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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

2000-1183(IT)G

 

ENTRE :

 

KELLY BRIAN EDWARDS,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

 

Appel entendu les 22, 23 et 24 janvier 2002, à Ottawa (Ontario), par

 

l’honorable juge Gerald J. Rip

 

Comparutions

 

Avocats de l’appelant :              Me Roger E. Taylor

                                                Me Edward C. Rowe

 

Avocat de l’intimée :                 Me Donald Gibson

 

 

JUGEMENT

 

          L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 1997 est rejeté avec frais.


Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de juin 2002.

 

 

« Gerald J. Rip »

J.C.C.I.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de juin 2004.

 

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur


 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Date: 20020627

Dossier: 2000-1183(IT)G

 

ENTRE :

 

KELLY BRIAN EDWARDS,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Rip

 

[1]     Dans le présent appel, la question est de savoir si le revenu gagné par un résident du Canada après le 30 juin 1997 au titre d’un emploi exercé pour une société résidante de la Région administrative spéciale de Hong Kong (la « RASHK » ou « Hong Kong ») est exonéré de l’impôt canadien sur le revenu en vertu de l’Accord entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République populaire de Chine en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu (le « Traité fiscal Canada‑Chine », l’« Accord », le « Traité » ou la « Convention »)[1].

 

[2]     Durant toute la période pertinente, Kelly Brian Edwards était un résident du Canada, mais ne gagnait pas un revenu d’emploi au Canada. Il exerçait un emploi comme pilote de ligne pour Veta Ltd., filiale en propriété exclusive de Cathay Pacific Airlines Ltd. (« Cathay Pacific »), société qui avait été constituée en vertu des lois de Hong Kong et qui était un résident de Hong Kong. M. Edwards a interjeté appel à l’encontre de la cotisation d’impôt sur le revenu établie à son égard pour 1997, en se fondant sur le fait que son revenu d’emploi pour la période allant du 1er juillet au 31 décembre 1997 est exonéré d’impôt sur le revenu au Canada en raison de l’application du paragraphe 15(3) du Traité fiscal Canada‑Chine[2].

 

[3]     La position de l’appelant est que la RASHK fait partie de la République populaire de Chine depuis le 1er juillet 1997 et que le Traité s’applique donc depuis cette date aux personnes qui sont des résidents de la RASHK. En vertu du paragraphe 15(3) de la Convention, la rémunération versée par Cathay Pacific au titre de l’emploi exercé par l’appelant à bord d’un aéronef exploité en « trafic international », au sens de l’article 3 de la Convention, est exonérée d’impôt au Canada. Comme l’appelant a reçu un revenu d’emploi de Cathay Pacific en 1997, il peut, en vertu du sous‑alinéa 110(1)f)(i) de la Loi, déduire dans le calcul de son revenu pour 1997 le montant du revenu qu’il a reçu de Cathay Pacific au titre de son emploi pour la période allant du 1er juillet au 31 décembre 1997.

 

[4]     Dans la cotisation qui a été établie, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a déduit de l’impôt par ailleurs payable par M. Edwards pour 1997 un crédit pour impôt étranger, en vertu du paragraphe 126(1) de la Loi. Le point de vue du ministre est que le Traité ne s’applique pas à Hong Kong.

 

Faits

 

[5]     Dans le cadre de l’appel, un exposé conjoint partiel des faits a été déposé, M. Edwards a témoigné, ainsi que David K. Hollman, fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères, et a été consigné en preuve un extrait de l’interrogatoire préalable de Karen Caspersen, une représentante de l’intimée[3].

 

[6]     L’exposé conjoint partiel des faits[4] est libellé dans les termes suivants :

 

[TRADUCTION]

A.    Faits concernant l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu

 

1.     La Loi de 1986 sur l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu [onglet A], soit la partie III de L.C. 1986, ch. 48, édicte au Canada l’Accord entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République populaire de Chine en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu [onglet B] (l’« Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu »).

 

2.     L’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu a été signé le 12 mai 1986 par les premiers ministres du Canada et de la République populaire de Chine (« RPC ») au nom de leurs gouvernements respectifs. D’une manière générale, l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu est calqué sur le modèle de 1977 de convention en matière de double imposition établi par l’Organisation de coopération et de développement économiques (« OCDE ») (le « modèle de convention de l’OCDE ») [onglet C; onglet D : commentaires y afférents], ainsi que sur le modèle de convention en matière de double imposition entre pays développés et pays en voie de développement adopté en 1979 par le groupe spécial d’experts de l’Organisation des Nations unies (le « modèle de convention de l’ONU ») [onglet E; onglet F : commentaires y afférents].

 

3.     L’appelant invoque les articles 1, 2 et 3 et les paragraphes 4(1) et 15(3) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu en tant qu’éléments pertinents aux fins de la décision sur cet appel. Ces dispositions se lisent comme suit[5] :

 

        Le Gouvernement du Canada et le Gouvernement de la République populaire de Chine, désireux de conclure un Accord en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu, sont convenus des dispositions suivantes :

 

        L’ARTICLE 1 :      Personnes visées

 

        Le présent Accord s’applique aux personnes qui sont des résidents d’un État ou des deux États contractants.

 

        L’ARTICLE 2 :      Impôts visés

 

        1.      Les impôts actuels auxquels s’applique l’Accord sont notamment :

 

        a)      en ce qui concerne le Canada :

 

                les impôts sur le revenu qui sont perçus par le Gouvernement du Canada, (ci-après dénommés « impôt canadien »);

 

        b)      en ce qui concerne la République populaire de Chine :

 

                (i)         l’impôt sur le revenu individuel;

 

                (ii)        l’impôt sur le revenu des entreprises mixtes à capitaux chinois et étrangers;

 

                (iii)       l’impôt sur le revenu des entreprises étrangères; et

 

                (iv)       l’impôt local sur le revenu;

 

                (ci-après dénommés « impôt chinois »).

 

        2.      Le présent Accord s’applique aussi aux impôts de nature identique ou substantiellement analogue qui seraient établis après la date de signature du présent Accord et qui s’ajouteraient aux impôts visés au paragraphe 1 ou qui les remplaceraient. Les autorités appropriées des États contractants se communiquent, dans des délais raisonnables, les modifications substantielles apportées à leurs législations fiscales respectives.

 

        L’ARTICLE 3 :      Définitions générales

 

        1.      Au sens du présent Accord, à moins que le contexte n’exige une interprétation différente :

 

       a)      le terme « Canada », employé dans un sens géographique, désigne le territoire du Canada, y compris toute région située au-delà des mers territoriales du Canada qui, conformément au droit international et en vertu des lois du Canada, est une région à l’intérieur de laquelle le Canada peut exercer des droits à l’égard du fond et du sous-sol de la mer et de leurs ressources naturelles;

 

       b)      l’expression « la République populaire de Chine », lorsqu’employée dans un sens géographique, désigne tout le territoire de la République populaire de Chine, y compris sa mer territoriale, dans lequel les lois relatives à l’impôt chinois s’appliquent, et toutes les régions situées au-delà de sa mer territoriale, y compris le fond et le sous-sol de la mer, sur lesquelles la République populaire de Chine a juridiction conformément au droit international et dans lesquelles les lois relatives à l’impôt chinois s’appliquent;

 

       c)      les expressions « un État contractant » et « l’autre État contractant » désignent, suivant le contexte, le Canada ou la République populaire de Chine;

 

       d)      le terme « impôt » désigne, suivant le contexte, l’impôt canadien ou l’impôt chinois;

 

       e)      le terme « personne » comprend les personnes physiques, les sociétés et tous autres groupements de personnes;

 

       f)       le terme « société » désigne toute personne morale ou toute entité qui est considérée comme une personne morale aux fins d’imposition;

 

       g)      les expressions « entreprise d’un État contractant » et « entreprise de l’autre État contractant » désignent respectivement une entreprise exploitée par un résident d’un État contractant et une entreprise exploitée par un résident de l’autre État contractant;

 

       h)      le terme « nationaux » désigne toutes les personnes physiques qui possèdent la nationalité d’un État contractant et toutes les personnes morales, sociétés de personnes et autres groupements de personnes constitués conformément à la législation en vigueur dans un État contractant.

 

       i)       l’expression « trafic international » désigne tout transport effectué par un navire ou un aéronef exploité par une entreprise d’un État contractant, sauf lorsque le navire ou l’aéronef n’est exploité qu’entre des points situés dans l’autre État contractant;

 

       j)       l’expression « autorité compétente » désigne, en ce qui concerne le Canada, le ministre du Revenu national ou son représentant autorisé, et, en ce qui concerne la République populaire de Chine, le Ministère des Finances ou son représentant autorisé.

 

        2.      Pour l’application du présent Accord par un État contractant, toute expression qui n’est pas définie dans le présent Accord a le sens que lui attribue le droit de cet État contractant concernant les impôts auxquels s’applique le présent Accord, à moins que le contexte n’exige une interprétation différente.

 

        L’ARTICLE 4 :      Résident

 

        1.      Au sens du présent Accord, l’expression « résident d’un État contractant » désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet État, est assujettie à l’impôt dans cet État contractant, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège social, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue.

 

        [...]

 

        L’ARTICLE 15 :    Professions dépendantes

 

        [...]

 

        3.      Nonobstant les dispositions des paragraphes 1 et 2, les rémunérations au titre d’un emploi salarié exercé à bord d’un navire ou d’un aéronef exploité en trafic international par une entreprise d’un État contractant ne sont imposables que dans cet État contractant.

 

        [...]

 

B.    Faits concernant l’appelant

 

4.     Durant toute la période pertinente, Kelly Brian Edwards (l’« appelant ») était résident du Canada seulement. Comme résident du Canada, l’appelant était assujetti à de l’impôt au Canada sur son revenu de toutes provenances.

 

5.     L’appelant est un pilote de ligne qui, durant toute la période pertinente, exerçait un emploi pour Veta Ltd., filiale en propriété exclusive de Cathay Pacific Airlines Ltd.

 

6.     Durant toute la période pertinente, l’appelant remplissait les fonctions de son emploi pour Veta Ltd. à bord d’un aéronef exploité par Cathay Pacific Airlines Ltd. Durant toute la période pertinente postérieure au 1er juillet 1997, l’aéronef qui était exploité par Cathay Pacific Airlines Ltd. et à bord duquel l’appelant exerçait son emploi assurait des services de transport aérien, notamment entre la Région administrative spéciale de Hong Kong (« RASHK ») de la RPC et le Canada.

 

7.     L’appelant a gagné un revenu d’emploi de 265 739 $ en 1997 dans le cadre de l’emploi qu’il exerçait comme pilote de ligne à bord d’un aéronef exploité par Cathay Pacific Airlines Ltd.

 

8.     En vertu du paragraphe 8(1) de l’Inland Revenue Ordinance, Ordinance 112, soit une ordonnance relative à la fiscalité ci‑après appelée l’« Ordonnance fiscale 112 », l’appelant était tenu de payer un impôt salarial à Hong Kong avant le 1er juillet 1997 et à la RASHK de la RPC à partir du 1er juillet 1997, sur son revenu provenant de l’emploi qu’il exerçait pour Veta Ltd. comme pilote de ligne à bord d’un aéronef exploité par Cathay Pacific Airlines Ltd. Le revenu tiré par l’appelant de l’emploi exercé pour Veta Ltd. a sa source dans la RASHK de la RPC aux fins du paragraphe 8(1) de l’Ordonnance fiscale 112, pour les raisons énoncées aux paragraphes 47 et 48 ci‑après. L’appelant a payé un impôt salarial de 40 665 $ (CAN) au titre du revenu d’emploi dont il est fait état au paragraphe 7.

 

9.     Dans sa déclaration canadienne de revenu pour l’année d’imposition 1997, l’appelant a inclus comme revenu d’emploi le montant de 265 739 $ indiqué au paragraphe 7 ci‑devant. L’appelant a demandé un crédit pour impôt étranger de 40 665 $ en vertu de l’alinéa 126(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu (du Canada) (la « Loi ») au titre de l’impôt salarial dont il est fait état au paragraphe 8 ci‑devant. Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi à l’égard de l’appelant une cotisation initiale basée sur le fait que le revenu d’emploi de l’appelant aux fins de l’impôt canadien était de 265 739 $ et admettant le crédit pour impôt étranger demandé en vertu l’alinéa 126(1)a) de la Loi (la « première cotisation »).

 

10.   L’appelant a signifié un avis d’opposition [onglet G] à l’égard de la première cotisation, avis dans lequel il faisait savoir qu’il s’opposait au fait que soit incluse dans son revenu aux fins de l’impôt canadien la partie du revenu d’emploi indiqué au paragraphe 7 ci‑devant qui se rapportait à la période postérieure au 1er juillet 1997. Le montant de cette partie du revenu d’emploi de l’appelant était de 152 910 $. L’appelant cherchait en outre à ce que sa demande de crédit pour impôt étranger soit proportionnellement réduite de 26 653 $, soit la partie de la demande de crédit pour impôt étranger qui se rapportait à la partie du revenu d’emploi indiqué au paragraphe 7 ci‑devant qui se rapportait à la période postérieure au 1er juillet 1997. À l’appui de son opposition, l’appelant soutenait que le paragraphe 15(3) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu s’appliquait de manière à exclure de son revenu aux fins de l’impôt canadien la partie de son revenu qui se rapportait à l’emploi qu’il exerçait — à bord d’un aéronef exploité par Cathay Pacific Airlines Ltd. — après le 1er juillet 1997, date à laquelle Hong Kong est devenue la RASHK de la RPC. L’appelant invoquait également le sous‑alinéa 110(1)f)(i) de la Loi, qui se lit comme suit :

 

            110(1) Déductions — Pour le calcul du revenu imposable d’un contribuable pour une année d’imposition, il peut être déduit celles des sommes suivantes qui sont appropriées :

 

f) Déduction des paiements — [...] ou toute somme [...] représentant, selon le cas :

 

(i)        une somme exonérée de l’impôt sur le revenu au Canada par l’effet d’une disposition de quelque convention ou accord fiscal avec un autre pays qui a force de loi au Canada,

[...]

