Dossier : 97-333(UI) |
ENTRE : |
ÉRIC DUCHESNE, |
appelant, |
et |
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LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL, |
intimé. |
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Appel entendu le 5 novembre, à Roberval (Québec).
Devant : L'honorable juge Alain Tardif |
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Comparutions : |
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Avocate de l'appelant: |
Me Louise Fortin
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Avocate de l'intimé : |
Me Emmanuelle Faulkner |
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JUGEMENT
L'appel interjeté en vertu de l'article 70 de la Loi sur l'assurance-chômage est rejeté et la décision rendue par le ministre du Revenu national est confirmée pour les périodes allant du 7 mars au 1er octobre 1993, du 22 mai au 26 novembre 1994 et, finalement, du 1er mai au 17 novembre 1995 relativement à l'emploi de l'appelant pour Diane Gaudreault, sa mère, selon les motifs du jugement ci-joints.
Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de janvier 2005.
« Alain Tardif » |
Juge Tardif
Référence : 2005CCI59 |
Date : 20050126 |
Dossier : 97-333(UI) |
ENTRE : |
ÉRIC DUCHESNE, |
appelant, |
et |
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LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL, |
intimé. |
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MOTIFS DU JUGEMENT
Le juge Tardif
[1] Il s'agit d'un appel d'une décision datée du 5 décembre 1996. La décision concernait le travail exécuté par l'appelant au cours des périodes allant du 7 mars au 1er octobre 1993, du 22 mai au 26 novembre 1994 et, finalement, du 1er mai au 17 novembre 1995 pour Diane Gaudreault, sa mère
[2] Le travail effectué par l'appelant fut exclu des emplois assurables en vertu des dispositions de la Loi sur l'assurance-chômage (la « Loi » ) étant donné qu'il existait un lien de dépendance entre l'appelant et sa mère, propriétaire de l'entreprise agricole qui l'employait.
[3] Pendant les périodes concernées, les dispositions pertinentes à l'alinéa 3(2)c) de la Loi étaient les suivantes :
3.(1) Un emploi assurable est un emploi non compris dans les emplois exclus et qui est, selon le cas :
[...]
(2) Les emplois exclus sont les suivants :
[...]
c) sous réserve de l'alinéa d), tout emploi lorsque l'employeur et l'employé ont entre eux un lien de dépendance, pour l'application du présent alinéa :
(i) la question de savoir si des personnes ont entre elles un lien de dépendance étant déterminée en conformité avec la Loi de l'impôt sur le revenu,
(ii) l'employeur et l'employé, lorsqu'ils sont des personnes liées entre elles, au sens de cette loi, étant réputés ne pas avoir de lien de dépendance si le ministre du Revenu national est convaincu qu'il est raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d'emploi ainsi que la durée, la nature et l'importance du travail accompli, qu'ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s'ils n'avaient pas eu un lien de dépendance;
[...]
[4] Bien que tout emploi effectué par une personne qui a un lien de dépendance avec son employeur (le lien de dépendance étant déterminé en conformité avec les articles 251 et 252 de la Loi de l'impôt sur le revenu) est exclu des emplois assurables, le législateur a toutefois prévu une exception; ainsi, un emploi en principe exclu à cause du lien de dépendance peut être déterminé assurable si, à la suite d'une enquête et analyse par le ministre du Revenu national (le « ministre » ), il s'avère que le travail a été effectué dans des circonstances, selon des modalités et dans un contexte semblables ou comparables à ceux qui auraient existés en l'absence de tout lien de dépendance. En d'autres termes, un emploi effectué par une personne ayant un lien de dépendance avec son employeur doit être considéré comme un emploi exécuté sans lien de dépendance, si le contexte et les circonstances entourant l'exécution du travail sont comparables ou similaires à une relation de travail entre deux tiers.
[5] Le législateur a même prévu que l'évaluation visant à savoir si le travail exécuté été de façon comparable à celle s'il n'y avait pas eu ce lien de dépendance devrait se faire selon des critères qu'il a lui-même édictés, soit la durée, la rétribution, la nature, l'importance, et toutes les circonstances pouvant s'avérer pertinentes.
