Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date : 19971127

Dossiers : 95-4033-IT-G; 95-4038-IT-G; 95-4001-IT-G; 95-4000-IT-G; 95-4032-IT-G; 95-4002-IT-G

ENTRE :

SPIRE FREEZERS LIMITED, EDWARD BUTCHER, JOHN DOBREI, PATRICK GOUVEIA, MAROJE MILOSLAVIC, JOHN O’NEILL,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Rip, C.C.I.

[1] Spire Freezers Limited, Edward Butcher, John Dobrei, Patrick Gouveia, Maroje Miloslavic and John O’Neill (ci-après parfois appelés les “Canadiens”) interjettent appel contre des cotisations d'impôt relatives à l'année 1987 par lesquelles le ministre du Revenu national (le “ministre”) a rejeté les déductions qu'ils avaient faites à l'égard de pertes autres qu'en capital et de pertes en capital pour l'année 1987. Les appelants ci-après désignés interjettent également appel à l'égard d'années d'imposition subséquentes dans lesquelles les pertes reportées de l'année 1987 ont été rejetées :

Appelant Année d'imposition

Spire Freezers Limited 1990

Patrick Gouveia 1989

John Dobrei 1988

Edward Butcher 1990

[2] Les avocats ont convenu que les appels seraient entendus ensemble sur preuve commune et que la décision qui serait rendue dans l'appel interjeté par Spire Freezers Limited s'appliquerait à tous les appels. De fait, la preuve présentée à l'audience se rapportait à l'appel interjeté par cette dernière.

[3] En 1987, une société en nom collectif créée en vertu des lois de la Californie sous la raison sociale Hamilton Cove Partnership (“HCP”) était en train d'assurer la promotion et la construction d'un condominium à usage d'habitation composé de 423 unités sur l'île Santa Catalina, en Californie, (parfois appelé le “condominium de HCP” ou le “projet de Hamilton Cove”). Les associés de HCP étaient BCE Developments Inc. (“BDI”), une corporation du Delaware, et Peninsula Cove Corporation (“Peninsula”), une corporation de la Californie. Peninsula était une filiale possédée en propriété exclusive de BDI qui, de son côté, était une filiale de BCE Development Corporation (“BCED”), une corporation canadienne, dont BCE Inc. a finalement été propriétaire.

[4] À la fin de 1986, les coûts du condominium dont HCP était le promoteur-constructeur excédaient de beaucoup la juste valeur marchande du projet (d'environ 10 millions de dollars US), ce qui risquait d'occasionner des pertes importantes à HCP.

[5] M. Jeffrey Wagner, autrefois administrateur et directeur, Impôt, de BDI, a témoigné que le processus d'obtention de permis en vue de la promotion du condominium de HCP avait été long et qu'afin d'obtenir des autorités locales la permission de construire les condominiums, HCP avait convenu d'acheter un ensemble d'habitations pour les personnes à faible revenu connu sous le nom d'appartements de la rue Tremont (les “appartements Tremont”), à Avalon, sur l'île Santa Catalina.

[6] Les appartements Tremont appartenaient à une corporation californienne connue sous le nom de “Tremont Street Apartments Corporation” (“TSAC”). Il s'agissait d'un ensemble d'habitations locatives pour les personnes à revenu faible ou modeste subventionné et contrôlé par les administrations fédérale et étatique et composé de 20 à 30 unités.

[7] M. Wagner a déclaré qu'il doutait que HCP aurait construit les appartements Tremont isolément, c'est-à-dire autrement que comme moyen d'obtenir l'autorisation de construire le condominium. BDI était prête à vendre les appartements Tremont si elle obtenait un prix qui lui convenait étant donné qu'elle ne considérait pas cet immeuble comme un actif stratégique et qu'elle s'occupait généralement de construction en vue de la revente. Ni BDI ni Peninsula n'envisageaient de tirer un bénéfice des appartements Tremont étant donné qu'à leurs yeux, il s'agissait d'un coût lié à la promotion du condominium.

[8] M. Wagner a expliqué que Hamilton Cove Development était considérée comme une “coentreprise”, terme communément utilisé aux États-Unis lorsque plus d'une personne a des intérêts dans une activité commerciale. Il a expliqué que BDI et Peninsula participaient “moitié-moitié” dans HCP, mais que BDI était propriétaire à 100 p. 100 de Peninsula. Il estimait que BDI était propriétaire à 100 p. 100 de la société. Il a déclaré que le partage du compte capital ne lui importait donc pas.

[9] Il semblerait qu'à un moment donné en 1987, BDI et Peninsula aient envisagé la possibilité de disposer des parts qu'elles avaient dans la société HCP à condition que le condominium de HCP soit conservé ou transféré à BDI.

[10] À la fin du mois de mai 1987, M. Jim Millson, de CMF Enterprises Ltd. (“CMF”), une compagnie de Toronto qui s'occupait de la vente d'abris fiscaux, semble avoir préparé une proposition de deux pages intitulée : “Objet : perte d'entreprise de 7,1 millions de dollars”. M. Butcher, qui était alors l'avocat de Spire Freezers Limited1, a attiré l'attention du président de la corporation, Patrick Gouveia, sur cette proposition. Selon la proposition, une société des États-Unis avait une perte d'entreprise “minimum” de 7 millions de dollars US et supposait qu'un investisseur paierait 20 p. 100 de la perte, soit 1,42 million de dollars US, pour acquérir la perte à des fins fiscales. L'opération proposée par M. Millson était la suivante :

a) une corporation de placement achèterait une part dans la société pour la somme de 37,42 millions de dollars US;

b) une société de portefeuille achèterait alors l'immeuble pour sa juste valeur marchande, soit 36 millions de dollars US;

c) la perte de 7 millions de dollars US subie par la société serait attribuée aux nouveaux associés, ce qui entraînerait une économie d'impôt de 3,6 millions de dollars US au taux d'imposition réel le plus élevé;

d) un nouvel associé poursuivrait les activités de la société en transférant un actif similaire de valeur nominale et en fait conserverait un excédent de caisse sur une opération de 2,18 millions de dollars US jusqu'au moment où la société pourrait être liquidée et un gain en capital créé, de sorte que l'impôt s'élèverait à 1,4 million de dollars US.

[11] Dans la proposition, M. Millson semble ne pas avoir tenu compte du fait que la société était titulaire des actions de TSAC. Il a supposé que la “perte est une perte d'entreprise ordinaire et que la société est une véritable société en nom collectif”.

[12] Après avoir examiné la proposition de M. Millson, M. Gouveia a parlé à un certain M. Dan Torbiak et à un certain M. Howard Henry, de Touche Ross, qui agissaient comme vérificateurs pour Spire Freezers Limited. M. Gouveia a expliqué qu'avant de parler à M. Torbiak, il voulait connaître le nom des dirigeants de HCP et que, lorsqu'il a appris qu'il s'agissait d'une compagnie de Bell Canada, il a poursuivi l'affaire.

[13] M. Gouveia a témoigné avoir organisé une réunion avec M. Millson et plusieurs cadres supérieurs et actionnaires importants de Spire Freezers Limited pour que M. Millson donne un aperçu de sa proposition. (Certaines personnes associées à Spire Freezers Limited voulaient participer à l'investissement décrit dans la proposition). Toutefois, M. Gouveia ne voulait pas négocier avec un intermédiaire et il a demandé le nom d'une personne responsable chez BDI. C'est “avec réticence” que M. Millson lui a donné le nom d'un certain M. Currie.

