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Date: 19990305

Dossier: 96-4343-IT-G

ENTRE :

COM DEV LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1] L'appelante, Com Dev Ltd. ( « Com Dev » ), est une corporation privée sous contrôle canadien oeuvrant dans la fabrication de composantes d'engin spatial. La conception et la fabrication des composantes nécessitaient un vaste travail de recherche-développement. Les parties conviennent que l'appelante a engagé des frais admissibles comme dépenses pour des recherches scientifiques et du développement expérimental ( « RSDE » ) au sens de l'article 37 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ). Les parties conviennent également que ces frais sont des « dépenses admissibles » au sens du paragraphe 127(9) de la Loi[1]. La Com Dev a demandé des crédits d'impôt à l'investissement ( « CII » ) à l'égard des dépenses admissibles.

[2] Ces appels, interjetés sous le régime de la procédure générale, concernent les années d'imposition de l'appelante 1989, 1990, 1991 et 1992. Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi à l'égard de la Com Dev de nouvelles cotisations pour les années d'imposition en question, par des avis simultanés de nouvelle cotisation en date du 16 décembre 1994. Dans les nouvelles cotisations qu'il a établies à l'égard de la Com Dev, le ministre a refusé les CII qui avaient été demandés par l'appelante.

FAITS

[3] Au début du procès, les parties ont déposé un exposé conjoint partiel des faits. Les faits pertinents dont il a été convenu sont les suivants :

[TRADUCTION]

3. Durant toute la période pertinente, l'appelante était une compagnie dûment constituée en vertu des lois du Canada, soit une corporation privée sous contrôle canadien au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu (du Canada) (la « Loi » ).

4. L'appelante exploite activement une entreprise comme concepteur et fabricant de composantes de satellite.

5. La Spar Aérospatiale Limitée ( « Spar » ) s'était vu adjuger un contrat par le gouvernement du Canada pour la conception et la fabrication d'un satellite (le « Radarsat » ), qui devait être lancé en 1994. Le contrat entre les deux parties a été signé le 26 janvier 1990.

[...]

6. La Spar a envoyé une demande de proposition à divers sous-traitants concernant la conception et la fabrication du système de calibration, du système de réception, de l'émetteur faible puissance et des décaleurs de phases nécessaires pour l'engin spatial (collectivement appelés les « composantes » ).

[...]

7. En 1989, l'appelante a été choisie comme sous-traitant pour la conception et la fabrication des composantes, sous réserve des conditions énoncées dans une lettre d'intention et dans le contrat avec la Spar en date du 6 juillet 1990 (le « contrat Spar-Com Dev » ).

[...]

8. Le contrat Spar-Com Dev a été modifié six fois par écrit. Il n'y a pas eu d'autres modifications écrites de ce contrat.

[...]

9. L'appelante a livré les dernières composantes requises en vertu du contrat en septembre 1994.

10. L'appelante a tiré du contrat Spar-Com Dev des sommes totalisant 28 350 000 $ (collectivement appelées les « paiements de la Spar » ).

ÉLÉMENTS DE PREUVE PRÉSENTÉS AU PROCÈS

[4] L'appelante a appelé quatre témoins. Ces personnes ont témoigné d'une manière directe et crédible et ont, au cours de leur témoignage, reconnu et commenté les documents déposés comme pièces.

[5] Le premier témoin a été Mme Anita Carol Davis, une vice-présidente de la Com Dev qui, au cours de la période en question, administrait pour l'appelante le contrat conclu entre la Spar Aérospatiale Limitée ( « Spar » ) et la Com Dev.

[6] Elle a décrit les événements ayant conduit à la collaboration de la Com Dev avec la Spar. La Spar avait conclu un contrat avec Sa Majesté la Reine ( « Sa Majesté » ) en janvier 1990 pour la construction d'un satellite-radar permettant d'améliorer la surveillance de changements environnementaux grâce à des images radar de la surface de la terre. À cette fin, après des propositions préliminaires, la Spar avait demandé à la Com Dev de fabriquer et de livrer quatre composantes pour le satellite. Le contrat entre la Spar et la Com Dev était un contrat à prix ferme prévoyant une gestion du risque, une garantie de bonne exécution et des paiements d'étape axés sur les résultats. Ce témoin a fait la distinction entre ce contrat et un contrat à prix coûtant majoré, dans lequel le risque est pris en charge par l'entrepreneur et non par le sous-traitant, les paiements ne sont pas axés sur les résultats et les bénéfices sont protégés grâce à une structure de prix coûtant majoré. Ce témoin a en outre expliqué qu'un contrat à prix coûtant majoré correspondait habituellement à un contrat de recherche-développement garantissant une disponibilité future, par opposition au contrat soumis à la Cour, qui est un contrat visant la fabrication et la fourniture d'un produit.

