Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Date: 20021121

Dossier: 2000-4296(IT)I

 

 

ENTRE :

LA SUCCESSION DE FRANCES GELTMAN,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

____________________________________________________________________

 

Représentant de l'appelante : Harold Geltman

Avocate de l'intimée : Me Susan Shaughnessy

____________________________________________________________________

 

Motifs Du Jugement

 

(Rendus oralement à l'audience à

Montréal (Québec), le 3 septembre 2002)

 

Le juge McArthur

 

[1]     La question soulevée par l’appelante est de savoir si l’Agence des douanes et du revenu du Canada a le droit d’appliquer le paragraphe 70(5) de la Loi de l’impôt sur le revenu dans le calcul de l’impôt à payer par la succession de sa mère. Le paragraphe 70(5) crée une fiction selon laquelle une disposition est réputée avoir eu lieu immédiatement avant le décès.

 

[2]     En appliquant ce paragraphe dans le cas de l’appelante, le ministre du Revenu national a considéré que Frances Geltman a disposé de son fonds enregistré de revenu de retraite avant son décès, ajoutant ainsi la somme de 65 567,39 $ à son revenu. L’appelante a soulevé les questions à trancher dans sa réplique à la réponse à l’avis d’appel comme suit :

 

          [TRADUCTION]

 

a)         l’Agence des douanes et du revenu du Canada a-t-elle le droit de déterminer l’état de Frances Meltzer Geltman comme étant un état : DE VIE OU DE MORT?

 

b)         l’Agence des douanes et du revenu du Canada a-t-elle le droit de rejeter les trois documents suivants et de commuter un ÉTAT DE DÉCÈS EN UN ÉTAT DE VIE?

a)         ATTESTATION DE DÉCÈS PAR LE MÉDECIN D'URGENCES-SANTÉ datée du 5 janvier 1999;

b)         déclaration de décès datée du 5 janvier 1999;

c)         copie d’un certificat de décès daté du 18 mars 1999

 

c)         l’Agence des douanes et du revenu du Canada a-t-elle le droit de rejeter la DÉCLARATION D’URGENCES SANTÉ SUR LA CAUSE MÉDICALE DU DÉCÈS datée du 9 février 1999?

 

d)         l’Agence des douanes et du revenu du Canada a-t-elle le droit de déterminer dans son avis que :

« si les versements ne sont pas perçus par le conjoint, nous considérons que la défunte a reçu, immédiatement avant son décès, un montant égal à la juste valeur marchande du régime à la date du décès. »

« page 10 – Agence des douanes et du revenu du Canada – Déclarations de revenus de personnes décédées… 1999 »

« Sous réserve d’une nouvelle enquête : notamment les articles 3 et 70 ainsi que le paragraphe 146.3(6) de la Loi de l’impôt sur le revenu L.R.C. 1985 ch.1 (5e suppl.) dans sa forme modifiée et applicable à l’année d’imposition en cause. »

Réponse de l'intimée à l’avis d’appel no 13, page 4.

 

L’appelante soutient que l’intimée n’a AUCUN DROIT de prendre une telle décision :

 

ASSIMILER « IMMÉDIATEMENT AVANT LE DÉCÈS » À « À LA DATE DU DÉCÈS »

 

Si on accordait le même droit à chaque organisme public ou ministère, on se retrouverait dans un chaos juridique.

Si la même règle de droit s’appliquait aux brevets génétiques ainsi qu’à la recherche génétique actuelle ou future dans les secteurs fonctionnels public et privé, il s’ensuivrait des EXEMPTIONS ET DES EXCEPTIONS CHAOTIQUES ET LA PROCÉDURE QUI ASSIMILERAIT LA MORT À LA VIE n’est pas une sorte de jeu à jouer aux fins des points d’impôt, des taxes OU TOUTES SORTES DE GAINS FRAUDULEUX.

 

[3]     Frances Geltman est décédée à Montréal, le 5 janvier 1999. Une déclaration de revenus lui a été préparée par un cabinet de comptables agréés qui a déterminé que le montant à payer s’élevait à 14 876,54 $. Son fils, Harold Geltman, était le seul héritier et l’unique liquidateur de la succession et il n’est pas d’accord avec la conclusion du comptable, bien qu’il ait signé la déclaration de revenus. À la fin de l’audience, j’ai rendu un jugement oral après avoir déterminé que la position de M. Geltman était peut-être équitable dans ces circonstances. Je ne peux modifier la loi telle qu’elle figure au paragraphe 70(5). J’ai ajouté que l’appel était rejeté pour les motifs donnés par l’avocat de l’intimée et énoncés par le juge Gibson de la Cour d’appel fédérale dans le dossier La Reine c. La succession Mastronardi, [1978] 1 C.F. 399 (77 DTC 5217).

 

[4]     Je vais maintenant m’étendre davantage sur ces motifs.

 

[5]     Le paragraphe 70(5) de la Loi se lit en partie comme suit :

 

70(5)    En cas de décès d'un contribuable au cours d'une année d'imposition, les présomptions suivantes s'appliquent:

 

a)   le contribuable est réputé avoir disposé, immédiatement avant son décès, de chacune de ses immobilisations et avoir reçu de leur disposition un produit égal à leur juste valeur marchande immédiatement avant son décès;

 

Dans le cas de l’appelante, il y a eu une disposition présumée d’une action de La Maison Oscar résultant en un gain en capital de 2 215,91 $ et la somme plus grande de 65 567,39 $ désignée comme pensions de retraite. Ces montants ont été légèrement réajustés.

 

[6]     En vertu du paragraphe 146.3(6) de la Loi, le montant à payer et reçu à la suite du désenregistrement du fonds enregistré de revenu de retraite a été inclus dans le revenu de l’appelante.

 

[7]     Dans le dossier RMM Canadian Enterprises Inc. c. Sa Majesté la Reine, C.C.I., n° 94‑1732(IT)G (97 DTC 302), le juge Bowman a fait les commentaires suivants :

 

Même le législateur qui, sous réserve de restrictions constitutionnelles, est suprême et a le pouvoir de présumer qu'une chose en est une autre, ne peut pas transformer une question de droit en une question de fait.

 

Aucune disposition réelle n’a été faite par Mme Geltman ou sa succession mais, elle est réputée, par la loi, avoir disposé de ses biens.

 

[8]     Dans le dossier Mastronardi, la Cour fédérale a examiné le paragraphe 70(5) et a déterminé que le sens clair d'un texte législatif dans le contexte d’une série de faits ne doit pas être ignoré pour prévenir, par le biais de faits entièrement différents, une injustice qui pourrait éventuellement être commise.

 

[9]     J’estime que la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national pour l’année d’imposition 1999 est juste relativement à la succession de Frances Geltman et ce, conformément au sens clair des paragraphes 70(5) et 146.3(6) de la Loi. L'appel est rejeté.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de novembre 2001.

 

 

 

« C. H. McArthur »

J.C.C.I.

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de septembre 2004.

 

 

 

 

Sophie Debbané, réviseure

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.