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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

1999-3572(GST)G

ENTRE :

SASKATCHEWAN WHEAT POOL,

appelant,

 

 et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appel entendu les 8, 9 et 10 janvier 2002 à Regina (Saskatchewan), par

l'honorable juge E. A. Bowie

 

Comparutions

Avocat de l'appelant :                Me Brian Scherman

Représentantes de l’intimée :     Me Elaine Lee et

                                                Crystal McLeod (stagiaire)

 

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’égard de la nouvelle cotisation de taxe établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise, visée par un avis daté du 7 mai 1999 et portant le numéro 09ES114483308, pour la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1993, est accueilli avec dépens, et la nouvelle cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, pour le motif que l’appelant ne pouvait percevoir et verser la TPS qu’à l’égard de la partie des primes recouvrées par lui pour la Hartford Fire Insurance Company qu’il conservait à titre de rémunération pour les services qu’il prodiguait à Hartford.

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de décembre 2002.

 

 

« E. A. Bowie »

 

J.C.C.I.

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 17e jour de novembre 2004.

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur


 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Date: 20021219

Dossier: 1999-3572(GST)G

ENTRE :

SASKATCHEWAN WHEAT POOL,

appelant,

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Bowie, C.C.I.

 

[1]     Cet appel vise une cotisation de la taxe sur les produits et services (TPS) établie en vertu de la Partie IX de la Loi sur la taxe d’accise (la Loi). La cotisation concerne la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1993. De façon générale, il s’agit de savoir si certains versements effectués à la Hartford Fire Insurance Company en contrepartie d’une protection d’assurance tombent sous le coup de la TPS. (Je désignerai cette compagnie ainsi que les autres membres du groupe Hartford sous le terme de « Hartford ».) Le ministre du Revenu national a établi une cotisation à l’égard de l’appelant en vertu de l’article 178 de la Loi en appliquant ledit article de telle sorte que ces montants deviennent assujettis à la taxe. L’article 178 était en vigueur pendant la période visée par la cotisation contestée par l’appelant. Il a été abrogé le 24 avril 1996. Il était libellé comme suit :

 

178      Pour l'application de la présente partie, la somme que l'acquéreur d'un service rembourse au fournisseur pour les frais que celui-ci a engagés lors de la fourniture, sauf dans la mesure où il engage ces frais à titre de mandataire de l'acquéreur, est réputée faire partie de la contrepartie de la fourniture.

 

Le gouvernement a justifié l’abrogation de cet article en disant qu’il ne faisait qu’exprimer une position qui existait en common law, et qu’il était donc redondant.

 

[2]     L’appelant soutient avoir recouvré à titre de mandataire de Hartford les montants auprès des personnes effectivement assurées et que les versements avaient été effectués par les assurés en contrepartie de la fourniture par Hartford d’un service financier aux assurés[1]. Au procès, l’avocat de l’appelant a concédé, avec raison, qu’il devait recouvrer et verser la TPS sur un pourcentage des primes conservées par lui conformément à son entente avec Hartford en contrepartie du recouvrement de ces primes et, peut-être, d’autres services fournis par l’appelant à l’égard du règlement des sinistres.

 

Faits

 

