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Date : 20000228

Dossier : 98-651-IT-I

ENTRE :

JEFF CRAWFORD,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

La juge Lamarre, C.C.I.

[1] Les présents appels, interjetés sous le régime de la procédure informelle, se rapportent à des cotisations établies par le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”) relativement aux années d'imposition 1994, 1995 et 1996 de l'appelant.

[2] Dans le calcul de son revenu pour ces années d'imposition, l'appelant a déduit les frais suivants relatifs à un emploi :

Frais relatifs à un emploi déduits pour 1994, 1995 et 1996

Description 1994 1995 1996

Frais comptables/juridiques 75,00 $ 250,00 $ 214,00 $

Appels interurbains 567,98

Repas, boissons 341,86 206,95

Vêtements 249,40

Fournitures 154,34

Endroit de travail à domicile 7 757,29 951,99 899,57

Frais d'automobile 3 379,88 3 164,52 2 716,53

Total 11 780,15 $ 4 957,77 $ 4 191,39 $

[3] Le ministre a refusé la déduction de toutes ces dépenses en s'appuyant sur les faits énoncés aux paragraphes 7, 8, 9 et 10 de la réponse à l'avis d'appel. Ces paragraphes sont rédigés comme suit :

[TRADUCTION]

7. Ces nouvelles cotisations qu'a établies le ministre à l'égard de l'appelant se fondent sur les hypothèses de fait suivantes :

[...]

b) l'appelant travaille à plein temps pour la Ville d'Ottawa;

c) au cours des années d'imposition 1994, 1995 et 1996, l'appelant était un pompier volontaire pour le service des incendies de Kemptville;

d) l'appelant n'a jamais été un employé du service des incendies de Kemptville au cours de la période en cause;

e) au cours des années d'imposition 1994, 1995 et 1996, une allocation fixe, établie selon le nombre d'incendies et de séances de formation et de cours auxquels il a participé, a été versée à l'appelant par le service des incendies de Kemptville pour les frais qu'il a engagés dans l'exercice de ses fonctions de pompier volontaire;

f) le service des incendies de Kemptville n'effectuait pas de retenues à la source sur les allocations fixes pour frais versées à l'appelant;

g) le service des incendies de Kemptville a versé à l'appelant les montants bruts de 2 118,48 $ en 1994, de 1 865,13 $ en 1995 et de 2 570,52 $ en 1996 à titre d'allocations pour les frais que l'appelant a engagés dans l'exercice de ses fonctions de pompier volontaire;

h) le service des incendies de Kemptville a exclu du revenu de l'appelant l'allocation pour frais qui lui était versée, jusqu'à concurrence du maximum annuel de 500 $ permis par le sous-alinéa 6(1)b)(iii) [sic] de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”);

i) l'appelant a inclus dans le calcul de son revenu pour fins fiscales les montants nets de 1 618,48 $ en 1994, de 1 365,13 $ en 1995 et de 2 070,52 $ en 1996;

j) exception faite des allocations pour frais dont il est fait mention à l'alinéa 7c) [sic] plus haut, l'appelant ne recevait du service des incendies de Kemptville aucun salaire ni aucune rémunération pour l'accomplissement de ses fonctions de pompier volontaire;

k) l'appelant a déduit les montants de 11 780,15 $ en 1994, de 4 957,77 $ en 1995 et de 4 191,39 $ en 1996 à titre de frais relatifs à un emploi qu'il a engagés dans l'accomplissement de ses fonctions de pompier volontaire;

l) la déduction des frais relatifs à un emploi dont il est fait mention au paragraphe 7k) ci-dessus a été refusée parce qu'il ne s'agit pas de dépenses engagées ou effectuées par l'appelant en vue de tirer un revenu de l'exercice de ses fonctions de pompier volontaire;

m) l'appelant ne peut déduire les montants indiqués au paragraphe 7k) plus haut à titre de frais relatifs à un emploi.

8. Le ministre soutient que les frais comptables et juridiques et les frais d'appels interurbains, de vêtements, de repas et de boissons ne peuvent être déduits en vertu du paragraphe 8(2) de la Loi.

