'acquérir des services ménagers à domicile. L'avocat de l'intimée soutient que, dans le cas de CT, les paiements avaient pour objet l'acquisition des services de santé, qui n'étaient pas des services ménagers à domicile, et que, dans le cas de CH, ils avaient pour objet l'exploitation de Cartier House par CH.

[68]        Puisque j'ai déjà établi que les services de santé étaient des services ménagers à domicile, l'argument de l'intimée quant à CT ne peut tenir. Dans le cas de CH, l'exploitation de Cartier House comprenait la fourniture de services de soins de longue durée. Le montant versé par la FHA à CH pour l'exploitation de l'établissement Cartier House a donc également été versé en vue de l'acquisition de ces services. Il était aussi expressément stipulé dans l'entente FHA‑CH que CH était autorisée à utiliser du personnel contractuel pour fournir les services de soins de longue durée.

[69]        De plus, il est clair, selon les termes des ententes, que la FHA a versé des montants à CT et à CH en vue de l'acquisition des services en cause. Les deux ententes obligent la FHA à verser des montants à CT et à CH pour la fourniture de services aux résidents de Courtyard Terrace et de Cartier House. Le paragraphe 7.1 de l'entente FHA‑CT exigeait que la FHA paie à CT les [TRADUCTION] « tarifs fixés à l'annexe B » « pour les services de santé ». Selon les paragraphes 3.4 et 7.5 de l'entente FHA‑CH, CH devait fournir à ses résidents des services de soins de longue durée et la FHA devait payer ces services. En vertu de l'entente, les fonds versés par la FHA ne pouvaient être utilisés qu'aux fins de la fourniture des services de soins de longue durée.

[70]        La FHA n'a peut-être pas assumé dans les deux cas l'entièreté du coût des services ménagers à domicile pour lesquels CT et CH ont conclu des ententes avec SimpeQ et HARPS respectivement, mais elle a effectivement versé un montant à chacune des deux sociétés en vue de l'acquisition des services ménagers à domicile; par conséquent, les exigences du deuxième volet de l'alinéa 13b) de la partie II ont été remplies.

[71]        L'intimée a également fait valoir que le fait de conclure que la FHA a versé des montants aux appelantes en vue de l'acquisition des services ménagers à domicile nuirait au droit des organismes de bienfaisance et des organismes à but non lucratif qui exploitent des établissements comme Courtyard Terrace ou Cartier House d'obtenir les remboursements aux organismes de services publics en vertu de l'article 259 de la Loi. L'intimée soutient que, pour être un organisme à but non lucratif admissible en vertu de cet article, l'exploitant doit recevoir un montant qui correspond à la définition du terme « montant de financement public » au Règlement sur les remboursements aux organismes de services publics (TPS/TVH), DORS/91‑37 (le Règlement). Selon cette définition, le montant de financement public s'entend de toute somme d'argent payée soit en vue d'aider financièrement une personne à atteindre ses objectifs, soit en contrepartie des biens ou des services qu'elle met à la disposition d'autres personnes au moyen de fournitures exonérées. Selon l'avocat de l'intimée, si les sommes payées par une régie régionale de la santé à un exploitant à but non lucratif sont considérées comme avoir été versées en vue de l'acquisition par l'exploitant de services ménagers à domicile, cela ferait en sorte que les sommes ne seraient pas des montants de financement public, selon le Règlement. L'exploitant à but non lucratif n'aurait donc pas droit à un remboursement à titre d'organisme de services publics.

[72]        Je ne suis pas en mesure d'accepter la thèse soutenue par l'intimée, vu l'argument sommaire présenté par son avocat sur ce point. D'après mon interprétation de la partie II de l'annexe V, les fournitures d'hébergement et de services aux résidents de résidences avec services de soutien et d'établissements de soins de longue durée sembleraient constituer des fournitures de « services de santé en établissement » « offerts dans un établissement de santé » et elles seraient donc des fournitures exonérées en vertu de l'article 2 de la partie II de l'annexe V. À ce titre, la subvention reçue par l'exploitant à but non lucratif d'une résidence avec services de soutien ou d'un établissement de soins de longue durée en contrepartie des biens ou des services qu'il met à la disposition des résidents de l'établissement correspondrait toujours à la définition de « montant de financement public » établie dans le Règlement et l'admissibilité au remboursement de l'exploitant à but non lucratif ne serait pas compromise.