[3]     L’appelant exploite plusieurs parcs à bestiaux dans la province de la Saskatchewan, dans lesquels du bétail et d’autres bestiaux sont vendus aux enchères. Ce bétail est transporté en camion depuis les installations des éleveurs jusqu’aux parcs. À leur arrivée, les bestiaux sont menés à des enclos, puis à l’aire des enchères, où ils sont vendus au plus offrant. Une fois vendus, ils quittent l’aire, puis restent un court moment dans les enclos avant d’être embarqués dans des camions qui les emportent vers leur ultime destination. Celle-ci peut être une ferme, un parc d’engraissement ou un abattoir, situé en Saskatchewan, ailleurs au Canada ou aux États-Unis. Le transport à la sortie peut se faire par camion, ou, dans le cas de plus longues distances, par train. De toute évidence, le mouvement des bestiaux dans les camions et leur entassement dans les enclos présentent un risque élevé de blessures ou de mort causées par toutes sortes de traumatismes. Avant 1972, les camionneurs et les éleveurs souscrivaient l’assurance contre le risque de blessures ou de mort du bétail en transit. Hartford a toujours été un chef de file de ce type d’assurance dans l’Ouest du Canada, offrant des polices couvrant les éleveurs et les acquéreurs individuellement contre les pertes potentielles. En 1972, Hartford a élaboré ce qui a été décrit dans la preuve comme une police d’assurance globale aux termes de laquelle les pertes causées par les blessures ou la mort du bétail étaient couvertes, aussi bien pendant le transport jusqu’au parc que pendant le séjour au parc avant la vente. Hartford indemnisait également les assurés des pertes encourues après la vente, soit au parc, soit pendant le transport vers l’ultime destination des bestiaux. Je reparlerai des modalités de ces polices en donnant plus de précisions. Malgré certaines modifications occasionnelles de la couverture par le biais d’avenants établis au fil des ans, ces polices sont restées en vigueur dans ce qui reste essentiellement leur présentation originale, jusqu’au 1er avril 1993, date à laquelle elles ont été remplacées par la police no 87 LST 620002.

 

[4]     J’ai entendu la preuve présentée par Clarence Kuse, qui était le directeur principal de Hartford en Saskatchewan entre 1963 et 1995, date à laquelle il a pris sa retraite et a été remplacé par James Blahum. Ils ont tous deux témoigné au sujet de la formation, de l’historique et de l’administration des rapports entre Hartford, le Saskatchewan Wheat Pool et les éleveurs, camionneurs et acquéreurs, de 1963 à ce jour. Leurs témoignages concordaient les uns avec les autres, et il s’agit de témoins désintéressés. J’accepte entièrement leurs dires. J’ai également entendu la déposition de Morton Allewell, qui a pris sa retraite en 1992 après 26 ans de carrière à la division du bétail de l’appelant. Peu avant son départ, il occupait le poste de chef de l’exploitation. L’autre témoin pour l’appelant était Stewart Stone, qui est actuellement directeur général de Heartland Livestock Services, société qui a succédé à la division du bétail du Saskatchewan Wheat Pool. En 1993, il est devenu directeur du marketing et des finances. Tous ces témoins connaissaient les activités de l’appelant pendant la période visée. Leurs témoignages concordaient les uns avec les autres et n’ont pas été ébranlés par le contre-interrogatoire. Je conviens que leurs dépositions contiennent une description exacte d’une relation d’affaires de longue durée et d’importance cruciale entre l’appelant, les éleveurs et les acquéreurs de bétail d’une part, et Hartford d’autre part, au cours de la période allant de 1960 à 1993.

 

Activités de l’appelant

 

[5]     L’appelant offre à ses clients un certain nombre de services, notamment la vente de bétail dans l’aire d’enchères, l’acquisition de bestiaux au nom d’autrui à titre d’acquéreur sur ordre d’achat, l’organisation du transport à la sortie des bestiaux acquis au nom des acheteurs, le marquage au fer, l’inoculation et la pose d’étiquettes d’oreilles, ainsi que la négociation des ventes de bétail directement aux abattoirs au nom des éleveurs. L’appelant fait également office d’organisme de financement pour les éleveurs, conformément à un programme dit de financement de l’alimentation, et il fait l’acquisition de bétail pour son propre compte afin de soutenir le marché. En outre, il possède et élève des chevaux qu’il vend lui-même sur le marché japonais.

