Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 19980924

Dossier: 97-2923-IT-I

ENTRE :

PATRIMOINE DE ROBERT BOND,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1] Dans le calcul du revenu des années d'imposition 1993, 1994 et 1995, l'appelant a déduit des honoraires de conseiller en placement s'élevant à 11 301 $ pour 1993, à 12 940 $ pour 1994 et à 20 762 $ pour 1995.

[2] En établissant des nouvelles cotisations à l'égard de ces années d'imposition, le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a ramené la déduction au titre des honoraires de conseiller en placement à 500 $ pour chacune des trois années, soit une réduction de 10 801 $ pour 1993, de 12 440 $ pour 1994 et de 20 262 $ pour 1995.

POSITION DE L'APPELANT

[3] L'avis d'appel énonce ce qui suit :

[TRADUCTION]

-           Le paiement des droits versés au curateur public de la province de la Saskatchewan est obligatoire, étant exigé aux termes d'un règlement provincial; ces droits sont non discrétionnaires et se calculent en fonction du revenu gagné durant la période en cause.

-           Les droits en question sont payés pour assurer la protection des avoirs du contribuable (dans le cas de l'incapacité mentale de ce dernier) et le placement judicieux des fonds qui produiront ainsi des revenus accrus, augmentant de ce fait l'impôt sur le revenu payable par le contribuable. Les droits constituent une dépense effectuée en vue de générer un revenu.

-           Le bureau du curateur public gère et administre les avoirs du contribuable, y compris ses actions et valeurs mobilières; cela fait partie de l'“ activité d'entreprise principale ” du curateur public et à ce titre relève de l'alinéa 20(1)bb) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

POSITION DE L'INTIMÉE

[4] Les montants déduits à titre d'honoraires de conseiller en placement dans chacune des années en cause se rapportent aux montants versés au curateur public. Les droits versés à ce dernier concernaient la gestion des affaires personnelles de l'appelant, notamment le paiement de dépenses personnelles (par exemple, des paiements à l'Assiniboia Pioneer Lodge, le paiement de frais médicaux et du coût de vêtements et le versement d'acomptes provisionnels au titre de l'impôt sur le revenu).

ARGUMENT DE L'APPELANT

[5] L'appelant fait valoir que la Cour canadienne de l'impôt a, dans la décision McEntyre Estate v. The Queen, 97 DTC 245 (C.C.I.), reconnu la possibilité pour un exécuteur testamentaire d'effectuer le même genre de déduction, même si elle a dans ce cas-là refusé la déduction parce que l'exécuteur testamentaire n'avait pas engagé les frais de gestion dans le cours normal des affaires. En l'espèce, le curateur public, qui gère de façon régulière les affaires d'autres incapables, a engagé les frais de gestion en s'acquittant des responsabilités que lui confère la loi applicable. Par conséquent, les droits qu'il a exigés en l'occurrence relèvent de l'alinéa 20(1)bb) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”).

ARGUMENTS DE L'INTIMÉE

[6] Les montants déduits au titre d'honoraires de conseiller en placement, soit 10 801 $ pour 1993, 12 440 $ pour 1994 et 20 262 $ pour 1995, ont été à juste titre refusés par le ministre conformément aux alinéas 18(1)a) et 20(1)bb) de la Loi.

[7] Les droits versés au curateur public ne correspondaient pas à des sommes versées à une personne pour obtenir son avis sur l'opportunité d'acheter ou de vendre certaines actions ou valeurs mobilières de l'appelant ou pour la prestation de services relativement à l'administration ou à la gestion d'actions ou de valeurs mobilières de l'appelant.