 

        Le ministre a ratifié la première cotisation, par voie d’avis de ratification en date du 2 décembre 1999 [onglet H].

 

C.    Faits concernant Cathay Pacific Airlines Ltd.

 

11.   Durant toute la période pertinente, Cathay Pacific Airlines Ltd. et sa filiale Veta Ltd. étaient des personnes morales constituées en sociétés, enregistrées et résidant à Hong Kong avant le 1er juillet 1997 et dans la RASHK de la RPC à partir du 1er juillet 1997, où chacune avait son siège social.

 

12.   Durant toute la période pertinente, Cathay Pacific Airlines Ltd. exploitait une entreprise consistant à fournir au public des services de transport aérien commercial, notamment des services de transport aérien entre le Canada et Hong Kong avant le 1er juillet 1997 et entre le Canada et la RASHK de la RPC à partir du 1er juillet 1997.

 

13.   Durant la période pertinente, Cathay Pacific Airlines Ltd. ne fournissait pas de services de transport aérien entre des endroits situés au Canada.

 

14.   Au cours de la période pertinente, Cathay Pacific Airlines Ltd. était tenue de payer de l’impôt sur les bénéfices à Hong Kong avant le 1er juillet 1997 et à la RASHK de la RPC à partir du 1er juillet 1997, soit un impôt calculé conformément à la partie IV de l’Ordonnance fiscale 112, ce qui est décrit plus en détail au paragraphe 49 ci‑après. En particulier, Cathay Pacific Airlines Ltd. est assujettie aux dispositions de l’article 23C de l’Ordonnance fiscale 112, ce qui est décrit plus en détail au paragraphe 50 ci‑après. Cathay Pacific Airlines Ltd. n’était pas tenue de payer — et ne payait pas — de l’impôt à la Chine continentale en vertu du « Règlement provisoire de l’impôt sur les revenus d’entreprise » de la Chine continentale, ce qui est décrit plus en détail au paragraphe 38 ci‑après.

 

15.   La position de l’appelant est que, depuis le 1er juillet 1997, en tant que résidente de la RASHK de la RPC, Cathay Pacific Airlines Ltd. est un « résident d’un État contractant » au sens du paragraphe 4(1) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu aux fins des définitions d’« entreprise d’un État contractant » et de « trafic international » figurant aux alinéas 3(1)g) et i) de cet accord. La position de l’intimée est que l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu ne s’applique pas à la RASHK de la RPC et qu’en conséquence, comme résidente de la RASHK de la RPC, Cathay Pacific Airlines Ltd. n’était pas, à partir du 1er juillet 1997 ou à n’importe quelle date, un « résident d’un État contractant » au sens du paragraphe 4(1) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu aux fins des définitions d’« entreprise d’un État contractant » et de « trafic international » figurant aux alinéas 3(1)g) et i) de cet accord.

 

D.    Faits concernant la RASHK de la RPC

 

16.   La « Déclaration commune sino‑britannique sur la question de Hong Kong » (Sino‑British Joint Declaration on the Question of Hong Kong) [onglet I] (ci‑après appelée la « Déclaration commune ») a été signée à Beijing le 19 décembre 1984 par les premiers ministres du Royaume‑Uni et de la RPC.

 

17.   Dans la Déclaration commune, le gouvernement de la RPC déclarait qu’il avait décidé de recommencer à exercer la souveraineté sur Hong Kong à partir du 1er juillet 1997, et le gouvernement du Royaume‑Uni déclarait qu’il rendrait Hong Kong à la RPC le 1er juillet 1997.

 

18.   Le 1er juillet 1997, la souveraineté sur Hong Kong a été retournée à la RPC, et Hong Kong est alors devenue la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine. La Région administrative spéciale de Hong Kong fait partie de la RPC depuis le 1er juillet 1997.

 

19.   L’article 31 de la « Constitution de la République populaire de Chine » [onglet J] autorise comme suit l’établissement de régions administratives spéciales selon les modalités prescrites par voie de loi édictée par l’Assemblée populaire nationale :

 

[TRADUCTION]

L’État peut établir des régions administratives spéciales au besoin. Les systèmes à instituer dans des régions administratives spéciales seront prescrits par voie de loi édictée par l’Assemblée populaire nationale compte tenu de conditions particulières.

 

20.   La structure constitutionnelle de la RASHK de la RPC est prescrite par une loi que la septième Assemblée populaire nationale a adoptée le 4 avril 1990, qui a été promulguée par voie de décret du président de la RPC à cette date‑là et qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1997, soit la « Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine » ([onglet K] ci‑après appelée la « Loi fondamentale »).

 

21.   L’article 8 de la Loi fondamentale renferme des dispositions concernant le maintien des règles de droit de Hong Kong une fois reprise la souveraineté par la RPC et concernant le pouvoir du corps législatif de la RASHK de continuer à modifier de telles règles de droit, pourvu que celles‑ci ne soient pas contraires à la Loi fondamentale. L’article 8 dit :

 

[TRADUCTION]

Les règles de droit précédemment en vigueur à Hong Kong, c’est‑à‑dire la common law, les règles d’equity, les ordonnances, la législation par délégation et le droit coutumier, seront maintenues, sauf celles qui contreviennent à la présente loi et sous réserve des modifications pouvant être apportées par le corps législatif de la Région administrative spéciale de Hong Kong.

 

22.   Le mécanisme d’adoption des règles de droit de Hong Kong en tant que règles de droit de la RASHK de la RPC est prévu à l’article 160 de la Loi fondamentale, qui dit :

 

[TRADUCTION]

Lorsque la Région administrative spéciale de Hong Kong sera établie, les règles de droit précédemment en vigueur à Hong Kong seront adoptées comme règles de droit de la Région, sauf celles qui seront déclarées contraires à la présente loi par le Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale.

 

23.   Le 23 février 1997, la vingt‑quatrième session de la huitième Assemblée populaire nationale a adopté la « Décision du Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale sur la façon dont les règles de droit précédemment en vigueur à Hong Kong seront traitées en vertu de l’article 160 de la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine » [onglet L] (la « Décision du Comité permanent »), dans laquelle il est dit que, sauf 24 ordonnances mentionnées à l’annexe 1 et à l’annexe 2 de la Décision du Comité permanent, les règles de droit précédemment en vigueur à Hong Kong sont adoptées comme règles de droit de la RASHK. L’article 1 de la Décision du Comité permanent dit :

 

[TRADUCTION]

La règles de droit précédemment en vigueur à Hong Kong, ce qui inclut la common law, les règles d’equity, les ordonnances, la législation par délégation et le droit coutumier, sont adoptées comme règles de droit de la Région administrative spéciale de Hong Kong, sauf celles qui contreviennent à la Loi fondamentale.

 

24.   Le corps législatif de la RASHK a édicté l’« Ordonnance de réunification relative à Hong Kong » (Hong Kong Reunification Ordinance) [onglet M], Gazette no 110 de 1997, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1997 et dont le paragraphe 7(1) dit :

 

[TRADUCTION]

Les règles de droit précédemment en vigueur à Hong Kong, c’est‑à‑dire la common law, les règles d’equity, les ordonnances, la législation par délégation et le droit coutumier, qui ont été adoptées comme règles de droit de la Région administrative spéciale de Hong Kong continueront à s’appliquer.

 

25.   L’article 151 de la Loi fondamentale dit :

 

[TRADUCTION]

La Région administrative spéciale de Hong Kong peut, de sa propre initiative, en utilisant le nom « Hong Kong, Chine », maintenir et développer des relations et conclure et mettre en œuvre des accords avec des régions et États étrangers et avec des organisations internationales appropriées, et ce, dans les domaines appropriés, y compris le domaine économique, le domaine commercial, le domaine financier et monétaire, le domaine du transport de marchandises, le domaine des communications, le domaine du tourisme, le domaine de la culture et le domaine des sports.

 

26.   L’article 153 de la Loi fondamentale dit :

 

[TRADUCTION]

L’application, à la Région administrative spéciale de Hong Kong, des accords internationaux auxquels la République populaire de Chine est ou deviendra partie sera déterminée par le Gouvernement populaire central, selon les circonstances dans la Région et les besoins de celle‑ci et après examen du point de vue du gouvernement de la Région.

 

Les accords internationaux auxquels la République populaire de Chine n’est pas partie et qui sont cependant mis en œuvre à Hong Kong peuvent continuer d’être mis en œuvre dans la Région administrative spéciale de Hong Kong. Au besoin, le Gouvernement populaire central autorisera ou aidera la gouvernement de la Région à prendre des dispositions appropriées pour l’application, à la Région, d’autres accords internationaux pertinents.

 

27.   La RASHK de la RPC et la Chine continentale ont une entente en vue d’éviter les doubles impositions entre les deux parties, soit le « Protocole d’accord relatif à l’arrangement entre la Chine continentale et la Région administrative spéciale de Hong Kong visant à éviter la double imposition des revenus ». Cette entente a été signée par des représentants du gouvernement de la RASHK de la RPC et du gouvernement de la Chine continentale le 11 février 1998 [onglet N].

 

E.    Faits concernant le droit fiscal de la Chine continentale

 

28.   De l’impôt est fixé par la Chine continentale selon deux principes de base. Les résidents de la Chine continentale sont généralement assujettis à de l’impôt sur les revenus de toutes provenances. Les non‑résidents de la Chine continentale sont généralement assujettis à de l’impôt seulement sur les revenus dont la source se situe en Chine continentale. L’impôt en Chine continentale est administré par l’Administration fiscale de l’État.

 

29.   Les impôts décrits dans la présente section E s’appliquent à la Chine continentale. Aucun des impôts mentionnés dans la présente section E ne s’applique à la RASHK de la RPC, et le Gouvernement populaire central n’a pas le droit de percevoir des impôts dans la RASHK de la RPC en vertu de l’article 106 de la Loi fondamentale.

 

30.   L’« impôt sur le revenu individuel » est visé au sous‑alinéa 2(1)b)(i) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu et était un impôt établi en vertu de la « Loi de l’impôt sur le revenu individuel de la République populaire de Chine » [onglet O] (loi adoptée à la troisième session de la cinquième Assemblée populaire nationale le 10 septembre 1980 et révisée conformément à la « Décision relative à la révision de la Loi de l’impôt sur le revenu individuel de la République populaire de Chine » qui a été adoptée à la quatrième séance du Comité permanent de la huitième Assemblée populaire nationale le 31 octobre 1993 et qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1994).

 

31.   Conformément à la « Loi de l’impôt sur le revenu individuel de la République populaire de Chine », dans sa forme modifiée (la « Loi de l’impôt sur le revenu individuel »), et au règlement y afférent (le « Règlement de mise en œuvre ») :

 

       a)      les particuliers qui ne sont pas domiciliés en Chine continentale mais qui y résident pendant au plus 90 jours au cours d’une année d’imposition et dont le revenu n’est pas fourni par un établissement permanent situé en Chine continentale ne sont pas assujettis à de l’impôt en Chine continentale (Règlement de mise en œuvre, article 7);

 

       b)      les particuliers qui résident en Chine continentale pendant moins d’un an sont assujettis à de l’impôt seulement sur les revenus provenant de sources situées à l’intérieur de la Chine continentale (Loi de l’impôt sur le revenu individuel, article 1);

 

       c)      les particuliers qui ne sont pas domiciliés en Chine continentale mais qui y résident pendant plus d’un an et moins de cinq ans sont assujettis à de l’impôt sur les revenus provenant de sources situées à l’intérieur de la Chine continentale et provenant de sources situées à l’extérieur de la Chine continentale, mais seulement dans la mesure où le payeur est à l’intérieur de la Chine continentale (Règlement de mise en œuvre, article 6);

 

       d)      les particuliers qui résident en Chine continentale pendant plus de cinq ans sont assujettis à de l’impôt sur les revenus provenant de sources situées à l’intérieur de la Chine continentale et de sources situées à l’extérieur de la Chine continentale (c’est‑à‑dire sur les revenus de toutes provenances) (Loi de l’impôt sur le revenu individuel, article 1).

 

        En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu individuel, un impôt progressif allant de 5 à 45 p. 100 est fixé sur les revenus salariaux, et un impôt progressif allant de 5 à 35 p. 100 est fixé sur les revenus d’entreprise (Loi de l’impôt sur le revenu individuel, article 3).

 

32.   L’« impôt sur le revenu des entreprises mixtes à capitaux chinois et étrangers » est visé au sous‑alinéa 2(1)b)(ii) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu et était un impôt fixé avant le 1er juillet 1991 en vertu de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des coentreprises à capitaux chinois et étrangers » [onglet Q] qui a été adoptée par l’Assemblée populaire nationale le 10 septembre 1980 et qui a été modifiée par l’Assemblée populaire nationale le 2 septembre 1983. Conformément à l’article 3 de cette loi, de l’impôt était généralement perçu au taux de 30 p. 100 (sous réserve des réductions spécifiées à l’article 5 de cette loi) sur les revenus de toutes provenances.