 

Les polices d’assurance

 

[6]     Hartford œuvre depuis plusieurs années dans le domaine de l’assurance; elle est le principal assureur de bétail dans l’Ouest du Canada depuis une bonne cinquantaine d’années. Avant 1972, les éleveurs devaient assurer leur bétail directement auprès de Hartford, chaque éleveur agissant pour son propre compte afin de souscrire une police protégeant ses cargaisons. Le bétail était protégé pendant le transport en camion jusqu’au lieu de vente. D’après M. Kuse, en 1972 il a mis au point ce qu’il appelle la police « spéciale unique », soit une police globale, afin de couvrir le bétail pendant le transport et dans le parc à bestiaux avant la vente, en vertu d’une police unique. Cette police a été établie à la division du bétail du Saskatchewan Wheat Pool et portait le numéro 9236 attribué par Hartford. La police prévoyait que les primes seraient versées par les expéditeurs en fonction du nombre de têtes de bétail expédiées et de la distance parcourue jusqu’au parc à bestiaux. Les primes étaient facturées aux éleveurs par l’appelant sous forme de plusieurs déductions opérées par lui à même le prix de vente du bétail de l’éleveur. Un avis de règlement normal, à la suite de la vente de têtes de bétail, indiquait le produit de la vente pour le bétail expédié, moins la commission de vente de l’appelant, les frais perçus pour d’autres services, tels que l’inoculation, ayant pu être fournis, et moins les frais d’assurance applicables. En outre, Hartford a établi la police numéro 9237, une police globale conçue pour couvrir les bestiaux après la vente, du moment où le titre était transféré à l’acquéreur, pour la période où les bestiaux demeuraient encore dans le parc de l’appelant, et pendant le transport de ce point-là jusqu’aux installations de l’acquéreur. Ici encore, la prime était fonction du nombre de bêtes assurées et de la distance parcourue. Les risques couverts par ces polices étaient les risques de mort de bestiaux ou de blessures subies résultant de toute cause sauf une condition préexistante. La police prévoyait également que la prime d’assurance était perçue par l’appelant, qui facturait chaque acquéreur par le biais de la facture correspondant au prix d’achat de la tête de bétail acquise. L’appelant versait alors les primes à Hartford, conservant le pourcentage convenu à titre de rémunération en contrepartie de la perception de la prime.

 


Question en litige

 

[7]     L’intimée soutient que le véritable assuré en vertu des polices d’assurance établies par Hartford est l’appelant, et non les éleveurs et acquéreurs de bétail, et que les montants facturés par l’appelant à ces éleveurs et acquéreurs pour l’assurance étaient en fait des frais supplémentaires correspondant à ses services d’enchères, servant à répercuter sur les éleveurs et les acquéreurs ses propres coûts d’assurance. Si les frais étaient en fait une contrepartie pour les services d’enchères, il s’agirait d’une fourniture taxable. Pour les motifs suivants, j’ai conclu que les assurés en vertu des polices étaient les éleveurs et les acquéreurs de bétail, et que les montants qui leur étaient facturés étaient en fait des primes versées par eux à Hartford et recouvrées pour Hartford par l’appelant à titre de mandataire à cette fin.

 

Qui est l’assuré?

 

[8]     Tous les témoins ont convenu qu’il était souhaitable que le plus grand nombre d’éleveurs et d’acquéreurs possible soient protégés par l’assurance Hartford. Aucune démarche n’était requise de la part des éleveurs ou des acquéreurs pour obtenir la garantie : tous les bestiaux étaient considérés comme couverts, et les primes étaient facturées aux éleveurs et aux acquéreurs, sauf s’ils faisaient des démarches pour décliner l’assurance. Il arrivait parfois qu’un acheteur refuse l’assurance parce qu’il avait déjà souscrit une assurance ailleurs par le biais de sa propre police couvrant tout le bétail acheté lors des enchères de bétail organisées par l’appelant ou par d’autres. Un tel acquéreur n’aurait alors aucune prime à verser. Les éleveurs pouvaient également refuser la couverture, mais rares étaient ceux qui le faisaient. Aucune prime n’était facturée à ceux qui effectuaient les démarches nécessaires pour refuser l’assurance. Il ne fait aucun doute que l’appelant et Hartford préféraient vraiment voir les acquéreurs autant que les expéditeurs couverts contre le risque de blessure ou de mort du bétail. Pour Hartford, il s’agissait tout simplement d’une question de volume des opérations et donc de bénéfices. Pour l’appelant, il y avait certains avantages financiers directs, car il gagnait une partie des primes d’assurance qu’il percevait. Je suis certain qu’il existait également des avantages indirects pour l’appelant, parce que ses rapports avec les éleveurs et avec les acquéreurs pâtiraient inévitablement s’ils subissaient des pertes non assurées pour cause de blessure ou de mort de bestiaux en transit vers les parcs ou s’y trouvant en instance de vente et d’expédition.