[7] Du point de vue de la Com Dev, ce qu'on lui avait demandé de faire, c'était de développer par des recherches sa technologie patrimoniale[2] pour l'exécution d'un contrat relatif à un produit commercial. La Spar a acheté un produit assorti de renseignements suffisants fournis par la Com Dev concernant l'utilisation du produit et décrivant les étapes allant de la conception jusqu'au modèle de vol, c'est-à-dire que l'information transférée visait à assurer la fonctionnalité et la fiabilité des composantes.

[8] Le deuxième témoin, M. Bill Chisholm, exerçait un emploi pour la Spar comme programmeur d'ordinateurs pour le Radarsat. Il a participé directement à la réalisation du contrat avec la Com Dev au nom de la Spar. Son témoignage indiquait que la Spar estimait que la Com Dev avait suffisamment de technologies patrimoniales, de droits de propriété intellectuelle et de connaissances avant la conclusion du contrat pour permettre à la Spar de conclure que l'appelante était capable d'exécuter le contrat dans son intégralité. Ce témoin a confirmé que la Spar et la Com Dev n'avaient aucun lien de dépendance et que leur relation n'avait pas toujours été cordiale, car les contrôles de coût imposés par le gouvernement du Canada à la Spar influaient sur la relation que la Spar avait avec la Com Dev.

[9] Ces deux témoins ont fait état de leur rôle respectif à l'égard des deux contrats, soit le contrat entre Sa Majesté et la Spar et le contrat entre la Spar et la Com Dev. Il n'y avait aucune relation contractuelle directe entre Sa Majesté et la Com Dev. Le financement du projet entre Sa Majesté et la Spar provenait du gouvernement du Canada. Pour ce qui est du contrat entre la Spar et la Com Dev, les paiements venaient de la Spar. Une partie du projet a été confiée par la Spar à la Com Dev de manière à répondre aux exigences de Sa Majesté à l'égard de la Spar, c'est-à-dire de façon à protéger l'intégrité du projet contre les risques d'échec.

[10] Dans son arrangement contractuel avec la Spar, le gouvernement du Canada avait insisté pour que les contrats entre les sous-traitants et la Spar incluent ce qui suit :

[TRADUCTION]

12.3 Toutes les informations techniques et inventions conçues, élaborées ou pour la première fois effectivement mises en oeuvre dans l'exécution du travail prévu au présent contrat seront la propriété de Sa Majesté, et l'entrepreneur n'aura aucun droit à cet égard, sauf ce qui pourra être permis par Sa Majesté. L'entrepreneur ne pourra sans l'autorisation écrite expresse de Sa Majesté divulguer ou utiliser de telles informations techniques et inventions si ce n'est dans l'exécution du travail prévu au présent contrat et ne pourra vendre qu'à la SPAR, en vertu du présent contrat, des articles ou choses incorporant de telles informations techniques et inventions[3].

[11] La Spar avait inclus la clause précitée dans son contrat avec la Com Dev, mais elle avait aussi inclus la clause restrictive suivante :

[TRADUCTION]

12.7 L'information détaillée dans la lettre de l'entrepreneur en date du 19 avril 1990 est considérée comme appartenant à l'entrepreneur ou à ses sous-traitants, selon le cas[4].

[12] La lettre mentionnée dans la clause 12.7 et déposée comme pièce dans la présente affaire se lit comme suit :

[TRADUCTION]

19 avril 1990

Dossier : 5050

Réf. : JB-1578

SPAR Aérospatiale

Division du satellite et du système de communication

21025, autoroute transcanadienne

Sainte-Anne de Bellevue (Québec)

H9X 3R2

À l'attention de : Monsieur Terry Littlewood

Directeur des contrats de sous-traitance

Objet : Lettre devant être mentionnée dans le contrat S-700014

Article 12.7

Monsieur,

La déclaration suivante de renseignements de fabrication doit être mentionnée comme l'indique la rubrique ci-dessus intitulée « Objet » .