9. Le ministre soutient que l'appelant n'a pas besoin d'un endroit de travail à domicile et que les frais déduits sont déraisonnables.

10. Le ministre soutient que les taux d'utilisation de l'automobile à des fins liées au travail de 68 %, de 58 % et de 56 % en 1994, 1995 et 1996, respectivement, sont injustifiés et déraisonnables.

[4] Lors de l'audience, l'avocate de l'intimée a indiqué à la Cour qu'elle convenait que, au cours des années en cause, l'appelant tirait un revenu d'une charge ou d'un emploi suivant le paragraphe 5(1) de la Loi, revenu qui lui était versé par le service des incendies de Kemptville relativement à l'accomplissement de ses fonctions de pompier volontaire.

[5] L'intimée fait valoir néanmoins que l'appelant ne peut déduire les frais en cause puisqu'il s'agit de dépenses qui n'ont pas été engagées ou effectuées par l'appelant en vue de tirer un revenu de l'accomplissement de ses fonctions de pompier volontaire et qui ne sont donc pas déductibles en vertu du paragraphe 8(1) de la Loi. Plus précisément, l'intimée soutient (1) que les frais comptables et juridiques et les frais d'appels interurbains, de vêtements et de repas et boissons déduits ne peuvent être déduits en vertu du paragraphe 8(2) de la Loi, (2) que l'appelant n'était pas tenu d'aménager un endroit de travail à domicile, et (3) que les montants déduits pour l'utilisation de son automobile pour les fins de son travail dans chaque année visée sont excessifs.

[6] L'appelant a admis ne pas avoir le droit de déduire de frais comptables et juridiques, mais prétend avoir droit à toutes les autres déductions.

[7] L'appelant et M. Timothy Gordon Bond, le chef du service des incendies de Kemptville, ont tous deux témoigné.

[8] M. Bond a expliqué les tâches du capitaine Crawford, l'appelant. Il a déposé en preuve un document portant sur les fonctions d'un capitaine (pièce R-1). Ce document se lit comme suit :

[TRADUCTION]

CAPITAINE

ÉNONCÉ GÉNÉRAL DES FONCTIONS :

Être responsable de la compagnie de pompiers qui lui est assignée et effectuer le travail qui y est relié, selon les besoins.

ÉLÉMENTS DISTINCTIFS DU GRADE :

Il s'agit d'un travail de supervision qui comprend des responsabilités relatives à la direction des activités d'une compagnie de pompiers sur les lieux d'une urgence ou à la caserne. Le travail se fait conformément aux politiques établies et requiert l'exercice d'un bon jugement dans des situations d'urgence. Le/la capitaine répond aux appels urgents assignés à sa compagnie et prend le commandement jusqu'à ce qu'un officier supérieur prenne la relève.

EXEMPLES DES TÂCHES :

• répond aux alertes assignées à sa compagnie

• désigne du personnel pour mettre en place et connecter des tuyaux d'incendié et des lances d'incendie, pour ouvrir et fermer les bouches d'eau, pour pointer les tuyaux d'incendie, pour monter les échelles, pour ventiler les édifices, pour effectuer de la récupération, pour procéder à des opérations de sauvetage, pour stabiliser les lieux où se retrouvent des matières dangereuses et pour s'acquitter d'autres fonctions visant à sauver des vies ou des biens dans des situations où le service des incendies peut être appelé à agir

• procéder à l'inspection des lieux de l'incendie pour empêcher que le feu ne reprenne

• surveiller le nettoyage, la vérification et le remplacement des outils et de l'équipement après une urgence

• surveiller le travail des pompiers pour s'assurer qu'il est effectué de façon sécuritaire et conformément à la procédure établie

• inspecter l'équipement, le terrain et la caserne pour s'assurer que tout est en état

• signaler les insuffisances au chef adjoint du service des incendies

• faire respecter la discipline

• entraîner et former les pompiers

• tenir un dossier faisant état des activités de formation

• rencontrer régulièrement le chef et le chef adjoint du service des incendies pour discuter des opérations générales du service

• accomplir toute autre tâche que lui assigne le chef du service des incendies

CONNAISSANCES, HABILETÉS ET CAPACITÉS REQUISES :