 

[9]     L’avocat de l’intimée a tâché d’établir, lors du contre-interrogatoire des témoins, que le véritable assuré aux termes de ces polices était l’appelant, et que l’appelant ne faisait que répercuter sur les éleveurs et les acquéreurs le coût de souscrire une assurance pour lui-même. Ni la preuve orale, ni les documents ne viennent appuyer cette théorie. Le risque encouru par l’appelant était minime, car les modalités de vente et d’achat des bestiaux dégageaient la responsabilité de l’appelant, sauf en cas de négligence expresse de la part de ses employés. L’avantage accordé à l’appelant était certainement accru lorsque Hartford a établi un avenant le protégeant contre les réclamations subrogées pouvant être portées contre lui par Hartford. Toutefois, je suis convaincu par la preuve que ce n’était qu’un avantage marginal, de valeur minime et non précisée en faveur de l’appelant.

 

Règlement des sinistres

 

[10]    Si on décelait une blessure à une bête au moment du déchargement d’une cargaison à l’arrivée, ou dans le parc à bestiaux après le déchargement mais avant la vente, le conducteur qui avait livré la cargaison en informait les employés de l’appelant et ces derniers dressaient un rapport. L’appelant envoyait généralement cette demande au bureau local de Hartford en indiquant la nature de la blessure et les circonstances, et évaluait le montant du sinistre. Une bête gravement blessée était normalement vendue à un abattoir en vue de la récupération. Si Hartford réglait la valeur totale de la bête, elle avait droit au montant de la récupération et était payée soit par l’abattoir, soit par l’appelant si celui-ci avait perçu l’argent de l’abattoir. Si la bête était vendable, elle était vendue, et l’expéditeur recevait le produit de la vente de la part de l’appelant. Hartford réglait alors à l’expéditeur la différence entre la valeur marchande de la bête saine et le prix de vente réel de la bête blessée.

 

[11]    Les sinistres survenant après la vente étaient réglés différemment. Même si la police no 9237 couvrait les pertes dans le parc à bestiaux après la vente mais avant l’expédition, ainsi que les pertes pendant le transport à la sortie, Hartford attribuait un numéro de police distinct, pour des raisons administratives, pour couvrir les pertes survenues dans le parc à bestiaux de l’appelante avant l’expédition. D’après la preuve présentée, aucune police n’a jamais existé sous ce numéro distinct; il s’agissait d’une procédure établie par Hartford pour assurer le suivi des sinistres survenus entre la vente et l’expédition des bestiaux, à ses propres fins de souscription. Le regroupement de ces sinistres à des fins de souscription n’a aucun rapport avec les questions en litige.

 

[12]    Les sinistres se produisant après la vente étaient signalés à Hartford plus ou moins de la même façon que ceux qui survenaient avant la vente. Si l’acquéreur d’une bête qui était blessée ou qui mourrait après la vente avait déjà été facturé pour cette bête, Hartford versait le montant du sinistre directement à l’acquéreur. Si l’acquéreur n’avait pas encore été facturé avant la blessure, l’appelant, au lieu de facturer l’acquéreur, facturait Hartford pour la valeur de la bête. Dans ce cas, l’acquéreur ne recevait aucune facture et ne réglait pas le prix d’achat de la bête. Hartford payait la valeur de la bête à l’appelant, et l’appelant pour sa part payait ce montant à l’éleveur de la façon habituelle. D’après ce scénario, le montant de toute récupération obtenu pour la bête revenait à Hartford. Si une bête, après la vente, s’avérait légèrement blessée mais encore vendable, elle était retournée à l’aire d’enchères. À cause de sa blessure, sa deuxième vente se faisait à un prix moindre. Hartford versait alors à l’éleveur la différence entre le prix de vente d’origine et le deuxième prix de vente. Dans leur témoignage, M. Kuse et M. Blahum n’ont laissé aucun doute planer sur le fait que Hartford, à titre d’assureur, préférait grandement verser les indemnités directement au propriétaire de la bête morte ou blessée au lieu de les remettre indirectement par le biais de l’appelant. Néanmoins, il est arrivé à l’appelant, à l’occasion, de recevoir les indemnités d’assurance en fiducie pour un éleveur.