[14] “Nous voulions obtenir des pertes fiscales et nous voulions que l'opération fonctionne”, a expliqué M. Gouveia. Pour atteindre ce but, la société doit poursuivre ses activités, c'est-à-dire qu'elle doit “continuer à exister après la conclusion de l'opération”. Cela étant, MM. Gouveia et Butcher et un actionnaire de Spire Freezers Limited se sont rendus en Californie le vendredi 31 mai pour rencontrer M. Currie et d'autres représentants du groupe BDI.

[15] M. Gouveia a d'abord été mis au courant de l'existence des appartements Tremont entre le jeudi après-midi et le 2 juin, qui était un mardi, lorsqu'ils étaient en Californie, mais il a affirmé que cela leur importait peu.

[16] M. Torbiak a témoigné que la proposition que BDI avait faite ne discutait pas. Il voulait que la société poursuive ses activités et qu'elle ne soit pas dissoute. Pour poursuivre ses activités, la société devait posséder un actif productif de revenu. À un moment donné, M. Torbiak estimait qu'il pouvait être nécessaire de “transférer un actif de valeur nominale pour atteindre ce but”. Toutefois, il se demandait pourquoi il fallait transférer un actif si l'on en avait déjà un. Cet actif était composé des appartements Tremont et, comme M. Gouveia l'a confirmé, il était donc souhaitable de structurer l'opération de façon que ce soit la société, plutôt que TSAC, qui soit propriétaire des appartements Tremont avant de conclure les opérations envisagées. M. Torbiak a parlé de l'affaire à M. Currie et en fin de compte il a été décidé, selon M. Torbiak, de conclure le marché. Les négociations se sont poursuivies. M. Gouveia a retenu les services d'un avocat de la Californie. Il a également rencontré le gérant des appartements Tremont.

[17] L'opération qui devait être conclue entre Spire Freezers Limited, BDI et Peninsula a été consignée par écrit au moyen d'un projet de lettre daté du 2 juin 1987. Le projet de lettre a été examiné par les personnes concernées et par leurs conseillers et une lettre d'entente révisée, également datée du 2 juin 1987, a été signée. Cette lettre prévoyait, entre autres choses, que les actions de TSAC seraient transférées de HCP à BDI.

[18] M. Gouveia a déclaré qu'en juin 1987, il n'était pas au courant de l'étendue complète des pertes associées au condominium et que les personnes concernées croyaient que le prix d'achat intégral serait rajusté au moment de la conclusion. Il a également témoigné qu'il ne connaissait pas le prix attribué aux appartements Tremont par les vendeurs. Il ne savait pas de quelle façon le prix des condominiums avait été fixé par les vendeurs. Ici encore, il s'agissait d'un marché qui ne se discutait pas. M. Torbiak a également confirmé que lorsqu'il avait examiné la proposition et la lettre du 2 juin 1987, il ne savait pas quels montants étaient en cause et qu'aucune projection de revenu n'avait été préparée. Un bilan “pro forma” au mois de mai 1987 de Spire Freezers Limited avait été préparé de façon qu'il soit tenu compte de la vente d'un bien à Montréal et d'un investissement dans une compagnie déficitaire, probablement l'investissement dans HCP. M. Torbiak a également préparé une analyse hypothétique de l'opération concernant HCP.

[19] M. Gouveia est comptable agréé. Il a reconnu qu'il est “normal” qu'une opération de cette envergure soit analysée minutieusement. La valeur des biens en cause était en tout d'environ 33 000 000 $, mais M. Gouveia n'a pas pris la peine d'analyser l'opération parce que, comme il l'a dit : “[...] de la façon dont ce marché était structuré, notre risque était minime [...] il fallait que tout cela se produise [...].”

[20] M. Gouveia a supposé que les pertes de HCP étaient des pertes autres qu'en capital et qu'elles pouvaient être déduites au complet d'un autre revenu. On garantissait aux appelants une perte fiscale minimum de 7 000 000 $ US et ceux-ci n'auraient pas à payer plus de 1 400 000 $ US s'il était par la suite constaté que la perte était plus importante.

[21] Le coût engagé à l'égard de l'opération devait être ce qui était remis en espèces. L'hypothèque grevant les appartements Tremont, qui avait par la suite été ajoutée à l'opération, devait être une dette de HCP. M. Torbiak a témoigné que la valeur des appartements Tremont se rapprochait énormément du niveau d'endettement ou qu'elle était peut-être même égale au montant de la dette. À son avis, étant donné que le montant de la dette se rapprochait de la juste valeur marchande, ils ne devaient payer aucun montant additionnel pour leur participation dans la société parce qu'en fait, ils acquéraient une part minime dans l'ensemble d'habitations ou ils n'en acquéraient pas.

[22] La lettre d'entente du 2 juin 1987 a par la suite été modifiée par des lettres datées du 9 juin, du 24 juillet et du 30 septembre 1987. Le 30 novembre 1987, les opérations suivantes ont été conclues conformément aux ententes conclues dans les lettres :

a) BDI et Peninsula ont modifié la convention de HCP de façon à prévoir que HCP poursuive ses activités malgré le retrait d'un associé ou l'admission d'un nouvel associé.

b) TSAC a vendu les appartements Tremont à HCP pour la somme de 2 900 000 $ US, dont 696 629,68 $ US étaient payables comptant, le solde étant payé au moyen de la prise en charge de dettes. L'argent comptant a été obtenu au moyen d'un prêt de 696 629,68 $ US que BDI avait antérieurement consenti à HCP en échange d'un billet (le “billet”).

c) HCP a vendu les actions de TSAC à BDI pour la somme de 696 629,68 $ US, que cette dernière a payée en cédant le billet à la société.

d) Peninsula a censément vendu à Spire Freezers Ltd. la participation de 50 p. 100 qu'elle avait dans HCP et BDI a censément vendu une participation de 25 p. 100 dans la société à Spire Freezers Ltd. et une participation de 25 p. 100 dans HCP au groupe Spire, qui agissait pour son propre compte et pour le compte d'autres Canadiens, comme suit :

Mark Anbar 5,00 %

Ouzi Anbar 6,25 % Edward Butcher 2,78 %

John Dobrei 1,67 % Patrick Gouveia 6,25 %

Maroje Miloslavic 1,11 % John O’Neill 1,39 %

Groupe Spire 0,22 % Spire Freezers (autrefois

Diamond Cold Storage Limited) 0,33 %

Total 25,00 %

En vertu de diverse ententes, les Canadiens étaient censés devenir les associés de HCP à la suite de l'acquisition des participations susmentionnées dans HCP. Les Canadiens affirment qu'une fois cette opération conclue, ils étaient des associés de HCP, qui possédait les appartements Tremont et le condominium.

e) Le condominium a alors été vendu à BDI pour la somme de 33 321 662 $ US.

f) Le nom HCP a alors été remplacé par celui de “Tremont Street Partnership”.

[23] Dans l'aveu officiel de faits, les appelants reconnaissaient que leur motif, lorsqu'ils ont conclu les opérations, était de réduire leur dette fiscale canadienne en ayant la possibilité de se prévaloir des pertes subies par HCP. Les appelants ont ajouté que dans la mesure où les pertes prévues excédaient les coûts qu'ils avaient engagés, l'opération pouvait être qualifiée en termes familiers d'“opération d'évitement fiscal” ou d'“opération relative à une perte fiscale”. Les appelants concèdent également qu'une partie importante du prix qu'ils avaient versé au vendeur (au moins 511 962,32 $ US avant les honoraires d'avocats et de comptables et les autres frais liés à l'opération) se rapportait aux pertes fiscales sous-jacentes de HCP qu'ils espéraient déduire de leur revenu aux fins de l'impôt canadien. Les appelants savaient également que “pour que leur objectif se réalise, il fallait que [HCP] continue à exister”. Par conséquent, les appelants voulaient bien que HCP acquière et continue à posséder et à exploiter les appartements Tremont. MM. Gouveia et Torbiak ont reconnu que toute l'opération était préétablie et qu'une fois qu'elle était commencée, il fallait mener l'affaire à terme.

