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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

2001-223(IT)I

ENTRE :

RONALD ROY,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appel entendu le 23 novembre 2001, à Toronto (Ontario),

audition réouverte le 11 janvier 2002,

conférence téléphonique tenue le 19 février 2002, à Ottawa (Ontario),

auditions poursuivies les 11 juin et 16 juillet 2002, à Toronto (Ontario), par

 

l'honorable juge en chef Alban Garon

 

 

Comparutions

 

Pour l'appelant :                        L'appelant lui-même

Avocate de l’intimée :                Me Sointula Kirkpatrick

 

JUGEMENT

 

          L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est rejeté.

 

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2002.

 

 

« Alban Garon »

J.C.C.C.I.

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour de juillet 2004.

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur

 


 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Date: 20020731

Dossier: 2001-223(IT)I

 

 

ENTRE :

RONALD ROY,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge en chef Garon, C.C.I.

 

[1]     Il s’agit d’un appel d’une nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 1997. Dans sa nouvelle cotisation, le ministre du Revenu national a refusé la déduction pour gains en capital au montant de 25 000 $ et permis à l’appelant de déclarer une perte en capital de 25 000 $. Dans son avis d’opposition, l’appelant prétend qu’il a subi une perte au titre d’un placement d’entreprise d’un montant de 25 000 $ due à la vente de ses actions dans Smooth Express International Ltd., dénommée dans la suite des présentes « SEIL ».

 

[2]     Lors de l’audition de l’appel, l’appelant a clairement fait comprendre qu’il ne faisait appel que de la cotisation pour l’année d’imposition 1997, et non de la cotisation pour l’année d’imposition 1995, comme il l’avait mentionné au premier paragraphe de son avis d’appel. À cet égard, il importe de noter que l’intimée a déposé sa réponse à l’avis d’appel en supposant que l’appelant en appelait de la cotisation de 1997. L’audition du présent appel s’est poursuivie sur le même fondement.

 

[3]     Le ministre du Revenu national, dans l’établissement de la cotisation de l’appelant pour l’année d’imposition 1997, se fondait sur des présomptions de fait, lesquelles sont décrites au paragraphe 6 de la réponse à l’avis d’appel. Le paragraphe 6 se lit comme suit :

 

[traduction]

a) SEIL a été constituée en vertu des lois de la province de l’Ontario le 17 janvier 1995;

 

b) le seul actionnaire de SEIL pendant les années d’imposition 1995 et 1996 était Brad Adams; en 1997, les actionnaires étaient Brad Adams et Jerry Doane;

 

c) Smooth Express Ltd. (SEL) et SEIL sont des sociétés liées. SEL a été constituée en vertu des lois de la province de l’Ontario le 23 mars 1993. Les actionnaires de SEL pendant les années d’imposition 1995, 1996 et 1997 étaient Brad Adams, Tim Adams et Kent Truman;

 

d) l’appelant n’a fourni aucune documentation au soutien de son placement dans SEIL;

 

e) l’appelant n’a fourni aucune documentation au soutien de la prétendue vente par lui des actions de SEIL à Brad Adams;

 

f) il n’y a eu au cours de l’année d’imposition 1997 aucune disposition réelle ou réputée d’actions du capital-actions d’une société ni d’une créance due à l’appelant à laquelle s’appliquerait le paragraphe 50(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1. (5e supp.) telle que modifiée (la « Loi »);

 

g) au cours de l’année d’imposition 1997, l’appelant n’a disposé d’aucun bien qui était une action du capital-actions d’une société exploitant une petite entreprise ni d’une créance due à l’appelant par une société privée sous contrôle canadien donnant lieu à une perte en capital à une personne avec qui l’appelant n'avait pas de lien de dépendance, laquelle société était :

 

A)        une société exploitant une petite entreprise;

 

B)          un failli (au sens du paragraphe 128(3) de la Loi) qui était une société exploitant une petite entreprise lors de sa faillite; ou

 

C)         une société visée par l’article 6 de la Loi sur les liquidations qui était insolvable (au sens de la Loi) et qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où l’ordonnance de mise en liquidation de la société a été rendue en vertu de la Loi.

 

h) l’appelant n’a pas subi une PTPE au cours de l’année d’imposition 1997.