 

33.   L’« impôt sur le revenu des entreprises étrangères » est visé au sous‑alinéa 2(1)b)(iii) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu et était un impôt fixé avant le 1er juillet 1991 en vertu de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises étrangères » [onglet R] qui a été adoptée par l’Assemblée populaire nationale le 13 décembre 1981 et qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1982. En vertu de cette loi, un impôt progressif allant de 20 à 40 p. 100 était généralement perçu sur les revenus provenant de sources situées en Chine continentale.

 

34.   L’« impôt sur le revenu des entreprises mixtes à capitaux chinois et étrangers » et l’« impôt sur le revenu des entreprises étrangères » ont été remplacés, le 1er juillet 1991, par l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers (« ECE ») et des entreprises étrangères (« EE ») établi en vertu de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers et des entreprises étrangères » [onglet S] qui a été adoptée à la quatrième séance de la septième Assemblée populaire nationale le 9 avril 1991 et qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1991.

 

35.   L’impôt établi en vertu de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers et des entreprises étrangères » (la « Loi de l’impôt sur le revenu des ECE et des EE ») et en vertu des « Règles de mise en œuvre détaillées » y afférentes [onglet T] (les « Règles de mise en œuvre détaillées ») s’applique au revenu de toutes provenances des ECE et au revenu des EE dans la mesure où celui‑ci provient de sources situées en Chine continentale. Cet impôt est perçu à un taux maximum représentant 30 p. 100 du revenu imposable (article 5).

 

36.   En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu des ECE et des EE, le taux d’imposition est ramené à 15 p. 100 dans le cas d’ECE exerçant des activités de production dans des « zones économiques spéciales » et à 24 p. 100 dans le cas d’ECE exerçant des activités dans des « zones économiques côtières ouvertes » et dans certains autres secteurs (Règles de mise en œuvre détaillées, article 7 et chapitre 6, « Traitement fiscal préférentiel »). Sous réserve de certaines exceptions, les ECE d’une durée d’exploitation d’au moins dix ans qui exercent des activités de production sont exonérées d’impôt pour les deux premières années de rentabilité et ont droit à une réduction d’impôt de 50 p. 100 pour la période allant de la troisième année à la cinquième (Règles de mise en œuvre détaillées, article 8 et chapitre 6, « Traitement fiscal préférentiel »). Lorsque des profits tirés d’une ECE par un investisseur étranger dans cette ECE sont réinvestis par lui directement dans l’établissement ou l’expansion en RPC d’entreprises à vocation exportatrice ou technologiquement avancées, l’investisseur peut obtenir un remboursement intégral de l’impôt déjà payé sur le revenu d’entreprise correspondant à la somme réinvestie, conformément aux règlements pertinents du Conseil d’État (Règles de mise en œuvre détaillées, article 81). De même, lorsque des profits tirés d’une ECE par un investisseur étranger dans cette ECE sont réinvestis par lui directement pour accroître le capital social ou utilisés par lui comme investissement pour la création d’une autre ECE, l’investisseur obtiendra un remboursement représentant 40 p. 100 de l’impôt déjà acquitté sur le revenu correspondant à la somme réinvestie, pourvu que la durée d’exploitation ne soit pas inférieure à cinq ans. Si l’argent réinvesti est retiré en deçà de cinq ans, l’impôt remboursé doit être rendu (Loi de l’impôt sur le revenu des ECE et des EE, article 10). Les profits après impôt tirés d’une ECE ne sont pas assujettis à une retenue d’impôt lorsqu’ils sont versés aux actionnaires (Loi de l’impôt sur le revenu des ECE et des EE, article 19, et Règlement de mise en œuvre, article 63).

 

37.   L’« impôt local sur le revenu » est visé au sous‑alinéa 2(1)b)(iv) de l’Accord Canada‑Chine en matière d’impôts sur le revenu. Avant le 1er juillet 1991, un « impôt local sur le revenu » représentant 10 p. 100 de l’impôt sur le revenu par ailleurs payable était fixé en vertu de l’article 3 de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des coentreprises à capitaux chinois et étrangers » [onglet Q] et en vertu de l’article 4 de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises étrangères » [onglet R]. Depuis le 1er juillet 1991, un « impôt local sur le revenu » est fixé aux ECE et aux EE en vertu de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers et des entreprises étrangères » [onglet S], à un taux représentant 3 p. 100 du revenu imposable (article 5), sous réserve d’une réduction pouvant être accordée par les autorités locales (article 9).

 

38.   Depuis le 1er janvier 1994, un « impôt sur les revenus d’entreprise » est fixé à toutes les entreprises autres que les entreprises à capitaux étrangers et les entreprises étrangères en vertu du « Règlement provisoire de l’impôt sur les revenus d’entreprise » [onglet U] (règlement adopté à la douzième séance à huis clos du Conseil d’État le 26 novembre 1993 et promulgué par le décret no 137 du Conseil d’État de la RPC le 13 décembre 1993). Cet impôt s’applique expressément aux entreprises d’État, aux entreprises collectives, aux entreprises privées, aux coentreprises et aux entreprises à capitaux mixtes. L’impôt sur les revenus d’entreprise est fixé à un taux représentant 33 p. 100 du revenu imposable de toutes provenances (article 1). Aucun « impôt local sur le revenu » n’est fixé en vertu du « Règlement provisoire de l’impôt sur les revenus d’entreprise ».

 

39.   Le « Règlement provisoire de l’impôt sur les revenus d’entreprise » [onglet U] a remplacé, au 1er janvier 1994, l’« impôt sur le revenu des entreprises d’État », la « taxe relative à la réglementation afférente au revenu des entreprises d’État », l’« impôt sur le revenu des entreprises collectives », l’« impôt sur le revenu des entreprises privées » et l’« impôt sur le revenu des ménages » qui avaient été établis en vertu du « Projet de règlement de la République populaire de Chine relatif à l’impôt sur le revenu des entreprises d’État » et des « Mesures de perception de l’impôt d’ajustement sur les entreprises d’État » publiés par le Conseil d’État le 1er septembre 1984, ainsi qu’en vertu du « Règlement provisoire de la RPC relatif à l’impôt sur le revenu des entreprises collectives » publié le 11 avril 1985 et en vertu du « Règlement provisoire de la République populaire de Chine relatif à l’impôt sur le revenu des entreprises privées » publié le 25 juin 1988.

 

40.   En plus de l’impôt sur le revenu individuel, de l’impôt sur le revenu des ECE et des EE, de l’impôt local sur le revenu et de l’impôt sur les revenus d’entreprise, plusieurs autres impôts sont fixés en Chine continentale, y compris une « taxe sur la valeur ajoutée » relative à la vente ou à l’importation de produits ou de services taxables, une « taxe à la consommation » sur les articles de luxe, une « taxe d’affaires » sur la prestation de certains services et sur le transfert de biens immeubles et incorporels, une « taxe sur la valeur ajoutée de terrains », une « taxe sur les actes translatifs », un « droit de timbre », une « taxe d’immatriculation de véhicules et de navires » et une « taxe sur les ressources » [onglet V, à 10.6].

 

        F.      Faits concernant le droit fiscal de la RASHK de la RPC

 

41.   Dans la RASHK de la RPC, il n’y pas de système général d’imposition du revenu ou du capital selon la résidence du contribuable. Aux fins de la détermination du revenu imposable, les résidents et les non‑résidents sont traités de la même manière. La source du revenu, plutôt que le lieu de résidence, est le principal facteur dans la détermination de l’assujettissement d’une personne à l’impôt. Une personne qui a gagné un revenu dans la RASHK de la RPC ou un revenu provenant de la RASHK de la RPC est une personne imposable. Les éléments suivants sont des revenus ou profits assujettis à l’impôt : les revenus tirés d’une charge ou d’un emploi et les profits imposables tirés d’un commerce, d’une entreprise ou d’une profession, ainsi que la valeur imposable de terrains et de bâtiments. Les revenus qui sont gagnés dans la RASHK de la RPC ou qui en proviennent et qui représentent un de ces trois éléments d’imposition selon l’Ordonnance fiscale 112 sont généralement assujettis à de l’impôt dans la RASHK de la RPC [onglet W, à 11.2‑11.4].

 

42.   Dans la RASHK de la RPC, l’impôt est administré par le « ministère des Affaires fiscales » (appelé en anglais « department of Inland Revenue »). Aucun des impôts décrits dans la présente section F ne s’applique à la Chine continentale.

 

43.   L’article 73 de la Loi fondamentale dit :

 

[TRADUCTION]

Le Conseil législatif de la Région administrative spéciale de Hong Kong exerce les fonctions et pouvoirs suivants : [...]

 

(3)      Approuver les impôts, ainsi que les dépenses publiques.

 

44.   L’article 106 de la Loi fondamentale dit :

 

[TRADUCTION]

La Région administrative spéciale de Hong Kong sera financièrement indépendante.

 

Les produits financiers de la Région administrative spéciale de Hong Kong seront utilisés par cette dernière exclusivement pour ses propres fins et ne seront pas cédés au Gouvernement populaire central.

 

Le Gouvernement populaire central ne prélèvera pas d’impôts dans la Région administrative spéciale de Hong Kong.

 

45.   L’article 108 de la Loi fondamentale dit :

 

[TRADUCTION]

La Région administrative spéciale de Hong Kong appliquera un système d’imposition indépendant.

 

En prenant comme référence la politique de faible imposition précédemment menée à Hong Kong, la Région administrative spéciale de Hong Kong édictera des lois de sa propre initiative concernant les types d’impôts, les taux d’imposition, les réductions d’impôt, les allocations et exemptions et d’autres questions d’impôt.

 

46.   La loi fiscale de Hong Kong qu’était l’« Ordonnance relative à la fiscalité » (Inland Revenue Ordinance) du 3 mai 1947 a été adoptée comme Ordonnance fiscale 112 de la RASHK de la RPC au 1er juillet 1997, conformément au processus décrit aux paragraphes 20 à 24 du présent document. Le texte au 1er juillet 1997 de l’Ordonnance fiscale 112 de la RASHK de la RPC était le même que le texte au 30 juin 1997 de l’Ordonnance relative à la fiscalité du 3 mai 1947.

 

47.   L’Ordonnance fiscale 112, partie III [onglet X], de la RASHK de la RPC établit un « impôt salarial ». Conformément au paragraphe 8(1), un tel impôt est fixé aux particuliers au titre du revenu qu’ils gagnent dans la RASHK de la RPC ou qui en provient et qui représente un revenu tiré d’une charge ou d’un emploi, un profit ou une pension. Le paragraphe 8(1) s’applique lorsque la source de l’emploi du particulier est située dans la RASHK de la RPC, auquel cas tout le revenu tiré de cet emploi est assujetti à l’impôt salarial, même si les services ne sont qu’en partie fournis dans la RASHK de la RPC. En vertu du paragraphe 8(1A), l’impôt salarial s’applique à un emploi dont la source n’est pas située dans la RASHK de la RPC mais relativement auquel les services sont fournis dans la RASHK de la RPC (CIR v. Geopfert, (1987) HKTC 2, à la p. 210) [onglet W, à 19.1‑19.2]. L’impôt salarial est un impôt progressif allant de 2 à 17 p. 100 [onglet W, à 24.3].

 

48.   Le ministère des Affaires fiscales de la RASHK de la RPC a fait savoir que la source d’un emploi est considérée comme étant située dans la RASHK de la RPC lorsque le contrat d’emploi est négocié ou conclu dans la RASHK de la RPC, que l’employeur est résident de la RASHK de la RPC ou que la rémunération de l’employé est versée à ce dernier dans la RASHK de la RPC [onglet W, à 19.2].

 

49.   L’Ordonnance fiscale 112, partie IV [onglet Y], de la RASHK de la RPC établit un « impôt sur les bénéfices ». Les personnes résidantes et non résidantes (y compris les sociétés de capitaux, les sociétés de personnes, les fiduciaires et les groupements de personnes) qui exercent ou sont réputées exercer une activité relative à un commerce, à une entreprise ou à une profession dans la RASHK de la RPC sont assujetties à de l’impôt sur les profits imposables dont la source est située dans la RASHK de la RPC. Certains revenus provenant de sources situées à l’extérieur de la RASHK de la RPC sont réputés provenir d’une source située dans la RASHK de la RPC. Aussi bien les rentrées d’argent effectives que les sommes portées au crédit d’une personne mais non versées à celle‑ci (c’est‑à‑dire les produits à recevoir) sont considérées comme un revenu assujetti à l’impôt sur les bénéfices [onglet W, à 12.1]. Le taux d’impôt sur les bénéfices est de 15 p. 100 pour les particuliers et de 16 p. 100 pour les personnes morales [onglet W, à 22.1 et 24.1].

