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Date: 19991029

Dossier: 98-124-UI; 98-21-CPP

ENTRE :

CALABOGIE PEAKS (1983) INC.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Motifs du jugement

Le juge suppléant Somers, C.C.I.

[1] Les appels en l'instance ont été entendus à Ottawa, Canada, le 5 octobre 1999.

[2] L'appelante interjette appel d'une décision par laquelle le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a déterminé que l'emploi que les travailleurs ont exercé pour elle au cours des années 1996 et 1997 était assurable et cotisable car ils étaient liés par un contrat de louage de services. Le ministre a établi une évaluation à l'égard de l'appelante pour omission de remettre des cotisations d'assurance-emploi relativement à Kristian Knight, Johnathan Lockhart, Tobias Lockhart, Kyle Miller, John Newdouf, Christopher Packham, Grant Smith, Brad Thompson, Ed Virgin et Kevin White.

[3] L'alinéa 5(1)a) de la Loi sur l'assurance-emploi est libellé en partie dans les termes suivants :

5. (1) Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

l'emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d'un contrat de louage de services ou d'apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l'employé reçoive sa rémunération de l'employeur ou d'une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

[...]

[4] La charge de la preuve incombe à l'appelante. Cette dernière doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que la décision du ministre est mal fondée en fait et en droit. Chaque cas est un cas d'espèce.

[5] Pour établir une cotisation à l'égard de l'appelante, l'intimé s'est fondé sur les faits suivants, qui ont été admis ou niés :

[TRADUCTION]

l'entreprise de l'appelante a été constituée en personne morale en 1984; (admis)

l'appelante exploite un centre de ski auquel se rattache une entreprise de multi-propriété exploitée à longueur d'année; (admis)

les services des travailleurs ont été retenus aux fins de la fabrication de neige artificielle; (admis)

les services des travailleurs ont été retenus par entente verbale; (admis)

les travailleurs étaient payés entre 9 $ et 12 $ l'heure, selon leur expérience; ils recevaient un chèque toutes les deux semaines; (admis)

les travailleurs fournissaient leurs services à l'établissement de l'appelante; (admis)

les heures de travail des travailleurs étaient déterminées par l'appelante; (nié)

les travailleurs devaient remplir des feuilles de temps et les remettre au superviseur de l'appelante; (nié)

le travail des travailleurs était supervisé et inspecté par le chef d'équipe de l'appelante; (nié)

les travailleurs devaient fournir les services personnellement; (nié)

l'équipement nécessaire à la fabrication de la neige artificielle était fourni aux travailleurs par l'appelante; (nié)

les travailleurs n'exploitent pas une entreprise pour leur compte; (nié)

les travailleurs étaient employés par l'appelante conformément à un contrat de louage de services; (nié)

l'appelante n'a pas retenu de cotisations d'assurance-emploi sur la rétribution versée aux travailleurs. (admis)

[6] L'appelante exploite un centre de ski auquel se rattache une entreprise de multi-propriété exploitée à longueur d'année. Les services des travailleurs étaient retenus par entente verbale pour la fabrication de neige artificielle, et ils étaient payés par chèque toutes les deux semaines, entre 9 $ et 12 $ l'heure, selon leur expérience.

[7] Les travailleurs fournissaient leurs services sur les pentes de ski au lieu d'affaires de l'appelante, dont ils utilisaient l'équipement lourd, évalué approximativement à 500 000 $. Toutefois, les travailleurs fournissaient leurs propres vêtements et outils à main.

[8] Au début de leur travail et de temps à autre par la suite, les travailleurs recevaient des instructions générales quant au travail à effectuer. Le payeur assumait le coût des réparations de l'équipement lourd et payait également aux travailleurs le temps qu'ils passaient à effectuer ces réparations. En réponse à l'une des questions posées dans le questionnaire daté du 1er octobre 1997, Michael Murphy, directeur de l'exploitation et secrétaire-trésorier, le seul témoin à l'audition, a indiqué que les travailleurs tenaient des feuilles de temps qu'ils remettaient au chef d'équipe qui, à son tour, présentait des factures périodiques au payeur.

