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Date: 20000726

Dossier: 98-1663-IT-G

ENTRE :

KNOWLEDGE SYSTEMS INCORPORATED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge McArthur, C.C.I.

[1] Les appels portent sur les cotisations établies à l'égard de six années d'imposition de l'appelante, soit de 1991 à 1996. La seule question à trancher consiste à savoir si une activité donnée de l'appelante, Knowledge Systems Incorporated (“ KSI ”), est une activité de recherche scientifique et de développement expérimental (RS & DE) au sens de l'article 37 et du paragraphe 248(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu ainsi que du paragraphe 2900(1) du Règlement.

[2] L'appelante fournissait des services informatiques et techniques ainsi que des services de conseil en gestion de systèmes informatiques en Ontario. Durant les années en cause, par l'entremise de son directeur, John J. Leppik, elle a également recueilli des données en vue d'un projet appelé Knowledge Development Systems (KDS). L'hypothèse sur laquelle reposait ce projet, telle qu'exposée dans l'avis d'appel, était qu'il devait être possible de créer un lien entre l'intelligence et l'expérience de l'utilisateur humain et les capacités de mémoire, de stockage, d'extraction et d'indexage ainsi que la rapidité de l'ordinateur, de façon à créer un processus décisionnel supérieur combinant ce que l’esprit humain, d’une part, et le micro-ordinateur, d’autre part, offraient de mieux. Cette hypothèse a évolué au fil des ans. Dans ses observations, l'avocat de l'appelante a déclaré :

[TRADUCTION]

[...] Votre honneur, je reconnais volontiers qu'il existait de nombreuses hypothèses, certaines consignées, d'autres non, mais l'hypothèse centrale, tout à fait claire pour M. Gotlieb et qui, selon ma respectueuse opinion, ressortait très clairement du témoignage de M. Leppik, était qu'il voulait construire un ordinateur omniprésent, qui pourrait [...] non pas seulement accompagner l'utilisateur partout, mais être en fin de compte collé à sa personne et qui pourrait l'aider. Penser — non, ce n'est pas le bon terme, plutôt exploiter la fiabilité [...], la capacité et la vitesse d'un ordinateur ainsi que l'intelligence et la sagesse de l'esprit humain.    (Transcription, page 45)

[3] Durant les années d'imposition en cause, l'appelante a fait état de dépenses courantes et de dépenses en immobilisations rattachées au projet KDS que l'on pourrait récapituler ainsi :

Année d'imposition

D. courantes

Immobilisations

Total

1991

14 559 $

1 231 $

15 790 $

1992

18 877

5 785

24 662

1993

31 960

2 433

34 393

1994

37 946

1 487

39 433

1995

50 460

5 823

56 283

1996

24 472

     Zéro

24 472

Dans ses déclarations produites pour ces années d'imposition, l'appelante a indiqué que ces dépenses étaient des dépenses de RS & DE au sens des articles 37, 127, 127.1 et 248 de la Loi ainsi que du paragraphe 2900(1) du Règlement. Le ministre du Revenu national, lorsqu'il a établi l'impôt payable par l'appelante pour les années d'imposition en cause, a autorisé cette dernière à déduire lesdites dépenses dans le calcul de ses bénéfices conformément à l'article 9 de la Loi, mais il a refusé de les considérer comme des dépenses de RS & DE. À la suite de l'audience, les parties ont déposé un exposé conjoint partiel des faits, daté du 26 juin 2000, dans lequel elles convenaient du règlement de certains points pertinents uniquement dans l'éventualité où les appels relatifs à la question de la RS & DE seraient admis. Je ferai mention de cet exposé à la fin des présents motifs de jugement.

Faits

[4] M. Leppik[1] a obtenu un baccalauréat es sciences appliquées de l'Université de Toronto en 1961 et est ingénieur enregistré en Ontario. Il a travaillé chez IBM Canada de 1961 à 1984. Lors de son départ à la retraite, il était directeur des programmes scientifiques et généraux. Il a mis sur pied le programme canadien d'IBM pour la recherche conjointe avec les universités et les hôpitaux en technologies de l'information. Depuis 1984, il a entre autres choses représenté plus de 150 contribuables concernant leurs demandes à Revenu Canada au titre de la RS & DE. Je crois que son taux de réussite est de 100 %.

