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Date: 19991801

Dossier: 97-297-IT-G

ENTRE :

ANDRÉ VEILLEUX,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 3 novembre 1998 à Montréal (Québec) par l’honorable juge Pierre Archambault

Motifs du jugement

Le juge Archambault, C.C.I.

[1] Monsieur André Veilleux en appelle d’une cotisation établie par le ministre du Revenu national (ministre) selon l’article 227.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu (Loi) et selon la Loi sur l’assurance-chômage (LAC). Par cette cotisation en date du 26 avril 1996, le ministre tient monsieur Veilleux, à titre d’administrateur de Les Entreprises Melateck Inc. (Melateck), responsable du paiement de sommes (retenues à la source) que Melateck aurait dû retenir lors du versement de salaires à ses employés. Le ministre tient monsieur Veilleux responsable aussi de cotisations que Melateck n’a pas non plus remises au ministre en vertu de la LAC. Avec les pénalités et les intérêts, le montant de la cotisation du ministre s’élève à 39 239,18 $ pour la période de septembre à décembre 1994 (période pertinente). Le 21 février 1995, une ordonnance de séquestre a été rendue contre Melateck en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et le ministre a soumis au syndic des preuves de réclamation en date du 30 mars 1995. La seule question en litige est de savoir si monsieur Veilleux, en sa qualité d’administrateur de Melateck, a agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement de Melateck à l’égard de la période pertinente qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

Faits

[2] Durant la période pertinente, Melateck fabriquait des meubles mélaminés. Monsieur Veilleux était le seul actionnaire et administrateur de cette société. Comme éducation, il n'avait terminé que sa onzième année. C’est lui qui a fondé Melateck le 9 novembre 1978. À cette époque, il était depuis une dizaine d’années représentant de commerce chez une société de produits électroniques. D’ailleurs, les premiers meubles fabriqués par Melateck ont été des tables pour ces produits électroniques. Monsieur Veilleux a quitté son poste de représentant de commerce en 1985 pour se consacrer entièrement à Melateck.

[3] En 1984, des difficultés financières ont obligé Melateck à retarder le versement de ses retenues à la source. Ayant réglé par la suite ces difficultés financières, Melateck a acquitté ses arrérages d’impôt.

[4] Même si Melateck n’a jamais réalisé d’importants bénéfices, elle a réussi à exploiter avec succès son entreprise de 1985 à 1990. L’arrivée de la nouvelle taxe sur les produits et services de même que l’abolition de l’exemption de la taxe de vente provinciale ont eu un impact négatif sur ses ventes. À partir de 1991, Melateck a subi des pertes : 54 000,00 $ en 1991 et 55 000,00 $ en 1992. En 1993, elle a subi une perte dans le même ordre de grandeur. De plus, une tentative de percer sur le marché américain qui a mal tourné est venue empirer la situation.

[5] De façon générale, c’est du mois de juillet au mois de septembre que Melateck fait face à ses plus sérieux problèmes de liquidités et que sa ligne de crédit est le plus utilisée. Durant cette période, Melateck est en pleine production de meubles pour la saison d’automne.

[6] Au début de la période pertinente, la ligne de crédit de Melateck s’élevait à 400 000,00 $ dont 374 000,00 $ avaient été utilisés. Compte tenu des pertes répétées et de la faible rentabilité qui a toujours caractérisé cette entreprise, le banquier de Melateck a perdu confiance dans l’avenir de celle-ci et, lors d’une réunion du mois d’octobre 1994, a demandé à monsieur Veilleux de trouver un nouveau banquier pour Melateck. Le banquier n’a pas modifié sa décision même si monsieur Veilleux a retiré 80 000,00 $ d’un régime enregistré d’épargne-retraite pour les investir dans Melateck. Dans un rapport daté du 26 octobre 1994, le banquier indique qu’il va vérifier de façon quotidienne le compte bancaire de Melateck pour s’assurer qu’il ne soit pas à découvert et il confirme avoir informé Melateck qu’il n’hésiterait pas à refuser d’honorer les chèques de Melateck si elle empruntait plus que ce que la ligne de crédit permettait ou s’il le fallait pour s’assurer que cette ligne de crédit soit bien protégée.