 

Les polices

 

[13]    Les polices d’assurance d’origine avaient été souscrites par Hartford le 14 février 1972, et l’assuré nommé sur le recto de celles-ci était :

 

          [TRADUCTION]

 

Saskatchewan Wheat Pool

Division du bétail

Regina (Saskatchewan)

 

ci-après dénommé « le camionneur » pour le compte des propriétaires, ci-après dénommé « propriétaire » ou « propriétaires » du bétail transporté selon les modalités des présentes […].

 

La police no 9236 contenait un avenant libellé comme suit :

 


[TRADUCTION]

 

La police visée par cet avenant est modifiée et limitée afin de garantir la totalité du bétail dans lequel la Division du bétail du Saskatchewan Wheat Pool détient un intérêt pendant son transport depuis le point de chargement par camion dûment équipé pour le transport du bétail jusqu’à un parc à bestiaux de la Division du bétail du Saskatchewan Wheat Pool ou à une agence de vente indiquée ci-dessous : […]

 

Il est important que le Saskatchewan Wheat Pool soit décrit comme l’assuré « pour le compte des propriétaires du bétail transporté […] ». La référence au bétail dans lequel le Saskatchewan Wheat Pool détient un intérêt doit être considérée comme visant les éleveurs et les acquéreurs, car ils sont les seuls à avoir un intérêt à l’égard du bétail avant, pendant ou après la vente, sauf dans le cas inhabituel où l’appelant est un acquéreur pour son propre compte. À la suite de cela figure la liste des dix installations de l’appelant. La police contient ensuite les dispositions suivantes :

 

          [TRADUCTION]

 

La présente police assure contre les sinistres liés à la mort ou à l’infirmité effective causés par les périls associés au transport […] de cargaisons de bétail en transit dans des camions automobiles, des remorques ou des semi-remorques jusqu’à leur déchargement à un parc à bestiaux de la Division du bétail du Saskatchewan Wheat Pool ou à une des agences de ventes indiquées précédemment.

 

Les autres dispositions pertinentes de l’avenant se lisent comme suit :

 

[TRADUCTION]

 

Il est convenu qu’après le déchargement, la police continue d’assurer contre les pertes causées par l’infirmité ou la mort accidentelles pendant que le bétail transite par les allées, enclos, hangars et granges dans les installations appartenant à l’assuré ou louées par lui, ou jusqu’à ce que les bestiaux soient vendus, ou pour une période de 48 heures, en prenant le premier de ces événements à survenir, sauf qu’il n’existe aucune responsabilité en vertu de la police pour les pertes causées par le feu, la foudre, les tempêtes de vent, les tornades ou les cyclones après que le bétail assuré aux présentes a été déchargé des camions à la destination indiquée ci-dessous.

 

2.            Chaque fois que les mots « le camionneur », le « propriétaire » ou les « propriétaires » apparaissent dans les modalités écrites de la police à laquelle le présent avenant est rattaché, ils seront remplacés par les mots « l’assuré », et toute modalité de la partie imprimée de la police qui se trouve en contradiction avec les modalités de l’avenant restera sans effet.