[24] M. Gouveia a témoigné que les appelants n'avaient jamais eu l'intention de conserver le condominium de HCP : selon le marché, le condominium devait être revendu à BDI. De plus, BDI ne voulait pas continuer à être propriétaire des appartements Tremont. M. Gouveia a déclaré que les Canadiens avaient “peut-être un instant” envisagé de conserver le condominium. Toutefois, à son avis, le projet était tout simplement trop gros pour eux.

[25] L'avocate de l'intimée a demandé à M. Gouveia si l'on avait songé au fait qu'en tant que propriétaires, Spire Feezers Limited et les autres Canadiens courraient les risques et bénéficieraient des avantages associés au condominium de HCP. M. Gouveia a répondu par la négative. En vertu de l'entente conclue avec HCP, les appelants étaient tenus de transférer la propriété du condominium de HCP à BDI. M. Gouveia a concédé qu'il était prévu que BDI cesserait d'être propriétaire bénéficiaire du condominium pendant une brève période seulement.

[26] M. Wagner a témoigné que quant à BDI, la nature de l'opération, bien qu'elle soit structurée sous la forme d'une vente de parts dans une société et du condominium, constituait aux fins de l'impôt américain une attribution à BDI du condominium de HCP plutôt qu'une vente. Quant aux appartements Tremont, aux fins de l'impôt américain, le bien était vendu aux Canadiens pour la somme de 1 200 000 $ US. Le titre de propriété était simplement transféré de façon que l'opération soit structurée de la façon voulue. Étant donné qu'en fin de compte, le condominium a continué à appartenir à BDI, HCP attribuait, sur le plan financier, le condominium à BDI, qui était autrefois son associée. Aux fins de l'impôt américain, BDI ne reconnaissait pas le transfert du condominium comme constituant un achat-vente.

[27] Étant donné que tous les frais de promotion du condominium de HCP et des appartements Tremont avaient été ajoutés aux coûts des stocks, selon M. Wagner, le résultat de l'opération était que BDI avait apporté un autre rajustement à ses stocks.

[28] M. Wagner a déclaré que BDI avait toujours été le propriétaire effectif du condominium, sauf au moment où celui-ci appartenait aux Canadiens. À son avis, l'opération était une attribution de bien à un associé parce que BDI n'avait jamais cessé d'être propriétaire effectif du condominium de HCP, et ce, bien que les opérations aient eu lieu le 30 novembre 1987.

[29] Les parts proportionnelles des Canadiens, à part Spire Freezers Limited, devant être acquises au moyen de l'investissement ont été déterminées par M. Gouveia. La participation des Canadiens correspondait en tout à 25 p. 100. Personne n'avait tenu compte du bénéfice réel ou éventuel tiré de quelque immeuble (c'est-à-dire du condominium de HCP ou des appartements Tremont) lorsqu'il avait été décidé de conclure les opérations. La participation de chacun des Canadiens était liée à ce que ceux-ci avaient les moyens de payer. Dans une lettre d'opinion qu'elle a envoyée à Spire Freezers Limited et aux autres Canadiens, Touche Ross supposait que les Canadiens voulaient que HCO poursuive ses activités pour une période indéfinie en vue d'exploiter, après la conclusion, les appartements Tremont à titre de bien locatif productif de revenu.

[30] Pendant l'interrogatoire principal, M. Gouveia a déclaré que lorsqu'il avait conclu les opérations, il croyait que les appartements Tremont seraient rentables; de fait, des bénéfices ont été tirés de leur exploitation chaque année après 1988.

[31] L'état des résultats de HCP pour 1987 indique les ventes d'unités condominiales conclues avant le 30 novembre 1987 ainsi que la vente du reste du condominium de HCP à BDI ce jour-là, le coût des propriétés vendues représentant le total des coûts engagés par HCP au 30 novembre 1987.

[32] Pendant les années 1987 à 1995, les appartements Tremont et certains actifs connexes étaient les seuls actifs possédés par Tremont Street Partnership (autrefois HCP), comme on l'appelait alors. Selon les états de résultats et des avoirs des associés de la soi-disant Tremont Street Partnership pour les exercices ayant pris fin les 31 décembre 1989 à 1995, préparés par les vérificateurs américains de la société, le revenu de la soi-disant société et les montants retirés par les soi-disant associés étaient les suivants :

Année

Revenu net

Montant retiré

1989

33 224 $ (US)

50 136 $ (US)

1990

38 506

48 528

1991

73 483

99 379

1992

66 345

119 109

1993

114 165

156 913

1994

82 521

151 520

1995

49 192

130 839

[33] Aux fins de l'impôt canadien, le revenu était le suivant :

Année

($ CAN)

1989

0

1990

0

1991

0

1992

0

1993

72 023 $

1994

62 162

1995

32 954

[34] Les propriétaires ont réduit chaque année le principal de l'hypothèque qui grevait le condominium de HCP.

[35] Selon le programme de subvention locative de l'État dans le cadre duquel les appartements Tremont avaient été construits, les propriétaires des appartements Tremont sont tenus de déposer tous les mois des sommes d'argent dans ce que M. Gouveia a appelé un “fonds d'amortissement” de façon que de l'argent soit disponible aux fins des réparations et des autres dépenses, comme les assurances et les impôts fonciers. En 1990 et en 1993, les montants ainsi déposés s'élevaient à 72 895 $ US et 50 603 $ US respectivement. L'organisme étatique vérifiait la gestion des appartements Tremont tous les trois mois.

[36] Dans le calcul du revenu tiré de la soi-disant société aux fins de l'impôt sur le revenu canadien pour l'exercice ayant pris fin le 31 décembre 1987, la Tremont Street Partnership a déduit la somme de 10 030 887 $ US (11 412 300 $ CAN) à titre de perte subie lors de la vente du condominium de HCP et la somme de 367 107 $ US (480 836 $ CAN) à titre de perte subie lors de la vente des actions de TSAC. Chacun des appelants a allégué avoir le droit de déduire sa part proportionnelle de ces pertes.

[37] L'intimée ne conteste pas le montant des pertes ou leur répartition entre Spire Freezers Limited et les autres Canadiens, mais elle nie que les appelants ont le droit de déduire ces pertes aux fins de l'impôt sur le revenu canadien.

[38] Deux personnes ont témoigné à titre d'experts à l'audience. Richard M. Buxbaum est un avocat habilité à exercer sa profession devant les tribunaux de la Californie. Il est professeur de droit international à la Faculté de droit (Boalt Hall) de l'université de la Californie à Berkeley et est expert en matière de droit des sociétés et de droit des compagnies, de droit international et de droit économique européen ainsi qu'en matière d'opérations commerciales internationales. Il a témoigné à titre d'expert en droit des sociétés de la Californie pour le compte des appelants. À son avis, la relation qui existait entre BDI et Peninsula était de la nature d'une société même si on l'avait peut être qualifiée de “coentreprise”.

[39] Selon le professeur Buxbaum, par contrat de coentreprise, on entend un contrat de société “dans ce cas-ci”; le mot “coentreprise” n'est pas un terme de métier, mais les parties sont libres de qualifier une situation comme elles le veulent. Le professeur Buxbaum ne savait pas si le Internal Revenue Code des États-Unis fait une distinction entre les deux termes, mais il a reconnu qu'il existe des différences dans la législation de la Californie entre une société et une coentreprise.

