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Date: 20000204

Dossier: 98-1950-GST-I

ENTRE :

ELGIN MILLS LESLIE HOLDINGS LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bowman, C.C.I.

[1]L’appelante interjette appel d’une cotisation établie aux termes de la Loi sur la taxe d’accise pour la période allant du 1er mars 1996 au 28 février 1997. En établissant cette cotisation, le ministre du Revenu national a refusé d'accorder à l’appelante des crédits de taxe sur les intrants (“ CTI ”) de 2 980,95 $.

[2] Dans sa déclaration de TPS pour la période en cause, l’appelante a demandé un remboursement de taxe nette de 3 011,40 $, fondé sur un montant de 42,00 $ correspondant à la TPS perçue et de 3 053,40 $ pour des CTI. Le ministre n’a accordé que 72,45 $ à l’appelante.

[3]L’appelante exploite une entreprise sous la raison sociale “ Cash’n Dash ”. Elle fournit une gamme de services, notamment :

-           des boîtes aux lettres,

-           des services de messagerie,

-           l’escomptage fiscal,

-           l’envoi de mandats,

-           un télécopieur,

-           la vente de billets de loterie

-           des cartes d’abonnement d’autobus

-           des services de tenue de livres

-           la mise à niveau de systèmes informatiques

-           des services de reprographie

-           la vente de télécartes prépayées,

-           du traitement de texte,

-           l’encaissement de chèques,

-           la préparation de déclarations de revenu.

[4] Pendant la période qui nous occupe, le revenu brut de l’appelante s’est élevé à 21 568 $. Après quelques rajustements minimes, qui ne sont pas importants pour le présent appel, l’appelante a finalement inscrit 22 811 $ sur sa déclaration de TPS. Cependant, de ce montant, seulement la somme de 600 $ visait des services taxables (les boîtes aux lettres et le télécopieur). La somme de 42 $ a donc été perçue et versée au receveur général.

[5] Aucun des autres revenus touchés pendant cette période ne visait des services taxables.

[6] Pendant cette période, les commissions touchées pour l’encaissement des chèques représentaient, de loin, la plus grande portion des revenus. Ces commissions variaient de 0,5 p. 100 à 4 p. 100, selon le genre de chèque. Des 22 811 $ déclarés, 18 030 $ provenaient du service d’encaissement de chèques ou s’y rapportaient. M. Sheth, le propriétaire de l’appelante, a déclaré que l’encaissement de chèques représentait 45 p. 100 de son chiffre d’affaires et que les autres services comptaient pour 55 p. 100. Cette répartition était peut-être exacte pour d’autres périodes mais, d’après les chiffres mentionnés précédemment, elle ne l’était certes pas pour la période qui nous occupe.

[7]L’appelante a soutenu que l’encaissement de chèques n’était pas un “ service financier ” au sens de la Loi. Si tel est le cas, il est difficile de voir comment elle pourrait justifier qu’elle n’ait pas demandé la TPS pour toutes les commissions, les frais de transaction et les frais d’identification associés à l’encaissement de chèques.

[8] À mon avis, l’encaissement de chèques contre rétribution ou contre commission est un service financier. Les alinéas a) et d) de la définition d’un “ service financier ” du paragraphe 123(1) de la Loi sont ainsi formulés :

“ service financier ”

a) L’échange, le paiement, l’émission, la réception ou le transfert d’argent, réalisé au moyen d’un échange de monnaie, d’opération de crédit ou de débit d’un compte ou autrement ;

[...]

d) l’émission, l’octroi, l’attribution, l’acceptation, l’endossement, le renouvellement, le traitement, la modification, le transfert de propriété ou le remboursement d’un effet financier;

[9] M. Sheth a signalé un certain nombre de différences entre son entreprise et une banque. Il ne fait pas de doute que les différences sont nombreuses, mais cela ne veut pas forcément dire que l’encaissement de chèques n’est pas un service financier.

[10] L’avocate de l’intimée a soutenu que l’encaissement de chèques relevait de l’alinéa a), au motif que la définition du mot “ argent ” comprend “ [...] la monnaie, les chèques, les billets à ordre [...] ”. On pourrait soutenir que l’encaissement de chèques relève de l’alinéa d), également au motif qu’un chèque est un effet financier parce qu’il est un “ titre de créance ” selon la définition de l’expression “ effet financier ”. Un “ titre de créance ” est défini, en partie, comme le “ droit de se faire payer de l’argent [...] ”.

[11] En tant que service financier, l’encaissement de chèques est visé par la partie VII de l’annexe V et constitue une fourniture exonérée au sens de l’article 123 de la Loi.

[12] Par conséquent, il ne s’agit pas d’une “ activité commerciale ” au sens de l’article 123. En voici la définition partielle :

“ activité commerciale ” Constituent des activités commerciales exercées par une personne :

(a) l’exploitation d’une entreprise [...] sauf dans la mesure où l’entreprise comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées.

[13] L’encaissement de chèques n’est donc pas une activité commerciale pour l’application de la Loi.