 

50.   Des règles particulières visant l’application de l’impôt sur les bénéfices à un propriétaire d’aéronef résidant dans la RASHK de la RPC sont énoncées à l’article 23C de l’Ordonnance fiscale 112 de la RASHK de la RPC [onglet Y]. En vertu de l’article 23C, une société résidante de la RASHK de la RPC qui exploite une entreprise comme propriétaire d’aéronef est réputée exploiter cette entreprise dans la RASHK de la RPC. L’article 23C de l’Ordonnance fiscale 112 indique quelle proportion du revenu de toutes provenances qu’un propriétaire d’aéronef tire de l’exploitation d’une entreprise en tant que propriétaire d’aéronef doit être attribuée à la RASHK de la RPC aux fins de l’impôt.

 

51.   L’Ordonnance fiscale 112, partie VII [onglet Z], de la RASHK de la RPC prévoit l’assujettissement à l’impôt fixé au moyen d'une cotisation personnelle. Cette partie indique que les éléments d’imposition prévus dans l’Ordonnance fiscale 112 de la RASHK de la RPC peuvent en fait faire l’objet d’une seule et unique cotisation dans le cas d’un particulier qui est un résident permanent ou temporaire de la RASHK de la RPC et qui opte pour une cotisation personnelle. Le revenu total du particulier aux fins d’une cotisation personnelle comprend la valeur imposable nette de terrains et bâtiments appartenant au particulier, le revenu imposable net provenant d’une charge ou d’un emploi lucratif du particulier et les profits imposables. Les dons de bienfaisance approuvés, les pertes d’entreprise et certains frais d’intérêts sont portés en diminution du revenu total pour déterminer le montant imposable relatif au particulier [onglet W, à 21.2].

 

52.   Aux fins de cet appel, les parties au présent document conviennent des faits qui y sont énoncés. Chaque partie se réserve le droit de contester la pertinence de l’un quelconque des faits énoncés dans le présent document.

 

[7]      Aucune déposition n’a été faite au procès concernant la relation constitutionnelle, juridique ou politique entre la Région administrative spéciale de Hong Kong et la République populaire de Chine. Je ne sais donc pas si une région administrative spéciale est analogue à une province canadienne, à un État des États‑Unis, à un territoire du Canada, à un territoire des États‑Unis ou à une colonie de la Couronne britannique, par exemple.

 

[8]      M. Edwards a souvent travaillé pour Cathay Pacific depuis 1989. Il pilote habituellement un aéronef pour Cathay Pacific entre Toronto et Hong Kong. Il habite en Ontario. Il paie de l’impôt sur son salaire à la RASHK.

 

[9]      M. Hollman a été contre‑interrogé par l’avocat de l’appelant sur sa déclaration solennelle qui a été déposée comme pièce. Il est agent du service extérieur depuis 33 ans. À l’époque du procès, il était, depuis 1999, directeur adjoint de la Direction de la Chine et de la Mongolie du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Lui et trois autres fonctionnaires s’occupent de la gestion des relations politiques entre le Canada et la République populaire de Chine. Le Canada a une ambassade à Beijing et un consulat général dans la RASHK.

 

[10]     Par suite d’une demande présentée en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, M. Hollman a examiné des documents qu’avait son ministère concernant la négociation du Traité fiscal Canada‑Chine. Les documents mentionnés dans sa déclaration sont inclus dans la liste supplémentaire de documents de l’intimée.

 

[11]     À la demande du ministère de la Justice et, ai‑je conclu, aux fins du présent appel, M. Hollman a pris des dispositions pour que soit envoyée au ministère chinois des Affaires étrangères, en novembre 2001, une note diplomatique verbale faisant état de la position du gouvernement du Canada selon laquelle la Convention ne s’applique pas à la RASHK et demandant au gouvernement de la Chine de confirmer que sa propre position est la même que celle du Canada. L’échange de notes diplomatiques verbales représente la « façon habituelle — et reconnue — dont le gouvernement du Canada communique avec les gouvernements d’autres États », m’a informé M. Hollman. Une note semblable a été envoyée au ministère de la Justice de Hong Kong. M. Hollman était au courant que, lors d’un échange de lettres, en mars 2001, entre les autorités fiscales canadiennes et chinoises, chacun des deux gouvernements a adopté la position selon laquelle la Convention ne s’applique pas à la RASHK. Dans la réponse du gouvernement chinois, il est dit :

 

[TRADUCTION]

       L’article 108 de la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine dispose que la RASHK met en œuvre un système d’imposition indépendant. Par conséquent, l’accord susmentionné ne s’applique pas à la Région administrative spéciale de Hong Kong, et une société qui a été constituée dans la Région administrative spéciale de Hong Kong, qui en est un résident et qui y a son siège social et son siège de direction n’est pas un « résident d’un État contractant » ni une « entreprise d’un État contractant » au sens de l’article 4 et de l’alinéa 3(1)g), respectivement, de l’Accord.

 

[12]     La réponse du ministère de la Justice de Hong Kong confirmait également la position du gouvernement du Canada.

 

[13]     L’avocat de l’appelant s’opposait à la preuve relative aux échanges de notes diplomatiques entre le Canada et la Chine, parce qu’ils avaient eu lieu après les années d’imposition considérées dans le présent appel. Des copies des notes ont été envoyées à l’avocat huit jours avant le procès; toutefois, l’avocat de l’intimée avait précédemment informé l’avocat de l’appelant de cet échange de notes et l’avait informé qu’il lui enverrait des copies de ces notes.

 

[14]     L’avocat de l’appelant n’accepte pas comme point de vue du gouvernement du Canada l’opinion exprimée dans une lettre en date du 13 mars 2001 de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (l’« ADRC ») à l’administration fiscale chinoise. De l’avis de l’ADRC, lequel avis a été confirmé par l’administration fiscale chinoise, le Traité fiscal Canada‑Chine ne s’applique pas à Hong Kong. D’après l’ADRC, Hong Kong ne peut être considérée comme faisant partie de la RPC aux fins du Traité que si la législation relative à l’impôt chinois s’applique à la RASHK. L’ADRC a conclu dans sa lettre qu’un examen des paragraphes 1 et 2 de l’article 2 du Traité indique que l’expression « impôt chinois » n’inclut pas l’impôt de Hong Kong, pour les raisons suivantes :

 

[TRADUCTION]

       [L]es impôts énumérés à l’alinéa 2(1)b) [du Traité] désignent les impôts perçus par la RPC à l’époque de la négociation de l’Accord. Les impôts de Hong Kong ne seraient pas assimilables à « l’impôt local sur le revenu » parce que, d’après nos notes issues de la négociation de l’Accord, l’impôt local sur le revenu a été décrit par la RPC comme désignant les impôts que les administrations locales ont le droit de percevoir, mais seulement si cela est permis par la législation fiscale adoptée par l’Assemblée populaire et si cela entre dans le cadre de cette législation, et nous croyons comprendre que Hong Kong ne serait pas considérée comme assujettie à cette législation. La Loi fondamentale de Hong Kong et la Déclaration commune sino‑britannique établissent toutes deux que la législation fiscale de la RPC n’est pas en vigueur à Hong Kong. Pour ce qui est du paragraphe 2 l’article 2 (Impôts visés), les impôts de Hong Kong ne sont pas des impôts de nature identique ou substantiellement analogue « qui seraient établis après la date de signature du présent Accord et qui s’ajouteraient » aux impôts existants qui sont énumérés « ou qui les remplaceraient ». Ils ne s’ajoutent pas aux impôts énumérés et ne les remplacent pas non plus.

 

[15]     L’ADRC a aussi fait référence à une publication de l’« Inland Revenue Department » (ministère des Affaires fiscales) de Hong Kong qui exprimait également le point de vue selon lequel le Traité ne s’appliquerait pas à Hong Kong[6].

 

[16]     La position du ministère des Finances a été exprimée au congrès de 1997 de l’Association de planification fiscale et financière — Table ronde sur la fiscalité fédérale. En réponse à la question 3.7, « Est‑ce que le ministère des Finances pourrait nous dire si la convention fiscale entre le Canada et la Chine s’appliquera à Hong Kong à la suite de l’unification? », le représentant du ministère des Finances a déclaré ce qui suit :

 

[TRADUCTION]

Le traité fiscal entre le Canada et la Chine ne s’appliquera pas à Hong Kong malgré l’unification, parce que, en vertu des modalités de l’accord d’unification, il a été convenu que Hong Kong maintiendra son système fiscal, de sorte que la législation fiscale chinoise ne s’applique pas à Hong Kong. Comme vous le savez peut‑être, le Canada n’avait pas de convention fiscale avec Hong Kong.

 

[17]     La partie de l’interrogatoire préalable de Mme Caspersen qui a été consignée en preuve au procès se rapportait au manque de déclarations publiques du gouvernement canadien indiquant que le Traité ne s’appliquait pas à la RASHK.

 

[18]     Parmi les pièces déposées au procès, il y avait des lettres que des fonctionnaires des ministères des Finances et des Affaires étrangères s’étaient écrites pendant les négociations relatives au Traité fiscal Canada‑Chine, en 1984 et subséquemment. La question de Hong Kong a été examinée; le 20 septembre 1984, des représentants du Royaume‑Uni et du gouvernement de la RPC ont paraphé un projet d’accord en prévision du transfert de souveraineté sur Hong Kong, du Royaume‑Uni à la RPC, devant avoir lieu le 1er juillet 1997. Dans l’intervalle, les autorités de Hong Kong n’étaient pas disposées à négocier une convention fiscale avec le Canada. Hong Kong n’avait de convention fiscale avec aucun gouvernement. C’est seulement lorsqu’un cabinet d’avocats de Toronto a soulevé la question de savoir si la Convention s’appliquerait à Hong Kong après le 30 juin 1997 que les ministères des Finances et des Affaires étrangères ont vraiment commencé à étudier la question. En mai 1995, le ministère des Affaires étrangères, Direction du droit économique, inclinait à penser que le Traité ne s’appliquerait pas à Hong Kong après le 30 juin 1997, et, en 1997, le ministère des Finances et Revenu Canada (nom que portait alors ce ministère) ont adopté la même position[7].

 

Analyse

 

[19]     L’arrêt canadien clé sur l’interprétation de traités relatifs à l’impôt sur le revenu est l’arrêt de la Cour suprême du Canada intitulé Crown Forest Industries Ltd. c. Canada[8]. Dans cette affaire, la contribuable — une société — louait certaines barges de la Norsk Pacific Steamship, soit une société non résidante qui avait été constituée aux Bahamas et qui exploitait toutefois une entreprise aux États‑Unis. Se fondant sur le paragraphe 2 de l’article XII de la Convention Canada - États‑Unis en matière d'impôts (1980), la contribuable avait retenu 10 p. 100 d’impôt sur les paiements locatifs qu’elle faisait à la Norsk. La Cour devait déterminer si la Norsk était un « résident d’un État contractant » — c’est‑à‑dire des États‑Unis dans ce cas‑là — au sens de l’article IV de la Convention Canada - États‑Unis en matière d'impôts (1980). L’appel a été accueilli. S’exprimant pour la Cour, le juge Iacobucci a statué :

 

       L’interprétation d’un traité vise d’abord et avant tout à trouver le sens des termes en question. Il convient donc de considérer le langage utilisé ainsi que l’intention des parties. [...][9]

 

[20]     Au sujet de l’intention des rédacteurs de la convention, le juge Iacobucci a fait remarquer ceci :

 

       L’analyse de l’intention des rédacteurs d’une convention fiscale est très importante pour déterminer le champ d’application de ce traité. Comme le fait remarquer le juge Addy dans Succession J. N. Gladden c. La Reine, [1985] 1 C.T.C. 163 (C.F. 1re inst.), aux pp. 166 et 167 :

 

Contrairement à une loi fiscale ordinaire un traité ou une convention en matière d’impôt doit être interprété de façon libérale, de manière à appliquer les véritables intentions des parties. Il faut éviter une interprétation littérale ou légaliste lorsque l’objet fondamental du traité pourrait être rejeté ou contrecarré dans la mesure où le point particulier à l’étude est visé. [Je souligne.]

 

[...]

 

       Manifestement, l’objectif de la Convention revêt une grande importance quant à la façon d’interpréter ses dispositions. [...] pour dégager ces objectifs et intentions, un tribunal peut recourir à des documents extrinsèques qui font partie du contexte juridique (notamment les conventions modèles acceptées et les commentaires officiels portant sur celles-ci) sans qu’il soit nécessaire d’avoir préalablement décelé une ambiguïté.[10]

 

[21]     De plus, à la page 827, le juge Iacobucci a répété que, dans l’interprétation d’une convention fiscale internationale, on peut se reporter à des documents extrinsèques comme d’autres conventions fiscales internationales et des modèles généraux de telles conventions. Le juge Iacobucci s’appuyait à cet égard sur l’article 31 de la section 3 de la partie III de la Convention de Vienne sur le droit des traités (la « Convention de Vienne »)[11], qui traite de l’interprétation des traités.

 

[22]     Les articles 31 et 32 de la Convention de Vienne se lisent comme suit :

 

ARTICLE 31

Règle générale d’interprétation

 

          1. Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but.

 

          2. Aux fins de l’interprétation d’un traité, le contexte comprend, outre le texte, préambule et annexes inclus :

 

a) tout accord ayant rapport au traité et qui est intervenu entre toutes les parties à l’occasion de la conclusion du traité;

 

b) tout instrument établi par une ou plusieurs parties à l’occasion de la conclusion du traité et accepté par les autres parties en tant qu’instrument ayant rapport au traité.