[40] Le professeur Buxbaum a déclaré que, par suite de la modification apportée au contrat de société, HCP avait continué à exister au moment où BDI et Peninsula s'étaient retirées de la société et où les appelants avaient été admis dans la société. Il a dit que la vente du condominium de HCP n'avait pas mis fin à la société. En outre, il a déclaré que les appelants étaient devenus membres de la société au moment où ils y avaient acquis des parts dans la société.

[41] Le professeur Buxbaum a expliqué qu'en vertu du droit des sociétés de la Californie, la société “prend fin”2 uniquement une fois que deux mesures ont été prises : a) la “dissolution”, définie comme étant “le changement qui se produit dans la relation qui existe entre les associés du fait qu'un associé cesse de participer à l'exploitation par opposition à la liquidation de l'entreprise” (article 15029); et b) la “liquidation” (à la suite de la dissolution), qui n'est pas en soi définie par la loi, mais dont les attributs et le fonctionnement sont décrits aux articles 15033 à 15040 du Code. En d'autres termes, comme l'a expliqué le témoin, la “dissolution” en soi n'équivaut pas à la “cessation d'activités”; c'est plutôt le début du processus menant à pareille cessation. Lorsque prend fin le processus de liquidation, la société “cesse ses activités” (article 15030). La définition figurant à l'article 15029 elle-même indique uniquement un mode de dissolution, soit le cas où un associé cesse de participer à l'exploitation de l'entreprise, mais d'autres actes, y compris l'admission d'un nouvel associé, peuvent également entraîner la dissolution de la société (article 15031).

[42] Toutefois, le paragraphe 15031(7) du Corporations Code de la Californie prévoit que l'admission d'un nouvel associé peut tout au plus entraîner la “dissolution” de la société, ce qui n'équivaut pas à la “cessation d'activités” de la société, mais constitue uniquement le début du processus de liquidation. Dans la plupart des situations commerciales, y compris celle qui est ici en cause, l'admission d'un nouvel associé n'entraîne pas la dissolution parce qu'une disposition du contrat de société empêche pareil résultat. La société continue simplement à avoir une personnalité juridique comme auparavant, plutôt qu'à fonctionner uniquement sur le plan économique. En l'espèce, les anciens associés de HCP avaient modifié le contrat de société de façon à permettre à la société de poursuivre ses activités si de nouveaux associés étaient admis.

[43] Le professeur Buxbaum a concédé qu'aux fins de son avis, l'avocat des appelants l'avait informé que les Canadiens avaient l'intention de devenir associés et que BDI et Peninsula voulaient également que les Canadiens deviennent des associés.

[44] Richard Hartnig a témoigné pour le compte de l'intimée à titre d'expert en droit fiscal américain. M. Hartnig est titulaire d'un diplôme de droit de l'université Duke et d'une maîtrise en fiscalité du Georgetown University Law Center. De 1979 à 1983, il était avocat au sein de la Interpretative Division du Chief Counsel Office du Internal Revenue Service des États-Unis. En 1983, il était adjoint du chef de la direction. Pendant les dix années qu'il a passées au sein du Internal Revenue Service, il était responsable de dossiers concernant les sociétés, les abris fiscaux et les instruments financiers. Depuis 1983, il pratique le droit à Atlanta, en Georgie. Le témoignage de M. Hartnig portait sur le droit fiscal américain.

[45] J'hésite toujours à retenir un témoignage lorsqu'il est question de la façon dont une opération est traitée dans un ressort étranger aux fins de l'impôt. J'ai uniquement tenu compte du témoignage de M. Hartnig afin de savoir comment les opérations ont été ou auraient dû être déclarées aux fins de l'impôt américain. La façon dont une opération est traitée dans un ressort étranger n'a rien à voir avec la façon dont elle devrait être traitée aux fins de l'impôt canadien. Toutefois, si le contribuable traite une opération comme étant une disposition de biens dans un ressort étranger et comme étant autre chose au Canada, j'aimerais savoir pourquoi. Quoi qu'il en soit, M. Hartnig a témoigné qu'à son avis, aux fins de l'impôt américain, BDI avait traité le condominium de HCP non comme si elle l'avait acquis, mais comme s'il lui avait été attribué. Le témoin a déclaré que cela était incompatible avec la convention du 2 juin 1987 (telle qu'elle a été modifiée), qui était libellée sous la forme d'une convention de vente, mais qui était au fond une attribution. À son avis, les Canadiens ont acheté des parts dans une société qui n'avait qu'un actif, soit les appartements Tremont; le condominium avait déjà été attribué à BDI. Les Canadiens n'ont jamais assumé un risque à titre de propriétaires du condominium de HCP et ils ne pouvaient pas bénéficier des avantages liés à la propriété, ni de l'accroissement de la valeur du condominium; les Canadiens n'ont jamais eu de parts dans le condominium. M. Hartnig a dit dans son exposé écrit que si, après la vente des parts qu'ils avaient dans la société, les Canadiens avaient manqué à leur parole et n'avaient pas vendu le condominium de HCP, BDI a) disposerait d'un recours en vue de l'exécution en nature ou de l'obtention de dommages-intérêts, et b) aurait exigé le paiement des billets et demandé des intérêts moratoires en cas de défaut de paiement.

[46] Je remarque que, de l'avis de M. Hartnig, la société HCP a cessé ses activités aux fins de l'impôt américain étant donné qu'il y avait eu une vente ou un échange d'au moins 50 p. 100 de la participation totale dans l'actif et dans les bénéfices de la société3. M. Hartnig n'a pas exprimé d'avis au sujet de la question de savoir si la société avait cessé ses activités en vertu de la législation étatique sur les sociétés. Toutefois, il ne croyait pas qu'on ait eu l'intention de tromper qui que ce soit, et ce, bien qu'aux fins de l'impôt canadien, le transfert du condominium de HCP en faveur de BDI puisse constituer une vente et qu'aux fins de l'impôt américain, le transfert puisse constituer une attribution à un associé.

LA QUESTION EN LITIGE

[47] Je crois qu'il est donc juste de conclure, compte tenu des faits, que les appelants ont conclu les opérations avec BDI et Peninsula uniquement en vue d'acquérir une perte fiscale. Ils ne voulaient pas exploiter une entreprise dans le cadre d'une société en Californie sauf en tant qu'instrument leur permettant d'atteindre leur but, soit d'acquérir la perte. Ont-ils néanmoins le droit de déduire les soi-disant pertes subies par HCP?

Arguments des appelants

[48] L'avocat des appelants soutient qu'en vertu de l'article 96 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “Loi”), les pertes d'entreprise et les pertes en capital de la société HCP pour son exercice 1987 doivent être attribuées aux appelants et considérées comme des pertes d'entreprise et des pertes en capital que ces derniers ont subies pour l'application de la Loi4.

[49] En vertu de l'article 96, le revenu et les pertes sont calculés au niveau de la société et sont ensuite attribués aux associés individuels. Un changement d'associés au sein de la société n'influe pas sur le calcul du revenu et des pertes de la société. En particulier, l'exercice d'une société ne prend pas fin au moment où pareil événement se produit, et la société n'est pas tenue de traiter les gains et pertes accumulés comme ayant été réalisés avant le changement d'associés, de façon qu'ils puissent être attribués aux anciens associés aux fins de l'impôt sur le revenu.

[50] Les résidents canadiens doivent inclure dans leur revenu la part du revenu et des pertes de toutes les sociétés dont ils sont membres qui leur est attribuée. À cette fin, la Loi ne fait pas de distinction entre les sociétés régies par les lois d'une province canadienne et celles qui sont régies par les lois d'un ressort étranger.