 

[4]     L’appelant a admis les alinéas a), e), g) et h) de la réponse à l’avis d’appel.

 

[5]     En ce qui concerne l’alinéa b) du paragraphe 6, l’appelant a nié que M. Brad Adams ait été le seul actionnaire de SEIL en 1995. Il a au contraire affirmé qu’il était le seul actionnaire de SEIL et a cité des documents de constitution en soutien à ses affirmations. Il a toutefois admis la deuxième partie de l’alinéa b), selon laquelle les actionnaires de SEIL en 1997 étaient Messieurs Brad Adams et Jerry Doane. À ce sujet, l’appelant a déclaré qu’il avait cessé d’être actionnaire de SEIL vers août ou septembre 1996. Selon son témoignage, il a vendu à ce moment [traduction] « le reste de la société », pour le paraphraser, à M. Brad Adams contre une somme de 5 000 $.

 

[6]     En ce qui concerne l’alinéa 6c) de la réponse à l’avis d’appel, l’appelant nie que Smooth Express Ltd., dénommée dans la suite des présentes « SEL », soit liée à SEIL. À l’égard de cet alinéa, il a également indiqué qu’il ne savait pas si SEL a été constituée en vertu des lois de la province de l’Ontario le 23 mars 1993, et qu’il ne savait pas qui étaient les actionnaires de SEL pendant les années d’imposition 1995, 1996 et 1997.

 

[7]     L’appelant a nié l’alinéa 6d) de la réponse à l’avis d’appel.

 

[8]     Au sujet de l’alinéa 6f) de la réponse à l’avis d’appel, l’appelant a déclaré qu’il a disposé des actions du capital-actions de SEIL en 1996, mais non en 1997, et qu’il a reçu un chèque de M. Adams au montant de 5 000 $. À l’égard de l’alinéa 6f), l’appelant a également déclaré que SEIL ne pouvait le rembourser en 1996 des prêts qu’il avait faits à la société en 1995 et 1996.

 

[9]     L’appelant a témoigné qu’il [traduction] « croyait » que la créance qui lui était due par SEIL est devenue une mauvaise créance en 1996, mais qu’il ne connaissait pas le montant exact de cette créance. Il a ajouté qu’elle était [traduction] « probablement de plus de 30 000 $ ». Il a affirmé clairement qu’il avait disposé de ses actions en 1996, lorsqu’il les a vendues à M. Adams pour une somme de 5 000 $. L’appelant avait payé 1 $ pour ses actions dans SEIL.

 

[10]    En contre-interrogatoire, l’appelant a confirmé que, au moment de la constitution de SEIL, il détenait toutes les 100 actions émises du capital-actions de la société. Le nombre d’actions en circulation a été ultérieurement augmenté à 200; le moment précis de cette mesure n’a pas été mentionné. Il a également déclaré qu’il dirigeait l’entreprise de SEIL en 1995 et pendant une partie de 1996. Selon lui, M. Gerald Doane, un citoyen américain, a acquis vers mai 1996 environ le tiers du capital-actions de cette société. L’appelant a affirmé que M. Doane n’avait rien payé pour les actions, mais qu’il avait fourni une ligne de crédit d’environ 20 000 $. Son témoignage est clair à l’effet que M. Adams a payé 5 000 $ les 60 actions qui lui furent vendues par l’appelant en juillet 1996.

 

[11]    La déclaration de revenu de 1996 de l’appelant a été produite à la Cour. Cette déclaration montre que l’appelant avait déclaré une perte en capital nette de 5 000 $ pour la vente des actions. La déclaration de revenu de 1997 de l’appelant a également été soumise en preuve. À la ligne 254 de la déclaration, l’appelant demande une déduction pour gains en capital de 25 000 $.

 

[12]    M. Adams, qui a été appelé à témoigner par l’intimée, a affirmé qu’il a acquis 40 actions de l’appelant en juillet 1996 et que, un mois plus tard, il a acheté 10 autres actions de l’appelant pour une somme de 1 $. Son témoignage indique que, à un certain moment en 1996, M. Jerry Doane détenait 100 actions. Après l’acquisition par M. Adams de 10 actions de l’appelant au cours de l’été 1996, M. Adams et M. Doane détenaient chacun 100 actions du capital-actions de SEIL.