[5] Voici un extrait de la position de l'appelante, exposée dans l'avis d'appel modifié :

[TRADUCTION]

14. L'objectif technologique du projet KDS consistait à concevoir un moyen qui permettrait aux spécialistes et aux autres personnes exerçant un métier axé sur le savoir d'utiliser des micro-ordinateurs omniprésents qui les aideraient dans tous les aspects du traitement de la connaissance. Le but du projet était de découvrir un moyen efficace de stocker, de structurer et d'exploiter une base de données pour spécialistes. Le résultat visé était l'élaboration d'une application logicielle prête à être utilisée à l'intention de tels travailleurs utilisant un micro-ordinateur compatible IBM.

15. L'approche retenue pour le projet KDS consistait à mettre au point un prototype afin d'évaluer dans quelle mesure l'objectif technologique pouvait être atteint à l'aide de la technologie existante, de définir les incertitudes technologiques, de déterminer dans quels domaines des progrès technologiques permettraient d'obtenir des résultats utiles et de préciser la nature de ces progrès.

16. Le projet KDS comportait plusieurs éléments d'incertitude technologique, notamment :

a) la définition exhaustive des éléments de connaissance;

b) la détermination et la définition des domaines de connaissance;

c) l'établissement de rapports entre les éléments de données;

d) la détermination des algorithmes de traitement requis pour synthétiser les éléments de savoir en agrégats ou domaines de savoir;

e) la possibilité d'éliminer ou de réduire les problèmes rattachés à l'inclusivité et à l'exclusivité.

17. Les recherches de l'appelante dans le cadre du projet KDS ont été systématiques.

18. Les recherches de l'appelante dans le cadre du projet KDS ont abouti à des progrès technologiques.

[6] L'avocat de l'intimée est d’avis que les activités à l'égard desquelles des dépenses de RS & DE ont été déclarées ne constituaient pas des activités de RS & DE au sens de l'article 37 et du paragraphe 248(1) de la Loi ni au sens de l'article 2900 du Règlement. Il a précisé dans ses observations écrites :

[TRADUCTION]

[...] L'appelante a eu recours à des technologies existantes, tant pour le matériel que pour les logiciels, et ne les a pas modifiées. L'appelante a fait état d'améliorations à apporter au projet en cause, mais elle n'a pas mis en oeuvre ni testé ces améliorations possibles. L'appelante a consigné tous les essais effectués dans le cadre du projet d'une manière telle qu'ils ne peuvent être compris ni reproduits. Il s'ensuit que le projet de l'appelante ne constituait pas une activité de recherche scientifique et de développement expérimental au sens du paragraphe 2900(1) du Règlement de l'impôt sur le revenu.

[7] L'une et l'autre parties se sont fondées sur le témoignage de spécialistes hautement compétents. M. C.C. Gotlieb a témoigné pour l'appelante. Son association avec l'Université de Toronto, d'abord en tant qu'étudiant, puis comme chargé de cours, professeur et chercheur, remonte à 1942. Depuis 1986, il est professeur émérite au département des sciences informatiques et à la faculté de bibliothéconomie et des sciences de l'information. Ses nombreuses distinctions et réalisations s'étalent sur 18 pages. Il a reçu trois doctorats honorifiques ainsi que l'Ordre du mérite du Canada. Ses domaines de spécialisation comprennent la physique, les mathématiques et l'informatique. Il offre également des services d'expert-conseil. Il a qualité pour témoigner à titre de spécialiste en bases de données et systèmes d'extraction de l'information. M. Gotlieb et M. Leppik ont eu des relations d'affaires au fil des ans, et ils étaient amis. Lorsqu'on lui a demandé d'évaluer le projet de l'appelante, M. Gotlieb a d'abord eu des réticences, mais il s'est finalement laissé fléchir.

[8] A témoigné pour l’intimée M. Stan Matwin, titulaire d’un doctorat, qui est également un spécialiste très compétent dans les domaines pertinents. Il a assisté à l'audience et a entendu le témoignage et le contre-interrogatoire de M. Gotlieb. Il a consacré plus de temps à la question que son confrère.