 

           3. Il sera tenu compte, en même temps que du contexte :

 

a) de tout accord ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l’interprétation du traité ou de l’application de ses dispositions;

 

b) de toute pratique ultérieurement suivie dans l’application du traité par laquelle est établi l’accord des parties à l’égard de l’interprétation du traité;

 

c) de toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties.

 

4. Un terme sera entendu dans un sens particulier s’il est établi que telle était l’intention des parties.

 

ARTICLE 32

Moyens complémentaires d’interprétation

 

           Il peut être fait appel à des moyens complémentaires d’interprétation, et notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances dans lesquelles le traité a été conclu, en vue, soit de confirmer le sens résultant de l’application de l’article 31, soit de déterminer le sens lorsque l’interprétation donnée conformément à l’article 31 :

 

           a) laisse le sens ambigu ou obscur; ou

 

           b) conduit à un résultat qui est manifestement absurde ou déraisonnable.

 

[23]    L’arrêt Crown Forest a été appliqué par la Cour d’appel fédérale dans plusieurs causes[12]. Conformément à cet arrêt, je traiterai d’abord du langage utilisé dans le Traité fiscal Canada‑Chine, puis de l’intention des rédacteurs de la Convention.

 

Le langage utilisé

 

[24]    Je conviens avec l’avocat de l’appelant que la méthode appropriée quant à l’application d’une convention relative à l’impôt sur le revenu a été résumée avec exactitude par Philip Baker dans son ouvrage intitulé Double Taxation Conventions and International Tax Law[13]. D’après M. Baker, en interprétant une convention en matière de double imposition, il faut d’abord déterminer si la question entre dans le champ d’application de la convention, puis appliquer les définitions pertinentes et déterminer ensuite lesquelles des dispositions de fond s’appliquent.

 

[25]    L’article 1 du Traité, soit le premier des articles préliminaires traitant du champ d’application du Traité, dit que le Traité s’applique aux personnes qui sont des résidents de l’un des États contractants ou des deux. Le fait que l’appelant — un résident du Canada — fasse partie des personnes visées par le Traité n’est pas un point controversé.

 

[26]    L’article 2 détermine le champ d’application du Traité en ce sens qu’il définit les impôts qui sont visés par le Traité. L’appelant argue que, comme il cherche à obtenir une mesure de redressement concernant « les impôts sur le revenu qui sont perçus par le Gouvernement du Canada », il satisfait à l’exigence en matière de champ d’application qui est prévue à l’alinéa 2(1)a) du Traité. L’avocat de l’appelant soutient qu’il est inexact d’aborder le problème comme dépendant de la question de savoir si le Traité s’applique à la RASHK. Le langage utilisé dans le Traité, affirme‑t‑il, s’applique à l’appelant. Cet argument est séduisant. Toutefois, l’avocat de l’appelant reconnaissait que, si un résident du Canada cherchait à obtenir en vertu de la Convention une mesure de redressement concernant un des impôts perçus dans la RASHK, la question de savoir si un tel impôt entrait dans le champ d’application du Traité serait pertinente. En fait, eu égard au principe de courtoisie internationale, il serait inusité qu’un résident canadien cherchant à obtenir une mesure de redressement au titre d’impôts sur le revenu perçus par le gouvernement du Canada soit considéré comme entrant dans le cadre du champ d’application du Traité, tandis qu’un résident canadien cherchant à obtenir une mesure de redressement relative à l’un des impôts perçus dans la RASHK n’entrerait pas dans ce cadre.

 

[27]    Comme le fait remarquer M. Baker, les traités fiscaux sont négociés dans le contexte de deux systèmes fiscaux existants, de sorte que l’article 2 spécifie les impôts auxquels s’applique la Convention. Ainsi, il semble convenir davantage de considérer que, en appliquant l’article 2 de la Convention, il faut prendre en compte non seulement les impôts à l’égard desquels une mesure de redressement est demandée, mais également le contexte des deux systèmes fiscaux existants des parties au Traité. En appliquant cette approche, il semblerait que le cas de l’appelant n’entre pas dans le cadre des impôts visés par le Traité.

 

[28]    L’appelant soutient que, en vertu du paragraphe 15(3) du Traité, il a droit à une déduction, au Canada, du montant de son revenu d’emploi reçu de Cathay Pacific, parce que ce revenu d’emploi n’est imposable que dans l’État contractant qu’est la République populaire de Chine. Pour que s’applique le paragraphe 15(3) de la Convention, les deux conditions suivantes doivent être réunies :

 

i)          la rémunération en cause doit être une rémunération au titre d’un emploi exercé à bord d’un navire ou d’un aéronef exploité en « trafic international »;

ii)         la rémunération en cause doit être une rémunération au titre d’un emploi exercé pour une « entreprise d’un État contractant ».

 

[29]    Les expressions « trafic international » et « entreprise d’un État contractant » sont définies au paragraphe 3(1) de l’Accord. Encore là, il n’y a aucun différend entre les parties quant au fait que la rémunération de l’appelant était une rémunération au titre d’un « emploi exercé à bord d’un [...] aéronef exploité en trafic international ». Les parties ne s’entendent pas quant à savoir si Cathay Pacific était une « entreprise d’un État contractant » aux fins de la Convention. Tel est le principal point en litige dans le présent appel.

 

[30]    L’alinéa 3(1)g) de la Convention définit l’expression « entreprise d’un État contractant » comme désignant « une entreprise exploitée par un résident d’un État contractant ». L’expression « résident d’un État contractant » est définie comme suit au paragraphe 4(1) de la Convention :

 

Au sens du présent Accord, l’expression « résident d’un État contractant » désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet État, est assujettie à l’impôt dans cet État contractant, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège social, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue.

 

[31]    Pour déterminer si Cathay Pacific est une entreprise de la RPC, je dois d’abord déterminer si Cathay Pacific est une personne qui :

 

          a) en vertu de la législation de cet État,

 

          b) est assujettie à l’impôt dans cet État contractant,

 

c) en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège social, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue.

 

Il doit être satisfait à ces trois exigences pour que j’arrive à la conclusion que Cathay Pacific était une entreprise de la RPC en 1997.

 

A)      « […] en vertu de la législation de cet État »

 

[32]    Cathay Pacific est assujettie à l’impôt dans la RASHK en vertu de la partie IV de l’Internal Revenue Ordinance[14] (ordonnance relative à la fiscalité) de Hong Kong.

 

[33]    L’expression « législation de cet État » n’est pas définie dans la Convention. En ce qui a trait au premier critère en matière de résidence qui est prévu dans le Traité, l’appelant invoque deux arguments. Premièrement, il argue que l’Ordonnance relative à la fiscalité de Hong Kong fait partie de la « législation de la République populaire de Chine », ce que nie l’intimée. Deuxièmement, il soutient que, dans le membre de phrase « législation de cet État », le mot « État » ne renvoie pas à la définition géographique de « la République populaire de Chine » figurant à l’alinéa 3(1)b) de la Convention. L’alinéa 3(1)b) indique ce que l’expression « la République populaire de Chine » désigne « lorsqu’employée dans un sens géographique ».

 

[34]    Dans le membre de phrase « la législation de cet État », le mot « État » n’est pas employé en un sens géographique. La législation n’est pas le produit d’un secteur géographique. Elle est le produit des institutions d’une entité juridique et politique, c’est‑à‑dire de l’État de la République populaire de Chine dans le présent appel. La Convention ne définit toutefois pas en un sens juridique ou politique l’expression « la République populaire de Chine ». La question est donc de savoir si, aux fins du Traité, la RPC inclut la RASHK en un sens autre qu’un « sens géographique ».

 

[35]    À l’appui de l’argument selon lequel la RPC inclut la RASHK aux fins du Traité, l’appelant fait référence aux Commentaires sur l’article 2 du Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune[15] de l’OCDE, qui se lisent comme suit :

 

1. Cet article s’inspire du désir de rendre plus acceptables et précises la terminologie et la nomenclature des impôts faisant l’objet de la Convention, de donner la possibilité d’identifier les impôts des États contractants qui sont visés par la Convention, d’étendre le plus possible le champ d’application de la Convention en y incluant, autant que possible, en harmonie avec les règles de la législation interne des États contractants, les impôts perçus par les subdivisions politiques ou les collectivités locales, et d’éviter la nécessité de conclure une nouvelle convention à chaque modification de la législation interne des États contractants grâce à l'échange périodique de listes et à une procédure amiable.

 

[36]    En fait, les Commentaires suivants sont encore plus clairs à cet égard :

 

2. Le paragraphe définit le champ d’application de la Convention, à savoir les impôts sur le revenu et sur la fortune; on a donc écarté l’expression « impôts directs » beaucoup trop imprécise. Peu importe l’autorité pour le compte de laquelle ces impôts sont perçus; il peut s’agir aussi bien de l’État lui‑même que de ses subdivisions politiques ou de ses collectivités locales (États fédérés, régions, provinces, cantons, districts, départements, arrondissements, Kreise, communes ou groupements de communes, etc.).

 

[37]    Toutefois, l’avocat de l’appelant ne tient pas compte de ce que le texte de l’article 2 du Modèle de l’OCDE diffère de celui de l’article 2 du Traité fiscal Canada‑Chine. Le Canada a en fait expressément réservé sa position sur la partie du paragraphe (1) du Modèle de l’OCDE qui dit qu’un traité fiscal s’applique aux impôts de subdivisions politiques ou de collectivités locales. La partie pertinente du Modèle de l’OCDE, qui est complètement absente du texte du Traité fiscal Canada‑Chine, se lit comme suit :

 

Article 2. Impôts visés — (1) La présente Convention s’applique aux impôts sur le revenu et sur la fortune perçus pour le compte d’un État contractant, de ses subdivisions politiques ou de ses collectivités locales, quel que soit le système de perception.

 

[38]    Les observations ci‑devant ne peuvent s’appliquer au Traité.

 

[39]    L’appelant invoque en outre le paragraphe 3(2) du Traité, ainsi que l’article 3 de la Loi sur l’interprétation des conventions en matière d’impôts sur le revenu[16] et l’article 38 de la Loi d’interprétation[17], pour faire valoir, d’une manière peu concluante à mon avis, que, depuis le 1er juillet 1997, l’expression « la République populaire de Chine » employée dans le Traité inclut la RASHK lorsqu’elle est employée en un sens autre qu’un « sens géographique ». L’article 38 de la Loi d’interprétation se lit comme suit :

 

 La désignation courante d’une personne, d’un groupe, d’une fonction, d’un lieu, d’un pays, d’un objet ou autre entité équivaut à la désignation officielle ou intégrale.

 

[40]    Enfin, à l’appui de la proposition voulant que la RASHK soit incluse dans « la République populaire de Chine » au sens ordinaire de cette expression employée dans le Traité, l’appelant invoque les solutions adoptées dans des accords en matière de double imposition entre le Canada et d’autres pays.

 

[41]    Il faut appliquer les termes du paragraphe 31(1) de la Convention de Vienne pour interpréter l’expression « la République populaire de Chine » dans le contexte des mots « la législation de la République populaire de Chine ». Puis, la question à laquelle il faut répondre est de savoir si l’Ordonnance relative à la fiscalité de Hong Kong fait partie de la « législation de la République populaire de Chine » aux fins de l’article 4 du Traité.

 

[42]    L’Ordonnance relative à la fiscalité est un texte qui a été édicté par le corps législatif de la RASHK. Depuis le 1er juillet 1997, le corps législatif de la RASHK tire ses pouvoirs de l’article 3 du chapitre IV de la « Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Hong Kong »[18]. Les dispositions de la Loi fondamentale qui sont pertinentes aux fins qui nous occupent se lisent comme suit :

 

[TRADUCTION]

Article 66. Le Conseil législatif de la Région administrative spéciale de Hong Kong est le corps législatif de la Région. [...]

 

Article 73. Le Conseil législatif de la Région administrative spéciale de Hong Kong exerce les fonctions et pouvoirs suivants :

 

(1) Édicter, modifier ou abroger des lois conformément à la présente loi et aux procédures juridiques;

 

(2) Examiner et approuver les budgets présentés par le gouvernement;

 

(3) Approuver les impôts, ainsi que les dépenses publiques; [...]

 

Article 108. La Région administrative spéciale de Hong Kong appliquera un système d’imposition indépendant.

 

[43]    Si je ne m’abuse, la Loi fondamentale est une loi de l’Assemblée populaire nationale de la RPC. Elle a été édictée conformément à l’article 31[19] et au paragraphe 13 de l’article 62 de la Constitution de la République populaire de Chine[20], qui autorisent l’établissement de régions administratives spéciales comme la RASHK et Macao. Le paragraphe 13 de l’article 62 se lit comme suit :

 

[TRADUCTION]

L’Assemblée populaire nationale exerce les fonctions et pouvoirs suivants :

 

[...]

 

13. décider de l’établissement de régions administratives spéciales, ainsi que des systèmes à y instituer [...]

 

[44]    L’avocat de l’appelant était donc d’accord sur l’avis juridique d’Alan Willis, qui était conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères à l’époque et qui, le 29 décembre 1994, a déclaré que « depuis le 1er juillet 1997, l'assise de la législation de la nouvelle entité qu’est la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine est la RPC » et que les articles 106[21] et 108[22] de la Loi fondamentale « représentent une délégation de pouvoir d’imposition, du gouvernement central à l’administration locale ».