• bonne connaissance des méthodes modernes de lutte contre les incendies et de la prévention des incendies

• bonne connaissance de la municipalité et des régions circonvoisines visées par une entente de protection

• bonne connaissance du type de bâtiments que l'on retrouve dans la zone qui lui a été assignée

• bonne connaissance des méthodes de sauvetage et des premiers soins

• bonne connaissance des consignes et règles de sécurité et de l'équipement de sécurité

• doit avoir la capacité de superviser des pompiers et de faire respecter la discipline; doit avoir un bon jugement, être débrouillard et en bonne condition physique

EXPÉRIENCE ET FORMATION :

Doit avoir au moins cinq années d'expérience satisfaisante en tant que pompier et avoir reçu une formation supplémentaire dans des écoles de pompiers régionales ou au moyen de séminaires de formation.

CONDITIONS DE TRAVAIL :

Le/la capitaine doit pouvoir travailler peu importe les conditions météorologiques et le faire dans des circonstances difficiles. Il/elle pourrait être appelé(e) à pénétrer dans des atmosphères ou des lieux dangereux et devra travailler de façon sécuritaire.

[9] Selon M. Bond, en pratique, les pompiers sont avertis d'un incendie par téléavertisseur. Ils doivent se rendre directement sur les lieux de l'urgence ou à la caserne — selon celui des deux qui est le plus rapproché — à partir de l'endroit où ils se trouvent lorsqu'ils reçoivent l'appel. S'ils se rendent directement sur les lieux de l'incendie, ils utilisent leurs propres moyens de transport. Une fois sur place, ils dirigent les opérations sur le terrain jusqu'à ce que les autres pompiers arrivent.

[10] Le capitaine est en outre responsable de la formation des pompiers inexpérimentés. Il doit également faire de la recherche et mener à bien des projets relativement aux programmes de sécurité, ce qui comprend notamment le fait de donner des cours sur la prévention des incendies destinés aux écoles, aux maisons de soins infirmiers et aux hôpitaux. Ces cours ont lieu à la caserne.

[11] Bien que les pompiers ne soient pas tenus de posséder un téléphone cellulaire ou de travailler à domicile, les deux leur sont utiles. En fait, un pompier peut être joint sur son téléphone cellulaire s'il en donne le numéro à la caserne. Il est également utile, pour le capitaine, de travailler chez lui puisque la caserne n'offre pas l'espace nécessaire. En contre-interrogatoire, M. Bond a reconnu que la caserne contient une très grande salle de réunion et une cuisine, mais il a indiqué qu'il est plus pratique pour le capitaine de préparer ses cours à la maison.

[12] Selon M. Bond, il était rare que les pompiers aient à travailler durant une période de plus de 12 heures à l'extérieur de la municipalité de Kemptville. Il a également indiqué en contre-interrogatoire que les pompiers recevaient en moyenne de 160 à 180 appels par année au total et qu'une demi-douzaine d'entre eux tout au plus provenaient de l'extérieur de la municipalité de Kemptville, dont la superficie est d'environ 150 milles carrés.

[13] M. Bond a expliqué que tous les pompiers volontaires sont rémunérés selon un système de partage. Par exemple, comme l'indique la pièce R-2, la municipalité de Kemptville a accordé une rétribution de 40 000 $ pour l'année 1999 pour tous les pompiers volontaires. Ce montant a été distribué parmi les pompiers selon le nombre de points accumulé par chacun d'eux. Pour une heure de travail ou moins, le pompier reçoit un point. En plus de cela, les officiers, comme l'appelant, reçoivent un chèque supplémentaire de 850 $ par an. M. Bond a souligné que le même système de partage existait au cours des années en cause.

