Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19980127

Dossier: 97-698-IT-I

ENTRE :

FRANÇOIS ROY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge G. Tremblay, C.C.I.

Point en litige

[1] Selon l’avis d’appel et la réponse à l’avis d’appel, il s’agit de savoir si, parce que l’appelant a fait faillite le 2 juillet 1996, alors que depuis avril 1995 il avait avec son ex-conjointe Sylvie Tremblay la garde partagée de leurs deux enfants Sabrina et Nicolas,

1) il a capacité en justice,

2) la Cour peut entendre l’appel,

3) si oui à cette dernière question, l’appelant est le particulier admissible à l’égard de son fils Nicolas pour la période de mai 1995 à juin 1997 pour les années de base 1993, 1994 et 1995.

L’appelant soutient avoir contribué à 50 p. cent des dépenses engagées pour les deux enfants.

Fardeau de la preuve

[2] L'appelant a le fardeau de démontrer que les cotisations de l'intimée sont mal fondées. Ce fardeau de la preuve découle de plusieurs décisions judiciaires dont un jugement de la Cour suprême du Canada rendu dans l'affaire Johnston c. le ministre du Revenu national[1].

[3] Dans le même jugement, la Cour a décidé que les faits assumés par l'intimée pour appuyer sa décision sont également présumés vrais jusqu'à preuve du contraire. Dans la présente cause, les faits présumés par l'intimée sont décrits aux alinéas a) à f) du paragraphe 8 de la Réponse à l'avis d'appel. Ce paragraphe se lit comme suit :

8. En établissant les avis de détermination de prestations fiscales pour enfants du 20 février 1997, pour les années de base 1993, 1994 et 1995, le Ministre s’est notamment fondé sur les faits suivants :

a) l’appelant et Madame Sylvie Tremblay (ci-après l’“ex-conjointe”) vivaient ensemble en union libre; [admis]

b) de leur union sont nés deux enfants, Sabrina, née le 9 novembre 1991, et Nicolas, né le 13 juin 1993; [admis]

c) en avril 1995, l’appelant et son ex-conjointe se sont partagés la garde des enfants, Sabrina et Nicolas; [nié]

d) en vertu d’un jugement de Cour rendu le 20 juin 1996, la garde partagée était accordée à l’appelant et à son ex-conjointe, pour leurs deux enfants, Sabrina et Nicolas; [admis]

e) l’appelant a fait faillite le 2 juillet 1996; [admis]

f) le ministre a révisé les prestations fiscales pour enfants de l’appelant, pour les années de base 1993, 1994 et 1995, accordant la prestation fiscale pour enfants seulement pour sa fille Sabrina, à 180,33 $, pour la période de mai et juin 1995, pour l’année de base 1993, à 1 369,00 $, pour la période de juillet 1995 à juin 1996, pour l’année de base 1994, et à 1 117,40 $, pour la période de juillet 1996 à juin 1997, pour l’année de base 1995. [admis que c’est la décision du Ministre à laquelle s’oppose l’appelant]

Capacité ou incapacité de l'appelant d'ester en justice

[4] L’appelant a fait faillite le 2 juillet 1996 et en a été libéré le 2 avril 1997. L’intimée invoque l’article 56 du Code de procédure civile du Québec, alléguant que l’appelant n’avait pas la capacité d’ester en justice. En effet, lorsque l’appelant a produit son avis d’appel le 18 février 1997, il n’était pas encore libéré de la faillite et c’était le Syndic qui avait cette capacité. L’article 56 se lit comme suit :

56. Il faut être apte à exercer pleinement ses droits pour ester en justice sous quelque forme que ce soit, sauf disposition contraire de la loi.

Celui qui n’est pas apte à exercer pleinement ses droits doit être représenté, assisté ou autorisé, de la manière fixée par les lois qui régissent son état et sa capacité ou par le présent code.

L’irrégularité résultant du défaut de représentation, d’assistance ou d’autorisation n’a d’effet que s’il n’y est pas remédié, ce qui peut être fait rétroactivement en tout état de cause, même en appel.

[5] L’appelant soutient qu’il s’est adressé au Syndic au sujet du différend entre lui-même et madame Tremblay concernant les prestations fiscales pour enfants. Le Syndic lui a répondu qu’il n’interviendrait pas dans cette affaire mais que si l’appelant lui-même voulait intervenir, il pouvait le faire.

[6] À mon avis, l’appelant avait alors l’autorisation du Syndic pour procéder. Il avait la capacité d’ester en justice et la Cour a le droit de l’entendre.

Faits mis en preuve

[7] La prépondérance de la preuve démontre que de avril 1995 au 30 juin 1996, l’appelant avait la garde prépondérante de ses deux enfants. Cette décision a été prise suite au fait que le rôle de la Cour étant chargé, les parties ne pouvaient procéder avant plus d’un an.

Madame Sylvie Tremblay, travaillant comme infirmière à des heures irrégulières de jour et de nuit, ne prenait cependant les enfants que sporadiquement. L’appelant lui versait alors quand même 50 p. cent de la somme des prestations reçues.

[8] Le 20 juin 1996, les parties passent en Cour, la décision est prise qu’il y aurait garde partagée, chacun ayant sa semaine jusqu’à ce qu’une enquête soit faite et que la Cour révise le tout.

[9] L’appelant, ne recevant plus les prestations fiscales pour garde d’enfants, fait un appel téléphonique aux responsables de l’émission des chèques. Il apprend que depuis le 1er juillet, il n’a plus la garde des enfants, fait qui s’est avéré faux. De plus, il apprend que c’est à la demande de madame Sylvie Tremblay qu’on aurait pris cette décision et ce, sans considérer la décision de la Cour et sans faire enquête.

[10] Au début d’octobre 1996, M. Serge Delisle, enquêteur, vient rencontrer l’appelant et propose de lui verser les prestations pour un enfant à lui et pour un enfant à madame Tremblay, vu la décision temporaire concernant la garde partagée. Il l’avise aussi qu’il doit s’informer auprès de madame Sylvie Tremblay si elle accepte cette proposition.

[11] Monsieur Delisle informe par la suite l’appelant que madame Tremblay a refusé sa proposition. Elle préfère recevoir les prestations et en verser la moitié elle-même à l’appelant. L’appelant n’a jamais reçu la moitié du chèque des prestations de la part de madame Tremblay.

[12] De plus, on réclame de l’appelant la moitié des prestations reçues par lui de avril 1995 à juin 1996 (par. [3] : 8 f)).

[13] Suite à la preuve entendue, la Cour est d’avis que vu le règlement de la faillite intervenu, il n’y a pas d’effet juridique relativement aux remboursements réclamés. De plus, indépendamment de l’argument ci-dessus, et vu la prépondérance de la preuve et entente avec l’intimée, il est décidé que de avril 1995 au 30 juin 1996, l’appelant avait au moins en garde partagée un des deux enfants, soit sa fille Sabrina, et que l’appelant ne doit rien au Ministre.

Conclusion

[14] L’appel est accordé.

“ Guy Tremblay ”

J.C.C.I.



[1] [1948] R.C.S. 486, 3 DTC 1182, [1948] C.T.C. 195.

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