[6] En l'espèce, pour justifier et expliquer sa décision que le lien de dépendance avait bel et bien façonné la relation de travail pour les périodes en cause, l'intimé a énuméré ses hypothèses de fait, lesquelles sont reproduites au paragraphe 5 de la Réponse à l'avis d'appel. Elles se lisent comme suit :
a) Diane Gaudreau exploite, depuis 1987, une ferme d'élevage de boeuf; (admis)
b) elle est la mère de l'appelant; (admis)
c) Diane Gaudreau a trois garçons, l'appelant né en juin 1975, Phylippe né en septembre 1977, et Carl né en octobre 1979; (admis)
d) Diane Gaudreau a acheté la ferme de son beau-père Phylippe Duchesne;(admis)
e) la ferme a une superficie de 340 acres et comporte un troupeau de plus de 110 têtes; (admis)
f) Diane Gaudreau cultive aussi le foin et l'avoine qu'elle récolte deux fois par année; (nié)
g) Diane Gaudreau travaille pour une Commission scolaire, 35 heures par semaine, à l'année longue; (nié)
h) elle effectue la tenue de livres de la ferme en plus d'accomplir ses tâches ménagères; (nié)
i) elle travaille aussi à la ferme; (ignoré)
j) son époux Berthold Duchesne travaillait pour elle à temps partiel;(admis)
k) les 3 fils de Diane Gaudreau travaillaient occasionnellement pour elle sans rémunération; (nié)
l) en 1993, l'appelant avait besoin de 20 semaines d'emploi assurable pour se qualifier à recevoir des prestations d'assurance-chômage; (nié)
m) en 1993, Diane Gaudreau a rémunéré l'appelant durant 22 semaines;(nié)
n) l'appelant avait besoin de 12 semaines d'emploi assurable pour se qualifier à recevoir des prestations d'assurance-chômage en 1994, et 1995;(nié)
o) Diane Gaudreau a rémunéré l'appelant durant 12 semaines en 1994 et 14 semaines en 1995; (nié)
p) l'appelant effectuaient plusieurs des nombreuses tâches requises sur la ferme, dont : (nié)
aider à récolter l'avoine et faire les foins,
faire des piquets,
réparer les clôtures,
fabriquer et réparer des barrières,
sortir le fumier de l'étable,
sortir le fumier la « maternité » ,
sortir le fumier des différents enclos,
nettoyer la cour de stockage du foin,
surveiller le vêlage,
piquer et traiter les veaux,
déplacer les animaux,
étiqueter les animaux;
q) entre ses semaines de travail rémunérées, l'appelant travaillait pour Diane Gaudreau sans rémunération; (nié)
r) l'appelant était lié au payeur en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu; (admis)
s) il n'est pas raisonnable de conclure dans ces circonstances, que le contrat de travail de l'appelant aurait été à peu près semblable s'il n'avait pas eu de lien de dépendance avec Diane Gaudreau. (nié)
[7] L'appelant a admis les hypothèses de fait mentionnées aux alinéas a), b), c), d), e), j) et r).
[8] Il a nié les autres allégations ou n'en avait aucune connaissance; il s'agit des alinéas f), g), h), k), l), m), n), o), p), q) et s).
[9] En guise de preuve, dont le fardeau lui incombait, l'appelant a fait valoir principalement par son témoignage et celui de sa mère qu'il avait été impliqué dans tous les travaux liés à l'exploitation d'une ferme dont la vocation était l'élevage de boeufs pour la boucherie.
[10] À l'exception de la période où l'appelant n'avait pas de permis de conduire, sa mère lui confiait la responsabilité de tous les travaux que commandait son exploitation agricole, en fonction de son expérience limitée par son jeune âge.
[11] Il s'agissait d'une ferme où les animaux étaient à l'extérieur à l'année longue. Certes, il y avait des abris, mais de façon générale, les animaux étaient à l'extérieur en permanence. Les abris étaient des endroits permettant aux animaux de se placer à l'abri du vent et des intempéries. Il y avait également un emplacement servant de « maternité » où les vaches mettaient bas quand cela était prévisible.
