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Date: 19980116

Dossier: 97-682-IT-I

ENTRE :

GILLES TEASDALE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge G. Tremblay, C.C.I.

Point en litige

[1] Selon l’avis d’appel et la réponse à l’avis d’appel, il s’agit de savoir si le revenu gagné de l’appelant aux fins de la déduction de frais de garde d’enfants a correctement été déterminé à 1 360 $ et, conséquemment, si le montant de 907 $ a correctement été déduit dans le calcul du revenu de l’appelant à titre de frais de garde d’enfants pour l’année d’imposition 1995.

[2] L’appelant soutient que son salaire provenant de l’Aide au travailleur indépendant (A.T.I.) est un revenu gagné et non des prestations d’assurance-chômage, comme le prétend l’intimée.

Fardeau de la preuve

[3] L'appelant a le fardeau de démontrer que les cotisations de l'intimée sont mal fondées. Ce fardeau de la preuve découle de plusieurs décisions judiciaires dont un jugement de la Cour suprême du Canada rendu dans l'affaire Johnston c. le ministre du Revenu national[1]..

[4] Dans le même jugement, la Cour a décidé que les faits assumés par l'intimée pour appuyer les cotisations ou nouvelles cotisations sont également présumés vrais jusqu'à preuve du contraire. Dans la présente cause, les faits présumés par l'intimée sont décrits aux alinéas a) à f) du paragraphe 4 de la Réponse à l'avis d'appel. Ce paragraphe se lit comme suit :

4. Pour établir cette cotisation, le Ministre a tenu notamment pour acquis les faits suivants :

a. au cours de l’année en litige, l’appelant a déclaré les revenus suivants :

i. Revenus d’emploi 1 360 $

ii. Prestations d’assurance-chômage 27 150

ce qui fait un revenu total de : 28 510 $

[admis]

b. durant l’année en litige, l’appelant aurait payé un montant de 6 019 $ à titre de frais de garde pour enfants; [admis]

c. en produisant sa déclaration d’impôt pour l’année d’imposition 1995, l’appelant réclama une déduction au montant total de 6 019 $ à titre de frais de garde d’enfants; [admis]

d. en produisant sa déclaration d’impôt pour l’année d’imposition 1995, l’appelant a réclamé une déduction à titre de frais de garde d’enfants, pour les enfants suivants :

NOM NÉS LE

Katherine 13-09-90

Nicholas 16-03-92 [admis]

e. durant l’année en litige, le “ revenu gagné ” de l’appelant était de 1 360 $, tel qu’il appert à la rubrique revenus d’emploi à sa déclaration de l’année d’imposition 1995; [nié]

f. le montant de 907 $ déductible à titre de frais de garde d’enfants a correctement été considéré dans le calcul du revenu net de l’appelant, pour l’année d’imposition 1995, de la façon suivante :

le moindre des montants suivants :

i. Montant réel payé au cours de l’année 6 019 $

ii. 2/3 du revenu gagné : 1 360 $ =     907 $

iii. 2 enfants à 5 000 $ chacun    10 000 $

[nié]

[5] Les faits admis ci-dessus constituent la substance de la preuve. L’appelant conteste le fait que la case 14 du feuillet T4U inclut tous les montants reçus de Développement des ressources humaines Canada (ci-après “ D.R.H. ”) et que ces montants soient considérés comme “ prestations d’assurance-chômage ” à la ligne 119 du formulaire T-688. L’appelant soutient que l’allocation provenant de l’Aide au travailleur indépendant et l’allocation pour soins d’enfants à charge (pièce A-1) ne sont pas des prestations d’assurance-emploi.