[7] Vers la fin octobre 1994, en raison de ses inquiétudes, la succursale bancaire avec laquelle Melateck faisait des affaires a décidé de transférer à une unité spéciale la surveillance des prêts consentis à Melateck. Un représentant de cette unité spéciale, monsieur Cayer, a témoigné au cours de l’audience à la demande de monsieur Veilleux. Il a indiqué qu’il se contentait de s’assurer à la fin de chaque jour que le compte de la ligne de crédit n’était pas à découvert, et qu’il affectait le surplus au remboursement des prêts. Ce n’est pas le banquier qui faisait les chèques payables aux fournisseurs de Melateck et il n’exigeait pas non plus que chacun des chèques émis par Melateck soit approuvé par lui. Par contre, monsieur Cayer a reconnu qu’il fallait que la “ situation s’améliore ” et il n’aurait pas hésité à refuser d’honorer un chèque s'il y avait eu découvert. Selon le souvenir de monsieur Cayer, le banquier n’a refusé d’honorer aucun chèque pour manque de fonds. De plus, monsieur Cayer a reconnu n’avoir jamais discuté avec Melateck ni avec ses représentants du paiement des retenues à la source dues au ministre. Selon monsieur Cayer, ce sont monsieur et madame Veilleux qui continuaient à gérer l’entreprise de Melateck.

[8] Lors de son témoignage, monsieur Morrissette, un conseiller en gestion employé à temps partiel par Melateck, a confirmé que c’est l’épouse de monsieur Veilleux, Mme Boisvert, qui faisait les chèques à être envoyés aux fournisseurs de même qu’au ministre. Par contre, c’est monsieur Morrissette qui décidait à qui les chèques pouvaient être envoyés. Dans le cas du ministre, il a décidé de retenir ces chèques pour manque de liquidités. Selon lui, il était important d’améliorer la situation financière de Melateck avant de payer le ministre. Compte tenu de la décision du banquier de ne pas augmenter la ligne de crédit et d’exiger que Melateck se trouve un nouveau banquier, il était impérieux que tous les chèques émis soient couverts par des dépôts. Il fallait donc se concentrer sur les dépenses essentielles, à savoir les salaires nets des employés et les comptes des fournisseurs les plus importants. Monsieur Morrissette a confirmé que monsieur Veilleux s’occupait de la production de Melateck et de ses ventes et n’était pas impliqué dans le choix des créanciers que Melateck payait. Monsieur Morrissette, tout comme monsieur Veilleux, espérait que toutes les sommes dues au ministre seraient acquittées après avoir trouvé un nouveau banquier et un nouveau financement.

[9] Tous les deux étaient confiants de trouver ce nouveau banquier. Des démarches avaient été entreprises auprès de la Banque Nationale et de la Banque Laurentienne. Plusieurs rencontres ont d’ailleurs eu lieu avec des représentants de la Banque Nationale au cours de l’automne 1994. Toutefois, au mois de décembre de la même année, cette banque a informé Melateck de sa décision de ne pas la financer.

[10] En raison de cette tournure des événements, Melateck n’a pu obtenir son nouveau financement et elle a été incapable de payer les sommes dues au ministre. La solution alors retenue par Melateck a été de vendre son fonds de commerce à une nouvelle société appartenant à Mme Boisvert, l’épouse de monsieur Veilleux. Cette vente en bloc s’est effectuée avec le consentement du banquier de Melateck. Dans un rapport en date du 17 janvier 1995, ce banquier fait l’analyse de la situation. Il a décidé qu’il valait mieux coopérer parce que cette solution semblait la plus prometteuse quant au recouvrement de ses créances. Voici comment monsieur Cayer et un autre de ses collègues se sont exprimés : “ We have considered taking control of this operation and maximizing the liquidation process; however, this alternative would expose us to a loss. In allowing the owners to self liquidate, it permits us to recapture all our funds.

[11] Il semble que cette stratégie ait été couronnée de succès. Au cours de l’automne 1994, le banquier a réussi à se faire rembourser une somme d’environ 60 000 $. Le solde impayé de la ligne de crédit est passé de 374 000,00 $ au 26 octobre 1994 à 310 471,00 $ au 10 janvier 1995. Il semble de plus que le banquier ait réussi par la suite à obtenir le remboursement de tout ce qui lui était dû.