[14] M. Bond reconnaît avoir signé le formulaire T2200 que l'appelant a joint à sa déclaration de revenus (pièce R-3). Sur ce formulaire, M. Bond indiquait que le corps de pompiers volontaires de Kemptville (l'“ employeur ”) (1) exigeait normalement de l'appelant qu'il travaille ailleurs qu'au lieu d'affaires de l'employeur, (2) exigeait de l'appelant qu'il acquitte lui-même ses frais, (3) exigeait de l'appelant qu'il s'absente durant une période d'au moins 12 heures du territoire de la municipalité de Kemptville, et (4) rémunérait l'appelant à la commission selon le volume des contrats négociés. M. Bond a également indiqué dans cette déclaration que l'appelant devait lui-même acquitter les frais reliés à son véhicule, à ses repas et à son bureau à domicile, et que les employés ne recevaient pas d'allocation ni de remboursement pour les dépenses faites en vue de gagner un revenu d'emploi. La déclaration indique également que, en vertu d'un contrat d'emploi, l'appelant devait utiliser une partie de sa résidence comme bureau et payer les fournitures qu'il consommait directement dans son travail.

[15] M. Bond a indiqué ne pas avoir rempli cette déclaration lui-même pour chacune des années en cause, mais a précisé qu'il l'avait lue avec attention la première fois qu'il l'avait signée. Il a dit ne pas très bien connaître les dispositions de la Loi, mais il pensait avoir répondu aux questions de façon valable.

[16] Néanmoins, en contre-interrogatoire, M. Bond a clairement indiqué qu'il n'était pas obligatoire de posséder un téléphone cellulaire. Il a également dit qu'il ne pouvait obliger un officier ou un capitaine à utiliser une partie de sa résidence comme bureau (bien que cela eût sûrement été plus pratique) puisque ceux-ci auraient alors demandé un remboursement et la municipalité ne disposait d'aucun budget pour cela. Quant aux fournitures, toujours selon M. Bond, mis à part les vêtements personnels que les pompiers peuvent avoir à porter lorsqu'ils se rendent directement sur les lieux d'un incendie, ils ne sont pas tenus de fournir quelque fourniture que ce soit pour le travail.

[17] Pour ce qui est de l'utilisation de véhicules, il n'existait, selon M. Bond, aucune exigence selon laquelle les pompiers devaient utiliser leur propre automobile, mais ils devaient se rendre sur les lieux de l'incendie ou à la caserne de pompiers, selon celui de ces endroits qui était le plus proche, et ils devaient le faire par leurs propres moyens. Si les pompiers utilisent leur propre voiture et remettent une feuille indiquant le kilométrage parcouru dans le cadre de leur travail, le service des incendies de Kemptville les rembourse.

[18] L'appelant a indiqué avoir fini le sous-sol de sa maison, y aménageant un bureau où se retrouvent un ordinateur et quelques dossiers. Il a également construit, a-t-il dit, un garage pour stationner son camion et son automobile.

[19] Pour 1994, il a déduit dans une proportion de 49 %, comme étant liées à son travail, des dépenses afférentes à son domicile. Cette proportion a été réduite à 17 % pour 1995, puis augmentée à 24 % pour 1996.

[20] Au cours des années en cause, l'appelant a travaillé pour la Ville d'Ottawa et en tant que pompier volontaire pour la municipalité de Kemptville. Il a dit avoir travaillé de 500 à 600 heures par année à son domicile pour la municipalité de Kemptville, sans rémunération. Il rencontrait des gens à son domicile pour des fins professionnelles, mais cela lui arrivait très rarement. Sur le formulaire T2200, il déclare avoir parcouru 33 152 kilomètres en 1994, 29 602 kilomètres en 1995 et 28 512 kilomètres en 1996 pour la municipalité de Kemptville. De plus, il a dit qu'il demeurait à une distance de six milles de la caserne de pompiers de Kemptville. En contre-interrogatoire, il n'a pu justifier tout le kilométrage indiqué sur le formulaire. Il n'a pas non plus été capable d'expliquer pourquoi il a déduit 154 $ pour des fournitures en 1996 et rien dans les années précédentes. Il n'a pu expliquer pourquoi il a déduit 567,98 $ pour des appels interurbains en 1994, et rien en 1995 et 1996. Contrairement à M. Bond, l'appelant a dit dans son témoignage avoir été obligé de travailler sur une période de plus de 12 heures à plusieurs occasions.

