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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

2001-2217(GST)I

ENTRE :

PAUL K. SNIDER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

Appel entendu le 4 février 2002, à Ottawa, Canada, par

 

l'honorable juge Terrence O'Connor

 

Comparutions

 

Pour l'appelant :                                  L'appelant lui-même

 

Avocate de l'intimée :                          Me Justine Malone

 

 

JUGEMENT

 

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 11 décembre 2000 et porte le numéro 00207221112370002, est rejeté selon les motifs du jugement ci-joints.

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour d'avril 2002.

 

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de mars 2004.

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur


 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20020423

Dossier: 2001-2217(GST)I

 

 

ENTRE :

 

PAUL K. SNIDER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge O'Connor, C.C.I.

 

QUESTION EN LITIGE

[1]     La question à trancher dans l’appel en l'instance est de savoir si l’appelant a droit à un remboursement de la taxe sur les produits et services (« TPS ») pour maisons neuves de 4 512,61 $, en vertu de l’article 254 ou de l’article 256 de la Loi sur la taxe d’accise (« Loi »). L’article 256 s’applique aux immeubles d’habitation construits par le constructeur ou dont le propriétaire a confié la construction à un intermédiaire. L’article 254 se rapporte aux immeubles d’habitation construits et vendus par un constructeur.

 

FAITS

 

[2]     En janvier 1996, l’appelant a conclu un contrat d’achat d’un immeuble d’habitation sur demande et d’un lot avec Robert J. Scott Construction (« Scott »). L’appelant et Scott s’étaient entendus sur les modalités de vente de l’immeuble et du lot situé au 198, croissant Orchard, R. R. no 3, Perth (Ontario) et avaient convenu de paiements additionnels coïncidant avec les diverses étapes de la construction.

 

[3]     L’appelant a présenté une demande de remboursement de la taxe sur les produits et services pour habitations neuves (« demande ») relativement au montant indiqué précédemment. Le ministre du Revenu national (« ministre ») a reçu cette demande le 20 juillet 2000.

 

[4]     Au moyen d’un avis de cotisation de TPS daté du 11 décembre 2000, le ministre a avisé l’appelant que sa demande de remboursement avait été rejetée.

 

[5]     Pour rejeter ainsi la demande, le ministre s’est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes :

 

                   [TRADUCTION]

 

a)         En avril 1996, l’appelant a acheté un fonds d’un constructeur avant le début de la construction de l’immeuble d’habitation et il a conclu un contrat avec ce constructeur pour construire l’immeuble;

 

b)         la demande ne satisfait pas aux critères établis pour donner droit à un remboursement au titre d’un immeuble d’habitation construit par un constructeur en vertu du paragraphe 254(2) de la Loi étant donné que la propriété de l’immeuble d’habitation n’a pas été transférée à l’appelant une fois la construction achevée en grande partie;

 

c)         l’appelant a embauché un entrepreneur pour construire un immeuble d’habitation à logement unique devant lui servir de lieu de résidence habituel au 198, croissant Orchard, R.R. n3, Perth (Ontario) (« l’immeuble »);

 

d)         l’appelant était le premier particulier à occuper l’immeuble après le début des travaux;

 

e)         la construction de l’immeuble a été achevée en grande partie le 28 juin 1996, ou aux environs de cette date;

 

f)          l’appelant a occupé l’immeuble à titre de lieu de résidence habituel le 28 juin 1996, ou aux environs de cette date;

 

g)         l’appelant a présenté une demande de remboursement que le ministre a reçue (le sceau de l’Agence en faisant foi) le 20 juillet 2000;

 

h)         la demande a été présentée le 23 avril 1996, ou après cette date;

 

i)          en vertu du paragraphe 256(3) de la Loi, la demande relative à un immeuble d’habitation construite par le propriétaire doit être déposée dans les deux ans suivant le premier en date des jours suivants, soit le jour qui tombe deux ans après le jour où l’immeuble est occupé pour la première fois après le début des travaux ou le jour où la propriété est transférée à une autre personne sans que l'immeuble ait été occupé et le jour où la construction de l'immeuble est achevée en grande partie;

 

j)          en conformité avec le paragraphe 256(3) de la Loi, la demande de l’appelant aurait dû être présentée dans les deux ans suivant le jour où la construction de l’immeuble était achevée en grande partie, soit le 28 juin 1998 ou avant;

 

k)         la demande de l’appelant n’a pas été présentée dans le délai de prescription de deux ans mentionné aux alinéas 6i) et 6j) qui précèdent.

 

[6]     Il convient de noter que certaines des hypothèses qui précèdent sont des hypothèses de droit.