[12] Selon monsieur Morrissette, Melateck a été incapable de payer le ministre en raison d’un manque de liquidités et en raison des contraintes exercées par le banquier de Melateck. De plus, à la fin, soit entre la mi-décembre 1994 et la mi-janvier 1995, le ministre a saisi des comptes débiteurs de Melateck, ce qui aurait rendu la perception des comptes plus difficile.

[13] Dans son témoignage, monsieur Veilleux a expliqué que les derniers versements effectués par Melateck à ses employés en décembre 1994 représentaient le paiement des jours fériés. Il lui apparaissait important de leur verser ces sommes à la veille des fêtes compte tenu des salaires peu élevés qu’ils gagnaient. À la question de savoir quelles mesures il avait prises pour s’assurer que les retenues à la source soient remises au ministre, monsieur Veilleux a répondu qu’il avait entrepris auprès d’autres banquiers des démarches pour obtenir du nouveau financement et qu’il avait tout fait pour protéger l’ensemble de son entreprise.

Analyse

[14] Le seul motif avancé par monsieur Veilleux pour contester la cotisation du ministre est qu’il avait agi avec “ le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables ” tel que l’exige le paragraphe 227.1(3) de la Loi. La question de savoir si monsieur Veilleux a satisfait à la norme de prudence est avant tout une question de fait. On retrouve dans la jurisprudence plusieurs commentaires sur l'approche que les tribunaux doivent adopter dans l’appréciation des faits. Dans Soper c. Canada (C.A.), [1998] 1 C.F. 124 et [1997] A.C.F. 881 (QL), une décision récente de la Cour d’appel fédérale, on a énoncé certaines lignes directrices à suivre. Dans cette décision, le juge Robertson fait tout d'abord un rappel utile de l’historique et du cadre législatif de l’article 227.1 de la Loi. Voici ce qu’il écrit au paragraphe 11 de sa décision :

[11] Avant l’entrée en vigueur de l’article 227.1 de la Loi, le ministère du Revenu national était aux prises avec deux problèmes connexes mais distincts. Le premier était le non-paiement de l’impôt sur les sociétés en tant que tel et le second était le défaut de versement des impôts qui devaient être retenus à la source au nom d’un tiers (p. ex. des employés). La récession de 1981 a empiré la situation dans les deux cas. Comme les entreprises étaient dans une situation financière difficile, les sociétés et les administrateurs ont activement et sciemment cherché par divers moyens à se soustraire au paiement de l’impôt. Ainsi, certaines sociétés se sont laissées dépouiller de leurs éléments d’actif par une entité liée, et il leur est resté une créance irrécouvrable, d’où l’impossibilité pour la Couronne d’éteindre sa créance au titre de l’impôt sur les sociétés impayé. [...] Pendant la récession, il n’était pas rare non plus que des sociétés omettent de verser des retenues d’impôt faites au nom d’un tiers. Face à l’alternative de verser ces montants à la Couronne ou de les prendre pour rembourser d’importants créanciers dont les biens ou les services étaient nécessaires pour continuer d’exploiter l’entreprise, les administrateurs ont souvent choisi la deuxième voie. Cet abus et cette mauvaise gestion manifestes de la part des administrateurs constituaient la “situation irrégulière” que l’article 227.1 visait à corriger [...]

[Je souligne.]

[15] Le juge Robertson résume ainsi l'approche que doivent suivre les tribunaux dans l’application de la défense prévue au paragraphe 227.1(3) de la Loi:

[40] Le moment convient bien pour résumer mes conclusions au sujet du paragraphe 227.1(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu. La norme de prudence énoncée au paragraphe 227.1(3) de la Loi est fondamentalement souple. Au lieu de traiter les administrateurs comme un groupe homogène de professionnels dont la conduite est régie par une seule norme immuable, cette disposition comporte un élément subjectif qui tient compte des connaissances personnelles et de l’expérience de l’administrateur, ainsi que du contexte de la société visée, notamment son organisation, ses ressources, ses usages et sa conduite. Ainsi, on attend plus des personnes qui possèdent des compétences supérieures à la moyenne (p. ex. les gens d’affaires chevronnés).