 

[45]    Je ne suis pas d’accord avec l’opinion de M. Willis. La question est de savoir si les pouvoirs conférés au Conseil législatif de la RASHK par la Loi fondamentale représentent une délégation législative provenant de l’Assemblée populaire nationale. On peut soutenir que tel n’est pas le cas. Un exemple pertinent est celui du Canada[23]. Techniquement, les principaux textes de la Constitution canadienne sont des textes qui ont été édictés par le parlement impérial de la Grande‑Bretagne[24]. La Loi constitutionnelle de 1867 établit le Parlement du Canada et les corps législatifs provinciaux et leur confère un pouvoir législatif. Il a toutefois été statué qu’il est erroné de considérer que les pouvoirs conférés par la Loi constitutionnelle de 1867 aux corps législatifs provinciaux[25] ou au Parlement du Canada[26] sont des pouvoirs délégués. Dans l’affaire Hodge, par exemple, il avait été statué que le pouvoir législatif provincial était « aussi plein et aussi ample, sous réserve des limites prévues à l’article 92, que celui que le parlement impérial avait et qu’il pouvait conférer ce pouvoir »[27]. De même, le pouvoir du Conseil législatif de la RASHK peut, en vertu de l’article 73 de la Loi fondamentale, être aussi plein et aussi ample que celui que l’Assemblée populaire nationale avait conformément à l’article 62 de la Constitution de la RPC. Ainsi, d’un point de vue canadien, le pouvoir indépendant de la RASHK d’édicter des lois fiscales ne représente pas une délégation de pouvoir d’imposition d’un gouvernement central à une administration locale. Comme je l’ai dit précédemment dans mes motifs, on n’a présenté aucune preuve sur la relation constitutionnelle ou juridique entre le gouvernement central de la RPC et la RASHK.

 

[46]    L’appelant affirme également que l’article 160[28] de la Loi fondamentale étaye sa proposition voulant que l'assise de la législation de la RASHK soit la RPC. Le 23 février 1997, le Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale a adopté comme constituant la législation de la RASHK le plus gros de la législation précédemment en vigueur à Hong Kong, y compris l’Ordonnance relative à la fiscalité[29].

 

[47]    On ne m’a présenté aucune preuve que le processus décrit au paragraphe précédent quant à l’adoption de la législation de la colonie de la Couronne qu’avait été Hong Kong représente une incorporation de la législation de la RASHK dans la législation de la République populaire de Chine. Il ne semble pas non plus que cela représente une intervention législative de l’Assemblée populaire nationale. Ce processus représentait plutôt une façon d’assurer la continuité de la législation de la colonie britannique qu’avait été Hong Kong comme législation de la nouvelle entité qu’était la RASHK, conformément aux négociations et ententes conclues par la RPC et le gouvernement du Royaume‑Uni.

 

[48]    L’Ordonnance relative à la fiscalité de Hong Kong ne fait pas partie de la « législation de la République populaire de Chine » aux fins de l’article 4 du Traité. Cathay Pacific n’est donc pas une entreprise d’un État contractant qui est partie au Traité. Sur la base de ces seules conclusions, le principal argument de l’appelant échouerait. Toutefois, au cas où j’aurais tort dans ma conclusion selon laquelle Cathay Pacific n’est pas une entreprise de la RPC, je vais maintenant examiner les autres arguments de l’appelant.

 

B)      « […] est assujettie à l’impôt dans cet État contractant »

 

[49]    Le deuxième critère auquel il doit être satisfait pour que Cathay Pacific soit considérée comme un résident de la République populaire de Chine est que Cathay Pacific soit « assujettie à l’impôt dans cet État contractant ». Cette expression n’est pas définie dans le Traité. Le terme « impôt » est défini à l’alinéa 3(1)d) du Traité comme désignant, « suivant le contexte, l’impôt canadien ou l’impôt chinois ». L’expression « impôt chinois » est définie à l’alinéa 2(1)b) du Traité.

 

[50]    L’appelant argue que le terme « impôt » dans l’expression « assujettie à l’impôt dans cet État contractant » ne doit pas recevoir la signification qui lui est attribuée par les articles 2 et 3 du Traité. Il soutient que l’objet de l’article 2 est de déterminer le champ d’application du Traité en ce sens que cet article définit les impôts ne devant pas faire l’objet d’une double imposition. D’autre part, l’article 4 est destiné à définir le sens de l’expression « résident d’un État contractant », donc à déterminer si un lien suffisant existe entre une personne et un État contractant.

 

[51]    L’avocat de l’appelant illustre son argument en faisant valoir que, si la définition d’« impôt chinois » s’appliquait à l’expression « assujettie à l’impôt dans cet État contractant » qui figure à l’article 4, aucune personne morale soumise à l’un quelconque des impôts sur les sociétés en Chine continentale[30] ne serait admissible à un allégement au titre d’impôts canadiens en vertu du Traité. En fait, affirme l’avocat, la définition d’« impôt chinois » figurant à l’article 2 de l’Accord n’énumère aucun des impôts fixés aux personnes morales de la Chine continentale.

 

[52]    Il faut éviter une interprétation littérale ou légaliste lorsque l’objet fondamental d’un traité pourrait être rejeté ou contrecarré dans la mesure où le point particulier à l’étude est visé[31]. L’argument de l’appelant selon lequel le terme « impôt » dans l’expression « assujettie à l’impôt dans cet État contractant » ne doit pas recevoir la signification qui lui est attribuée par les articles 2 et 3 du Traité est donc légitime. Malheureusement, l’avocat de l’appelant n’avance aucune autre interprétation du terme « impôt » utilisé dans ce contexte.

 

[53]    Le terme « impôt » doit être interprété par rapport au membre de phrase « en vertu de la législation de cet État, est assujettie à l’impôt dans cet État contractant ». Comme Cathay Pacific est assujettie à l’impôt en vertu de la partie IV de l’Ordonnance relative à la fiscalité de Hong Kong et que j’ai décidé que cette ordonnance ne fait pas partie de la « législation de la République populaire de Chine » aux fins de l’article 4 de la Convention, je dois conclure que Cathay Pacific n’est pas assujettie à l’impôt dans la République populaire de Chine en vertu du Traité.

 

[54]    Je suis conforté dans ma conclusion quand je considère le sens du mot anglais « therein » (« dans cet État contractant ») qui figure dans l’expression anglaise « liable to tax therein » (« assujettie à l’impôt dans cet État contractant ») à l’article 4 (version anglaise) du Traité. Le mot « therein » renvoie à l’expression « that Contracting State » (« cet État »), soit la République populaire de Chine dans le cas qui nous occupe. On peut soutenir que cela renvoie à la définition géographique de l’expression « People’s Republic of China » (« la République populaire de Chine »). Le mot « therein » signifie « à cet endroit ou dans cette chose »[32].

 

C)      «[…] en raison » d’un facteur énuméré ou d’un facteur analogue

 

[55]    Pour ce qui est du troisième critère en matière de résidence, l’article 4 du Traité exige qu’une personne soit assujettie à l’impôt dans un État contractant « en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège social, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue ».

 

[56]    Les dispositions pertinentes de l’Ordonnance relative à la fiscalité de la RASHK se lisent comme suit :

 

[TRADUCTION]

14 Assujettissement à l’impôt sur les bénéfices (1) Sous réserve des dispositions de la présente ordonnance, pour chaque année d’imposition, toute personne exerçant une activité relative à un commerce, à une profession ou à une entreprise à Hong Kong est assujettie à un impôt, au taux normal, sur ses bénéfices imposables y afférents gagnés à Hong Kong ou provenant de Hong Kong (à l’exclusion des bénéfices tirés de la vente d’immobilisations), selon ce qui est déterminé conformément à la présente partie.

 

[...]

 

23C. Détermination des bénéfices imposables d’un propriétaire d’aéronef résidant (1) Une personne exploitant une entreprise comme propriétaire d’aéronef est réputée exploiter cette entreprise à Hong Kong lorsque :

a) soit l’entreprise est normalement contrôlée ou gérée à Hong Kong;

b) soit la personne est une société constituée à Hong Kong.

 

[57]    Ces dispositions confirment que Cathay Pacific est assujettie à l’impôt aux termes de l’Ordonnance relative à la fiscalité de Hong Kong en raison « de son domicile, de sa résidence, de son siège social, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue ».

 

[58]    Me fondant sur l’analyse que je viens de faire, je conclus que Cathay Pacific n’était pas un « résident d’un État contractant » aux fins de l’article 4 du Traité fiscal Canada‑Chine. Elle n’était donc pas une « entreprise d’un État contractant » aux fins du paragraphe 15(3) du Traité.

 

Quelle était l’intention des rédacteurs de la Convention?

 

[59]    Une question plus vaste se pose dans le présent appel, soit une question de succession d’États. La succession d’États est un domaine du droit international public se rapportant aux cas dans lesquels la souveraineté (ou le pouvoir de conclusion de traités) sur un territoire passe à un État nouveau ou différent[33]. Il y a plusieurs formes de succession d’États : indépendance d’une ancienne colonie, transfert de souveraineté, sécession, fusion d’États (y compris l’annexion) ou transfert de territoire.

 

[60]    Le transfert de la souveraineté sur Hong Kong est un des plus récents cas de succession d’États. Naturellement, la succession d’États a des conséquences importantes pour ce qui est d’accords en matière de double imposition. La question soulevée dans le présent appel est de savoir si les traités fiscaux de l’État successeur la RPC dans ce cas‑ci s’appliquent à la nouvelle entité qu’est la Région administrative spéciale de Hong Kong.

 


[61]    Généralement, en l’absence d’une preuve contraire, un traité lie un État à l’égard de l’ensemble de son territoire[34].

 

[62]    Il est indubitable que depuis le 1er juillet 1997, d’un point de vue territorial et politique, la RASHK est une partie inaliénable de la RPC[35]. Il reste à déterminer si le Traité était destiné à s’appliquer à la nouvelle entité qu’est la RASHK de la RPC. Pour trancher cette question, M. Baker propose deux grandes approches : une approche fondée sur des solutions du droit international public et une approche fondée sur des solutions propres à la convention elle‑même en matière de double imposition.

 

i)                   Solutions du droit international public

 

[63]    D’après M. Baker, il n’y a pas d’ensemble bien établi de textes de droit international public sur la question de la succession d’États[36]. La pratique des États s’appuie aujourd’hui très fortement sur les « accords de transmission ».

 

[64]    Dans le cas de Hong Kong, en 1972, le Comité de la décolonisation des Nations unies avait accepté l’affirmation de la République populaire de Chine, entérinée par la Grande‑Bretagne, selon laquelle le règlement de la « question de Hong Kong » relevait totalement du droit souverain de la RPC et devait se faire d’une manière appropriée, lorsque toutes les conditions seraient réunies[37]. La première mesure officielle dans le règlement de la « question de Hong Kong » a été prise lorsque la Déclaration commune sino‑britannique[38] a été conclue, le 19 décembre 1984, et que les ratifications ont été échangées, le 27 mai 1985. Cet « accord de transmission », dûment enregistré par les deux parties auprès du Secrétariat des Nations unies, stipulait que la souveraineté sur Hong Kong serait transmise à la RPC le 1er juillet 1997. Les politiques de base de la RPC relatives à Hong Kong figurant à l’annexe 1 de la Déclaration commune ont été incorporées par la RPC dans la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Hong Kong. La RPC garantissait en outre que ces politiques de base resteraient inchangées pendant 50 ans.

 

[65]    Bien que la Déclaration commune et la Loi fondamentale ne traitent pas expressément de la question de la succession de la RASHK par rapport aux traités de la RPC, il ressort du texte de ces documents que Hong Kong ne sera pas liée par les accords internationaux de la RPC et qu’elle sera libre de conclure ses propres traités. Par exemple, en vertu de l’article 2 de la Loi fondamentale, la RASHK peut exercer un degré élevé d’autonomie et elle a un pouvoir exécutif et un pouvoir législatif, ainsi qu’un pouvoir judiciaire indépendant, y compris un pouvoir de décision finale. Les articles 106 et 108, dont il a été fait état précédemment, disposent que la RASHK sera financièrement indépendante et appliquera un système d’imposition indépendant. Enfin, l’article 151 de la Loi fondamentale dispose que la RASHK peut de sa propre initiative conclure des accords internationaux[39].

 

[66]    M. Mushkat signale que Hong Kong a conclu plus de 200 traités multilatéraux[40]. Jusqu’à maintenant, la RASHK n’a pas conclu d’accords globaux pour la prévention des doubles impositions, sauf avec la Chine continentale. Toutefois, compte tenu du texte de l’article 151 de la Loi fondamentale, il peut raisonnablement être conclu que la RASHK est pleinement capable de passer de tels accords.

 

[67]    Tout comme d’autres auteurs, M. Mushkat argue que, malgré le fait que la RASHK soit techniquement une « partie inaliénable » de la RPC et non un État indépendant, elle a une personnalité juridique indépendante[41]. L’article 34 de la Convention de Vienne prévoit une situation comme celle de la RASHK :

 

Un traité ne crée ni obligations ni droits pour un État tiers sans son consentement.

 

[68]    L’intention des rédacteurs de la Déclaration commune était non pas de lier la RASHK, nouvellement créée, par les accords internationaux de la RPC, mais plutôt de lui permettre de développer ses propres relations internationales et de conclure ses propres traités.