Déclaration de renseignements de fabrication

Conformément aux conditions du contrat RADARSAT entre la SPAR Aérospatiale et la COM DEV, S-700014, article 12 — Droits de propriété intellectuelle —, il est par les présentes attesté que tous les équipements et tous les renseignements et documents techniques connexes devant être produits dans la réalisation du travail et considérés comme produits à livrer en vertu du contrat utiliseront les logiciels, les procédés, les méthodes, les techniques et le savoir-faire existant ou appartenant à la COM DEV avant la date de prise d'effet du contrat. Donc, les droits de propriété intellectuelle concernant les produits à livrer — logiciels, procédés, méthodes, techniques et savoir-faire existant ou appartenant à la COM DEV avant la date de prise d'effet du contrat — seront la propriété de la COM DEV et pourront être utilisés seulement aux fins du programme RADARSAT.

Veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

[signature]

JOHN BERRY

Administrateur du contrat[5].

[13] Le témoin de la Spar a dit que la Spar approuvait totalement l'inclusion de cette modification dans le contrat entre la Spar et la Com Dev et que c'était lui en fait qui en avait recommandé l'inclusion.

[14] Ce témoin a relaté, de son point de vue, ce que la Com Dev avait fait dans la production des composantes, soit utiliser les technologies connues qui faisaient partie de son patrimoine interne et les adapter aux fins des composantes devant être produites pour la Spar en vertu du contrat. Il a dit que, dans ce processus d'adaptation, la Com Dev n'avait jamais livré de résultats de recherche-développement à la Spar et qu'on ne s'attendait pas non plus à la livraison de tels résultats.

[15] Le témoin suivant a été Bertram Blevis, Ph.D., reconnu comme expert dans le domaine spatial, y compris en aérospatiale et en télécommunications. Son témoignage s'est limité aux pratiques contractuelles normales dans le domaine spatial et à la façon dont ces pratiques se rapportaient aux activités de la Com Dev. Son témoignage visait en outre à aider à comprendre la volumineuse documentation de l'appelante.

[16] Il a dit que les composantes fournies par l'appelante en vertu du contrat étaient uniques en leur genre et qu'elles avaient dû être élaborées à partir de la technologie de l'appelante, de manière à répondre à des caractéristiques inédites et à assurer une interface avec d'autres équipements dont les propres caractéristiques changeaient et de façon à servir des applications inédites et à assurer que les composantes étaient adaptées au service spatial.

[17] Ce témoin a dit qu'il y avait deux types de contrats dans ce domaine : les contrats visant la vente de produits et les contrats de recherche-développement.

[18] Le témoin expert a passé en revue, de manière détaillée, plusieurs facteurs contractuels distinctifs, y compris les prix fermes, les échéanciers de paiement, les garanties de bonne exécution et la protection de la technologie. M. Blevis a conclu en l'espèce que les composantes livrées, avec la documentation d'appui y afférente, étaient conformes à ce qui est considéré dans le domaine aérospatial comme un contrat visant la vente d'un produit.

[19] Il a en outre dit que l'information (la documentation d'appui) fournie par la Com Dev à la Spar ne correspondait pas à la communication de résultats auxquels on s'attend normalement dans le cas d'un contrat de recherche-développement.

[20] Le dernier témoin a été le directeur financier de la Com Dev, M. David Belbeck, qui a dit à la Cour que la Com Dev avait subi une perte de 4 283 000 $ en exécutant le contrat. Il a en outre reconnu de la documentation indiquant que, après l'expiration du contrat, la Spar avait proposé d'acheter la technologie à la Com Dev pour pouvoir construire le Radarsat II, c'est-à-dire pour remplir la fonction précise que la Com Dev avait remplie pour la Spar dans le cadre de Radarsat I. Ce témoin a également confirmé que l'appelante avait cherché d'autres moyens de réduire ses pertes en demandant à être indemnisée par le gouvernement du Canada et que, cependant, elle n'y était pas parvenue, parce qu'il n'y avait aucune relation contractuelle entre la Com Dev et le gouvernement du Canada.