[12] La mère de l'appelant a expliqué comment elle était devenue propriétaire de la ferme, qu'elle avait acquise de son beau-père. Devenue propriétaire de la ferme après y avoir travaillé plusieurs années, elle était en mesure d'y apporter plusieurs améliorations et correctifs, tout en lui donnant une certaine expansion. En plus des améliorations apportées, elle a fait l'acquisition d'un autre terrain séparé du sien par une route.
[13] En même temps qu'elle travaillait comme productrice agricole, madame Gaudreault travaillait à temps partiel pour une commission scolaire. À un certain moment, un poste à temps plein est devenu disponible. Elle a postulé pour le poste et l'a obtenu, limitant ainsi sa disponibilité pour les travaux de la ferme.
[14] Son patron étant très collaborateur, elle pouvait compter sur une certaine souplesse pour s'occuper de sa ferme d'élevage de boeufs. Elle y consacrait tout son temps libre et ses vacances; elle réussissait à exploiter la ferme en avoir amélioré l'efficacité de manière à ce que son travail soit moindre tout en étant plus efficace.
[15] Elle affirme avoir procédé, en 1995, à l'embauche de son fils Éric, qui était revenu à la maison à la suite d'un passage dans l'armée, chez les cadets. Elle lui a offert 5 $ l'heure, montant qu'il a accepté.
[16] Quant à la description de tâches, elle a essentiellement indiqué qu'il effectuait le travail nécessaire; il réparait les abris, remplaçait les vitres, réparait les clôtures, sortait le fumier, nettoyait tout ce qui devait l'être et travaillait au foin ainsi que pour les semences, le labour, la cueillette des roches, et ainsi de suite.
[17] À la question de savoir si elle avait engagé d'autres personnes, elle a indiqué qu'effectivement, à l'occasion, elle avait engagé certaines personnes; elle a, d'ailleurs, fourni quelques noms.
[18] Elle a conclu son témoignage en indiquant qu'elle n'était plus propriétaire de la ferme et que son fils Éric, l'appelant, l'avait acquise le 3 août 1998 pour une contrepartie substantiellement inférieure à la juste valeur marchande (la « JVM » ).
[19] Lors de son témoignage, Éric a essentiellement confirmé celui de sa mère au sujet du fait qu'il avait bel et bien travaillé à la ferme. Il a expliqué qu'au début, il n'avait pas de permis de conduire, ce que le restreignait quant à l'exécution de certains travaux où un tracteur était requis.
[20] Après avoir obtenu son permis de conduire, il a affirmé avoir conduit le tracteur en citant, à titre d'exemple, le déplacement des balles de foin qu'il effectuait la nuit au moment où la circulation était moins dense sur la route provinciale qu'il devait utiliser dans le cadre de ces transports de foin.
[21] Il a confirmé le salaire et les modalités, c'est-à-dire qu'il était généralement payé en argent comptant.
[22] La preuve, dont le fardeau incombait à l'appelant, a fait très peu de place au fait que son père, également conjoint de sa mère, travaillait lui aussi à la ferme à l'époque des trois périodes en litige.
[23] Pour relever un tel fardeau de la preuve, l'appelant devait faire la démonstration qu'il avait exécuté un travail véritable, rémunéré selon les us et coutumes, qui tenait compte de ses compétences et de son expérience, etc. Il devait également démontrer que le travail avait été nécessaire et qu'il l'avait exécuté de la même manière qu'il l'aurait fait si son employeur n'avait pas été sa mère. Il devait également faire la preuve qu'il avait en tout temps été assujetti à son pouvoir de contrôle et qu'il était sous l'autorité de celle-ci.
[24] Le fait de préparer les champs et les semences, de cueillir le foin et de nourrir les animaux sont des tâches essentielles qui doivent normalement être exécutées à des moments spécifiques; le travail est fonction des tâches et non l'inverse.
[25] En l'espèce, la preuve de l'intimé a fait ressortir des éléments assez particuliers dont les causes n'ont été ni expliquées ni justifiées, sauf par des affirmations qui ne veulent rien dire, telles que :
· Il travaillait quand il y avait du travail.
· Il travaillait quand j'en avais besoin.
· Il ne travaillait pas lorsqu'il n'y avait rien à faire.