Analyse

[21] Les articles pertinents de la Loi sont les suivants :

Éléments à inclure

ARTICLE 6: Éléments à inclure à titre de revenu tiré d'une charge ou d'un emploi.

(1) Sont à inclure dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, ceux des éléments suivants qui sont applicables :

86(1)b)w

b) Frais personnels ou de subsistance — les sommes qu'il a reçues au cours de l'année à titre d'allocations pour frais personnels ou de subsistance ou à titre d'allocations à toute autre fin, sauf :

[...]

(vii) les allocations raisonnables pour frais de déplacement, à l'exception des allocations pour l'usage d'un véhicule à moteur, qu'un employé — dont l'emploi n'est pas lié à la vente de biens ou à la négociation de contrats pour son employeur — a reçues de son employeur pour voyager, dans l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, à l'extérieur :

(A) de la municipalité où était situé l'établissement de l'employeur dans lequel l'employé travaillait habituellement ou auquel il adressait ordinairement ses rapports,

(B) en outre, le cas échéant, de la région métropolitaine où était situé cet établissement,

(vii.1) les allocations raisonnables pour l'usage d'un véhicule à moteur qu'un employé — dont l'emploi n'est pas lié à la vente de biens ou à la négociation de contrats pour son employeur — a reçues de son employeur pour voyager dans l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi,

(viii) les allocations reçues — jusqu'à concurrence de 500 $ au total — par un pompier volontaire, d'un gouvernement, d'une municipalité ou d'une autre administration au titre des dépenses qu'il a engagées dans l'accomplissement ou en vertu de ses fonctions de volontaire,

[...]

pour l'application des sous-alinéas (v), (vi) et (vii.1), une allocation reçue au cours de l'année par le contribuable pour l'usage d'un véhicule à moteur dans l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi est réputée ne pas être raisonnable dans les cas suivants :

(x) l'usage du véhicule n'est pas, pour la fixation de l'allocation, uniquement évalué en fonction du nombre de kilomètres parcourus par celui-ci dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi,

(xi) le contribuable, à la fois, reçoit une allocation pour cet usage et est remboursé de tout ou partie de ses dépenses pour le même usage (sauf s'il s'agit d'un remboursement pour frais d'assurance-automobile commerciale supplémentaire, frais de péage routier ou frais de traversier et si l'allocation a été déterminée compte non tenu des dépenses ainsi remboursées);

Déductions

ARTICLE 8: Éléments déductibles.

(1) Sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant :

88(1)h)w

h) Frais de déplacement — lorsque le contribuable, au cours de l'année, à la fois :

(i) a été habituellement tenu d'exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur ou à différents endroits,

(ii) a été tenu, en vertu de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais de déplacement qu'il a engagés pour l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi,

les sommes qu'il a dépensées pendant l'année (sauf les frais afférents à un véhicule à moteur) pour se déplacer dans l'exercice des fonctions de son emploi, sauf s'il a, selon le cas :

(iii) reçu une allocation pour frais de déplacement qui, par l'effet des sous-alinéas 6(1)b)(v), (vi) ou (vii), n'est pas incluse dans le calcul de son revenu pour l'année,

(iv) demandé une déduction pour l'année en application des alinéas e), f) ou g);

88(1)h.1)w

h.1) Frais afférents à un véhicule à moteur — dans le cas où le contribuable, au cours de l'année, à été habituellement tenu d'accomplir les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur ou à différents endroits et a été tenu, aux termes de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais afférents à un véhicule à moteur qu'il a engagés dans l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, les sommes qu'il a dépensées au cours de l'année au titre des frais afférents à un véhicule à moteur pour se déplacer dans l'exercice des fonctions de son emploi, sauf s'il a, selon le cas :

(i) reçu une allocation pour frais afférents à un véhicule à moteur qui, par l'effet de l'alinéa 6(1)b), n'est pas incluse dans le calcul de son revenu pour l'année,

(ii) demandé une déduction pour l'année en application de l'alinéa f);

88(1)i)w

i) Cotisations et autres dépenses liées à l'exercice des fonctions — dans la mesure où il n'a pas été remboursé et n'a pas le droit d'être remboursé à cet égard, les sommes payées par le contribuable au cours de l'année au titre :

[...]