LA THÈSE DE L'APPELANTE

[21] La Com Dev soutient que le contrat Spar-Com Dev était un contrat visant la livraison d'un produit, soit les composantes. La Com Dev n'a pas fait de RSDE pour la Spar et ne lui a pas livré d'informations en matière de RSDE. L'information relative aux composantes qui a été livrée à la Spar ne serait pas suffisante pour que la Spar ou une personne dont elle retiendrait les services puisse reproduire les composantes. La livraison de l'information relative aux composantes est généralement exigée par un acheteur de composantes dans le domaine aérospatial et ne correspond pas à la livraison de travaux de RSDE.

[22] L'appelante soutient en outre que les clauses contractuelles qui semblent accorder à Sa Majesté des droits de propriété en recherche ou en développement ont été modifiées et restreintes par d'autres clauses.

[23] Les paiements contractuels faits par la Spar à la Com Dev n'étaient pas des paiements contractuels faits par le gouvernement fédéral ou un gouvernement provincial et n'ont pas été faits à la Com Dev à l'égard de travaux de RSDE.

[24] L'appelante conclut que les sommes payées par la Spar en vertu du contrat de sous-traitance passé avec la Com Dev ne constituaient pas des paiements contractuels au sens du paragraphe 127(9) de la Loi et que l'appelante a droit à un CII pour les années en question représentant le montant intégral des dépenses admissibles, sans déduction.

LA THÈSE DE L'INTIMÉE

[25] L'intimée soutient que le contrat Spar-Com Dev est tout ce qu'il y a de plus clair. L'intimée affirme également que, en vertu du contrat Spar-Com Dev, l'appelante est devenue un sous-traitant de la Spar pour la recherche, la conception, le développement, l'analyse, les tests, la vérification et la livraison concernant des sous-systèmes devant être intégrés au Radarsat et que, en vertu du contrat Spar-Com Dev, l'appelante était tenue de faire des travaux de RSDE pour concevoir, développer, analyser, tester, vérifier et livrer des sous-systèmes destinés à la Spar. L'intention était de transférer au gouvernement du Canada la propriété intellectuelle issue de l'exécution globale du contrat Spar-Com Dev. Conformément au contrat, l'appelante a reçu de la Spar des paiements d'un montant total de 28 350 000 $ à l'égard des dépenses engagées pour la recherche, la conception, le développement, l'analyse, les tests, la vérification et la livraison concernant les sous-systèmes destinés à la Spar. L'intimée soutient également que les dépenses admissibles engagées par l'appelante en vertu du contrat Spar-Com Dev ont à bon droit été réduites du montant total reçu de la Spar parce que le projet global était financé par le gouvernement du Canada. La réduction des dépenses admissibles a eu pour effet de diminuer le CII demandé par l'appelante.

[26] L'intimée affirme en outre que le projet était entièrement financé par le gouvernement du Canada et que ce financement se rapportait directement à la Com Dev par l'intermédiaire de la Spar.

POINT EN LITIGE

[27] Il s'agit de savoir si les sommes reçues de la Spar par l'appelante en vertu du contrat Spar-Com Dev représentent des paiements contractuels au sens de l'alinéa b) de la définition de « paiement contractuel » figurant au paragraphe 127(9) de la Loi.

ANALYSE

[28] L'article 37 de la Loi vise à encourager la recherche scientifique au Canada (Consoltex Inc. v. The Queen, 97 DTC 724, C.C.I.). L'incitation fiscale à faire des travaux de RSDE au Canada est double. Premièrement, les dépenses en RSDE donnent droit à un traitement de faveur en vertu de l'article 37. Les dépenses admissibles en vertu de l'article 37 sont entièrement déductibles pour l'année dans laquelle elles ont été engagées ou peuvent être regroupées et déduites pour des années ultérieures. Deuxièmement, un CII peut être obtenu en vertu du paragraphe 127(5) de la Loi.

[29] Le paragraphe 127(5) de la Loi permet à un contribuable de demander une déduction fondée sur le CII du contribuable pour l'année. Le CII pour l'année est défini au paragraphe 127(9) de la Loi. La définition d'un CII en vertu du paragraphe 127(9) de la Loi inclut, entre autres, un pourcentage des « dépenses admissibles » d'un contribuable faites dans l'année. L'expression « dépense admissible » est également définie en vertu du paragraphe 127(9) de la Loi. L'intimée admet que les montants en question sont des « dépenses admissibles » de l'appelante au sens du paragraphe 127(9) et donneraient droit au CII en vertu du paragraphe 127(9) si on interprétait cette définition sans se reporter à l'alinéa 127(11.1)c) de la Loi.