[8] L'“ activité d'entreprise principale ” du curateur public ne consiste pas à donner des avis sur l'opportunité d'acheter ou de vendre certaines actions ou valeurs mobilières ou à assurer des services relatifs à l'administration ou à la gestion d'actions ou de valeurs mobilières.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

[9] Les dispositions législatives pertinentes se lisent comme suit :

20(1) Malgré les alinéas 18(1)a), b) et h), sont déductibles dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition celles des sommes suivantes qui se rapportent entièrement à cette source de revenus ou la partie des sommes suivantes qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant :

[...]

bb) une somme, autre qu'une commission, versée par le contribuable au cours de l'année à une personne :

(i)                    soit pour obtenir son avis sur l'opportunité d'acheter ou de vendre certaines actions ou valeurs mobilières,

(ii)                  soit pour la prestation de services relativement à l'administration ou à la gestion d'actions ou de valeurs mobilières du contribuable,

si l'activité d'entreprise principale de cette personne consiste :

(iii)                 soit à donner des avis sur l'opportunité d'acheter ou de vendre certaines actions ou valeurs mobilières,

(iv)                soit, entre autres choses, à assurer des services relatifs à l'administration ou à la gestion d'actions ou de valeurs mobilières.

ANALYSE

[10] Le curateur public de la province de la Saskatchewan a été la seule personne appelée à témoigner dans les présents appels.

[11] La fonction de curateur public (une personne morale simple) a été créée par une loi de la législature de la Saskatchewan.

[12] En ce qui a trait aux personnes à charge majeures visées par une ordonnance d'un tribunal, le curateur public remplit essentiellement un rôle de garde, c'est-à-dire qu'il prend en charge leurs avoirs, qu'il les gère et les protège et qu'il paie toutes les dépenses qui doivent être payées.

[13] De par son rôle de garde et de gestion le curateur public agit en lieu et place de la personne à charge majeure.

[14] Les droits exigés par le curateur public en vertu de The Public Trustee Act sont établis par décret et consignés dans le règlement saskatchewanais concernant le curateur public.

[15] C'est un règlement provincial qui exige le paiement de droits au curateur public de la Saskatchewan. Ces droits sont non discrétionnaires et se calculent en fonction du revenu et de la valeur brute des avoirs. Ils sont payés pour assurer la protection des avoirs d'une personne dans le cas de son incapacité mentale. Tant que l'incapacité persiste, le curateur public gère les biens de la personne à charge majeure, s'occupant notamment de la gestion de ses affaires personnelles. Les avoirs des personnes à charge majeures peuvent être administrés et gérés durant de longues périodes. Les fonds dont la personne à charge majeure n'a pas immédiatement besoin sont investis au nom du curateur public.

[16] Le curateur public a délégué à Greystone Capital Management Inc. (“ Greystone ”) la responsabilité de placer les biens liquides des personnes à charge majeures. Les honoraires exigés par Greystone étaient portés en réduction du revenu gagné, de sorte que le revenu déclaré par le curateur public pour le compte de l'appelant reflétait la défalcation de ces honoraires.

[17] Il ressort de la preuve et de la loi pertinente que le curateur public joue essentiellement un rôle de gardien et de protecteur en ce qui a trait aux avoirs des personnes à charge majeures.

[18] L'“ activité d'entreprise principale ” du curateur public ne consiste ni à donner des avis sur l'opportunité d'acheter ou de vendre certaines actions ou valeurs mobilières ni à assurer des services relatifs à l'administration ou à la gestion d'actions ou de valeurs mobilières. Le curateur public n'est pas une entreprise commerciale. Le curateur public ne se fait pas passer pour un conseiller en placement visé à l'alinéa 20(1)bb).

[19] L'appelant a soutenu subsidiairement que les droits versés au curateur public devraient être assimilés à des frais médicaux. On n'a toutefois présenté aucun élément de preuve pour étayer ce point de vue.

CONCLUSION

[20] Les montants déduits pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995 comme honoraires de conseiller en placement ont à juste titre été refusés par le ministre du Revenu national.

DÉCISION

[21] Les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour de septembre 1998.

D. Hamlyn ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 26e jour d'avril 1999.

Erich Klein, réviseur

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.