 

[13]    Les déclarations de revenus de SEIL pour 1995, 1996 et 1997, produites au ministre en octobre 1999, ont été soumises comme pièces à l’audition du présent appel. M. Adams affirme que SEIL n’a pas fait faillite, mais qu’elle a simplement fermé, probablement en 1999.

 

Analyse

 

[14]    La question en l’espèce est de déterminer si l’appelant a subi une perte de placement au cours d’une année donnée qui lui aurait permis de déduire un montant pour perte déductible au titre d'un placement d’entreprise dans le calcul de son revenu ou de son revenu imposable, selon le cas, selon que la perte a été subie en 1997 ou à une année antérieure ou ultérieure.

 

[15]    Dans la détermination de l’existence d’une perte au titre d’un placement d’entreprise, l’on trouve les ingrédients nécessaires à l’alinéa 39(1)c) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). Voici le libellé des dispositions pertinentes de l’alinéa 39(1)c) :

 

(1) Pour l'application de la présente loi :

 

[...]

 

(c) une perte au titre d'un placement d'entreprise subie par un contribuable, pour une année d'imposition, résultant de la disposition d'un bien quelconque s'entend de l'excédent éventuel de la perte en capital que le contribuable a subie pour l'année résultant d'une disposition, après 1977 :

 

(i)       soit à laquelle le paragraphe 50(1) s'applique,

 

(ii)      soit en faveur d'une personne avec laquelle il n'avait aucun lien de dépendance,

 

d'un bien qui est :

 

(iii)     soit une action du capital-actions d'une société exploitant une petite entreprise,

 

(iv)     soit une créance du contribuable sur une société privée sous contrôle canadien (sauf une créance, si le contribuable est une société, sur une société avec laquelle il a un lien de dépendance) qui est :

 

   (A) une société exploitant une petite entreprise,

 

   (B) un failli, au sens du paragraphe 128(3), qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où il est devenu un failli pour la dernière fois,

 

   (C) une personne morale visée à l'article 6 de La loi sur les liquidations qui était insolvable, au sens de cette loi, et qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où une ordonnance de mise en liquidation a été rendue à son égard aux termes de cette loi.

 

[16]    Il convient également de rappeler l’alinéa 38c) de la Loi, lequel définit la portion d’une perte au titre d’un placement d’entreprise qui constitue une perte déductible au titre d’un placement d’entreprise aux fins, notamment, des articles 3 et 111 de la Loi. L’alinéa 38c) de la Loi se lisait comme suit lors de l’année pertinente :

 

Pour l'application de la présente loi :

 

[...]

 

(c) la perte déductible au titre d'un placement d'entreprise d'un contribuable, pour une année d'imposition, résultant de la disposition d'un bien est égale aux 3/4 de la perte au titre d'un placement d'entreprise que ce contribuable a subie, pour l'année, à la disposition du bien.

 

[17]    Le sous-alinéa 39(1)c)(i) renvoie expressément au paragraphe 50(1) de la Loi, lequel complète donc les dispositions de l’alinéa 39(1)c). Nous reproduisons ici le paragraphe 50(1) :

 

(1) Pour l'application de la présente sous-section, lorsque, selon le cas :

 

a)         un contribuable établit qu'une créance qui lui est due à la fin d'une année d'imposition (autre qu'une créance qui lui serait due du fait de la disposition d'un bien à usage personnel) s'est révélée être au cours de l'année une créance irrécouvrable;

 

b)         une action du capital-actions d'une société (autre qu'une action reçue par un contribuable en contrepartie de la disposition d'un bien à usage personnel) appartient au contribuable à la fin d'une année d'imposition et :

 

(i)      soit la société est devenue au cours de l'année un failli au sens du paragraphe 128(3),

 

(ii)     soit elle est une personne morale visée à l'article 6 de la Loi sur les liquidations, insolvable au sens de cette loi et au sujet de laquelle une ordonnance de mise en liquidation en vertu de cette loi a été rendue au cours de l'année,

 

(iii)    soit les conditions suivantes sont réunies à la fin de l'année :

 

(A) la société est insolvable,

 

(B)  ni la société ni une société qu'elle contrôle n'exploite d'entreprise,

 

(C) la juste valeur marchande de l'action est nulle,

 

(D) il est raisonnable de s'attendre à ce que la société soit dissoute ou liquidée et ne commence pas à exploiter une entreprise,

 

le contribuable est réputé avoir disposé de la créance ou de l'action à la fin de l'année pour un produit nul et l'avoir acquise de nouveau immédiatement après la fin de l'année à un coût nul, à condition qu'il fasse un choix, dans sa déclaration de revenu pour l'année, pour que le présent paragraphe s'applique à la créance ou à l'action.