[30] En ce qui a trait à la définition d'un CII figurant au paragraphe 127(9) de la Loi, l'alinéa 127(11.1)c) se lit comme suit :

(11.1) Pour l'application de la définition de « crédit d'impôt à l'investissement » au paragraphe (9),

[...]

c) le montant d'une dépense admissible faite par un contribuable est réputé être le montant de la dépense admissible, calculé sans tenir compte des paragraphes 13(7.1) et (7.4), moins le montant de toute aide gouvernementale, de toute aide non gouvernementale ou de tout paiement contractuel, relatif à la dépense, que le contribuable a reçu, est en droit de recevoir ou peut raisonnablement s'attendre à recevoir, à la date de production de la déclaration de revenu pour l'année d'imposition où la dépense a été faite;

(Le soulignement est de moi.)

[31] L'expression « paiement contractuel » est définie au paragraphe 127(9) de la Loi. Pour des montants devenus payables au plus tard le 20 décembre 1991, la définition de « paiement contractuel » se lit comme suit[6] :

« paiement contractuel » s'entend :

a) d'un montant payable par une personne qui réside au Canada pour des recherches scientifiques et du développement expérimental liés à l'entreprise de cette personne;

b) d'un montant payable — à l'exclusion d'un montant prescrit — par le gouvernement fédéral, un gouvernement provincial, une municipalité ou un autre organisme public canadien ou par une personne exonérée de l'impôt en vertu de la partie I à cause de l'article 149, pour des recherches scientifiques et du développement expérimental à faire pour cet organisme ou cette personne ou à leur profit;

c) d'un montant payable par une personne qui ne réside pas au Canada, si elle a droit à une déduction en vertu de la division 37(1)a)(ii)(D) à l'égard de ce montant.

[32] Dans l'exposé conjoint partiel des faits, les parties ont convenu que l'alinéa c) de la définition de « paiement contractuel » figurant au paragraphe 127(9) ne s'appliquait pas. À l'étape des plaidoiries, l'avocat de l'intimée a dit qu'il ne présenterait aucun argument fondé sur l'alinéa a) de la définition de « paiement contractuel » figurant au paragraphe 127(9). Ainsi, les arguments de l'appelante et de l'intimée se fondaient sur l'alinéa b) de la définition de « paiement contractuel » . La différence entre le libellé de l'alinéa b) concernant les montants payables après le 20 décembre 1991 et le libellé de l'alinéa b) pour les montants devenus payables au plus tard le 20 décembre 1991 est minime et n'influe pas sur la décision à rendre en l'espèce.

[33] Pour être admissible comme paiement contractuel en vertu de l'alinéa b) du paragraphe 127(9), un montant doit :

1) être payable par le gouvernement fédéral, un gouvernement provincial, une municipalité ou un autre organisme public canadien ou par une personne exonérée de l'impôt en vertu de la partie I de l'article 149;

2) être payable pour des travaux de RSDE à faire pour cet organisme ou cette personne ou à leur profit.

UN PAIEMENT CONTRACTUEL ÉTAIT-IL PAYABLE PAR LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL, UN GOUVERNEMENT PROVINCIAL, UNE MUNICIPALITÉ OU UN AUTRE ORGANISME PUBLIC CANADIEN?

[34] L'intimée soutient que les 28 350 000 $ ont été payés par le gouvernement du Canada. Elle prétend que la Spar était simplement un entrepreneur général et que tous les paiements passaient simplement par la Spar; l'intimée insiste en outre sur le fait que Sa Majesté est mentionnée dans de nombreuses dispositions du contrat Spar-Com Dev.

[35] L'appelante fait valoir que Sa Majesté et la Spar avaient conclu un contrat particulier, tandis que la Spar avait fait appel à la Com Dev dans le cadre d'un contrat distinct. L'appelante soutient également que Sa Majesté n'était pas partie au contrat Spar-Com Dev et que la Spar a payé à la Com Dev toutes les sommes qui étaient dues à cette dernière en vertu du contrat Spar-Com Dev. L'appelante dit que la définition de « paiement contractuel » figurant à l'alinéa b) du paragraphe 127(9) de la Loi doit recevoir son sens ordinaire et ne doit pas être élargie de manière à englober des arrangements indirects.