 

ii)                 Solution se trouvant dans des conventions en matière de double imposition

 

[69]    M. Baker affirme que, en l’absence de règles claires de droit international public, une solution au problème de la succession d’États et des conventions en matière de double imposition peut se trouver dans les conventions elles‑mêmes. Il faut examiner les objectifs et intentions des rédacteurs du Traité pour déterminer le champ d’application de celui‑ci[42]. Il a été statué dans l’arrêt Crown Forest que, pour dégager ces objectifs et intentions, un tribunal peut recourir à des documents extrinsèques sans qu’il soit nécessaire d’avoir préalablement décelé une ambiguïté.

 

A)               Objectifs généraux de la Convention

 

[70]    Les traités fiscaux sont négociés dans le contexte de deux systèmes fiscaux existants. Cela ressort clairement du texte de l’article 2 de la Convention et du Modèle de l’OCDE. Donc, d’après M. Baker, si, dans l’ensemble, le système fiscal reste en place concernant les États successeurs, il semble raisonnable que le traité doive continuer à s’appliquer. Par contre, si la succession d’États est suivie d’une modification importante du fond des systèmes fiscaux, il semble raisonnable que le traité ne continue pas à s’appliquer.

 

[71]    Bien que cela fasse l’objet de l’argumentation subsidiaire de l’appelant, que j’examinerai plus loin, si l’on adopte cette approche générale, il semble raisonnable que le Traité de la RPC avec le Canada ne s’applique pas à la RASHK, nouvellement créée, en raison de différences manifestes entre les systèmes fiscaux de la Chine continentale et de la RASHK.

 

B)               Pratique administrative

 

[72]    L’avocat de l’intimée a fait valoir, avec une preuve abondante à l’appui, que l’intention du gouvernement du Canada n’avait jamais été que le Traité s’applique à la RASHK. Quant à la valeur probante à accorder à la pratique administrative du gouvernement du Canada, l’intimée se fondait sur les observations suivantes formulées par le juge Iacobucci dans Crown Forest :

 

[...] comme l’a noté le juge La Forest dans l’arrêt Thomson c. Thomson, [1994] 3 R.C.S. 551, à la page 578 :

 

Il serait étrange qu’un traité international auquel la législature a tenté de donner effet ne soit pas interprété dans le sens que les États parties au traité doivent avoir souhaité.

 

C’est également l’opinion qui se dégage de la jurisprudence américaine. La Cour suprême des États-Unis, dans Sumitomo Shoji America, Inc. c. Avagliano, 457 U.S. 176 (1982), aux pp. 184 et 185, a conclu que [TRADUCTION] « Bien que non concluant, le sens que prêtent aux dispositions des traités les organismes gouvernementaux chargés de leur négociation et de leur application a le droit de se voir accorder une grande valeur ».[43]

 

[73]    Cette position est confirmée par l’alinéa 3b) de l’article 31 de la Convention de Vienne, qui dit que, dans l’interprétation des dispositions d’un traité, il sera tenu compte, en même temps que du contexte, de toute pratique ultérieurement suivie dans l’application du traité.

 

[74]    Dans une tentative pour faire fi de la preuve relative à la pratique administrative du gouvernement du Canada concernant le Traité, l’avocat de l’appelant invoquait les affaires Kubicek, succession et La Reine c. Fibreco Export[44] et se fondait sur l’observation que le juge de première instance avait faite dans Fibreco et selon laquelle, entre autres choses :

 

[...] lorsqu’il [le gouvernement] tente d’introduire en preuve ses pratiques antérieures afin de justifier son interprétation de la loi, il cherche alors à porter atteinte à la primauté du droit.

 

[75]    À la Cour d’appel fédérale, toutefois, le juge Hugessen a exprimé comme suit ses vues quant à la décision du juge de première instance :

 

Elle [la Cour] estime également qu’il a commis une erreur en refusant d’admettre certains éléments de preuve relatifs aux pratiques administratives et aux débats parlementaires. Certaines incertitudes subsistent, c’est un fait, quant à l’utilisation qui peut être faite de tels éléments pour interpréter une loi, mais la Cour est d’avis que le débat paraît porter davantage sur le poids à leur accorder que sur leur admissibilité, et que le juge de première instance a eu tort d’exclure ces éléments de preuve.[45]

 

[76]    Il est également à noter que, dans Fibreco, la Cour fédérale devait examiner la question de savoir si une usine de papier était un « bien certifié » au sens du paragraphe 127(9) de la Loi. On peut soutenir que, comme on n’avait pas à interpréter un accord en matière de double imposition dans Fibreco, le poids de cette décision est limité.

 

[77]    La preuve relative à la pratique administrative du gouvernement du Canada concernant le Traité est recevable et mérite qu’on y accorde beaucoup de poids. J’ai précédemment examiné dans les présents motifs la pratique et le point de vue du gouvernement du Canada (ainsi que de la RPC et de la RASHK). Dans la pratique administrative générale du gouvernement du Canada — ainsi que des gouvernements de la RPC et de la RASHK —, une société qui est un résident de Hong Kong et qui est assujettie à l’Ordonnance relative à la fiscalité de Hong Kong n’est pas considérée comme un résident de la RPC en vertu du Traité.

 

C)               Position exprimée dans des textes de doctrine

 

[78]    Les textes de doctrine sont également importants dans la détermination des règles de droit international. L’article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice dit :

 


La Cour, dont la mission est de régler conformément au droit international les différends qui lui sont soumis, applique :

 

[...]

 

d) [...] la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de détermination des règles de droit.

 

[79]    Les textes de doctrine qui m’ont été présentés étayent l’affirmation de l’intimée selon laquelle la Convention ne s’applique pas à la RASHK. Par exemple, d’un point de vue britannique, M. Baker exprime l’opinion suivante :

 

[TRADUCTION]

 

De même, la convention avec la Chine définit la « Chine » comme étant « tout le territoire [...] dans lequel la législation relative à l’impôt chinois est en vigueur [...] »; l’impôt chinois est défini comme incluant seulement les impôts en vigueur en Chine continentale (de manière à exclure Hong Kong, Macao et Taïwan —, ce qui tranche une question diplomatique difficile en établissant relativement clairement que les traités de la Chine ne s’appliqueront pas à Hong Kong après le 30 juin 1997).[46]

 

D)               Prévention d’incohérences internes

 

[80]    Il est bien établi qu’il faut éviter une interprétation littérale ou légaliste lorsque l’objet fondamental d’un traité pourrait être rejeté ou contrecarré[47].

 

[81]    Si le Traité fiscal Canada‑Chine s’appliquait à la RASHK, il y aurait en pratique une incohérence dans le Traité quant à la définition d’« autorité compétente » à l’alinéa 1j) de l’article 3. Cet alinéa dit expressément que le ministère des Finances de la RPC est l’autorité compétente chinoise aux fins de la Convention[48]. De plus, le ministère des Affaires fiscales de la RASHK administre le système d’imposition de Hong Kong indépendamment du ministère des Finances de la Chine continentale.

 

[82]    L’incohérence en question aurait des conséquences concrètes importantes aux fins du Traité. D. R. Davies fait remarquer qu’une caractéristique importante de tous les traités en matière de double imposition est le mécanisme visant une coopération administrative entre les autorités fiscales des pays qui sont parties à un traité[49]. Un tel mécanisme est prévu à l’article 23 du Traité, qui traite d’une procédure amiable, et à l’article 24, qui traite de l’échange de renseignements. Une incertitude quant à l’autorité compétente risquerait de mettre en péril l’application de ces dispositions. Il faut donc interpréter le Traité de manière à éviter une telle incohérence. Il s'agit d'un autre indice que la Convention ne s’applique pas à la RASHK.

 

E)                Autres documents extrinsèques

 

[83]    Dans l’arrêt Crown Forest, le juge Iacobucci a dit que, en interprétant une convention fiscale internationale, on peut se reporter à divers documents extrinsèques, y compris d’autres conventions fiscales internationales[50]. L’appelant n’a présenté aucun document pour établir qu’une convention en matière de double imposition conclue par la RPC, notamment après le 1er juillet 1997, a été considérée comme opportune pour exclure explicitement la RASHK du champ d’application de la convention.

 

[84]    On n’a guère d’indications de pays tiers quant à l’interprétation appropriée de leurs traités en matière de double imposition avec la RPC relativement à la RASHK. (J’étais plus réticent à accepter le témoignage d’un fonctionnaire de l’ADRC à l’égard d’une telle preuve.) D’après M. Baker, il semble être reconnu au Royaume‑Uni que, parce que la convention du Royaume‑Uni avec la Chine définit la « Chine » comme étant « tout le territoire [...] dans lequel la législation relative à l’impôt chinois est en vigueur [...] » et que l’impôt chinois est défini comme incluant seulement les impôts en vigueur en Chine continentale, il est « relativement clair » que la convention ne s’appliquera pas à Hong Kong, à Macao et à Taïwan[51].

 

Conclusion sur l’argument principal de l’appelant

 

[85]    Cathay Pacific n’était pas une « entreprise d’un État contractant » parce que, en vertu de la législation de la République populaire de Chine, elle n’était pas assujettie à l’impôt dans cet État contractant. Par conséquent, le revenu gagné par l’appelant du 1er juillet au 31 décembre 1997 au titre de l’emploi exercé pour Cathay Pacific n’est pas un revenu qui serait exonéré de l’impôt sur le revenu au Canada en raison de l’application du paragraphe 15(3) du Traité.

 

Argument subsidiaire de l’appelant

 

[86]    L’argument subsidiaire de l’appelant est que, dans la mesure où la définition de l’expression « la République populaire de Chine » figurant à l’alinéa 3(1)b) du Traité est pertinente aux fins de la détermination de la question de savoir si l’appelant a droit à la protection prévue au paragraphe 15(3), certains impôts établis en vertu de l’Ordonnance relative à la fiscalité de la RASHK répondent à la définition d’« impôt chinois » figurant à l’article 2 du Traité. Donc, l’appelant argue que la définition de « la République populaire de Chine » dans le Traité inclut la RASHK depuis le 1er juillet 1997.

 

[87]    L’avocat de l’appelant reconnaît qu’aucun des quatre types d’impôts prévus à l’alinéa (1)b) de l’article 2 du Traité ne s’applique dans la RASHK. L’avocat fait remarquer que les types d’impôts mentionnés au paragraphe 2(1) du Traité ont été établis en vertu de la législation qui était en vigueur en Chine continentale en 1986 et que, depuis, ils ont tous été modifiés substantiellement ou remplacés.

 

[88]    Le paragraphe 2 de l’article 2 du Traité dispose que le Traité s’applique aussi aux « impôts de nature identique ou substantiellement analogue » qui seraient établis après la date de signature de l’Accord « et qui s’ajouteraient aux impôts visés au paragraphe 1 ou qui les remplaceraient ». Les parties reconnaissent que cette disposition est nécessaire pour empêcher que le Traité ne soit inopérant si l’un des États contractants modifie sa législation fiscale, comme ont l’habitude de le faire les États. L’appelant argue à juste titre que le paragraphe 2(2) élargit la définition d’« impôt chinois » de manière à inclure des impôts comme ceux qui ont été établis en vertu de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers et des entreprises étrangères ». Cela ne signifie toutefois pas que les catégories d’impôt prévues au paragraphe 1 de l’article 2 doivent être étendues aux impôts établis par la RASHK. À cet égard, l’appelant répète qu’il invoque les Commentaires sur l’article 2 du Modèle de l’OCDE. Cependant, comme je l’ai déjà dit, les Commentaires auxquels fait référence l’appelant ne peuvent s’appliquer au texte du Traité, car ils renvoient à une partie du Modèle de l’OCDE qui est complètement absente du texte du Traité fiscal Canada‑Chine.

 

[89]    L’avocat de l’appelant arguait en outre que, conformément au paragraphe 2 de l’article 2 du Traité, il faudrait qu’un impôt établi dans la RASHK réponde à trois conditions pour être inclus dans la définition d’« impôt chinois ». Il faudrait que cet impôt :

 

a)       ait été établi après la date de signature de l’Accord;

      b)       s’ajoute aux impôts visés au paragraphe 1 de l’article 2 ou les remplace;

      c)       soit un impôt de nature identique ou substantiellement analogue par rapport aux impôts visés au paragraphe 1.

 

[90]    Pour ce qui est de l’exigence du paragraphe 2(2) concernant des impôts qui seraient « établis », l’appelant invoque principalement le fait que toute la législation de Hong Kong a été réédictée comme législation de la RASHK de la RPC le 1er juillet 1997. L’avocat de l’appelant fait remarquer qu’un élément fondamental de la structure d’une convention en matière de double imposition est que les impôts énumérés à l’article 2 soient des impôts établis, respectivement, par l’un ou l’autre des États contractants. À ce sujet, l’avocat soutient, encore là, que les impôts établis par la RASHK après le 1er juillet 1997 sont ainsi établis en vertu d’un pouvoir délégué par la RPC. J’ai déjà conclu que tel n’est pas le cas, car le pouvoir indépendant de la RASHK d’édicter des lois fiscales ne représente pas une délégation de pouvoir de taxation, d’un gouvernement central à une administration locale, et l’argument subsidiaire de l’appelant échoue.