[6] L’appelant soutient qu’en substance, les deux tiers du montant de 27 150 $ reçus de D.R.H. l’ont été comme aide au travailleur indépendant et comme aide pour soins d’enfants à charge. De mai à décembre 1995, l’appelant a reçu 619 $ par semaine à titre d’aide au travailleur indépendant (soit comme guide touristique) et 149 $ pour soins d’enfants à charge (pièce A-2). En somme, l’appelant soutient que la somme de 14 733 $ devrait être ajoutée au montant de 1 360 $ comme revenu gagné.

[7] Sous la pièce A-3, l’appelant a produit le formulaire de demande d’aide financière et d’inscription à une activité d’emploi. Ce document, entre autres, résume ainsi cette aide. L’appelant insiste sur le paragraphe souligné :

L’essentiel sur l’aide financière destinée au ...

Travail indépendant

Les recettes provenant d’une nouvelle entreprise ne sont pas traitées comme un revenu au moment de déterminer l’aide financière de base que la personne reçoit.

• La plupart des clients peuvent recevoir une aide financière pour une période allant jusqu’à 52 semaines.

• Les personnes handicapées peuvent recevoir de l’aide pour une période allant jusqu’à 78 semaines si le handicap réduit la possibilité que l’entreprise soit viable dans un délai d’un an.

L’entente conclue entre le client et le CRHC peut préciser que l’aide visera une période plus courte si le revenu que tire le client de l’entreprise devient suffisant.

Les participants sont aussi admissibles à des mesures de soutien personnelles, par exemple un montant pour couvrir les coûts de garderie.

Parce que les personnes qui participent à la prestation Travail indépendant peuvent ne pas être en mesure de prévoir avec précisioon leurs besoins financiers, les CRHC peuvent décider d’accorder une aide financière selon un taux fixe.

Les montants d’aide financière reçus ne sont pas assurables mais ils sont imposables.

[8] L’appelant se réfère aussi au texte détaillé, soulignant les points d’où l’on peut conclure qu’il s’agit de revenu gagné et non de prestations d’assurance-emploi :

Inscription à une activité en vertu de l’article 25

Aux termes de l’article 25 de la Loi sur l’assurance-emploi, un prestataire est en chômage, capable de travailler et disponible à cette fin, et donc admissible à des prestations d’assurance-emploi, lorsqu’il :

...

b) participe à toute autre activité d’emploi pour laquelle il reçoit de l’aide dans le cadre d’une prestation d’emploi et vers laquelle il a été dirigé par la Commission ou l’autorité qu’elle peut désigner.

...

Impôt sur le revenu

L’aide financière reçue dans le cadre de l’assurance-emploi est imposable, sauf l’aide fournie pour le paiement de frais de scolarité.

...

Aide financière

Dans le cadre de la Loi sur l’a.-e., la Commission a établi un certain nombre de prestations (programmes) d’emploi afin de permettre aux assuré(e)s d’obtenir du travail. Ces prestations d’emploi permettent de procurer de l’aide financière à l’appui de divers types d’activités d’emploi. Parmi les diverses formes que peut prendre l’aide financière pouvant être accordée à l’appui de chaque prestation d’emploi, il y a l’attribution d’une aide fiinancière directe aux assurés qui participent à une activité d’emploi. Cette aide directe peut servir à couvrir vos frais de subsistance et d’autres coûts comme les dépenses engagées pour prendre soin de personnes à charge, pour répondre à des besoins dus à un handicap, pour payer les frais d’inscription à des cours ou programmes d’instruction ou de formation ou pour couvrir vos frais de transport et d’hébergement. ...

[9] L’intimée a déposé la déclaration d’impôt de l’appelant de l’année 1995 (pièce I-1) et l’accord d’activité indépendante du 3 mai 1995 entre l’appelant et la Commission de l’emploi et de l’immigration du Canada (devenue Développement des ressources humaines Canada). L’intimée se réfère particulièrement aux deux paragraphes suivants :

ATTENDU QUE, en vertu du plan visant à aider les prestataires à fonder une entreprise ou à devenir travailleurs indépendants, plan établi à la Section III de la Partie VIII du Règlement sur l’assurance-chômage, la COMMISSION peut verser des prestations pour activité indépendante et, au besoin, des allocations supplémentaires à des prestataires occupés à élaborer et à mettre sur pied un projet d’entreprise en vertu d’un accord d’activité indépendante.