[9] Pour rendre ma décision, je me suis beaucoup appuyé sur le témoignage de ces deux spécialistes. C'est pourquoi je citerai de larges extraits de leurs rapports, en débutant par celui de M. Gotlieb. Voici comment il décrit les recherches menées par KSI[2] :

[TRADUCTION]

L'objet de ces recherches était de mettre au point un système grâce auquel, si une interrogation surgissait concernant un point ou une question, un particulier (l'utilisateur) serait en mesure d'évoquer tous les faits ou éléments pertinents dont il aurait eu connaissance antérieurement et qui auraient été saisis dans le système. Ce dernier devait constituer un aide-mémoire personnel portatif, rapide et fiable.

La démarche adoptée est la suivante : lorsque l'utilisateur estime qu'un élément dont il a pris connaissance vaut la peine d'être mis en mémoire et de faire partie de sa base personnelle de connaissances, il le saisit au moyen d'un appareil portatif, créant ainsi une entrée. L'appareil en question peut être un magnétophone, un ordinateur portatif, un scanneur à main, un appareil photo ou une caméra, par exemple. L'entrée compte trois composantes. La première est le localisateur, qui indique l'endroit où se trouve l'entrée : ce peut être l'appareil portatif lui-même, un ordinateur situé au bureau de l'utilisateur, un classeur à son domicile, le World Wide Web, une bibliothèque de bandes-son, un album de photos, un livre, une encyclopédie, etc. La deuxième composante est constituée d'un ensemble de descripteurs que l'utilisateur associe à l'entrée pour qu'ils servent de rubriques à l'aide desquelles l'entrée peut être classée et repérée. La date et l'heure constituent un descripteur; il y a aussi des mots-sujets, ainsi que des termes clés servant à décrire la nature de l'entrée. La troisième composante est le contenu, que l'on trouvera à l'endroit indiqué par le localisateur et qui peut se présenter sous forme de texte (parfois saisi à l'ordinateur portatif ou numérisé à l'aide du scanneur), de partie de bande-son, de photographie, d'image peinte ou même d'extrait musical.

Lorsqu'une interrogation est faite dans le système, des descripteurs lui sont attribués à elle aussi, et une recherche est lancée dans la base de connaissances afin d'extraire les entrées dont les descripteurs correspondent à ceux de l'interrogation. Dans les faits, le système ressemble beaucoup à une bibliothèque dotée d'un catalogue dont les rubriques servent à la recherche. Toutefois, dans le cas présent, le système est élaboré à l'intention d'un utilisateur unique, qui l'apporte dans tous ses déplacements.

[10] En janvier 2000, M. Gotlieb a passé trois heures dans le bureau de M. Leppik, a assisté à une démonstration et a posé de nombreuses questions. Plus tard, il a obtenu, au téléphone, de plus amples renseignements et a pu se faire une meilleure idée de la portée du système et de la méthodologie sous-jacente. M. Gotlieb a été favorablement impressionné par les antécédents de M. Leppik dans le domaine de la technologie ainsi que par le matériel qu'il avait assemblé. Il écrit aux pages 2 et 3, sous la rubrique “ Questions d'ordre technologique ” :

[TRADUCTION]

Pour saisir la portée du système, il faut observer qu'il fonctionne depuis maintenant huit ans et que le nombre d'entrées croît d'environ 3 500 par année, ce qui donne 28 000 entrées en tout. Chaque entrée est assortie de six ou sept descripteurs en moyenne, et le nombre total de descripteurs distincts dépasse le millier. M. Leppik dit qu'il consacre à peu près une demi-heure par jour à effectuer des entrées, soit approximativement dix par jour.

[11] Il explique que KDS n'est pas un système d'intelligence artificielle. Le système est censé comporter les fonctions de raisonnement qui permettent de rendre utile l’extraction de l'information mise en mémoire. M. Gotlieb ajoute qu'un système reposant sur les principes de base retenus pour KDS sera fonctionnel car des systèmes d'extraction de l'information de ce genre sont utilisés depuis des décennies.

