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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

 

 

1999-2164(IT)G

 

ENTRE :

 

GERRI MOORE,

 

appelante,

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

 

 

 

Appels entendus les 29, 30 et 31 octobre 2001, à Edmonton (Alberta), par

l'honorable juge Terrence O'Connor

 

Comparutions

 

Avocat de l'appelante :                                 Me R. Tim Hay

 

Avocat de l'intimée :                                     Me R. Scott McDougall

 

 


JUGEMENT

 

          Les appels des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 sont admis et les affaires sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de décembre 2001.

 

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 17e jour d'août 2004.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur


 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Date : 20011220

Dossier : 1999-2164(IT)G

 

 

 

ENTRE :

 

GERRI MOORE,

 

appelante,

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge O'Connor, C.C.I.

 

[1]     L'audition des présents appels a eu lieu à Edmonton (Alberta) les 29, 30 et 31 octobre 2001.

 

[2]     Les appels soulèvent essentiellement sept questions, savoir :

 

1.       Les nouvelles cotisations pour les années 1991, 1992 et 1993 étaient‑elles prescrites en vertu des dispositions du paragraphe 152(4) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi »); elles sont prescrites sauf si le contribuable ou la personne produisant la déclaration soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la Loi.

 

Selon moi, il incombe à l'intimée de prouver que l'appelante a fait une présentation erronée des faits au sens du paragraphe 152(4) ou a commis quelque fraude. J'estime que l'intimée a du moins réussi à établir qu'il y a eu une présentation erronée des faits. Il se peut que l'appelante ait fait preuve de naïveté en suivant les conseils de son commis comptable, mais il y a eu une présentation erronée des faits et les nouvelles cotisations n'étaient donc pas prescrites.

 

2.       La deuxième question à trancher est celle de savoir si le ministre a eu raison d'imposer les pénalités prévues au paragraphe 163(2) de la Loi. Ce paragraphe dispose que toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible de pénalités. Ici encore, le fardeau de la preuve repose sur l'intimée, et celle-ci, à mon avis, ne s'en est pas déchargée. Je ne crois pas que l'appelante a commis une faute lourde ni qu'elle remplit par ailleurs les conditions prévues par le paragraphe 163(2). Par conséquent, les pénalités ont été imposées à tort et doivent être retranchées des nouvelles cotisations.

 

3.       La troisième question est de déterminer si l'appelante a exploité ses activités de production cinématographique et de services médias en 1992 et en 1993 à titre d'entrepreneur indépendant auprès du Saskatchewan Council of Cultural Organizations (« SCCO ») et de Sask Film en société de personnes avec son mari, Steve Moore, ou à titre de propriétaire unique. En 1991, l'appelante ne considérait pas son mari comme un associé, mais plutôt comme un sous-traitant menant des activités de production cinématographique et télévisuelle. L'appelante a expliqué qu'elle n'avait pas saisi en 1991 toute la portée de la relation, mais qu'elle s'est rendu compte de l'étendue de la participation de son mari en 1992 et 1993 et a conclu qu'il y avait une société de personnes.

 

Après avoir pris connaissance de l'ensemble de la preuve, je suis convaincu que les revenus de l'appelante en 1992 et en 1993 ont été gagnés par la société de personnes exploitée par elle et son mari. L'appelante a témoigné que tous ses revenus en 1991 et 1992 provenaient de services de consultation en médias à titre d'entrepreneur indépendant auprès du SCCO et de Sask Film. Son mari a toutefois contribué à gagner ces revenus en exécutant des tâches de gestion hors des lieux d'affaires de ces entités. De plus, c'est lui qui s'est en grande partie occupé des documents administratifs de l'entreprise, de la préparation des déclarations, et, en fait, c'est lui qui a engagé la plupart des dépenses relatives aux activités de production cinématographique et télévisuelle pendant les années pertinentes. Il voyageait fréquemment afin de trouver des clients et de faire fructifier les activités de production. Il a également été établi qu'une petite partie du revenu de 1993 provenait des projets de production télévisuelle et cinématographique de l'appelante et de son mari. Une preuve abondante de la nature et de l'étendue de ces projets de production a été déposée, mais je ne juge pas nécessaire de l'examiner en détail. Il suffit de constater que, au cours des années pertinentes, la majorité du revenu de l'appelante provenait du SCCO et de Sask Film en sa qualité d'entrepreneur indépendant, mais qu'en même temps elle exploitait avec son mari les divers projets de production susmentionnés et qu'elle a engagé des dépenses considérables en tentant de rendre les projets rentables.

 

4.       La quatrième question consiste à déterminer si l'appelante avait une attente raisonnable de profit, ce qui exige d'analyser si la société de personnes présumée représentait pour elle une source de revenu pour les années pertinentes.

 

Au sujet de l'attente raisonnable de profit et de la source de revenu, bien que l'appelante ait eu un bureau à sa disposition aux locaux du SCCO et de Sask Film et qu'elle ait eu droit au remboursement de certaines dépenses, le détail précis des dépenses remboursées n'a pas été présenté. Tout bien considéré, bien que deux entreprises distinctes aient été exploitées, elles l'étaient par l'appelante en société de personnes avec son mari sous la raison sociale « Moonstar Productions » et, à mon avis, l'appelante en 1991 et la société de personnes en 1992 et 1993 avaient une attente raisonnable de profit. Je renvoie au contrat conclu par Sask Film et Moonstar Productions à l'onglet 9 de la pièce A‑1.