[9] Les travailleurs étaient supervisés par Brad Thompson, le chef d'équipe. Il n'y avait aucune obligation de rendre compte, mais, de temps en temps, les travailleurs tenaient le payeur au courant de l'avancement du travail. Les travailleurs faisaient des heures irrégulières, selon les conditions météorologiques et les besoins du payeur. Le témoin a déclaré qu'il ignorait si les travailleurs travaillaient exclusivement pour le payeur, mais le payeur était fort probablement l'unique client.

[10] La jurisprudence admet invariablement quatre facteurs fondamentaux aux fins de faire la distinction entre un contrat de louage de services d'un contrat d'entreprise. Dans l'arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553, la Cour d'appel fédérale a déclaré que, pour déterminer s'il y a contrat de louage de services ou contrat d'entreprise, il faut examiner « l'ensemble des éléments qui entraient dans le cadre des opérations » . Les quatre facteurs fondamentaux, dans cette affaire, sont les suivants :

la mesure du contrôle exercé par l'employeur;

le degré d'intégration;

la propriété des instruments de travail nécessaires pour effectuer le travail;

les chances de bénéfice et les risques de perte.

[11] a) Le contrôle

Le payeur donnait des instructions générales aux travailleurs au début de leur travail et à l'occasion par la suite. Les travailleurs rendaient compte à Brad Thompson, le chef d'équipe. Ils devaient tenir des feuilles de temps. Le payeur pouvait congédier un travailleur s'il n'effectuait pas ses tâches. Le degré de contrôle dépendait de l'expérience du travailleur. Dans la présente affaire, il y avait un contrôle suffisant pour conclure à l'existence d'un contrat de louage de services.

[12] b) Intégration

Selon la preuve, les travailleurs travaillaient exclusivement pour le payeur. Ce dernier ne pouvait exploiter son entreprise si les travailleurs n'accomplissaient pas leur tâches selon ses besoins. Les heures de travail irrégulières, qui étaient fonction des conditions de la météo, ne constituent pas un facteur déterminant. La preuve, à cet égard, nous permet de conclure qu'il y avait contrat de louage de services.

[13] c) Instruments de travail

Le travail était effectué à l'établissement du payeur. Ce dernier fournissait l'équipement principal et payait les travailleurs, qui se chargeaient des réparations. Les menus outils appartenant aux travailleurs ne sont pas un facteur important. Suivant la jurisprudence, les employés peuvent utiliser leurs propres outils de moindre valeur sans que soit compromis leur statut d'employés. La preuve, relativement à ce facteur, nous porte à conclure qu'il y avait contrat de louage de services.

[14] d) Chances de bénéfice et risques de perte

On n'a produit aucune preuve établissant que les travailleurs réalisaient des bénéfices ou subissaient des pertes dans le cadre de la prestation de leurs services au cours de la période en cause. Ils étaient payés à l'heure, même lorsqu'ils réparaient l'équipement lourd. Compte tenu de cette preuve, il y avait contrat de louage de services.

[15] Compte tenu de toutes les circonstances, dont le témoignage, les admissions et la preuve documentaire, je suis convaincu que l'appelante ne s'est pas acquittée de la charge qui lui incombait de prouver que le ministre a conclu à tort qu'il y avait contrat de louage de services.

[16] Les travailleurs exerçaient pour l'appelante un emploi assurable et cotisable au sens de l'alinéa 5(1)a) de la Loi sur l'assurance-emploi.

[17] Les appels sont rejetés et les évaluations sont confirmées.

Signé à Ottawa, Canada, ce 29e jour d'octobre 1999.

« J. F. Somers »

J.S.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 28e jour de juin 2000.

Benoît Charron, réviseur

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