 

[18]    Tout d’abord, avant de commenter la preuve présentée, je voudrais dire que j’ai été impressionné par la franchise et la sincérité de l’appelant. Son témoignage est crédible et j’accepte la preuve qu’il a présentée.

 

[19]    Premièrement, je n'ai pas à considérer les opérations liées à la disposition des actions du capital-actions de SEIL par l’appelant en 1996, car ces opérations n’ont pas donné lieu à une perte, puisque l’appelant a,  en une opération, disposé de 40 actions en faveur de M. Adams pour une somme de 5 000 $, alors qu’il avait acquis lesdites actions pour une somme de 1 $; dans la deuxième opération avec M. Adams, il a transféré 10 actions à celui-ci sans réaliser un gain ou un profit. La preuve n’est pas concluante quant aux conditions de la disposition des actions du capital-actions de SEIL acquises par M. Jerry Doane.

 

[20]    Une perte au titre d’un placement d’entreprise ne peut se produire eu égard aux faits de l’espèce que si elle résulte de la disposition d’un bien qui soit une créance de l’appelant sur SEIL, pour paraphraser l’alinéa 39(1)c) de la Loi.

 

[21]    L’alinéa 39(1)c) de la Loi couvre deux types de dispositions. Le premier type de disposition est celui mentionné au sous-alinéa 39(1)c)(i) de la Loi, lequel renvoie au paragraphe 50(1) de la Loi, et le deuxième est mentionné au sous-alinéa 39(1)c)(ii). Les deux dispositions s’appliquent à deux catégories de biens, une créance sur une catégorie particulière de société privée sous contrôle canadien et une action du capital-actions d’une société exploitant une petite entreprise.

 

[22]    Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de se pencher sur le deuxième type de disposition prévu au sous-alinéa 39(1)c)(ii) de la Loi, puisqu’il exige une disposition réelle d’une créance, ce qui ne s’est pas produit en l’espèce.

 

[23]    J’étudierai donc la nature de la créance prévue au sous-alinéa 39(1)c)(i), décrite plus précisément au paragraphe 50(1) de la Loi. Le paragraphe 50(1) de la Loi porte qu’une créance due à un contribuable à la fin d’une année d’imposition doit être établie par le contribuable comme s’étant révélée une créance irrécouvrable au cours de l’année. Selon moi, la preuve de l’appelant indique clairement que la créance due par SEIL à l’appelant découlant des prêts qui lui ont été faits est devenue une créance irrécouvrable en 1996. Dans le cas présent, cette exigence est donc respectée. Incidemment, l’intimée n’a pas allégué que la partie entre parenthèses de l’alinéa 50(1)a) portant sur les créances dues du fait de la disposition d’un bien à usage personnel s’applique à l’espèce.

 

[24]    Il faut ensuite déterminer quel était le montant dû par SEIL à l’appelant à la fin de l’année d’imposition 1996. Je n’ai aucun motif de douter de la preuve de l’appelant qui établit qu’il a prêté des montants importants à SEIL en 1995 et 1996, avant la disposition de ses actions du capital-actions de SEIL. Il a mentionné lors de son témoignage un montant dépassant 30 000 $. L’appelant lui-même a admis qu’il n’était pas en mesure de donner un montant même approximatif du total des prêts qu’il a consentis à SEIL. Il n’a pu non plus produire aucune preuve documentaire au soutien de la créance qui lui était due par SEIL pour la période pertinente. La preuve de l’appelant relative au quantum de la créance due par SEIL à l’appelant à la fin de l’année d’imposition 1996 est donc insatisfaisante.