[26] Il est notoire que le climat et les intempéries ont des effets considérables sur la charge de travail nécessaire à l'exploitation d'une ferme; il en est ainsi quant à la période où les travaux peuvent et doivent être exécutés. De façon générale, tout est déployé pour effectuer certains travaux quand la température est du bon bord; or, il est très difficile de concilier la façon et la raison dont le travail était organisé. Cette particularité ressort tout particulièrement du tableau préparé par madame Courcy.
[27] En l'espèce, elle a préparé les tableaux suivants :
Berthold Duchesne 1993 |
Éric Duchesne 1993 |
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semaines du |
salaire |
# sem. |
semaines du |
salaire |
# sem |
14 au 20 février 21 au 27 février
14 au 20 mars
25 avril au 1 mai
9 au 15 mai
20 au 26 juin 27 juin au 3 juil.
25 au 31 juillet
8 au 14 août
22 au 28 août
5 au 11 septembre |
720 $ 720
720
720
720
720 744
720
720
732
720 7 956 $ |
(1) (1)
(1)
(1)
(1)
(1) (1)
(1)
(1)
(1)
(1) (11) |
7 au 13 mars
4 au 24 avril 25 avril au 1 mai 2 au 8 mai
16 mai au 19 juin
4 au 24 juillet 25 au 31 juillet 1 au 7 août
15 au 21 août
29 août au 4 sept. 5 au 11 septembre 12 sept. au 2 oct.
|
150 $
150 150 150
150
150 150 150
150
150 150 150 3 300 $ |
(1)
(3) (1) (1)
(5)
(3) (1) (1)
(1)
(1) (1) (3) (22) |
1994 |
1994 |
||||
semaines du |
salaire |
# sem. |
semaines du |
salaire |
# sem |
14 au 20 février 21 au 27 février 11 au 17 avril 8 au 14 mai
5 au 11 juin
26 juin - 2 juil.
10 au 16 juillet 31 juil. - 6 août
14 au 20 août 21 au 27 août
4 au 10 sept.
2 au 8 octobre
|
720 720 720 720
720
720
720 720
720 720
720
720 8 640 $ |
(1) (1) (1) (1)
(1)
(1)
(1) (1)
(1) (1)
(1)
(1) (12) |
22 mai au 4 juin
19 au 25 juin 26 juin au 2 juil. 3 au 9 juillet
31 juil. - 6 août
21 au 27 août 28 août au 3 sept. 4 au 10 septembre 18 au 24 septembre 2 au 8 octobre 20 au 26 novembre
|
240 $
240 240 240
240
240 240 240 240 240 240 2 880 $
|
(2)
(1) (1) (1)
(1)
(1) (1) (1) (1) (1) (1) (12) |
1995 |
1995 |
||||
semaines du |
salaire |
# sem. |
semaines du |
salaire |
# sem |
14 au 10 juin 11 au 17 juin 18 juin au 1 juil. 2 au 15 juillet 16 au 22 juillet 23 au 29 juillet 13 août au 26 août 10 au 16 septembre 17 au 23 septembre
1 au 7 octobre
|
720 $ 720 720 720 720 720 720 720 720
720 9 360 $ |
(1) (1) (2) (2) (1) (1) (2) (1) (1)
(1) (13) |
30 avril au 6 mai 28 mai au 3 juin 4 au 10 juin
18 juin au 2 juil.
16 au 22 juillet
17 au 23 septembre 24 au 30 septembre 1 au 7 octobre 8 au 28 octobre 5 au 18 novembre |
280 $ 280 280
320 280 320
320 320 320 320 320 4 320 $
|
(1) (1) (1)
(2) (1)
(1) (1) (1) (3) (2) (14) |
[28] D'une part, le tableau met en évidence que l'appelant et son père travaillaient en alternance; d'autre part, il ressort que le père de l'appelant touchait une rémunération très supérieure à celle que recevait l'appelant. Conséquemment, il y a lieu de croire qu'il s'agissait d'un employé plus expérimenté assumant des responsabilités et exécutant du travail plus important, sinon plus exigeant, eu égard à la différence de salaire.
[29] Dans un contexte habituel, selon la réalité salariale, il aurait été normal que les deux travaillent ensemble, l'appelant agissant alors comme aide, comme second; l'écart salarial aurait alors non seulement pu s'expliquer, mais se comprendre.