 

3.            […]

 

4.            Le paragraphe des modalités imprimées de la police qui commence par les mots « Cette police assure également contre les pertes causées par le vol, etc. » est modifié par les présentes comme suit :

 

« Cette police assure également contre les pertes causées par les détournements de chargements entiers, lorsque le bétail est subtilisé par la prise de possession illégale du moyen de transport dans lequel le bétail est transporté ainsi que du bétail lui-même, mais elle n’assure pas les sinistres causés par le vol ou le détournement de bétail par le camionneur engagé par l'assuré ou par quiconque est employé par le camionneur engagé par l’assuré pour transporter le bétail ou représente le camionneur ou l’assuré en quelque capacité que ce soit. La police n’assure ni ne peut être interprétée comme assurant contre le vol d’une partie du bétail ou contre les pertes causées par des bestiaux manquants, sauf si tout le bétail en transit est volé ou détourné comme indiqué ci-dessus. Les bestiaux manquants ne peuvent être considérés comme des bestiaux morts sur le site d’un accident, d’une collision ou d’un capotage. »

 

5.            Il est explicitement entendu et convenu que l’assuré enverra tous les mois à la compagnie, à son bureau du parc à bestiaux public de Saskatoon, en Saskatchewan, un relevé dûment vérifié par écrit indiquant le nombre de têtes de bétail traitées et qu’il versera la prime correspondante aux taux établis ci-dessous : […]

 

[14]    La police no 9237 a également été établie le 14 février 1972, et elle couvrait le bétail après la vente. L’assuré y est décrit exactement de la même façon que dans la police no 9236. On y lit que la garantie commence au moment de la pesée du bétail assuré au parc à bestiaux et qu’elle se poursuit jusqu’à son déchargement à la destination. Elle établit une prime allant de 0,03 $ par tête de nourrain à 1,00 $ par tête de verrat de plus 350 livres pour assurer le bétail lorsqu’il se trouve dans le parc à bestiaux de l’appelant, ainsi qu’une prime calculée d’après la distance parcourue jusqu’à la destination dans le cas de bestiaux expédiés par camion depuis le parc. À part cela, les modalités des deux polices étaient essentiellement identiques.

 

[15]    Sans doute existe-t-il des disparités dans le libellé des polices originales de 1972. Toutefois, en donnant une interprétation raisonnable des polices dans leur ensemble, il est impossible d’éviter la conclusion qu’il s’agissait pour Hartford d’assurer les propriétaires du bétail selon les besoins contre les sinistres causés par la mort, les blessures et les détournements, entre autres. Certains avenants établis ultérieurement contiennent des avantages pour l’appelant. Cela comprend l’avenant qui le protège contre les actions subrogées, ainsi qu’un avenant pour le protéger contre le vol le bétail dont les soins et la garde étaient confiés à l’appelant. Dans le premier et le deuxième cas, la responsabilité potentielle de l’appelant est minimisée par les modalités de ses contrats avec les vendeurs et les acquéreurs, ce qui fait que le risque couvert par l’assurance n’était pas important. Par ailleurs, la preuve ne montre pas d’intention d’assurer l’appelant, contrairement aux éleveurs et aux acquéreurs.

 

[16]    Les problèmes liés au libellé de la police n’ont pas été éliminés, mais en fait exacerbés, par le libellé de la police réétablie en 1993. Toutefois, les deux parties et tous les témoins ont adopté la position que les polices établies en 1992 pour remplacer celles de 1972 étaient censées offrir la même garantie que les polices remplacées. Les deux parties conviennent que les mêmes résultats devraient être en vigueur pour la période entre janvier 1991 et le 1er avril 1993, quand la police de remplacement no 87 LST 620002 a été établie, que pendant la période du 1er avril 1993 au 31 décembre 1993. Autrement dit, elles reconnaissent que la nouvelle police ne produisait aucun changement fondamental des rapports. Les facteurs suivants indiquent que l’assuré en vertu de ces polices sont les expéditeurs et acquéreurs des bestiaux, et non l’appelant :

 

(i)      L’assurance a été établie à l’origine en 1972 pour remplacer les polices individuelles assurant les camionneurs;

 

(ii)      L’assurance en question est une assurance de biens, et non une assurance contre la négligence. Par conséquent, l’assuré doit être propriétaire des biens à l’occasion, ou une personne pouvant être tenue responsable de leur perte;

 

(iii)     Si l’appelant s’assurait contre les conséquences de sa négligence, les polices auraient alors un libellé conforme à l’assurance contre la négligence.