 

5.       La cinquième question consiste à déterminer si toutes les dépenses déduites ont été réellement engagées pour les entreprises et étaient raisonnables dans les circonstances.

 

L'appelante a le fardeau de la preuve à cet égard et j'estime qu'elle n'a pas réussi à prouver suffisamment toutes les dépenses. Plus particulièrement, je ne suis pas convaincu par les explications relatives au coût des marchandises vendues en 1992 et en 1993, au montant de 12 011,44 $ en 1992 et de 12 611 $ en 1993. L'appelante et la société ne produisaient ni ne vendaient de marchandises. Par conséquent, les dépenses totales admissibles doivent être réduites de 12 011,44 $ en 1992 et de 12 611 $ en 1993.

 

6.       La sixième question consiste à déterminer s'il y a eu en 1993 une perte locative de 14 850,14 $ et si elle était bien déductible.

 

À cet égard, je suis d'avis que cette perte n'est pas admissible car l'appelante n'exerçait pas d'activité de location. Elle était co‑propriétaire de l'immeuble en question avec une dénommée Maria Campbell; les deux co‑propriétaires avaient acheté l'immeuble en 1970 à un prix total de 25 000 $ pour y organiser des spectacles. Toutefois, en 1994, ladite Maria Campbell a pris possession de l'immeuble à toutes fins pratiques pour en faire sa résidence sans payer de loyer à l'appelante en sa qualité de co‑propriétaire. Cela est malheureux, mais indique clairement selon moi qu'il n'y a eu aucune activité de location au cours de l'année. En fait, aucun bail n'a été conclu.

 

7.       La septième question touche les nombreuses autres dépenses déduites et l'absence de pièces justificatives dans plusieurs cas. Au demeurant, les dépenses étaient-elles raisonnables? La preuve fournie par le mari de l'appelante à l'égard de certaines dépenses n'est ni complète ni convaincante. Le mari de l'appelante a été interrogé au sujet de deux grands livres qui contiennent des registres d'une épaisseur totale de cinq pouces. Un des grands livres renferme les détails de nombreuses dépenses. L'autre contient des comptes. Le mari de l'appelante a choisi certaines dépenses et a tenté de les rapprocher aux comptes afin de les réconcilier. Seules certaines dépenses ont été choisies, car il aurait été impossible de vérifier chaque dépense et de la réconcilier avec les comptes. On peut présumer que le vérificateur a vérifié la plupart des dépenses et ses commentaires défavorables ([TRADUCTION] « fictif », « exagéré », « sans pièce justificative », etc.) apparaissent à l'onglet 7 de la pièce A‑1.

 

          Malgré les difficultés susmentionnées, le vérificateur a néanmoins jugé qu'il ne devait refuser que certaines dépenses. J'estime qu'il est raisonnable d'utiliser son approche.

 

[3]     Par conséquent, les appels sont admis et les affaires sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant compte de ce qui suit :

 

1.       Les nouvelles cotisations pour 1991, 1992 et 1993 ne sont pas prescrites en vertu du paragraphe 152(4) de la Loi.

 

2.       L'appelante n'est pas passible de pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi.

 

3.       Les diverses entreprises exploitées, bien que représentant des activités distinctes, ont été exploitées en société de personnes par l'appelante et son mari en 1992 et 1993.

 

4.       Il y avait une attente raisonnable de profit.

 

5.       À l'égard de l'annexe A de la réponse au sujet de 1991, la vérification a accepté à juste titre des dépenses de 5 298,94 $, donnant lieu à un revenu net de 56 951,06 $.

 

6.       À l'égard de l'annexe B de la réponse au sujet de 1992, le coût des marchandises vendues, soit 12 011,40 $, a été refusé à juste titre, donnant lieu à un bénéfice brut de 64 416 $. La vérification a accepté des dépenses de 3 833,40 $ et des frais d'utilisation d'une résidence aux fins d'une entreprise de 1 332,01 $, pour un revenu net après rajustements de 59 250,59 $, lequel montant doit être partagé à parts égales entre l'appelante et son mari, Steve Moore.

 

7.       À l'égard de l'annexe C de la réponse au sujet de 1993, le coût des marchandises vendues, soit 12 611 $, a été refusé à juste titre, donnant lieu à un bénéfice brut de 70 418 $. La vérification a accepté des dépenses de 6 030,36 $, ainsi que 1 500 $ pour l'utilisation d'une résidence aux fins d'une entreprise, pour un revenu net après rajustements de 62 887,74 $, lequel montant doit être partagé à parts égales entre l'appelante et son mari, Steve Moore.

 

8.       La déduction de 14 850,14 $ pour la perte locative est refusée pour les motifs susmentionnés.

 

[4]     Vu les conclusions partagées, il n'y aura pas de dépens.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de décembre 2001.

 

 

 

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 17e jour d'août 2004.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 

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