 

[25]    Après avoir analysé la preuve en profondeur, j’ai noté que, dans la partie du passif du bilan de SEIL (pièce R-4) au 31 décembre 1995, figurait un poste [traduction] « Prêts provenant des actionnaires », et que le montant qui était indiqué à ce poste était de 10 850 $. J’ai également noté que, sur le bilan de SEIL au 31 décembre 1996 (pièce R-5), le même poste montrait un montant de 22 586 $ à titre de [traduction] « Prêts provenant des actionnaires ».

 

[26]    Comme la preuve démontre sans conteste que tout au long de 1995, l’appelant était le seul actionnaire de SEIL, il en découle que SEIL devait à l’appelant au 31 décembre 1995 un montant de 10 850 $. Il y a eu au cours de l’année 1996 trois actionnaires, y compris l’appelant. Le dossier montre que l’appelant a cessé d’être un actionnaire de SEIL à un certain moment de l’été 1996. Les deux autres actionnaires ont peut-être consenti des prêts à SEIL au cours de 1996 après qu’ils soient devenus actionnaires de ladite société. Comme l’appelant n’a pu fournir de preuve directe spécifique sur les prêts qu’il aurait versés à SEIL en 1996, il m’est apparu qu’il pourrait être possible de déterminer le montant des prêts de l’appelant, s’il en a consentis, pour l’année 1996 à l’aide du témoignage des deux autres actionnaires, M. Brad Adams et M. Jerry Doane, ou d’un de ces deux actionnaires, ou encore de la personne qui a rédigé les états financiers de SEIL pour l’année 1996.

 

[27]    Il était donc possible d’obtenir plus de preuves sur les prêts consentis par Messieurs Brad Adams et Jerry Doane à SEIL en 1996. Il convient de remarquer que M. Brad Adams, qui a témoigné à la première étape de l’audition du présent appel, n’a pas été interrogé sur la question du quantum des prêts que lui et M. Jerry Doane auraient pu consentir à SEIL en 1996.

 

[28]    Vu les lacunes dans la preuve soumise, et conformément à l’article 138 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), (lesquelles règles sont souvent appliquées aux appels régis par la procédure informelle lorsque le cas n’est pas couvert par les Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure informelle)), j’ai décidé de rouvrir l’audition pour permettre l’audition d’autres éléments de preuve et d’autres arguments.

 

[29]    À la reprise de l’audition, M. Brad Adams a témoigné qu’il n’avait mis aucun argent dans SEIL en 1996 et a ajouté que, le 15 janvier 1997, il avait prêté 20 000 $ à cette société. M. Adams a également soutenu qu’il ne savait pas si l’autre actionnaire, M. Jerry Doane, avait consenti des prêts à SEIL en 1996, mais à un moment de son témoignage, il a affirmé après la reprise de l’audition qu’il était [traduction] « pas mal certain » qu’il n’avait pas mis d’argent dans SEIL.

 

[30]    Étant donné l’absence de preuve convaincante relativement à la question de savoir si M. Doane a prêté des fonds à SEIL en 1996, je demeure dans l’impossibilité de déterminer le quantum du montant dû à l’appelant par SEIL au 31 décembre 1996. Par conséquent, l’appelant n’a pas réussi à établir le montant de sa perte au titre de placement d’entreprise au 31 décembre 1996.

 

[31]    À cela s’ajoute le fait que l’appelant n’a pas fait le choix exigé par le paragraphe 50(1) de la Loi dans la production de sa déclaration de revenus pour 1996. De plus, l’appelant n’a pas demandé au ministre de proroger le délai pour faire ce choix, comme il aurait pu le faire en vertu du paragraphe 220(3.2) de la Loi. Si l’appelant avait fait une telle demande au ministre, celui-ci aurait été obligé de l’étudier et de prendre une décision. Une telle décision, si elle avait été rendue contre l’appelant, aurait pu faire l’objet d’une révision par la Section de première instance de la Cour fédérale.

 

[32]    Je conclus donc que l’appelant n’a pas établi les éléments nécessaires pour déduire en 1997 un montant pour perte déductible au titre de placement d’entreprise qu’il prétend avoir subie en 1996.