[30] Doit-on comprendre que le travail exécuté certaines semaines était plus important, plus essentiel? Dans la négative, pourquoi l'appelant n'exécutait-il pas les travaux sans interruption, étant donné qu'il commandait un salaire beaucoup inférieur, d'où l'intérêt marqué pour l'entreprise?
[31] Ces particularités n'ont pas été expliquées; n'eût été les questions de l'intimé, la preuve de l'appelant aurait essentiellement effleuré d'une manière très marginale le fait que Berthold Duchesne, père de l'appelant et conjoint de sa mère, avait travaillé à la ferme.
[32] L'appelant a soutenu que la détermination de l'intimé avait résulté principalement de la prise en considération d'un seul élément.
[33] Selon lui, lors d'une enquête portant sur la nature assurable du travail de son père, Berthold Duchesne, ce dernier aurait déclaré que ses fils, dont l'appelant, avaient travaillé à la ferme mais qu'ils n'avaient jamais eu de rémunération.
[34] Tenant pour acquis ce fait obtenu de la déclaration du père de l'appelant, le ministre aurait, selon l'appelant et sa mère, conclu que le travail de l'appelant était essentiellement un emploi de convenance ne rencontrant aucunement les exigences d'un véritable contrat de louage de services, puisqu'il manquait un élément essentiel, la rémunération.
[35] Par la suite, il s'est avéré qu'il s'agissait là d'une information fausse qui découlait essentiellement d'une mauvaise compréhension ou interprétation des paroles du père de l'appelant.
[36] La représentante de l'intimé a admis qu'il s'agissait là d'un élément qui figurait au dossier et qui avait été porté à sa connaissance; elle a ajouté qu'elle était au fait des correctifs apportés, ajoutant que cette facette du dossier n'avait aucunement influencé ou façonné le résultat final de son analyse. Elle a indiqué que les éléments déterminants de ses recommandations avaient été :
· l'horaire de travail alternatif ni expliqué ni justifié;
· le nombre de semaines travaillées coïncidait avec le nombre de semaines requises pour se avoir droit aux prestations d'assurance-chômage;
· l'augmentation importante du salaire;
· Les modalités de paiement de la rémunération sont restées nébuleuses.
[37] Le fardeau de la preuve incombait à l'appelant. Pour relever un tel fardeau, il était certes important d'attaquer la qualité du travail d'analyse de manière à pouvoir être en mesure de démontrer que les conclusions retenues étaient déraisonnables et inadéquates. Il était cependant tout aussi important de démontrer précisément la nature du travail exécuté, d'expliquer et de justifier les différentes particularités, et surtout de démontrer clairement qu'il avait bel et bien existé une véritable relation employeur-employé.
[38] Or, l'appelant et sa mère ont essentiellement démontré que l'appelant avait été associé aux travaux de la ferme familiale, qu'il avait été rémunéré à l'occasion par chèque, mais généralement en argent comptant.
[39] Son salaire était au début de 5 $ l'heure pour être ensuite augmenté à 8 $, sans raison autre que celle qu'il avait pris de l'expérience.
[40] Eu égard aux éléments qui avaient été consignés par l'intimé, il aurait fallu faire un effort particulier pour expliquer et justifier d'une manière raisonnable et vraisemblable pourquoi l'appelant bénéficiait d'un horaire de travail alternatif avec son père et pourquoi la durée du travail correspondait sensiblement au nombre de semaines dont il avait besoin pour avoir droit aux prestations d'assurance-chômage.
[41] En présence d'un lien de dépendance, il m'apparaît utile, voire même essentiel, de faire une preuve plus convaincante que celle se résumant à indiquer que le travail a été exécuté en contrepartie d'un salaire payé parfois en comptant, parfois par chèque, et pour une durée essentiellement justifiée par l'affirmation qu'à un moment donné il y avait du travail à faire et que ce travail a pris fin quand le payeur a décidé qu'il n'y en avait plus.
[42] La présence du lien de dépendance fait en sorte que la personne qui évalue si le travail est assurable ou non doit pouvoir analyser beaucoup de faits précis afin de pouvoir conclure si le travail en cause a été exécuté d'une manière semblable à celle qu'un tiers l'aurait fait dans un contexte similaire.