(iii) du coût des fournitures qui ont été consommées directement dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi et que le contrat d'emploi du cadre ou de l'employé l'obligeait à fournir et à payer,

88(2)w

(2) Restriction générale. Seuls les montants prévus au présent article sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi.

88(4)w

(4) Repas. La somme dépensée par un cadre ou un employé pour son repas ne peut être incluse dans le calcul du montant d'une déduction en vertu de l'alinéa (1)f) ou h) que si le repas a été pris au cours d'une période où les fonctions de ce cadre ou de cet employé l'obligeaient à être absent, durant une période d'au mois douze heures, de la municipalité dans laquelle était situé l'établissement de l'employeur où il se présentait habituellement pour son travail et à être absent, le cas échéant, de la région métropolitaine où cet établissement était situé.

88(10)w

(10) Attestation de l'employeur. Un contribuable ne peut déduire un montant pour une année d'imposition en application des alinéas (1)f), h) ou h.1) ou des sous-alinéas (1)i)(ii) ou (iii) que s'il présente, en même temps que sa déclaration de revenu pour l'année en vertu de la présente partie, un formulaire prescrit, signé par son employeur, qui atteste que les conditions visées à cette disposition ont été remplies quant au contribuable au cours de l'année.

88(13)w

(13) Travail à domicile. Malgré les alinéas (1)f) et i):

(a) un montant n'est déductible dans le calcul du revenu d'un particulier pour une année d'imposition tiré d'une charge ou d'un emploi pour la partie d'un établissement domestique autonome où le particulier réside que si cette partie, selon le cas:

(i) est le lieu où le particulier accomplit principalement les fonctions de la charge ou de l'emploi,

(ii) est utilisée exclusivement, au cours de la période à laquelle le montant se rapporte, aux fins de tirer un revenu de la charge ou de l'emploi et est utilisée pour rencontrer des clients ou d'autres personnes de façon régulière et continue dans le cours normal de l'exécution des fonctions de la charge ou de l'emploi.

[22] Avant d'analyser en détail les dépenses déduites par l'appelant, je vais formuler quelques commentaires sur les renseignements que l'on retrouve dans les déclarations (formulaires T2200) signées par M. Bond, tel que l'exige le paragraphe 8(10) de la Loi, pour chacune des années en cause. Or, il me semble que la majorité des renseignements consignés dans ces déclarations contredisent le témoignage de M. Bond. Par exemple, il est indiqué dans les déclarations que l'appelant devait normalement travailler ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur ou à différents endroits. Pourtant, M. Bond a témoigné qu'environ six des 160 ou 180 appels, en moyenne, par année provenaient de l'extérieur de la municipalité de Kemptville, dont la superficie est relativement restreinte.

[23] M. Bond a également indiqué dans les déclarations que l'appelant devait payer ses propres frais et qu'il touchait une rémunération sous forme de commissions. Cependant, le témoignage de M. Bond n'a pas réfuté l'allégation, formulée dans la réponse à l'avis d'appel, selon laquelle les pompiers recevaient une allocation qui devait normalement couvrir les frais qu'ils engageaient personnellement dans l'exercice de leurs fonctions de pompiers volontaires. M. Bond a dit également que les pompiers pouvaient recevoir de la municipalité de Kemptville un remboursement supplémentaire au titre des frais de déplacement s'ils présentaient une feuille indiquant le kilométrage effectué dans le cadre de leur travail.

[24] Les déclarations indiquent en outre que l'appelant devait être absent du territoire de la municipalité de Kemptville durant une période d'au moins 12 heures pour les fins de son travail, mais M. Bond a témoigné qu'une telle situation ne se présentait que de façon occasionnelle.

[25] Quant à la question des fournitures et d'un bureau à domicile, M. Bond a dit ne pouvoir forcer ses employés à les fournir puisqu'ils auraient alors exigé le remboursement des frais y relatifs. Dans les déclarations, M. Bond a indiqué que l'appelant devait assumer ces frais et était tenu aux termes de son contrat d'emploi d'utiliser une partie de sa résidence.