[51] L'avocat des appelants a déclaré qu'en l'espèce, toutes les opérations étaient réelles et avaient un effet juridique, et qu'elles avaient des conséquences juridiques réelles. Les contrats passés entre les parties devaient être obligatoires et lier les parties conformément à leurs dispositions. La société a continué à exister malgré les événements qui se sont produits le 30 novembre 1987. En premier lieu, c'est la loi de la Californie qui régit la société. Le professeur Buxbaum a expliqué qu'à cause des dispositions du contrat de société, tel qu'il a été modifié, HCP a continué à exister même si les “anciens” associés avaient vendu aux appelants les parts qu'ils avaient dans la société et même si HCP avait vendu le condominium. En second lieu, le mot “société” tel qu'il est défini dans la plupart des lois provinciales s'entend ordinairement, selon l'avocat, de “la relation qui existe entre des personnes exploitant une entreprise en commun dans l'intention de réaliser un bénéfice”. L'avocat a déclaré qu'en l'espèce, les appelants étaient devenus associés de la société qui possédait les appartements Tremont. Ils s'attendaient à exploiter cette entreprise de façon à réaliser un bénéfice et, de fait, des bénéfices annuels étaient tirés de l'exploitation des appartements Tremont5.

[52] Les appelants soutiennent également que l'opération donnait lieu à une attente raisonnable de profit. Pour un investissement net de 1 208 591 000 $ US, soit le coût d'obtention des pertes, les appelants se sont vu attribuer une partie importante des bénéfices tirés de l'exploitation des appartements Tremont. L'avocat des appelants fait une distinction entre ce fait et ceux de l'affaire Continental Bank6. Il fait remarquer que, dans ce contexte, le “bénéfice” est employé dans son sens commercial ordinaire, ce qui comprend tant un excédent du revenu sur les dépenses qu'un accroissement de la valeur des actifs : Schultz v. The Queen, [1996] 2 C.T.C. 127 (C.A.F.). L'avocat de l'appelant a soutenu que rien ne permet en droit ou selon le sens commun de soutenir que HCP ne peut pas être considérée comme rentable tant qu'elle ne répare pas sa perte au moment de la vente du condominium. La société qui exploite une entreprise non rentable ne cesse pas pour autant d'être une société, et elle ne cesse pas non plus d'être une société lorsqu'elle se départit d'un actif non rentable et conserve un actif rentable.

[53] Le professeur Buxbaum estimait également qu'en acquérant des parts dans HCP et en convenant d'être liés par les dispositions s'appliquant à la société, les appelants sont devenus associés de la société HCP selon la législation de la Californie.

[54] Spire Freezers Limited était un membre de HCP qui détenait 75,33 p. 100 des parts à la fin de l'exercice de la société et à la fin de son propre exercice, le 31 décembre 1987. À la fin de 1987, les autres appelants détenaient également leurs parts respectives dans la société. L'avocat conclut donc que Spire Freezers Limited et les autres appelants étaient tenus, en vertu de l'article 96 de la Loi, d'inclure dans leur revenu respectif pour l'année leur part proportionnelle du revenu et des pertes de HCP pour leurs exercices, qui prenaient tous fin le 31 décembre 1987. Ce sont les seuls contribuables à qui ces pertes peuvent être attribuées aux fins de l'impôt sur le revenu, conformément à l'article 96 de la Loi.

Arguments de l'intimée

[55] De l'avis de l'intimée, les opérations que les appelants ont conclues étaient destinées à importer au Canada des pertes étrangères subies par des contribuables non résidants aux fins de la réduction de l'impôt sur le revenu que les résidents canadiens devaient payer. L'avocate de l'intimée soutient que si je conclus que le paragraphe 96(1) de la Loi a l'effet allégué par les appelants, chaque appelant était “membre” de la “société” HCP, que HCP “était propriétaire” du condominium et que la déduction de 10 millions de dollars US que les appelants ont demandée à l'égard de la soi-disant disposition du condominium était une “perte” subie d'une “source” par “la société” (HCP). De l'avis de l'intimée, en établissant les nouvelles cotisations, le ministre a eu raison de refuser de déduire les pertes, et ce, pour les raisons suivantes :

a) il n'y avait pas d'attente raisonnable de profit;

b) les appelants n'étaient pas membres d'une société qui avait subi une perte;

c) le condominium avait été attribué à BDI; il n'y avait pas eu de vente;

d) il n'y avait pas de perte réelle et il n'y avait pas d'attribution d'une perte;

e) il s'agissait d'une opération factice; les dépenses étaient déraisonnables et n'avaient pas été engagées en vue de permettre la réalisation d'un revenu;

f) l'opération était un trompe-l'oeil.

[56] L'avocate de l'intimée déclare que, par sa nature et compte tenu de son but, l'opération devait entraîner la création de pertes fiscales. L'opération était structurée de façon que les appelants puissent se prévaloir des pertes. Toutefois, l'opération, telle qu'elle était structurée, ne satisfait pas à la norme préliminaire nécessaire pour constituer une source aux fins de l'impôt, c'est-à-dire que l'entreprise, telle qu'elle était constituée, ne donnait pas lieu à une “attente raisonnable de profit”. L'existence d'une perte était non seulement prévue, mais cela constituait un élément nécessaire de l'opération. On ne peut donc pas dire que l'opération que les appelants ont conclue visait à leur permettre de réaliser un bénéfice. De plus, il ne peut pas y avoir de source de revenu aux fins de l'impôt à moins que l'activité ne soit exercée dans “une attente raisonnable de profit”.

[57] Les appelants disent qu'ils ont essuyé une perte quelques instants après être devenus associés de la société HCP. Ici encore, c'était le but auquel ils visaient. L'intimée soutient que lorsque le but visé par un contribuable particulier, considéré objectivement, est de permettre à celui-ci de subir une perte énorme de façon à réduire le montant de sa dette fiscale, l'activité ne peut pas avoir été exercée en vue de permettre au contribuable de réaliser un revenu. Il se peut bien qu'un élément de l'opération, se rapportant dans ce cas-ci aux appartements Tremont, produise certaines rentrées de fonds et peut-être un bénéfice quelconque, mais il ne s'agit pas d'un bénéfice suffisant pour compenser les pertes qui font partie intégrante de l'opération. L'avocate de l'intimée soutient que la possibilité de produire un revenu dans le proche avenir, en sus des dépenses, n'existait pas. L'avocate cite le jugement Jack Walls et al. v. The Queen, 96 DTC 6142, à la page 6146, dans lequel le juge Pinard a dit ceci :

Compte tenu de toutes les circonstances, il me semble que l'exploitation de la société n'offrait pas une expectative raisonnable de profit. Elle a plutôt été mise sur pied en vue de fournir un abri fiscal, avec l'intention que l'exploitation du parc d'entreposage donne lieu à d'importantes pertes initiales que les commanditaires pourraient déduire de leur impôt. [...]

Je crois qu'en l'espèce la réduction d'impôt était le seul but poursuivi par cet abri fiscal. Dans l'arrêt Moloney c. La Reine (1993), 145 N.R. 258, la Cour d'appel fédérale, examinant le cas d'un abri fiscal, déclare ceci aux pages 1 et 2 (A-73-89) :

Il est un principe élémentaire du droit que les contribuables peuvent structurer leurs affaires de manière à être assujettis au minimum d'impôt [voir Duke of Westminster's, [1936] A.C. 1]; toutefois, il est tout aussi évident à notre avis que, pour les contribuables, la réduction de leurs propres impôts ne peut en soi constituer une entreprise aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu. En d'autres termes, pour qu'une activité soit reconnue comme une “entreprise” dont les dépenses sont déductibles en vertu de l'alinéa 18(1)a), non seulement le contribuable doit-il s'y adonner avec une expectative raisonnable de profit, mais aussi faut-il s'attendre à ce que le profit en question découle de l'activité elle-même et non pas exclusivement des dispositions de la loi fiscale.