[36] Bien que le projet Radarsat ait en définitive été financé par le gouvernement du Canada, l'appelante n'avait aucune relation contractuelle directe avec le gouvernement du Canada. Les arrangements contractuels de l'appelante avaient été conclus avec la Spar. La preuve établit que la Spar a acheté des composantes conçues, fabriquées et livrées par l'appelante. Le contrat était un contrat à prix ferme comportant des paiements d'étape liés aux résultats de production. Les risques ont toujours été à la charge de l'appelante.

[37] Bien que Sa Majesté ait été mentionnée dans le contrat, cela ne change pas la réalité commerciale de la relation entre les parties. Sa Majesté avait le droit de surveiller l'évolution des travaux relatifs aux composantes, mais la preuve montre que cet arrangement est fréquent dans le domaine aérospatial lorsque, au bout du compte, le succès du projet global dépend en partie de produits fabriqués par des sous-traitants. Le droit de Sa Majesté de surveiller l'évolution des travaux relatifs aux composants ne change pas le fait qu'il n'y avait aucune relation contractuelle directe entre la Com Dev et Sa Majesté. De plus, aucun élément de preuve n'indiquait que la Spar, en retenant les services de la Com Dev en vertu du contrat Spar-Com Dev, agissait simplement comme mandataire de Sa Majesté. La Spar avait un contrat avec Sa Majesté pour agir comme entrepreneur général aux fins du projet Radarsat. C'est la Spar et non Sa Majesté qui a payé toutes les sommes dues à la Com Dev en vertu du contrat Spar-Com Dev.

[38] Lorsque la Com Dev s'est rendu compte qu'elle allait subir une perte à l'égard du contrat qu'elle avait conclu avec la Spar, elle a cherché à demander une indemnisation du gouvernement du Canada pour minimiser ses pertes. Toutefois, elle n'y est pas parvenue, car il n'y avait aucune relation contractuelle entre elle et le gouvernement du Canada. Toute demande d'indemnisation financière devait être présentée à la Spar, qui était libre de soumettre ou non la demande au gouvernement du Canada. La Spar a choisi de ne pas présenter la demande d'indemnisation financière. La Cour conclut que les paiements reçus de la Spar par la Com Dev résultaient des droits et obligations établis en vertu du contrat Spar-Com Dev et n'étaient pas des paiements contractuels provenant de Sa Majesté.

[39] L'intimée soutient également que, pour ce qui est de l'alinéa 127(11.1)c) de la Loi, les termes « relatif à » (soit, dans la version anglaise, « in respect of » ) doivent être interprétés selon la portée la plus large possible[7].

[40] Question d'interprétation législative, le sens ordinaire des termes doit être appliqué à la définition de « paiement contractuel » . Les termes « relatif à » sont utilisés pour indiquer que le montant de l'aide gouvernementale, de l'aide non gouvernementale ou du paiement contractuel doit se rapporter à la dépense admissible. La vaste formulation de l'alinéa 127(11.1)c) n'a pas été utilisée à l'alinéa b) de la définition de « paiement contractuel » figurant au paragraphe 127(9), et cette vaste formulation ne peut être interprétée comme s'appliquant à l'alinéa b).

UN PAIEMENT CONTRACTUEL ÉTAIT-IL PAYABLE POUR DES TRAVAUX DE RSDE À FAIRE AU PROFIT DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL OU D'UN GOUVERNEMENT PROVINCIAL?

[41] Bien qu'elle ait conclu que les paiements reçus par la Com Dev n'étaient pas payables par le gouvernement fédéral ou un gouvernement provincial, la Cour doit également déterminer si les paiements reçus par la Com Dev étaient payables pour des travaux de RSDE.

[42] La preuve indique que la clause relative aux droits de Sa Majesté concernant les « informations techniques et inventions conçues, élaborées ou pour la première fois effectivement mises en oeuvre dans l'exécution du travail » (clause 12.3) était modifiée par la clause 12.7. Cette dernière clause avait à tout le moins pour effet de limiter grandement les droits de propriété de Sa Majesté concernant les informations techniques et inventions assujetties au contrat. Ce sont ces clauses potentiellement conflictuelles qui empêchent de dire que le contrat Spar-Com Dev est tout ce qu'il y a de plus clair. Donc, la Cour n'est pas limitée par la règle d'exclusion de la preuve extrinsèque et peut aller au-delà du contrat et examiner la preuve accessoire entourant le contrat.