[26] Compte tenu de toutes ces contradictions, je ne crois pas que les déclarations qui accompagnaient les déclarations de revenu de l'appelant soient fiables et, dans les circonstances, je ne leur accorde aucun poids. Ayant fait ces commentaires, je vais maintenant analyser chacune des dépenses dont la déduction a été réclamée et déterminer si l'appelant peut les déduire de son revenu d'emploi.

Appels interurbains, vêtements et fournitures

[27] L'appelant a déduit 567,98 $ au titre d'appels interurbains pour 1994, mais rien pour 1995 et 1996. L'appelant a expliqué qu'il avait fait des appels interurbains d'Ottawa à Kemptville lorsqu'il travaillait à Ottawa. L'appelant a également déduit 249,40 $ pour les vêtements en 1995, mais rien en 1994 et en 1996. Il a déduit 154,34 $ pour des fournitures en 1996, mais rien en 1994 et en 1995.

[28] Selon le sous-alinéa 8(1)(i)(iii) de la Loi, dans la mesure où il n'a pas été remboursé et n'a pas le droit d'être remboursé à cet égard, l'appelant peut déduire les sommes payées au cours de l'année au titre du coût des fournitures qui ont été consommées directement dans l'accomplissement de ses fonctions, si son contrat d'emploi l'oblige à les fournir et à les payer. L'appelant n'a pas indiqué quelles fournitures faisaient l'objet de la déduction pour 1996. M. Bond a témoigné que l'appelant n'était pas tenu de fournir quoi que ce soit, à l'exception de ses vêtements. Il a clairement indiqué que l'utilisation d'un téléphone cellulaire n'était pas obligatoire. Les appels interurbains à partir Ottawa, où l'appelant travaillait pour un autre employeur, en l'occurrence la Ville d'Ottawa, n'étaient pas exigés par la municipalité de Kemptville. Quant aux vêtements, il a été décidé que les vêtements que portent habituellement des employés, ou qu'ils sont tenus de porter, ne sont pas des “ fournitures qui ont été consommées directement ” dans l'accomplissement des fonctions de ces employés (voir Goodman v. M.N.R., 53 DTC 225 (C.A.I.R.), Martyn v. M.N.R., 64 DTC 461 (C.A.I.) et le Bulletin d'interprétation IT-352R2, paragraphe 9). De plus, comme je l'ai mentionné plus haut, je ne peux me fier aux déclarations (formulaires T2200) qui accompagnaient les déclarations de revenu de l'appelant. Je suis en conséquence d'avis que l'appelant n'a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que ces dépenses étaient déductibles en vertu du sous-alinéa 8(1)i)(iii) et du paragraphe 8(2) de la Loi.

Repas et boissons

[29] L'appelant a déduit 341,86 $ en 1995, 206,95 $ en 1996 et rien en 1994 pour les repas et les boissons. Selon l'alinéa 8(1)h), les frais de déplacement sont déductibles si l'appelant a été habituellement tenu d'exercer ses fonctions ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur et qu'il a été tenu d'acquitter les frais de déplacement qu'il a engagés pour l'accomplissement de ses fonctions.

[30] Quant aux repas et boissons, l'appelant devait prouver, suivant le paragraphe 8(4), qu'ils ont été pris au cours d'une période où ses fonctions l'obligeaient à être absent, durant une période d'au moins 12 heures, de la municipalité de Kemptville.

[31] Selon le témoignage de M. Bond, cela n'arrivait qu'occasionnellement. L'appelant a dit que cela s'était produit à plusieurs reprises. L'appelant n'a pas justifié les montants déduits. Selon M. Bond, la municipalité de Kemptville répond à seulement six appels provenant de l'extérieur de la municipalité par année, sur un total de 160 à 180 appels. Cela voudrait dire que trois pour cent des appels proviennent de l'extérieur de la municipalité. Je trouve que ce pourcentage est très bas et je ne suis pas convaincue que ces frais de repas et de boissons qu'a engagés l'appelant dépassaient l'allocation annuelle de 500 $, exonérée d'impôt, qu'il recevait de la municipalité de Kemptville. Je conclus donc que l'appelant n'avait pas le droit de déduire ces dépenses.