[41] La norme de prudence énoncée au paragraphe 227.1(3) de la Loi n’est donc pas purement objective. Elle n’est pas purement subjective non plus. Il ne suffit pas qu’un administrateur affirme qu’il a fait de son mieux, car il invoque ainsi la norme purement subjective. Il est également évident que l’intégrité ne suffit pas. Toutefois, la norme n’est pas une norme professionnelle. Ces situations ne sont pas régies non plus par la norme du droit de la négligence. La Loi contient plutôt des éléments objectifs, qui sont représentés par la notion de la personne raisonnable, et des éléments subjectifs, qui sont inhérents à des considérations individuelles comme la “ compétence ” et l’idée de “ circonstances comparables ”. Par conséquent, la norme peut à bon droit être qualifiée de norme “ objective subjective ”.

[Je souligne.]

[16] Ce juge est un peu plus explicite quant au rôle que doit jouer un administrateur externe s’il veut bénéficier de la défense de la diligence raisonnable. Voici comment il s’exprime :

[53] À mon avis, l’obligation expresse d’agir prend naissance lorsqu’un administrateur obtient des renseignements ou prend conscience de faits qui pourraient l’amener à conclure que les versements posent, ou pourraient vraisemblablement poser, un problème potentiel. En d’autres termes, il incombe vraiment à l’administrateur externe de prendre des mesures s’il sait, ou aurait dû savoir, que la société pourrait avoir un problème avec les versements. La situation typique dans laquelle un administrateur est, ou aurait dû être, au courant de cette éventualité est celle de la société qui a des difficultés financières.

[Je souligne.]

Il va de soi qu’on ne peut en exiger moins d’un administrateur interne, comme monsieur Veilleux.

[17] Analysons les faits pertinents en l’espèce. Tout d’abord, il faut constater que durant la période pertinente, monsieur Veilleux était le seul administrateur et actionnaire de Melateck. Il s’impliquait de façon quotidienne dans les opérations de Melateck. C’est lui qui avait fondé cette entreprise en 1978. Même s’il ne possédait qu’une onzième année, monsieur Veilleux a oeuvré pendant de nombreuses années dans le monde des affaires. Au cours de la période pertinente, cela faisait déjà seize ans que monsieur Veilleux administrait Melateck. De plus, il avait connu certaines difficultés financières en 1984, ce qui l’avait amené à reporter à plus tard le versement des retenues à la source dues par Melateck au ministre. Nous sommes donc en présence d’un administrateur qui savait ou qui à tout le moins aurait dû savoir qu’il était important de remettre au ministre les retenues à la source.

[18] En 1994, monsieur Veilleux était au courant des difficultés financières de Melateck. Son banquier l’avait informé qu’il devait se trouver un autre banquier et obtenir un nouveau financement. Monsieur Veilleux a évidemment été impliqué dans les démarches pour obtenir ce nouveau financement. Interrogé sur les démarches qu’il avait entreprises pour prévenir le manquement à l’obligation de remettre au ministre les retenues à la source et les cotisations en vertu de la LAC, monsieur Veilleux s’est contenté de faire état de ses démarches pour obtenir un nouveau financement d’une nouvelle banque. Il n’a parlé que des mesures qu’il avait prises pour sauver l’entreprise dans son ensemble.

[19] La preuve n’a pas révélé que monsieur Veilleux a pris des mesures pour que les retenues à la source de même que les cotisations d’assurance-chômage soient remises au ministre. La preuve n’a pas révélé non plus que monsieur Veilleux a communiqué avec des représentants du ministre pour discuter des mesures à prendre pour éliminer les arrérages. Monsieur Cayer a témoigné qu’il n’avait jamais été question de payer les retenues à la source de Melateck. Il n’y a pas non plus de preuve que le banquier a empêché Melateck de payer le ministre.