[14] Le paragraphe 169(1), dans sa version antérieure à avril 1997, dispose que :

(1) Sous réserve de la présente partie, le crédit de taxe sur les intrants d’une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu’elle importe ou qui lui est fourni, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à l’importation ou à la fourniture devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable :

A x B

A représente la taxe relative à l’importation ou la fourniture qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable ;

B représente :

a) dans le cas où la taxe est réputée, par le paragraphe 202(4), avoir été payée relativement au bien le dernier jour d’une année d’imposition de la personne, le pourcentage que représente l’utilisation que la personne faisait du bien dans le cadre de ses activités commerciales au cours de cette année par rapport à l’utilisation totale qu’elle en faisait alors dans le cadre de ses activités commerciales et de ses entreprises ;

b) dans le cas où le bien ou le service est acquis ou importé par la personne pour l’utilisation dans le cadre d’améliorations apportées à une de ses immobilisations, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne utilisait l’immobilisation dans le cadre de ses activités commerciales immédiatement après sa dernière acquisition ou importation de tout ou partie de l’immobilisation ;

c) dans les autres cas, le pourcentage qui représente la mesure dans laquelle la personne a acquis ou importé le bien ou le service pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales.

[15] Au risque de simplifier exagérément, aux fins du présent appel, A est la taxe perçue et B est le pourcentage que représente l’utilisation que l’inscrit faisait des biens ou des services acquis dans le cadre de ses activités commerciales et pour lequel la TPS a été payée.

[16] Avant mai 1990, le paragraphe 169(2) prévoyait un CTI partiel dans le cas où une partie des intrants était attribuable à des fournitures taxables et une partie à des fournitures non taxables (soit des fournitures exonérées ou personnelles).

[17] L’alinéa Bc) de la formule incorpore maintenant la condition de l’attribution dans le paragraphe 169(1) (les alinéas a) et b) ne sont pas pertinents en l’espèce). Il n’a pas été précisé dans la réponse ni présumé que l’appelante était une institution financière. Toutefois, dans son mémoire, l’avocate de l’intimée a soutenu qu’elle l’était.

[18] L’alinéa 149(1)a) est libellé ainsi, en partie :

149.(1) Pour l’application de la présente partie, une personne est une institution financière tout au long de son année d’imposition si, selon le cas

a) elle est, à un moment de l’année

(i)                    une banque,

(ii)                  une personne morale titulaire d’un permis ou autrement autorisée par la législation fédérale ou provinciale à exploiter une entreprise d’offre au public de services de fiduciaire,

(iii)                 une personne dont l’entreprise principale est celle d’un courtier ou d’un négociant en effets financiers ou en argent, ou d’un vendeur de tels effets ou d’argent,

(iv)                une caisse de crédit,

(v)                  un assureur ou une autre personne dont l’entreprise principale consiste à offrir de l’assurance dans le cadre de polices d’assurance,

(vi)                le fonds réservé d’un assureur,

(vii)               la Société d’assurance-dépôts du Canada,

(viii)             une personne dont l’entreprise principale consiste à prêter de l’argent ou à acheter des titres de créance, ou les deux,

(ix)                 un régime de placement,

(x)                   une personne qui offre les services visés à l’article 158 ;

(xi)                 une personne morale réputée être une institution financière par l’article 151;

[19] Il semble que l’appelante, du moins pendant la période qui nous occupe, est visée par les sous-alinéas (iii) ou (viii).

[20] Les paragraphes 141(1) à (4), selon la version s’appliquant à la période en cause, sont libellés ainsi :

(1) Pour l’application de la présente partie, la consommation ou l’utilisation d’un bien ou d’un service par une personne, sauf une institution financière, est réputée se faire en totalité dans le cadre de ses activités commerciales si elle se fait presque en totalité dans ce cadre.

(2) Pour l’application de la présente partie, la consommation ou l’utilisation pour laquelle une personne, sauf une institution financière, a acquis ou importé un bien ou un service est réputée se faire en totalité dans le cadre de ses activités commerciales si elle se fait presque en totalité dans ce cadre.

(3) Pour l’application de la présente partie, la consommation ou l’utilisation d’un bien ou d’un service par une personne, sauf une institution financière, est réputée se faire en totalité dans le cadre de ses activités non commerciales si elle se fait presque en totalité dans ce cadre.

(4) Pour l’application de la présente partie, la consommation ou l’utilisation pour laquelle une personne, sauf une institution financière, a acquis ou importé un bien ou un service est réputée se faire en totalité dans le cadre de ses activités non commerciales si elle se fait presque en totalité dans ce cadre.

[21] Ces dispositions ne s’appliquent pas à l’appelante si celle-ci était une institution financière pendant la période qui nous occupe. Quelle qu’ait pu être la position adoptée lors de l’établissement de la cotisation, l’intimée a soutenu, devant la Cour, que les paragraphes 141.01(2) et (3), plutôt que l’article 141, s’appliquaient.

[22] Les registres de l’appelante ont été tenus avec minutie et M. Sheth, comptable agréé, a clairement établi que celle-ci avait payé la TPS, soit 3 053,40 $ pour son entreprise.

[23] J’estime cependant qu’une bonne partie de ce montant est reliée à l’activité exonérée, soit l’encaissement de chèques, et qui semble avoir été la principale activité de l’appelante pendant la période en cause. Par conséquent, il s’ensuit que la consommation, l’utilisation ou la fourniture d’un très petit pourcentage seulement des biens ou des services que l’appelante a acquis et pour lesquels la TPS a été payée s’est fait dans le cadre de ses activités commerciales.

[24] L’appel est donc rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, le 4 février 2000.

“ D. G. H. Bowman ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 22e jour de septembre 2000.

Mario Lagacé, réviseur

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