Fourniture unique

[73]        À l'audience, les appelantes ont admis que les fournitures des services de loisirs à CH par HARPS ne pouvaient être considérées comme des fournitures exonérées aux termes de l'article 13 de la partie II de l'annexe V. Elles font toutefois valoir qu'aux termes de l'article 138 de la Loi, ces fournitures devraient être réputées faire partie d'une fourniture exonérée unique de services de soins.

[74]        Les appelantes soutiennent que les services de loisirs et les services de soins avaient été fournis ensemble pour une contrepartie unique, puisque les deux catégories de fournitures avaient été facturées ensemble. Elles affirment également que les services de loisirs étaient accessoires aux services de soins, puisqu'ils ne représentaient que 5,4 p. 100 du nombre total d'heures facturées par HARPS pour les deux catégories de services.

[75]        Sur ce point, je suis d'accord avec la thèse de l'avocat de l'intimée, selon laquelle la méthode de facturation des fournitures de services de loisirs et des fournitures de services de soins ne veut pas dire que ces services ont été fournis pour une contrepartie unique. Il me semble, d'après l'exemple de facture de HARPS produit comme élément de preuve, que la société HARPS calculait le montant payable par CH selon le nombre total d'heures de travail des préposés aux loisirs et aux soins. Je conclus que le nombre total d'heures de travail et les rémunérations pour les deux catégories de préposés étaient combinés sur les factures parce que le taux horaire de l'ensemble des préposés était le même. La contrepartie pour chaque catégorie de travailleur constituerait donc un montant séparé et déterminable. Cette conclusion est aussi étayée par le fait que l'exemple de facture comporte une référence aux services de loisirs ainsi qu'aux services de soins.

[76]        Je conclus également que les services de loisirs n'étaient pas accessoires aux services de soins. Selon mon opinion, chaque genre de service était indépendant de l'autre et constituait une fourniture séparée. Les préposés aux loisirs s'occupaient des activités sociales des résidents, tandis que les préposés aux soins fournissaient des services personnels et aidaient les résidents dans leurs activités de la vie quotidienne.

[77]        Par conséquent, l'article 138 ne fait pas en sorte que les services de loisirs fassent partie d'une fourniture unique de services de soins.

Éléments reconnus

[78]        À l'audience, les appelantes ont reconnu que les demandes de remboursement de la TPS payée par erreur par CT à SimpeQ pour des services de sécurité, des services de réparation de systèmes de chauffage et des services de coordonnateur social et administratif ne devraient pas être acceptées.

Conclusion

[79]        Les appels sont accueillis en partie et les cotisations sont renvoyées au ministre du Revenu national pour nouvelles cotisations conformément aux présents motifs. Dans chaque appel, les appelantes ont droit aux dépens fixés conformément au tarif. Les appels ayant été entendus sur preuve commune, il n'y aura qu'un ensemble de dépens pour l'audience.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de novembre 2015.

« B. Paris »

Le juge Paris


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 278

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2011-3419(GST)G

2011-3420(GST)G

 

INTITULÉ :

COURTYARD TERRACE ASSISTED LIVING RESIDENCE LTD., CARTIER HOUSE CARE CENTRE LTD. c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :

Les 10 et 11 décembre 2014

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge B. Paris

DATE DU JUGEMENT :

Le 5 novembre 2015

COMPARUTIONS :

Avocats des appelantes :

Me Kimberley Cook

Me Noah Sarna

Avocats de l'intimée :

Me Victor Caux

Me Sara Fairbridge

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour les appelantes :

Noms :

Me Kimberley Cook

Me Noah Sarna

Cabinet :

Thorsteinssons LLP

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour l'intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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