 

[91]    Cela devrait conclure mon examen de l’argumentation de l’appelant. Toutefois, si je devais déterminer si les impôts établis dans la RASHK sont des impôts « de nature identique ou substantiellement analogue » par rapport aux quatre impôts énumérés à l’alinéa (1)b) de l’article 2 du Traité, je conclurais que les impôts de la RASHK et ceux de la RPC n’étaient pas des impôts de nature identique ou substantiellement analogue. Tout d’abord, les assiettes fiscales sont différentes : à Hong Kong, il s’agit d’une assiette territoriale, tandis que la RPC fixe de l’impôt sur les revenus de toutes provenances. Dans la RASHK, il n’y a pas de système d’impôt personnel sur le revenu ou les gains en capital selon la résidence du contribuable[52]. La source du revenu détermine habituellement l’obligation fiscale d’une personne dans la RASHK. Les impôts établis en vertu des parties II, III et IV de l’Ordonnance relative à la fiscalité de la RASHK sont l’impôt foncier, l’impôt salarial et l’impôt sur les bénéfices, respectivement. L’application des impôts se limite généralement aux revenus ou profits imposables gagnés à Hong Kong ou provenant de sources situées à Hong Kong.

 

[92]    L’assujettissement à l’impôt dans la RPC est généralement déterminé par rapport à la résidence du contribuable; les particuliers et les entreprises dans la RPC sont assujettis à de l’impôt sur leur revenu de toutes provenances[53]. Les non‑résidents de la RPC sont assujettis à de l’impôt seulement sur les revenus provenant de sources situées dans la RPC[54]. Il n’y a pas de retenue d’impôt dans la RASHK, mais il y a une retenue d’impôt de 20 p. 100 en Chine continentale. L’avocat de l’appelant argue que cela peut être une raison pour laquelle d’autres États n’ont pas besoin d’un traité fiscal avec la RASHK.

 

[93]    Les taux d’imposition de la RASHK et de la RPC sont également bien différents. L’article 2 de l’Ordonnance relative à la fiscalité fait état des taux d’imposition de la RASHK pour les années d’imposition 1998 et 1999 et pour chaque année d’imposition subséquente :

 

Sur la première tranche de 35 000 $ :                      2 %

a)     Sur la tranche suivante de 35 000 $ :                  7 %

b)    Sur la tranche suivante 35 000 $ :                       12 %

c)     Sur le reste :                                                     17 %

 

[94]    La structure des taux d’imposition de la RPC est plus complexe. Par exemple, en vertu de la « Loi de l’impôt sur le revenu individuel » (Individual Income Tax Law) de la RPC, l’impôt sur le revenu d’emploi va de 5 à 45 p. 100. Le revenu de placements est imposé à un taux uniforme de 20 p. 100. Les coentreprises à capitaux chinois et étrangers sont imposées à un taux uniforme de 30 p. 100 et sont en outre assujetties à un impôt local de 3 p. 100. Les taux d’imposition applicables à des coentreprises établies dans des régions côtières peuvent être inférieurs, en raison de l’existence de divers programmes d’encouragement réduisant les taux. Il y a en outre des exonérations fiscales temporaires, ainsi que d’autres déductions. Normalement, les taux d’imposition dans la RASHK sont beaucoup moins élevés qu’en Chine continentale.

 

[95]    Donc, les impôts établis par la RASHK n’entrent pas dans le cadre de la définition d’« impôt chinois » aux fins de l’article 2 du Traité, et la définition de l’expression « la République populaire de Chine » figurant dans le Traité n’inclut pas la RASHK. Cathay Pacific n’est pas une entreprise de la RPC aux fins du Traité.

 

[96]    L’appel est rejeté avec frais.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de juin 2002.

 

 

« Gerald J. Rip »

J.C.C.I.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de juin 2004.

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur


 



[1] Édicté par L.C. 1986, ch. 48, partie III. L’Accord est entré en vigueur le 29 décembre 1986.

[2] Le sous‑alinéa 110(1)f)(i) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») permet à un contribuable de déduire, dans le calcul du revenu imposable pour une année, une somme exonérée de l’impôt sur le revenu au Canada par l’effet d’un traité fiscal entre le Canada et un autre pays qui a force de loi au Canada.

[3] En outre, l’intimée a appelé comme témoin une négociatrice principale de traités de l’Agence des douanes et du revenu du Canada, Mme Jane Stalker, pour qu’elle fasse une déposition quant à savoir comment d’autres pays considèrent Hong Kong aux fins de l’application de traités fiscaux avec la République populaire de Chine. J’ai statué que, comme preuve « extrinsèque », ce témoignage était irrecevable.

[4]  Les sections auxquelles il est fait référence dans l'exposé conjoint partiel des faits ne sont pas reproduites dans les présents motifs.

[5]  Ces dispositions du Traité ne sont pas réitérées plus loin dans mes motifs.

[6] Cette publication était annexée à la lettre du ministère des Finances, mais pas à la copie de la lettre déposée comme pièce (R‑1, onglet 31). Un document annexé à une lettre fait partie de celle‑ci et doit également être déposé. Les documents figurant sous la cote R‑1 ont été déposés par consentement. L’appelant reconnaît seulement que ces documents ne sont que ce qu’ils prétendent être et rien d’autre.

[7] Dans une interprétation technique de l’alinéa 95(2)a.1) de la Loi, en date du 22 février 2001, l’ADRC disait que « par suite de l’unification de Hong Kong et de la République populaire de Chine, Hong Kong serait considérée comme faisant partie de la Chine aux fins de l’alinéa 95(2)a.1) ». L’ADRC disait toutefois que cette question était différente de la question de savoir si Hong Kong était visée par le Traité fiscal Canada‑Chine. Un résident de Hong Kong assujetti au régime fiscal de Hong Kong (et non à celui de la RPC) ne serait pas considéré comme un résident de la RPC [Doc. 1999‑0014 605(E)]. Dans la lettre d’interprétation technique, le raisonnement suivant était tenu :

[TRADUCTION]

Malgré l’unification de Hong Kong et de la République populaire de Chine, Hong Kong a maintenu son propre système fiscal. Le paragraphe 1 de l’article 3 (Définitions générales) de la Convention définit l’expression « la République populaire de Chine » comme désignant (aux fins de la Convention) « tout le territoire de la République populaire de Chine [...] dans lequel les lois relatives à l’impôt chinois s’appliquent [...] ». L’expression « impôt chinois » est définie au paragraphe 1 de l’article 2 (Impôts visés) de la Convention et n’inclut pas les impôts établis en vertu du régime fiscal de Hong Kong. [...]

[8]  [1995] 2 R.C.S. 802 [ci‑après appelé l’arrêt « Crown Forest »].

[9]  Ibid., à la page 814, paragraphe 22.

[10] Ibid., à la page 822, paragraphes 43 et 44.

[11] (1969) 1155 RTNU 331 (en vigueur en 1980); le Canada n’est pas partie à la Convention de Vienne.

[12] Voir La Reine c. Dudney, C.A.F., no A‑707‑98, 24 février 2000 (2000 D.T.C. 6169); Cudd Pressure Control Inc. c. La Reine, C.A.F., no A‑369‑95, 19 octobre 1998 (98 D.T.C. 6630); P.G. du Canada c. La Succession de Kubiak, C.A.F., no A‑677‑96, 26 septembre 1997 (97 D.T.C. 5454). Le cadre analytique dans l'arrêt Crown Forest ressemble à la méthode libérale d'interprétation des ententes sur la double imposition adoptée par les tribunaux de la Nouvelle‑Zélande : voir United Dominions Trust v. C.I.R. (1973), 1 N.Z.T.C. 61 018, à la page 61 031.

[13] P. Baker, Double Taxation Conventions and International Tax Law, 2e éd. (Londres, Street and Maxwell, 1994), paragraphe B‑20ff.

[14] C.112 de 1997 [ci‑après appelée l’« Ordonnance relative à la fiscalité »].

[15] Reliure à feuillets mobiles (Paris, OCDE, 1977) [ci‑après appelé le « Modèle de l’OCDE »].

[16] L.R.C. 1985, ch. I­4, dans sa forme modifiée.

[17] L.R.C. 1985, ch. I­21, dans sa forme modifiée.

[18] 3e sess., 7e A.P.N., 4 avril 1990, 29 I.L.M. 1511 [ci‑après appelée la « Loi fondamentale »].

[19] Voir par. 19 de l’exposé conjoint partiel des faits, inclus au par. 6 des présents motifs.

[20] 5e sess., 5e A.P.N., 4 décembre 1982, dans sa forme modifiée [ci‑après appelée la « Constitution de la RPC »].

[21] Voir par. 44 de l’exposé conjoint partiel des faits, inclus au par. 6 des présents motifs.

[22] Voir par. 45 de l’exposé conjoint partiel des faits, inclus au par. 6 des présents motifs.

[23] Voir P. W. Hogg, Constitutional Law of Canada, 4e éd., reliure à feuillets mobiles, vol. 1 (Scarborough (Ont.), Carswell, 1997), ch. 14.

[24] Constitution Act, 1867 (Loi constitutionnelle de 1867), 30 et 31 Victoria (R.‑U.), ch. 3; Canada Act, 1982 (Loi de 1982 sur le Canada), (R.‑U.), ch. 11.

[25] Affaire Hodge v. The Queen (1883), 9 A.C. 117 (C.P.) [ci‑après appelée l’affaire « Hodge »].

[26] Re Gray (1918), 57 R.C.S. 150.

[27] Affaire Hodge, précitée, note 25, à la p. 132.

[28] Voir par. 22 de l’exposé conjoint partiel des faits, inclus au par. 6 des présents motifs.

[29] 24e sess. du Comité permanent, 8e A.P.N. Voir paragraphes 22 et 23 de l’exposé conjoint partiel des faits, au par. 6 des présents motifs.

[30] Je conclus que la « Chine continentale » n’inclut pas le secteur géographique de Hong Kong.

[31] La succession de John N. Gladden c. La Reine, C.F. 1re inst., no T‑1425‑84, 28 janvier 1985, à la page 5 ([1985] 1 C.T.C. 163, aux pages 166 et 167) [ci‑après appelée l’affaire « Succession Gladden »].

[32] On pourrait donc remplacer l’expression « liable to tax therein » (« assujettie à l’impôt dans cet État contractant ») par un membre de phrase disant « liable to tax in the territory of the People’s Republic of China in which the laws relating to Chinese tax apply » (assujettie à l’impôt dans le territoire de la République populaire de Chine dans lequel les lois relatives à l’impôt chinois s’appliquent). Bien que cela fasse l’objet de l’argumentation subsidiaire de l’appelant, il semble qu’une entité comme Cathay Pacific n’entre pas dans le cadre de cette interprétation de l’expression « liable to tax therein » (« assujettie à l’impôt dans cet État contractant »).

[33] Baker, précité, note 13, au par.  E-01ff.

[34]  Article 29 de la Convention de Vienne, qui se lit comme suit :

À moins qu’une intention différente ne ressorte du traité ou ne soit par ailleurs établie, un traité lie chacune des parties à l’égard de l’ensemble de son territoire.

[35] Loi fondamentale, précitée, note 18, art. 1.

[36] Baker, précité, note 13.

[37] Voir, de façon générale, R. Mushkat, One Country, Two International Personalities: The Case of Hong Kong (Hong Kong, Hong Kong University Press, 1997), et M. J. A. Cooray, compte rendu de l’ouvrage de R. Mushkat intitulé One Country, Two International Personalities: The Case of Hong Kong, (1997) 42 McGill L.J. 751.

[38] Sino-British Joint Declaration on the Question of Hong Kong (Déclaration commune sino‑britannique sur la question de Hong Kong), Chine et Royaume‑Uni, 19 décembre 1984, U.K.T.S. 1984, no 26, 23 I.L.M. 1366.

[39] Voir par. 25 de l’exposé conjoint partiel des faits, inclus au par. 6 des présents motifs.

[40] Mushkat, précité, note 37, à la page 9.

[41] Voir Mushkat, précité, note 37, ch. 1.

[42] Arrêt Crown Forest, précité, note 8.

[43] Ibid., aux pages 831 et 832, paragraphe 63.

[44] C.F. 1re inst., no T‑2896‑89, 16 mai 1994 (94 D.T.C. 6325), confirmé par C.A.F., no A‑475‑94, 15 juin 1995 (95 D.T.C. 5412).

[45] Ibid. (C.A.F.), aux pages 3 et 4 (D.T.C. : à la page 5413).

[46] Baker, précité, note 13, au par. E-03.

[47] Affaire Succession Gladden, précitée, note 31, à la page 7 (C.T.C. : aux pages 166 et 167).

[48] L’Administration fiscale de l’État est le représentant autorisé du ministère des Finances.

[49] D. R. Davies, Principles of International Double Taxation Relief (Londres, Sweet & Maxwell, 1985), à 1.08.

[50] Arrêt Crown Forest, précité, note 8, à la p. 827.

[51] Voir la note 46.

[52] Voir, de façon générale, K. A. Lancaster, Taxation & Investment in the People’s Republic of China, Hong Kong and Macau (Amsterdam, Bureau international de documentation fiscale, 1998).

[53] Article 1 de la « Loi de l’impôt sur le revenu individuel de la République populaire de Chine », 3e sess., 5e A.P.N., 10 septembre 1980, article 1 de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des coentreprises à capitaux chinois et étrangers », 3e sess., 5e A.P.N., 10 septembre 1980, et « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers et des entreprises étrangères », 4e sess., 7e A.P.N., 9 avril 1991.

[54] Article 1 de la « Loi de la République populaire de Chine relative à l’impôt sur le revenu des entreprises à capitaux étrangers et des entreprises étrangères ».

 

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