[43] En vertu du contrat entre la Spar et la Com Dev, la Com Dev conservait les droits relatifs à la technologie qu'elle avait au début du contrat. Les travaux faits à partir de la technologie ainsi conservée représentaient, comme je l'ai déjà dit, une adaptation quant aux droits de propriété de l'appelante visant à répondre aux exigences de la Spar concernant les composantes. Les actions des parties au contrat étayent l'intention déclarée des parties dont la preuve fait état, à savoir que la Spar ne s'était pas montrée intéressée à acheter la technologie et que c'est en fait par la suite qu'elle a cherché à acheter la technologie à la Com Dev, pour le projet Radarsat II. Aucune preuve n'indique que Sa Majesté a fait valoir ou a cherché à obtenir l'un quelconque des droits de propriété intellectuelle dont l'intimée prétend maintenant qu'ils appartenaient à Sa Majesté. À l'appui de l'argument selon lequel ces droits de propriété intellectuelle appartenaient à Sa Majesté, l'intimée a produit une annotation figurant dans certains documents techniques (voir la pièce A-1, onglets 28 à 34), une confirmation figurant à la fin d'un document présenté par la Com Dev lors d'une conférence sur l'espace (pièce A-1 supplémentaire, onglet 9, page 130), ainsi que de la correspondance interne de la Com Dev avertissant les employés de la Com Dev au sujet de l'utilisation de l'information qui figurait dans des documents présentés à la Spar et dont d'autres compagnies étaient légitimement propriétaires (pièce A-1, onglet 37). La Cour conclut que cette preuve ne modifie pas l'examen qu'elle a fait des éléments de preuve concernant la relation contractuelle et l'intention des parties.

[44] Il est clair que la preuve indique qu'il n'y avait pas de résultats brevetables attribuables aux travaux effectués par l'appelante dans la production des composantes. La Com Dev a conservé tous les droits relatifs à la technologie qu'elle avait préalablement développée. La Com Dev avait le patrimoine et les moyens pour adapter et développer sa technologie existante et faire les recherches nécessaires de manière à livrer les composantes faisant l'objet du contrat conclu avec la Spar. Tous les témoins ont confirmé que la Spar n'entendait pas acheter et n'a pas acheté au profit du gouvernement du Canada les travaux de recherche-développement relatifs aux composantes achetées. Je conclus en l'espèce que la relation contractuelle, basée sur un prix ferme pour l'achat des composantes, n'incluait pas l'achat de travaux de RSDE.

CONCLUSION

[45] Les montants en question sont des « dépenses admissibles » au sens du paragraphe 127(9).

[46] Les montants payés par la Spar à la Com Dev ne constituent pas des paiements contractuels au sens de l'alinéa b) du paragraphe 127(9) de la Loi.

[47] L'appelante a droit à une déduction de CII pour les années en question selon les calculs prévus au paragraphe 127(5) sans réduction, conformément à l'alinéa 127(11.1)c) de la Loi.

DÉCISION

[48] Les appels sont admis, et les cotisations déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, compte tenu du fait que l'appelante a droit aux crédits d'impôt à l'investissement sans réduction en vertu de l'alinéa 127(11.1)c) de la Loi.

[49] L'appelante a droit à ses frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de mars 1999.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 9e jour de juillet 1999.

Mario Lagacé, réviseur



[1]           Voir les paragraphes 14 et 15 de l'exposé conjoint partiel des faits.

[2]           Technologie appartenant à la Com Dev avant le contrat conclu avec la Spar.

[3]           Pièce A-1, onglet 21.

[4]           Ibid.

[5]           Pièce A-1 supplémentaire, onglet 8.

[6]            L'expression « paiement contractuel » figurant au paragraphe 127(9) a été modifiée en 1994 concernant les montants qui devenaient payables après le 20 décembre 1991.

[7]           Voir Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, à la page 39, et The Queen v. Fording Coal Limited, 95 DTC 5672 (C.A.F.), à la page 5674.

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