 

PLAIDOIRIES

 

[7]     L’appelant affirme qu’il a présenté sa demande dans le délai requis car elle était fondée sur l’article 254 de la Loi. Le ministre soutient que l’article en question, qui se rapporte aux immeubles achetés du constructeur, n’est pas applicable, en raison principalement du fait que la propriété de l'immeuble n’a pas été transférée à l’appelant après que la construction eut été achevée en grande partie. L’appelant affirme avoir satisfait dans les faits à cette condition parce que le premier paiement de 17 000 $ effectué le 14 avril 1996 comprenait un montant de 15 000 $ se rapportant au lot et un autre de 2 000 $ se rapportant à certains matériaux qui étaient censés être utilisés dans la construction de la maison et parce que le contrat prévoyait des paiements additionnels durant la construction. L’appelant attire également l’attention sur la clause restrictive de l’acte de transfert qui stipule que l’appelant doit faire construire l’immeuble par l’auteur du transfert. L’appelant conclut en disant qu’il a satisfait aux conditions énoncées à l’article 254.

 

ANALYSE

 

[8]     À mon sens, l’article 254 de la Loi ne s’applique pas parce que la propriété de l’immeuble d’habitation n’a pas été transférée à l’appelant après que la construction eut été achevée en grande partie. Le transfert a eu lieu le 14 avril 1996 et il concernait initialement le lot et les matériaux de construction qui s’y trouvaient à ce moment‑là. En ce qui concerne les autres matériaux de construction et les améliorations à apporter après cette date, on peut lire ce qui suit dans l’ouvrage du très honorable Sir Robert Megarry intitulé The Law of Real Property, 5e édition, aux pages 731 et suivantes :

 

                   [TRADUCTION]

 

[   ] Le sens de « biens immobiliers » en droit englobe, comme on l’a déjà vu, bien plus que le « fonds » en langage courant94. Il comprend, notamment, les héritages incorporels de même que les accessoires fixes. La règle générale en ce qui concerne les accessoires fixes est « quicquid planatur solo, solo cedit »95 (toute chose fixée au sol en devient un élément indissociable). Dès lors, lorsqu’un immeuble est érigé sur le fonds et que des objets y sont fixés de manière permanente, on doit considérer en droit que le sol, l’immeuble et les objets qui y sont apposés font partie intégrante du « fonds », c.‑à‑d. que ce sont des biens immobiliers par opposition à des biens meubles. Ils deviennent en totalité la propriété du propriétaire du fonds, à moins qu’ils soient par ailleurs concédés ou cédés. [...]

 

[...] Les matériaux utilisés pour construire un immeuble cessent dès lors d’être des biens meubles et deviennent des éléments indissociables du fonds et ils cessent d’office d’appartenir à la personne qui les possédait à titre de biens meubles pour devenir la propriété du propriétaire du fonds sur lequel ils sont fixés, peu importe que la personne qui les a fixés avait ou non le droit de le faire.

 

[9]     Par conséquent, j’estime que l’article 254 de la Loi ne s’applique pas parce que le transfert a eu lieu avant que la construction soit achevée en grande partie.

 

[10]    Les dispositions applicables de la Loi sont les paragraphes 256(2) et 256(3). Ils prévoient ce qui suit, en ce qui concerne les matériaux :

 

256.     Au présent article, [...]

 

(2)        Le ministre verse un remboursement à un particulier dans le cas où, à la fois :

 

a)         le particulier, lui-même ou par un intermédiaire, construit un immeuble d'habitation – immeuble d'habitation à logement unique ou logement en copropriété – ou y fait des rénovations majeures, pour qu'il lui serve de résidence habituelle ou serve ainsi à son proche;

 

b)         la juste valeur marchande de l'immeuble, au moment où les travaux sont achevés en grande partie, est inférieure à 450 000 $;

 

c)         le particulier a payé la taxe prévue à la section II relativement à la fourniture par vente, effectuée à son profit, du fonds qui fait partie de l'immeuble ou d'un droit sur ce fonds, ou relativement à la fourniture effectuée à son profit, ou à l'importation par lui, d'améliorations à ce fonds ou, dans le cas d'une maison mobile ou d'une maison flottante, de l'immeuble (le total de cette taxe prévue au paragraphe 165(1) et aux articles 212 et 218 étant appelé « total de la taxe payée par le particulier » au présent paragraphe );

 

d)         selon le cas :

 

(i)         le premier particulier à occuper l'immeuble après le début des travaux est le particulier ou son proche,

 

(ii)        [sans objet]

 

Le montant remboursable est égal au montant suivant : [...]

 

[une formule est ensuite énoncée] [...]

 

(3)        Les remboursements prévus au présent article ne sont versés que si le particulier en fait la demande dans les deux ans suivant le premier en date des jours suivants :

 

a)         le jour qui tombe deux ans après le jour où l'immeuble est occupé pour la première fois de la manière prévue au sous-alinéa (2)d)(i);

 

a.1)      [sans objet];

 

b)         le jour où la construction ou les rénovations majeures de l'immeuble sont achevées en grande partie.

