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Date: 20000202

Dossiers: 98-1051-UI; 98-1052-UI

ENTRE :

DANIEL PAQUETTE, NORMAND PAQUETTE,

appelants,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

TRANSPORT DE LAIT PAQUETTE INC.,

intervenante.

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Représentant des appelants : M. Marcel Bergeron

Avocat de l’intimé : Me Yanick Houle

Représentant de l'intervenante : M. Marcel Bergeron

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Motifs du jugement

(rendus à la fin de l'audience à Drummondville (Québec) le 16 août 1999)

Le juge en chef adjoint Garon, C.C.I.

[1] Il s'agit d'appels par les deux appelants, messieurs Daniel Paquette et Normand Paquette, de décisions du ministre du Revenu national (“ministre”) selon lesquelles décisions l'emploi des appelants serait assurable dans les deux cas.

[2] Dans le cas de l'appelant Daniel Paquette, à l'audience, le mandataire des appelants a admis tous les alinéas du paragraphe 5 de la Réponse à l'avis d'appel à l'exception de l'alinéa m) et une partie de l'alinéa o) et dans certains autres cas, sous réserve de la preuve supplémentaire qui allait être fournie lors de l'audition de ces appels.

[3] Dans le cas de l'appelant Normand Paquette, la Réponse à l'avis d'appel et, en particulier, le paragraphe 5, est semblable dans une large mesure au paragraphe 5 de la Réponse à l'avis d'appel dans le cas de l'appelant Daniel Paquette.

[4] À l'audience, les deux appelants ont déposé pour leur compte. Et en plus, le père des appelants, monsieur Marcel Paquette a également témoigné. Pour le compte de l'intimé, j'ai entendu la déposition de monsieur Jean-Claude Roy, un agent des appels de Revenu Canada.

[5] Deux questions sont soulevées par les actes de procédure.

[6] Une première question a trait à la question du contrôle des actions. Sur cette question, le mandataire des appelants a reconnu que la position du ministre du Revenu national selon laquelle les appelants ne contrôlaient pas plus de 40% des actions, a été admis. Il me reste à disposer de la deuxième question.

[7] La deuxième question peut être formulée de la façon suivante : Est-ce que les modalités du contrat conclu avec chaque appelant sont à peu près semblables à celles d'un contrat qui aurait été conclu entre deux étrangers?

[8] J'en suis venu à la conclusion que la réponse à cette question est dans la négative pour les raisons suivantes :

1. J'ai noté que le salaire de chacun des deux appelants était un salaire fixe indépendamment du nombre d'heures de travail dans une semaine donnée. La preuve a établi que ce nombre d'heures pouvait varier selon les circonstances et suivant surtout les exigences du commerce du payeur. Par exemple, on pouvait être obligé de passer plusieurs heures un samedi ou un dimanche à effectuer des réparations aux camions qui étaient utilisés pour la livraison du lait. Quant à ce premier élément, le salaire des appelants n'était pas déterminé en fonction du nombre d'heures de travail, ce à quoi dans ce genre d'entreprise on se serait attendu normalement si les appelants n'avaient pas eu de lien de dépendance avec le payeur.

2. Quant à la rémunération des tâches des appelants, il m'a semblé que probablement les appelants étaient sous-rémunérés. À cet égard, lorsque l'intimé a tenté d'établir quel était le salaire moyen de personnes qui accomplissaient à peu près les mêmes tâches que les appelants durant l'année 1997, l'année qui est en litige, on n'a pas, à mon point de vue, tenu compte suffisamment du fait que les appelants étaient non seulement des camionneurs mais qu'ils exécutaient deux autres types de fonction, à savoir ils devaient effectuer des réparations aux camions selon les besoins, ils devaient donc être des mécaniciens et au surplus, les deux appelants remplissaient des fonctions de gestionnaire, fonctions qui étaient différentes selon qu'il s'agissait de l'appelant Daniel Paquette ou de l'appelant Normand Paquette. Leurs fonctions comme gestionnaires étaient des fonctions relativement importantes, moins importantes, je pense, sur le plan temps que leurs fonctions de camionneur mais ces fonctions de gestionnaire devaient être remplies pour le compte du payeur et ont été effectivement, durant l'année 1997 remplies par les deux appelants.

[9] En tenant compte des différents aspects des tâches de chacun des appelants, le poids de la preuve me semble indiquer qu'ils n'étaient pas suffisamment rémunérés. J'ai été, en particulier, impressionné par le fait que l'un des appelants, à savoir l'appelant Normand Paquette, a travaillé pour une autre société avec laquelle il n'avait aucun lien de dépendance durant l'année 1997 pour un salaire de 13,45 $ et il bénéficiait en plus de certains avantages sociaux.

[10] Donc, somme toute, sur la question de la rémunération, le poids de la preuve indique que les appelants n'étaient pas rémunérés selon les normes du marché. J'ai aussi noté à l'égard de la rémunération des appelants des fluctuations importantes de leurs salaires durant la période en cause. Ces fluctuations comme l'a souligné à mon point de vue, à bon droit, le mandataire des appelants, se voit plutôt rarement dans un contexte où les personnes qui transigent entre elles, n'ont pas de lien de dépendance.

[11] En ce qui concerne la rémunération, j'ai aussi retenu que celle-ci, bien que la preuve soit peut-être pas absolument limpide à ce sujet-là, était établie en fonction de la rentabilité de l'entreprise.

[12] J'ai aussi tenu compte du fait que les appelants étaient tous les deux, en bon nombre d'occasions, tenus de faire du temps supplémentaire et qu'ils n'étaient pas rémunérés à un taux spécial à l'égard de ce temps supplémentaire. J'ai aussi noté que les appelants en vertu de leur contrat avec le payeur n'avaient pas pris de vacances, ce qui est un élément inusité également.

[13] On a dit à un moment donné que certains employeurs, dans le domaine de transport du lait, choisissaient d'être remplacés à certains moments dans l'exécution de leurs tâches par une autre personne de façon à leur permettre de prendre des vacances. Cela n'est pas ce qui a été fait ici et, en plus, leur contrat de louage de services ne prévoyait pas qu'ils pouvaient prendre des vacances. Du moins on n'a pas fait valoir, ou on n'a pas mis en preuve que le contrat verbal qu'ils avaient passé avec le payeur leur permettait de prendre un certain nombre de jours de vacances durant l'année 1997.

[14] Dans le cas de l'appelant Normand Paquette, le ministre n'a pas semblé être au courant du fait qu'il avait été près de deux mois à faire du travail pour le compte du payeur sans être rémunéré. Cette période de deux mois commence quelque temps vers la mi-octobre pour se terminer ver le 9 décembre 1997.

[15] À mon point de vue, si le ministre avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon objective, il aurait dû tenir compte de ces éléments supplémentaires que je viens de souligner. L'ensemble de ces éléments me permet de conclure que le ministre a mal exercé sa discrétion en ne tenant pas compte de la totalité des éléments spéciaux du contrat de louage de services qui liait le payeur avec chacun des appelants.

[16] Alors, comme la jurisprudence l'a bien établi, le ministre ayant mal exercé sa discrétion, je suis en droit d'examiner l'ensemble des faits et d'en arriver à ma propre conclusion sur le bien-fondé ou non des appels des appelants.

[17] Pour les raisons que j'ai données, j'en suis venu à la conclusion, en tenant compte de l'ensemble des faits, que les emplois des deux appelants n'étaient pas assurables durant la période en question.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de février 2000.

“ Alban Garon ”

J.C.A.C.C.I.

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