[20] À mon avis, monsieur Veilleux n’a pas agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables. Il s’agit ici d’un cas typique d’une entreprise qui, face à de très sérieuses difficultés financières, doit choisir lesquels parmi ses créanciers elle payera. Melateck a choisi de payer d’abord le salaire net de ses employés et certains fournisseurs essentiels. En laissant Melateck privilégier certains de ses créanciers au détriment du ministre, monsieur Veilleux risquait de voir engagée sa propre responsabilité si ses tentatives d’obtenir un nouveau financement s’avéraient infructueuses. C’est ce qui s’est en fait passé et monsieur Veilleux doit donc accepter les conséquences du choix de Melateck. Ce résultat m’apparaît d’autant plus raisonnable que le banquier de Melateck semble avoir obtenu le remboursement complet des sommes qui lui étaient dues et que la famille de monsieur Veilleux a réussi à sauver son entreprise en permettant que le fonds de commerce de Melateck soit transféré d’une société appartenant à monsieur Veilleux à une autre appartenant à Mme Boisvert. N’eût été l’article 227.1 de la Loi, parmi le banquier, la famille Veilleux et le ministre, seul le ministre aurait été perdant.

[21] Dans son argumentation, le procureur de monsieur Veilleux a accordé beaucoup d’importance à la décision rendue par mon collègue le juge Rip dans l’affaire Grigg v. Canada, [1998] T.C.J. 726 (QL). Je ne crois pas que monsieur Veilleux se trouve dans une situation analogue à celle de M. Grigg. Tout d’abord, à la différence de monsieur Veilleux, M. Grigg n’avait pas une très grande expérience dans le monde des affaires. De façon plus importante, le banquier de la société de M. Grigg a exercé un degré de contrôle que l’on ne retrouve pas ici. Contrairement à ce qui s’est passé dans la présente affaire, c’est le banquier de la société de M. Grigg qui décidait lesquels des créanciers pouvaient être payés. M. Grigg a tenté de convaincre son banquier de payer le ministre. Il a même tenté de payer ce qui était dû au ministre, mais son banquier a refusé d’honorer le chèque.

[22] Finalement, il est important de noter que M. Grigg a été tenu responsable du manquement à l’obligation de remettre les retenues d’impôt dues par la société dont il était administrateur, et ce, jusqu’au moment où il a entrepris des démarches pour payer le ministre. Voici comment le juge Rip décrit cette situation :

[58] Up to and including the end of February 1993 Mr. Grigg did nothing to prevent the Company’s failures to remit. That the Company was in an intolerable relationship with its banker is not by itself a valid due diligence defence. It is only when Mr. Grigg learned of the failures and got in touch with Revenue Canada in an attempt to right the failures and Ms. Cunningham requested the Bank’s approval of cheques to Revenue Canada did Mr. Grigg start to exercise a degree of care, diligence and skill to prevent future failures.

[23] Ici, la preuve révèle clairement que le banquier n’a pas décidé lesquels des créanciers de Melateck devaient être payés. Il n’y a aucune preuve que ce banquier a refusé d’honorer un chèque au ministre en paiement des retenues à la source et des cotisations d’assurance-emploi. Le banquier honorait tous les chèques dans la mesure où les dépôts bancaires étaient suffisants pour les couvrir. La preuve révèle d’ailleurs que c’est Melateck et plus particulièrement monsieur Morrissette qui décidait quels étaient les créanciers qui allaient être payés. Il est bien évident que Melateck avait une faible marge de manoeuvre et qu’elle ne pouvait espérer que tous ses chèques seraient honorés si elle payait chacun de ses créanciers. Elle a donc dû faire un choix et le ministre ne figurait pas parmi les créanciers importants de Melateck. C’est précisément pour éviter qu’une telle situation se produise que l’article 227.1 de la Loi a été adopté. Ayant décidé de verser des salaires à ses employés, Melateck se devait de remettre au ministre les retenues à la source et les cotisations en vertu de la LAC qui correspondaient à ces salaires. N'ayant pas pris les mesures nécessaires pour prévenir le manquement à cette obligation, monsieur Veilleux ne peut se soustraire à la responsabilité qui résulte du paragraphe 227.1(1) de la Loi.

[24] Pour ces motifs, l’appel de monsieur Veilleux est rejeté avec dépens en faveur de l’intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour de janvier 1999.

“ Pierre Archambault ”

J.C.C.I.

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