Analyse

[58] Il est certain que les pertes déduites par les appelants ont été subies à l'égard de biens qui, au moment où ils ont été acquis par HCP, constituaient des sources de revenu pour cette dernière; HCP a été créée à titre de véritable société en vertu des lois de la Californie. Les associés, au moment où HCP a été créée et au moment où HCP a entrepris de construire le condominium et les appartements Tremont s'attendaient d'une façon raisonnable à tirer profit des investissements et ils exploitaient une entreprise en vue de réaliser un bénéfice.

[59] Lorsque les appelants ont conclu l'opération, ils n'avaient qu'un but à l'esprit : obtenir une perte fiscale. Compte tenu de la preuve, il est tout à fait clair que l'idée que l'opération soit rentable ne leur est jamais venue à l'esprit.

[60] Plus tôt cette année, j'ai rendu jugement dans l'affaire Philip Douglas Backman c. The Queen, [1997] A.C.I. no 728 (Q.L.). Les faits de l'affaire Backman n'étaient pas identiques à ceux de la présente espèce, mais ils étaient dans une certaine mesure similaires. Dans l'affaire Backman, les appelants étaient censés être associés dans une société en commandite plutôt que dans une société en nom collectif, comme c'est ici le cas. Dans l'affaire Backman, les contribuables avaient également acquis un ensemble d'habitations dont la valeur avait baissé par rapport à son coût initial. Les soi-disant associés, dans l'affaire Backman, avaient également acquis pour un montant minime un bien relatif au pétrole et au gaz et, lorsque ce bien s'est avéré non rentable, une unité condominiale, également pour un montant minime par rapport à l'investissement global. Les deux derniers biens avaient été acquis en vue de démontrer que la société exploitait une entreprise après qu'elle eut vendu l'ensemble d'habitations. Dans l'affaire Backman, j'ai statué que les opérations n'étaient pas un trompe-l'oeil et qu'elles avaient un effet juridique. Je le fais ici également, et ce, pour les motifs énoncés dans l'affaire Backman.

[61] De plus, comme dans l'affaire Backman, j'estime que l'opération ici en cause n'était pas une opération factice. En 1987, le paragraphe 245(1) de la Loi se lisait comme suit :

Dans le calcul du revenu aux fins de la présente loi, aucune déduction ne peut être faite à l'égard d'un débours fait ou d'une dépense faite ou engagée, relativement à une affaire ou opération qui, si elle était permise, réduirait indûment ou de façon factice le revenu.

[62] En l'espèce, la juste valeur marchande des appartements Tremont avait baissé. Une diminution de la valeur d'un actif ne constitue pas, si je comprends bien, un débours ou une dépense. Par conséquent, l'ancien paragraphe 245(1) ne s'applique pas en l'espèce. De même, l'article 67 de la Loi ne s'applique pas lui non plus dans les circonstances; tout débours, si une réduction de valeur constitue un débours, aurait été raisonnable eu égard aux circonstances étant donné qu'il découlait de la valeur sur le marché.

[63] J'examinerai maintenant la question de savoir si le 30 novembre 1987, les appelants étaient des associés de HCP.

[64] Les parties ont convenu qu'en vertu du paragraphe 96(1) de la Loi, le revenu du contribuable qui est membre d'une société doit être calculé compte tenu du fait que la société est une personne ayant une année d'imposition. En outre, le contribuable qui est membre d'une société a le droit de déduire sa part proportionnelle de la perte subie par la société pour l'année, à condition d'être membre de la société à la fin de son exercice7. Une société est une société et, à mon avis, il importe peu, aux fins de l'impôt canadien, que les résidents du Canada soient associés d'une société créée en vertu des lois d'une province canadienne ou d'un ressort étranger, dans la mesure où la relation existant entre les résidents du Canada (et les autres) est envisagée par le droit des sociétés d'une province canadienne. En l'espèce, HCP a été créée en vertu des lois de la Californie et je ne dispose d'aucun élément de preuve tendant à montrer que la société n'était pas une société aux fins de l'impôt canadien.

[65] La Loi ne définit pas le terme “société”. Comme je l'ai dit dans le jugement Backman, les tribunaux ont examiné la législation sur les sociétés de la province en cause pour déterminer s'il existe une société : voir, par exemple, No. 41 v. M.N.R., 52 DTC 1150 (C. de l'É.), aux pages 1153 et 1154, et Sandhu et al. v. The Queen, 80 DTC 6097 (C.F. 1re inst.), à la page 61038.

[66] Le droit provincial varie d'une province à l'autre, mais une société possède fondamentalement les mêmes attributs et caractéristiques tant dans les ressorts de common law que dans les ressorts de droit civil. Dans les provinces de common law, une société est définie comme étant “la relation qui existe entre des personnes qui exploitent une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice”9. Les ressorts canadiens de common law ont essentiellement des dispositions législatives identiques régissant les sociétés, lesquelles sont fondées sur la loi britannique initiale10.

[67] Au Québec, le passage pertinent de l'article 2186 du Code civil prévoit ceci :

Le contrat de société est celui par lequel les parties conviennent, dans un esprit de collaboration, d'exercer une activité, incluant celle d'exploiter une entreprise, d'y contribuer par la mise en commun des biens, de connaissances ou d'activités et de partager entre elles les bénéfices pécuniaires qui en résultent.

[68] Le professeur Buxbaum se demandait si, en vertu du droit des sociétés de la Californie, les événements qui s'étaient produits le 30 novembre 1987 avaient entraîné la cessation des activités de HCP; à son avis, ils ne l'avaient pas fait. Il s'est demandé si certains événements peuvent entraîner la cessation d'activités d'une société en vertu du droit des sociétés de la Californie. Il ne s'est pas arrêté aux dispositions de la législation sur les sociétés en nom collectif de la Californie et il n'en a pas cité, en ce qui concerne la relation qui doit exister entre des personnes qui sont associées. Je dois donc conclure qu'en ce qui concerne les affaires de genre, la législation sur les sociétés de la Californie est semblable à celle des provinces canadiennes.

[69] Par conséquent, comme c'est le cas au Canada, une société en Californie est une “relation qui existe entre des personnes qui exploitent une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice”.

[70] Lorsque HCP a initialement été créée par BDI et par Peninsula, il était certain que la relation qui existait entre elles visait à leur permettre d'exploiter une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice. Et c'est ce qu'elles ont fait jusqu'au 30 novembre 1987. Les appelants admettent que lorsqu'ils ont conclu les opérations le 30 novembre 1987, ils cherchaient à obtenir une perte qu'ils déduiraient de leur revenu aux fins de l'impôt sur le revenu canadien. La relation qui existait entre les divers appelants ne visait pas à leur permettre d'exploiter une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice. De fait, selon les témoignages de M. Gouveia et de M. Tobiak, ainsi que selon les témoignages que John Dobrei et Edward Butcher ont présentés pendant l'interrogatoire préalable, les appelants avaient conservé les appartements Tremont sur les conseils des vérificateurs de Spire Freezers Limited de façon que la soi-disant société continue à avoir un actif productif de revenu et confirme ainsi le maintien de la société HCP. Je ne retiens pas l'argument que l'avocat des appelants invoqué, à savoir qu'en tant que propriétaires des appartements Tremont, ses clients s'attendaient à exploiter une entreprise dans le cadre d'une société en vue de réaliser un bénéfice. Les appelants se sont réunis en vue d'obtenir une perte fiscale; c'était l'unique motif de la relation qui existait entre eux.