Endroit de travail à domicile

[32] L'appelant a déduit 7 757,29 $ en 1994, 951,99 $ en 1995 et 899,57 $ en 1996 pour un endroit de travail à domicile. Selon le paragraphe 8(13), un montant est déductible au titre d'un endroit de travail à domicile si l'appelant peut démontrer (1) que cet endroit est le lieu où il accomplit principalement ses fonctions, ou (2) qu'il utilise cet endroit exclusivement aux fins d'obtenir un revenu du service des incendies de Kemptville, et qu'il l'utilise pour rencontrer des clients ou d'autres personnes de façon régulière et continue dans le cours normal de l'exécution de ses fonctions. Cela n'est visiblement pas le cas. La preuve présentée en l'espèce indique qu'il était plus pratique pour l'appelant de préparer ses cours à la maison, mais que son employeur ne l'obligeait pas à le faire. De plus, l'endroit où l'appelant accomplissait principalement ses fonctions n'était évidemment pas à la maison mais sur les lieux des incendies (comme on peut l'inférer de la pièce R-2). L'appelant n'a pas non plus démontré qu'il utilisait son endroit de travail à domicile exclusivement aux fins de tirer un revenu de la municipalité de Kemptville. Il a indiqué qu'il ne rencontrait des gens chez lui pour les fins de son travail que de façon occasionnelle, et qu'il n'était pas payé pour le travail qu'il effectuait à la maison. Je conclus donc que ces dépenses ne sont pas déductibles.

Frais d'automobile

[33] L'appelant a déduit des frais d'automobile de 3 379,88 $ en 1994, de 3 164,52 $ en 1995 et de 2 716,53 $ en 1996. Ces frais représentent surtout le coût du carburant et de l'entretien et les frais d'immatriculation. Suivant l'alinéa 8(1)h.1), l'appelant doit démontrer qu'il était habituellement tenu d'accomplir ses fonctions ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur ou à différents endroits et qu'il était tenu, aux termes de son contrat d'emploi, d'acquitter les frais afférents à un véhicule automobile qu'il engageait dans l'accomplissement de ses fonctions.

[34] Selon M. Bond, il n'existait aucun contrat d'emploi écrit, et si les pompiers devaient se déplacer hors de la municipalité de Kemptville avec leur propre automobile, ils étaient remboursés par leur employeur sur présentation d'un formulaire de demande. Il a également indiqué que les pompiers n'étaient pas tenus de posséder une automobile, qu'ils devaient toutefois se déplacer par leurs propres moyens pour se rendre à la caserne de pompiers ou sur les lieux de l'incendie, selon celui des deux qui était le plus proche.

[35] L'appelant a indiqué qu'il habitait à six milles (10 km) de la caserne. M. Bond a témoigné que la municipalité de Kemptville couvre une superficie de 150 milles carrés environ (240 km2). L'appelant prétend avoir parcouru 33 152 km en 1994, 29 602 km en 1995 et 28 512 km en 1996 dans le cadre de ses fonctions. En contre-interrogatoire, l'appelant n'a pu expliquer comment justifier un kilométrage si élevé sur un territoire aussi restreint. En fait, il est difficile d'imaginer que l'appelant ait utilisé son automobile pour parcourir 30 000 km en moyenne par année dans l'exercice de ses fonctions pour une municipalité qui couvre une superficie de 24 km sur 10 km. Cela est complètement déraisonnable et injustifié. Il est plus probable que ce kilométrage a été accumulé en voyageant quotidiennement entre Kemptville et Ottawa, où il avait son autre emploi. Le coût du transport entre deux ou plusieurs emplois occupés simultanément n'est pas déductible (voir Larocque v. M.N.R. (1966), 42 Tax A.B.C. 23).

[36] J'arrive par conséquent à la conclusion que l'appelant n'a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que les frais relatifs au véhicule automobile étaient déductibles au cours des années en cause.

[37] Les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de février 2000.

“ Lucie Lamarre ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 27e jour d'octobre 2000.

Erich Klein, réviseur

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