ATTENDU QUE le PRESTATAIRE est admissible aux prestations conformément à la Loi sur l’assurance-chômage qu’il souhaite créer une entreprise ou devenir travailleur indépendant et qu’il a présenté une demande de prestations pour activité indépendante et, le cas échéant, des allocations supplémentaires, conformément au plan d’assistance susmentionné;

...

ainsi qu’au paragraphe 3(1)a) de l’accord :

3.(1) Le PRESTATAIRE doit :

a) toutes les deux semaines, remplir la carte de déclarations du prestataire d’assurance-chômage qu’il reçoit de la COMMISSION et la renvoyer à la COMMISSION dans les délais prévus à l’article 34 du Règlement sur l’assurance-chômage;

[10] L’intimée se réfère à la disposition 63(1)e) de la Loi stipulant, entre autres sous le titre Frais de garde d’enfants, que le montant à recevoir par le contribuable est :

e) le moins élevé des montants suivants :

(i) les 2/3 du revenu gagné du contribuable pour l’année,

(ii) le total des montants suivants :

(A) le produit de 5 000 $ par le nombre d’enfants admissibles du contribuable pour l’année qui sont âgés de moins de 7 ans à la fin de l’année ou qui sont des personnes pour lesquelles un montant est déductible en application de l’article 118.3 dans le calcul de l’impôt payable par un contribuable en vertu de la présente partie pour l’année,

(B) le produit de 3 000 $ par le nombre d’enfants admissibles du contribuable pour l’année, à l’exception des enfants visés à la division (A),

[11] La notion de “ revenu gagné ” est définie à l’alinéa 63(3)b) qui se lit comme suit :

63(3)b) “ revenu gagné ”. — “ revenu gagné ” d’un contribuable signifie le total

(i) des traitements, salaires et autre rémunération, y compris les gratifications, reçus par lui dans le cadre de charges ou d’emplois, et de toutes les sommes incluses dans le calcul de son revenu en vertu des articles 6 et 7,

(ii) des sommes incluses dans le calcul de son revenu, en vertu de l’alinéa 56(1)m), n) ou o), et

(iii) des revenus qu’il tire de toutes les entreprises qu’il exploite soit seul, soit comme associé participant activement à l’exploitation de l’entreprise;

[12] La définition de “ prestations d’assurance-chômage ” se retrouve au sous-alinéa 56(1)a)(iv) de la Loi :

56(1) Sans préjudice de la portée générale de l’article 3, sont à inclure dans le calcul du revenu d’un contribuable pour une année d’imposition :

a) Pensions, prestations d’assurance-chômage, etc. — toute somme reçue par le contribuable au cours de l’année en titre, ou en paiement intégral ou partiel :

(iv) d’une prestation versée en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi, à l’exception d’un versement lié au coût d’un cours ou d’un programme destiné à faciliter le retour d’un prestataire sur le marché du travail aux termes de cette loi.

[13] La Cour, considérant l’ensemble de la preuve et spécialement les définitions de “ revenu gagné ” et de “ prestations d’assurance-chômage ”, considérant que les sommes reçues par l’appelant, soit à titre d’allocations d’aide au travailleur indépendant, soit à titre d’allocations pour soins d’enfants à charge, le sont en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi et doivent être considérées comme des prestations d’assurance-emploi.

[14] Ces sommes ne peuvent donc pas être considérées comme un revenu gagné malgré certains aspects soulevés par l’appelant.

Conclusion

[15] L’appel est rejeté.

“ Guy Tremblay ”

J.C.C.I.



[1] [1948] R.C.S. 486, 3 DTC 1182, [1948] C.T.C. 195.

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