[71] Dans l'affaire Continental Bank, ci-dessus, le ministre a imposé le contribuable entre autres pour le motif qu'aucune société n'avait été créée. Dans les motifs du jugement que la Cour d'appel fédérale a rendu dans l'affaire Continental Bank, le juge d'appel Linden a examiné, entre autres choses, la définition de la “société”, aux pages 6359 à 6464 :

La planification fiscale et l'organisation soignée de ses affaires commerciales doit être plus qu'un jeu intellectuel. On peut concevoir des stratagèmes avec beaucoup d'imagination, mais ils doivent en dernière analyse être réels. Il faut se conformer à la Loi de l'impôt sur le revenu. La structure commerciale qui est utilisée ne doit pas être une fiction. En conséquence, si les parties choisissent d'utiliser une société de personnes dans un but commercial déterminé, elles doivent, en droit, créer une véritable société. [...] Dans chaque cas, le tribunal examine “ la véritable nature commerciale et pratique des opérations du contribuable ”18. Lorsque le tribunal conclut à l'absence de réalité juridique, l'opération risque de ne pas permettre aux parties d'atteindre l'objectif qu'elles désiraient peut-être ardemment et ce, même si l'opération en question ne constitue pas un trompe-l'oeil. La présente affaire en est un exemple.

[...]

La bonne question à se poser n'est pas celle de savoir si les parties pouvaient nier qu'elles étaient des associés, mais plutôt celle de savoir si elles respectaient les conditions prévues par la loi pour former une société. C'est uniquement au tribunal, et non aux parties, qu'il appartient de répondre à cette question.

[...]

La société de personnes (ou société en nom collectif) est une relation contractuelle21. Il s'agit essentiellement d'un accord conclu entre deux ou plusieurs personnes en vue d'exploiter ensemble une entreprise dans un but lucratif. Personne ne peut devenir un associé à moins de le vouloir ou d'être considéré, par sa conduite, comme le voulant. C'est ce que le juge Duff voulait dire lorsqu'il a déclaré, dans l'arrêt Robert Porter & Sons Ltd. v. J.H. Armstrong and Another, et al.22 :

[TRADUCTION]

La société de personnes tire son existence du contrat, comme en témoigne soit une déclaration expresse, soit une conduite y équivalant23.

L'existence d'une société de personnes dépend donc dans chaque cas de la volonté effective des parties. Ainsi que les auteurs Lindley et Banks le déclarent dans leur ouvrage Lindley and Banks on Partnership :

[TRADUCTION]

Pour déterminer l'existence d'une société de personnes [...] il faut tenir compte du véritable contrat intervenu entre les parties et de leur intention véritable, telle qu'elle ressort de l'ensemble des faits de l'affaire24.

[...]

Ainsi que je l'ai déjà déclaré, dans cette analyse, la forme doit céder le pas au fond. Les parties peuvent affirmer catégoriquement qu'elles ne sont pas des associés et être quand même considérées comme des associés par le tribunal, d'après l'appréciation de l'ensemble de la preuve. C'était la question qui était soumise à notre Cour dans l'affaire Schultz c. R.25, dans lequel le juge Stone a déclaré :

Il va sans dire que la dénégation expresse de l'existence d'une société de personnes, comme c'est le cas en l'espèce, ne suffit pas en elle-même à démontrer l'inexistence d'une société de personnes [...] En l'espèce, nous ne trouvons aucune déclaration portant que les appelants avaient l'intention de faire des affaires en tant qu'associés. Toutefois, il est possible d'inférer une telle intention de l'ensemble des circonstances et plus particulièrement de la manière dont les parties se sont comportées dans l'organisation de leurs affaires et dans l'exploitation de l'entreprise en cause26.

L'inverse est également vrai : les parties peuvent affirmer catégoriquement qu'elles sont des associés et le tribunal peut juger qu'elles ne le sont pas27. Ce qui compte, c'est le fond de la relation. Bien qu'elle soit assurément importante, la forme ne suffit pas. Il n'est pas non plus concluant que [TRADUCTION] “ les parties aient employé une expression ou un libellé qui visent à indiquer que l'opération n'est pas ce que, en droit, elle est ”28. À mon avis, dans le cas qui nous occupe, le libellé et la forme ont été utilisés pour que l'opération n'ait pas l'apparence de “ ce que, en droit, elle est ”.

[...]

Ce que cette affaire nous enseigne, c'est que, lorsque la loi exige une intention quelconque de la part de quelqu'un, cette intention doit ressortir des faits, faute de quoi le tribunal conclura tout simplement à son inexistence. Par conséquent, si la seule intention qu'a une personne en transférant une entreprise commerciale à une compagnie ou à une société de personnes consiste à retirer un avantage fiscal de ce transfert, et que, lorsque cette incidence fiscale se produit, la structure qui a permis d'obtenir ce résultat disparaît ou que l'intéressé en est écarté, cette personne n'avait en réalité pas l'intention d'exploiter l'entreprise dans le cadre de cette structure. Il s'ensuit, pour reprendre les termes employés par le juge de première instance dans le jugement Hickman, que l'on doit conclure qu'aucune démarche n'a été faite en vue de tirer un revenu d'une telle entreprise dans le cadre d'une telle structure. Voici en quels termes Lindley et Banks s'expriment sur la question dans leur ouvrage Lindley and Banks on Partnership :

[TRADUCTION]

Lorsqu'une société de personnes a été constituée dans un but premier autre qu'un but lucratif, comme par exemple pour éviter l'impôt, mais qu'il y a aussi un élément véritable, bien qu'accessoire, de profit, il est quand même possible d'en inférer que l'entreprise est exploitée “ dans un but lucratif ”. Toutefois, si l'un des “ associés ” s'est associé uniquement dans le but de réclamer la déduction d'une perte fiscale (ou, anciennement, une déduction pour amortissement) et qu'il était prévu dès le départ que tant qu'il demeurait un associé de la firme, aucun profit (au sens de “ gain net ”) ne serait tiré de l'exploitation de l'entreprise, on ne peut dire qu'il poursuivait le “ but lucratif ” nécessaire pour pouvoir être considéré comme un associé43.

Dans le cas qui nous occupe, l'intention des parties était marquée notamment par des considérations fiscales, ce qui me force à conclure qu'elles n'avaient pas l'intention de créer une véritable société de personnes44. Les parties ont peut-être créé certaines obligations légalement exécutoires, et notamment des obligations contractuelles, mais cela ne suffit pas à créer une société de personnes.

Pour conclure, l'opération qui m'est soumise ne constitue pas un trompe-l'oeil, mais elle ne répond pas à la définition de la société de personnes. [...]

____________________

18 La Reine c. Fiducie Bronfman, [1987] 1 R.C.S. 32, à la page 52 (le juge en chef Dickson).

21 Pooley v. Driver (1876), 5 Ch. D 458, à la page 472 (le maître des rôles Jessel); Davis v. Davis, [1894] 1 Ch. 393; Collins v. Baker, [1893] 1 Ch. 578.