 

[11]    Le paragraphe 256(3) reproduit au paragraphe précédent a été introduit par L.C. 1997, ch. 10, par. 66(3), et il s’applique à tout remboursement relatif à un immeuble d’habitation pour lequel une demande est déposée auprès du ministre du Revenu national le 23 avril 1996 ou après, sous réserve de certaines dérogations qui ne s’appliquent pas en l’espèce car l’appelant a occupé l’immeuble après le 23 avril 1996 seulement.

 

[12]    Dans l'ouvrage intitulé Canada GST Service, cartable C5, David M. Sherman se penche sur l’ancien paragraphe 256(3) et les modifications qui y ont été apportées, dans les termes suivants :

 

                   [TRADUCTION]

 

Délai pour demander le remboursement

 

Le délai prescrit à l’origine pour demander le remboursement était de deux ans suivant le premier en date des jours suivants :

 

a)         le jour où l'immeuble était occupé pour la première fois de la manière prévue au sous‑alinéa 256(2)d)(i) ou était vendu avant d’avoir été occupé de la manière décrite au sous‑alinéa 256(2)d)(ii),

 

et

 

b)         le jour où la construction ou les rénovations majeures de l’immeuble étaient achevées en grande partie.

 

Cette disposition a donné lieu à de nombreux litiges dans lesquels les contribuables n'ont pas obtenu le remboursement demandé parce qu’ils avaient présenté leur demande plus de deux ans après avoir emménagé dans l’immeuble. Voir la rubrique « Jurisprudence — Délai de présentation des demandes de remboursement » ci‑après.

 

Les modifications adoptées en 1997, rendues publiques pour la première fois le 23 avril 1996, ont changé sensiblement le délai accordé pour présenter une demande de remboursement. Ce délai est désormais limité par l’application conjuguée des paragraphes 256(3) et 256(2.01).

 

Le délai accordé pour présenter une demande est de deux ans suivant le premier en date des jours suivants :

 

·        le jour qui tombe deux ans après le jour où l’immeuble est occupé (autrement dit le délai est de quatre ans après le jour où l’immeuble est occupé);

 

·        le jour où l’immeuble est vendu par l'auteur d'une demande de remboursement avant d’avoir été occupé (cette situation est plutôt rare);

 

·        le jour où la construction ou les rénovations majeures sont « achevées en grande partie ».

 

Le changement se rapporte à l’occupation de l'immeuble, auquel se greffe désormais un délai de quatre ans plutôt qu’un délai de deux ans. Cependant, dans le cas de l’achèvement en grande partie de la construction, le délai est toujours de deux ans. Celui des deux délais qui prend fin le premier devient le délai applicable.

 

En outre, le paragraphe 256(2.01) interdit l'inclusion de la TPS lorsque celle‑ci devient payable deux ans après le jour où l'immeuble est occupé pour la première fois. Autrement dit, la personne qui emménage dans l’immeuble dispose d’une période de deux ans pour en achever la construction, après quoi les coûts engagés ne donnent pas droit au remboursement.

 

De manière générale, les modifications apportées se sont appliquées aux demandes de remboursement présentées après le 23 avril 1996, des droits acquis étant accordés dans le cas des immeubles occupés, construits en grande partie ou revendus avant cette date. Voir les observations formulées à la rubrique Antécédents, qui précède.

 

Il est peu probable que les tribunaux acceptent les demandes présentées après l’expiration du délai prévu pour des motifs d'équité, de compassion ou d’enrichissement injustifié pour le gouvernement. Voir l’analyse de ce point dans les observations formulées relativement au paragraphe 261(3), de même que les affaires citées sous la rubrique « Jurisprudence — Délai de présentation des demandes de remboursement ». Cependant, le délai qui prend fin une fin de semaine ou un jour férié peut être prolongé par l’application de la Loi d’interprétation ou de la jurisprudence. Voir les observations formulées relativement au paragraphe 301.

 

En outre, le Cabinet a accordé un certain nombre de décrets de remise à des particuliers qui ont fait défaut de respecter le délai. (Sur la question des décrets de remise accordés en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, voir les observations formulées relativement au paragraphe 165(1).)

 

[13]    En l’espèce, la construction a été achevée le 28 juin 1996 et la demande n’a été reçue par le ministre que le 20 juillet 2000, c.‑à‑d. plus de deux ans plus tard.

 

[14]    Dès lors, vu que l’article 254 de la Loi ne s’applique pas et que la demande a été présentée après l’expiration du délai prévu au paragraphe 256(3) de la Loi, l’appelant n’est pas admissible au remboursement et l’appel doit être rejeté.

 


[15]    Comme il est mentionné précédemment, l’appelant pourrait envisager de présenter une demande de décret de remise en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour d'avril 2002.

 

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de mars 2004.

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur

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