 

[33]    Il ressort de ce qui précède que, si la preuve nécessaire relative au quantum des prêts faits par l’appelant, plus particulièrement en 1996, avait été produite, et que si un choix avait été fait pendant la période prescrite, en vertu du paragraphe 50(1) de la Loi, la créance en question aurait constitué une perte au titre de placement d’entreprise à la fin de 1996, sous réserve des paramètres définis par le paragraphe 50(1) de la Loi.

 

[34]    Par conséquent, les trois quarts de ladite perte au titre d’un placement d’entreprise[1] auraient été déductibles pour l’année d’imposition 1996, comme le prévoit l’alinéa 3d) de la Loi. Le solde de la perte au titre d’un placement d’entreprise qui n’aurait pu être déduit en vertu de l’alinéa 3d) au cours de l’année où elle a été subie serait donc devenu une perte autre qu’une perte en capital pouvant être reportée sur les trois années antérieures et les sept années ultérieures en application du paragraphe 111(1) de la Loi. Je renvoie également à la définition de l’expression « perte autre qu’une perte en capital » du paragraphe 111(8) de la Loi, qui définit clairement que la portion non absorbée des pertes déductibles au titre d’un placement d’entreprise subies au cours d’une année donnée deviennent des pertes autres que des pertes en capital aux fins de report.

 

[35]    Puisque je conclus d'après la preuve soumise que la perte autre qu’une perte en capital n’avait pas été déduite antérieurement, c’est-à-dire en 1995, cette perte autre qu’une perte en capital aurait pu être déduite dans l’année d’imposition 1997, celle qui fait l’objet du présent appel. Le fait que le ministre n’ait déterminé l’existence d’aucune perte lors d’une année donnée n’empêche pas la Cour de contrôler la justesse d’une cotisation pour une autre année si l’un des éléments constitutifs de la cotisation pour ladite autre année concerne la perte en question à des fins de report. En effet, cette question a été analysée et, à mon avis, définitivement réglée par le juge en chef adjoint Bowman dans l’affaire Allcann Wood Suppliers Inc. c. La Reine, C.C.I., no 92-2505(IT)G, 31 mai 1994 ([1994] 2 C.T.C. 2079). Le passage suivant, aux pages 2 et 3 (C.T.C. : aux pages 2080 et 2081) est particulièrement intéressant :

 

... En l'absence d'une détermination exécutoire faite en vertu du paragraphe 152(1.1), un contribuable peut contester le calcul du ministre concernant une perte relative à une année particulière dans un appel portant sur une autre année lorsque le montant du revenu imposable du contribuable est influencé par le montant de la perte pouvant être reportée prospectivement en vertu de l'article 111. En contestant la cotisation portant sur une année pour laquelle de l'impôt est payable au motif que le ministre a incorrectement calculé le montant d'une perte relative à une année antérieure ou subséquente qui peut être déduite en vertu de l'article 111 dans le calcul du revenu imposable du contribuable pour l'année en question dans l'appel, le contribuable demande à la Cour de faire précisément ce que prévoient les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu en matière d'appel : déterminer l'exactitude d'une cotisation d'impôt en examinant la justesse d'un ou de plusieurs de ses éléments constituants, soit en l'espèce le montant d'une perte d'une autre année pouvant être déduite. La Cour n'a pas à déterminer la perte en vertu du paragraphe 152(1.1) ni à entendre un appel concernant une cotisation portant qu'aucun impôt n'est payable. Elle doit simplement établir l'exactitude de la cotisation portant sur l'année en question dans l'appel dont elle est saisie.

 

 

[36]    Vu ce qui précède, je suis dans l’obligation de rejeter l’appel à l'égard de la cotisation du ministre pour l’année d’imposition 1997.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2002.

 

 

« Alban Garon »

J.C.C.C.I.

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour de juillet 2004.

 

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur

 



[1] La portion restante de la perte au titre de placement d’entreprise, soit un quart de ladite perte, aurait été traitée normalement comme une perte en capital, dont les trois quarts auraient été une perte en capital déductible. Le montant résultant fait partie des pertes en capital déductibles du contribuable pour l’année prévue à l’alinéa 3b)(ii) de la Loi qui doivent être soustraites des gains en capital imposables du contribuable et du gain net imposable du contribuable pour l’année provenant des dispositions des types de biens y mentionnés, comme le prévoit l’alinéa 3b) de la Loi.

 

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