22 Robert Porter & Sons Ltd. v. J.H. Armstrong and Another, et al., [1926] R.C.S. 328.

23 Idem, à la page 329.

24 Banks, Lindley and Banks on Partnership, 16e éd. (1990), à la page 60.

25 Schultz c. R., (1995) 95 D.T.C. 5657 (C.A.F.) (le juge Stone).

26 Ibidem, à la page 5663.

27 Pooley v, Driver (1876), 5 Ch. D. 460; Stekel v. Ellice, [1973] 1 W.L.R. 191.

28 Weiner v. Harris, [1910] 1 K.B. 285, à la page 290 (le maître des rôles Cozens-Hardy).

[72] Dans les présents appels également, aucun des appelants n'avait une intention autre que celle d'obtenir une perte fiscale. Ils ont songé après coup à conserver les appartements Tremont, après qu'on leur eut dit qu'il fallait le faire. Le montant de la perte initiale que les appelants prévoyaient subir par rapport aux bénéfices prévus ou réels tirés des appartements Tremont ne peut pas, à mon avis, nous permettre de conclure que la relation qui existait entre les appelants visait à leur permettre d'exploiter une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice ou dans une attente raisonnable de profit11. Tout bénéfice tiré des appartements Tremont par rapport à la perte initiale exige un effort d'imagination incroyable lorsqu'il s'agit de conclure que les opérations visaient à permettre aux appelants de réaliser un bénéfice. Ici encore, la relation qui existait entre les appelants ne visait pas à leur permettre d'exploiter une entreprise en commun en vue de réaliser un bénéfice; les appelants ne se sont pas associés en vue d'exploiter une entreprise dont il tirerait des bénéfices.

[73] Je conclus que les Canadiens n'étaient pas des associés en ce qui concerne la propriété du condominium de HCP et des appartements Tremont. Dans son avis, le professeur Buxbaum a fait remarquer que l'avocat des appelants lui avait dit que les appelants voulaient devenir associés de HCP, et cela est peut-être bien vrai. Cependant, le professeur Buxbaum ne se demande nulle part dans son avis si la relation qui existait entre les appelants visait à permettre à ceux-ci d'exploiter une entreprise en vue de réaliser un bénéfice. La Cour d'appel fédérale a statué qu'au Canada, l'exploitation d'une entreprise en vue de réaliser un bénéfice constitue un élément important lorsqu'il s'agit de déterminer si une personne peut être considérée comme associée d'une société. En l'absence de cet élément, il n'y a pas de société pour l'application de la Loi.

[74] La position des appelants était qu'ils avaient acquis une part dans une société existante et, compte tenu de l'avis exprimé par le professeur Buxbaum, la société a continué à exister avec les Canadiens comme associés. Toutefois, comme je l'ai déjà fait remarquer, il n'existait pas entre les Canadiens une relation visant à permettre à ceux-ci d'exploiter une entreprise en vue de réaliser un bénéfice, ce qui constitue l'essence même de la société. Cette relation doit exister entre des personnes, et ce, qu'elles créent une nouvelle société ou qu'elles soient admises au sein d'une société existante. Le fait que BDI et Peninsula étaient associées dans HCP n'aide pas les appelants. Comme je l'ai dit dans le jugement Backman, les mots doivent vouloir dire quelque chose. Le législateur définit les mots d'une loi de façon à leur donner un sens particulier pour l'application de cette loi. La définition d'un mot dans une loi, que ce soit en Ontario ou en Californie, signifie quelque chose; ce “quelque chose” est le sens que le législateur veut attribuer au mot en question, et on ne saurait omettre d'en tenir compte12. Par conséquent, si une société est définie comme étant une certaine relation entre des gens, la Cour doit se demander si, dans un cas donné, cette relation existe. Or, en l'espèce, cela ne semble pas être le cas.

[75] Les appels sont rejetés avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour de novembre 1997.

“ Gerald J. Rip ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 9e jour de janvier 1998.

Monique Pelletier, réviseure



1                À ce moment-là, la compagnie s'appelait Trans Canada Freezers Limited.

2                Article 15030 du Corporation Code de la Californie. Les dispositions mentionnées dans ce paragraphe sont celles du Corporations Code de la Californie.

3                Sous-alinéa 708b)(i) du Internal Revenue Code des États-Unis.

4                Pour l'année 1987, le paragraphe 96(1) se lisait en partie comme suit :

(1) Lorsqu'un contribuable est membre d'une société, son revenu, le montant de sa perte autre qu'une perte en capital, de sa parte en capital nette, de sa perte agricole restreinte et de sa perte agricole, s'il y en a, pour une année d'imposition, ou son revenu imposable gagné au Canada pour une année d'imposition, selon le cas, est calculé comme si

a)             la société était une personne distincte résidant au Canada;

b)             l'année d'imposition de la société correspondait à son exercice financier;

c)              chaque activité de la société (y compris une activité relative à la propriété de biens) était exercée par celle-ci en tant que personne distincte, et comme si était établi le montant

                (i) de chaque gain en capital imposable et de chaque perte en capital déductible de la société, découlant de la disposition de biens, et

                (ii) de chaque revenu et perte de la société afférents à chacune des autres sources ou à des sources situées dans un endroit donné,

                pour chaque année d'imposition de la société;

[...]

f)               le montant du revenu de la société, pour une année d'imposition, tiré d'une source quelconque ou de sources situées dans un endroit donné, constituait le revenu du contribuable tiré de cette source ou de sources situées dans cet endroit donné, selon le cas, pour l'année d'imposition du contribuable au cours de laquelle l'année d'imposition de la société se termine, jusqu'à concurrence de la part du contribuable, et

                                g)             la perte du contribuable — à concurrence de la part dont il est tenu — résultant d'une source ou de sources situées dans un endroit donné, pour l'année d'imposition du contribuable dans laquelle l'année d'imposition de la société se termine, équivalait à l'excédent éventuel :

(i) de la perte de la société, pour une année d'imposition, résultant de cette source ou de ces sources,

sur

[...]

iii) dans les autres cas, zéro.

5                Voir par exemple la Loi sur les sociétés en nom collectif, L.R.O. 1990, ch. P. 5, art. 2, et The Queen v. Continental Bank Leasing Corporation, [1997] 1 C.T.C. 13 (C.A.F.).

6                Note 5, ci-dessus.

7                Je ne puis constater aucune distinction réelle ou juridique entre l'associé et le membre d'une société.

8                Selon Revenu Canada, la législation provinciale pertinente concernant les sociétés est concluante, lorsqu'il s'agit de déterminer si une entente particulière a pour effet de créer une société. Voir le Bulletin d'interprétation IT-90 : “Qu'est-ce qu'une société?” au paragraphe 2.

9                Voir les lois sur les sociétés en nom collectif des diverses provinces : R.S.A. 1980, ch. P-2, al. 1d); R.S.B.C. 1996, ch. 348, art. 2; R.S.M. 1987, ch. P30, art. 3; R.S.N.B. 1973, ch. P-4, art. 3; R.S.N. 1990, ch. P-3, al. 2c); R.S.N.S. 1989, ch. 334, art. 4; R.S.O. 1980, ch. 370, art. 2; R.S.P.E.I. 1988, ch. P-1; R.S.S. 1978, ch. P-3, par. 3(1). Voir également Northern Sales (1963) Ltd. v. M.N.R., 73 DTC 5200 (C.F. 1re inst.), à la page 5204.

10              Alison R. Manzer, A Practical Guide to Partnership Law, (Aurora: Canada Law Book, 1996) à 1-2.

11              Walls, ci-dessus.

12              L'interprétation finalement donnée à une disposition législative par le juge doit être vraisemblable et doit être celle qu'il est raisonnablement possible d'attribuer au texte de la disposition. Le juge ne devrait pas s'éloigner du sens ordinaire des termes. Ruth Sullivan, éd., Driedger on the Construction of Statutes, 3e éd., Toronto et Vancouver : Butterworths, pages 101 à 104, pages 110 à 113. Voir également pages 114 à 122.

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