 

(iv)     Si l’appelant était l’assuré et qu’il ne faisait que répercuter le coût de l’assurance sur ses clients, comme le soutient la Couronne, le coût de l’assurance serait alors tout simplement inclus dans le prix des services ou, subsidiairement, facturé séparément, mais sans que les expéditeurs et les acquéreurs aient la possibilité de décliner la garantie;

 

(v)     Les témoins s’accordent pour considérer les propriétaires des bestiaux comme les assurés;

 

(vi)     L’appelant n’a, à aucun moment, détenu un titre de propriété à l’égard des bestiaux qui lui étaient envoyés pour la vente. Au plus, il était un preneur à bail à l'occasion, mais sa responsabilité à cet égard est limitée par les modalités de ses contrats avec les expéditeurs et acquéreurs à des actes négligents bien particuliers; et

 

(vii)    Une lettre datée du 26 février 1976 et rédigée par M. Kuse sur le papier à en-tête de Hartford à M. R.L. Harland, chef comptable de la division du bétail de l’appelant, comprenait un résumé en deux pages de la garantie en vertu des polices, lequel montre bien que la police sur le transit d’arrivée par camion était censée garantir les bestiaux du chargement au point d’origine jusqu’au moment de la vente, et que la police de transport de sortie par camion les couvrait depuis leur chargement au parc à bestiaux jusqu’à leur ultime destination.

 

[17]    Il est bien établi que, si des produits ou services sont acquis par l’intermédiaire d’un mandataire entre le vendeur et l’acquéreur, il n’existe qu’une seule opération. Dans le cas présent, l’appelant est un mandataire dans les opérations par lesquelles Hartford vend l’assurance aux éleveurs et aux acquéreurs de bestiaux vendus dans ses installations. Les opérations ne sont pas assujetties à la TPS parce qu’elles ne constituent que la fourniture d’assurance par Hartford à ces éleveurs et acquéreurs. Une des questions oiseuses soulevées dans cette cause était celle de savoir si l’appelant, advenant le cas où il était un mandataire, était le mandataire de l’assuré ou de l’assureur. La réponse à cette question n’a aucune pertinence à l’égard de la cause en litige. La seule chose qui compte, c’est qu’il n’était pas un débiteur. Il est également important de savoir qu’il a offert à Hartford un service relativement à la perception des primes et au règlement des sinistres. Ce service était entièrement distinct de la vente d’assurance. L’appelant, comme je l’ai dit, a admis pendant le procès qu’il était responsable de recouvrer et de verser la taxe sur la partie des primes qu’il retenait à titre de paiement de la part de Hartford pour ces services. Cela n’est pas affecté par le fait que l’appelant a négocié les modalités des polices avec Hartford pour le bénéfice de ses clients. À ce titre, il était un mandataire non rémunéré pour les expéditeurs et les acquéreurs assurés.

 

[18]    L’appel est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que l’appelant était tenu de recouvrer et de verser la TPS seulement à l’égard de la portion des primes perçues par lui pour Hartford qu’il avait retenue à titre de rémunération pour les services rendus à Hartford. L’appelant l’a emporté substantiellement et a donc droit aux dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de décembre 2002.

 

« E. A. Bowie »

J.C.C.I.

 

Traduction certifiée conforme

ce 17e jour de novembre 2004.

 

 

 

Mario Lagacé, réviseur



[1]           La fourniture d’une police d’assurance est équivalente à la fourniture d’un « service financier, une « fourniture exonérée » et donc exclue de la définition d’une « activité commerciale », partant exclue également de la définition d’une « fourniture taxable ». L’article 165 impose la taxe sur l'« acquéreur d’une fourniture taxable […] ».

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