[43] Il en est ainsi pour le tribunal qui doit réviser une telle décision dans l'hypothèse où le processus premier a été entaché d'un quelconque manquement.
[44] Madame Courcy a reconnu le bien-fondé de l'inquiétude de l'appelant et de sa mère quant aux supposées révélations du père relatives à la gratuité. Elle a admis qu'il s'agissait du fait consigné mais corrigé dans le dossier. Suivant son témoignage, la recommandation qu'elle a soumise à l'origine de la détermination ne tenait pas compte de ce fait ultérieurement catégoriquement nié par les intéressés.
[45] L'étude et l'analyse de l'intimé soulèvent plusieurs questions auxquelles il n'existait pas de réponse. Je fais notamment référence aux éléments suivants :
· Pourquoi l'appelant a-t-il bénéficié d'une augmentation de salaire substantielle les deuxième et troisième années par rapport à la première année?
· Pourquoi l'horaire de travail alternatif?
· Pourquoi les périodes de travail coïncidaient-elles avec le nombre de semaines nécessaire pour avoir droit aux prestations d'assurance-chômage?
[46] Pour des raisons non spécifiées, lorsqu'il était question du travail de l'appelant, sa mère témoignait d'une manière défensive et à l'occasion manifestait de l'agressivité, comme si elle avait trouvé désagréable le fait de devoir fournir certaines explications.
[47] Quant au long récit d'entrée en la matière, elle a expliqué de manière impeccable le trajet qu'elle avait dû parcourir pour devenir propriétaire de la ferme qu'elle a par la suite développée et ce, tout en occupant un emploi à l'extérieur.
[48] Lorsqu'est venue la question fondamentale de décrire, d'expliquer et de justifier les paramètres du travail de l'appelant, son témoignage est devenu plus confus, plus évasif, à un tel point que n'eût été les questions soulevées par l'avocate de l'intimé, le tribunal aurait pu conclure que la presque totalité du travail exécuté à la ferme l'avait été par l'appelant et par sa mère, qui avait en autre un travail à l'extérieur pour une commission scolaire.
[49] Le travail de l'appelant, selon les relevés d'emploi, a été effectué pour le bénéfice de la ferme familiale. Il s'agissait d'une petite entreprise où le nombre de personnes impliquées était très peu élevé. Il n'était donc pas très difficile de soumettre une preuve claire, complète et convaincante de manière à dissiper les nombreux aspects nébuleux.
[50] En d'autres termes, l'appelant aurait dû concentrer ses énergies pour démontrer que le travail exécuté l'avait été dans un contexte semblable à celui où il l'aurait effectué pour une tierce personne. Une telle preuve aurait alors discrédité la qualité du travail d'analyse.
[51] Au contraire, la prépondérance de la preuve a démontré que l'appel avait bénéficié de conditions de travail largement façonnées ou influencées par la nature de la relation familiale qui le liait à sa mère.
[52] La prépondérance de la preuve est à l'effet que la décision a résulté d'une analyse sérieuse et que les conclusions retenues sont raisonnables eu égard aux faits disponibles.
[53] Pour ces raisons, l'appel doit être rejeté.
Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de janvier 2005.
« Alain Tardif » |
Juge Tardif
RÉFÉRENCE : |
2005CCI59 |
No DU DOSSIER DE LA COUR : |
97-333(UI) |
INTITULÉ DE LA CAUSE : |
Éric Duchesne et le ministre du Revenu national |
LIEU DE L'AUDIENCE : |
Roberval (Québec) |
DATE DE L'AUDIENCE |
le 5 novembre 2004 |
MOTIFS DU JUGEMENT PAR : |
l'honorable juge Alain Tardif |
DATE DU JUGEMENT : |
le 26 janvier 2005 |
COMPARUTIONS : |
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Avocate de l'appelant : |
Me Louise Fortin
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Avocate de l'intimé : |
Me Emmanuelle Faulkner |
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AVOCATE INSCRITE AU DOSSIER : |
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Pour l'appelant : |
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Nom : Étude : Ville : |
Me Louise Fortin Malette Alma (Québec) |
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Pour l'intimé : |
J. H. Sims, c.r., sous ministre de la Justice et sous-procureur général du Canada Ottawa, Canada |