[12] Le matériel dont dispose l'appelante à l'heure actuelle se compose de matériel informatique et du logiciel PackRat. N’importe qui peut se les procurer chez un détaillant d'équipement de bureau. L'appelante n'a pas modifié ce matériel de quelque manière que ce soit, et elle doit compter sur des progrès technologiques accomplis par quelqu'un d'autre dans l'avenir si elle veut disposer d'un ordinateur de taille suffisamment réduite pour répondre à ses besoins. Rien ne permet de savoir qui est susceptible de fournir un tel ordinateur, ni à quel moment. M. Gotlieb écrit à la page 4 :

[TRADUCTION]

La portabilité de KDS constitue également un progrès. Jusqu'à l'avènement de l'ordinateur, les systèmes d'extraction de données étaient massifs et peu pratiques. Souvenons-nous des anciens catalogues sur fiches des bibliothèques. En outre, l'actuel prototype de KDS ne constitue en rien le résultat final auquel on puisse s’attendre à cet égard. Les ordinateurs ne cessent de devenir plus petits et plus rapides, et il est à prévoir que nous disposerons de systèmes très compacts qui seront d'autant plus utiles et pratiques.

L'universalité et la portabilité de KDS, combinées à sa simplicité, permettent de l'utiliser n'importe où, et pendant longtemps. Le fait que le système a franchi l'épreuve du temps et qu'il évolue depuis huit ans rend cette affirmation crédible. De bien des manières, KDS représente la version ultime des organisateurs de poche que tant de gens transportent sur eux à des fins personnelles et d'affaires. J'utilise le mot “ ultime ” parce que le système est utile non seulement pour organiser rendez-vous et horaires, mais aussi pour à peu près toutes les activités quotidiennes faisant appel à la mémoire, sans compter sa très longue durée de vie utile.

À mon avis, des facteurs comme la polyvalence rattachée à la représentation multimédias du savoir, l'importance accordée aux particuliers et aux usages personnels, ainsi que la portabilité, ce à quoi s'ajoutent des caractéristiques comme la vitesse, la simplicité et le coût modique des micro-ordinateurs modernes, font de KDS un avancement technologique bien réel, présentant un grand intérêt.

Le lecteur pourrait conclure de cet extrait que l'appelante était en train de concevoir l'appareil portatif en question. Tel n'est pas le cas. Rien n'indique que l'appelante ait même simplement eu des rapports avec quelqu'un capable de mettre au point ce genre de technologie informatique. M. Gotlieb ajoute aux pages 4 et 5, sous la rubrique “ Incertitude scientifique et technologique ” :

[TRADUCTION]

Le produit que KSI s'efforce de mettre au point comporte un certain nombre d'incertitudes. Nous en avons déjà mentionné une, à savoir si le système donnera de bons résultats aux chapitres de la précision et du rappel lorsqu'il sera utilisé par d'autres personnes et que l'évaluation portera sur un grand nombre d'interrogations différentes. Ce point est très important, car il touche le coeur même de l'utilité et du potentiel commercial du produit.

Autre question, presque aussi importante : est-ce que le système, qui n'a été testé jusqu'ici que par le chef de la recherche, sera aussi bon et utile pour d'autres utilisateurs? De toute évidence, il doit être mis à l'essai par beaucoup plus d'utilisateurs. Cela fait intervenir la convivialité de l'interface utilisateur. M. Leppik est un utilisateur de matériel informatique très averti. Il est certain que les gens connaissent de plus en plus l’informatique, mais est-ce que les systèmes de saisie, de stockage et d'affichage de l'information du prototype conviendront à l'utilisateur “ moyen ”, à qui le système est destiné? Il serait surprenant que des améliorations ne puissent être apportées, mais il n'est pas possible d'indiquer pour le moment à quel niveau elles se situeraient ni en quoi elles consisteraient.

[...]

Le système est déjà utile, mais de nombreuses améliorations sont possibles. La question est de savoir non pas s'il existe des incertitudes, mais lesquelles de ces nombreuses incertitudes il serait rentable d'étudier.

Il écrit à la page 5, sous la rubrique “ Contenu scientifique ou technique ” :

[TRADUCTION]

J'ai eu l'occasion de constater personnellement la compétence professionnelle de M. Leppik. Pendant de nombreuses années qu'il a passées chez IBM et par la suite, il a travaillé à l'Université de Toronto, parfois dans le cadre de projets auxquels j'ai moi-même participé durant ma carrière universitaire. Je n'ai aucun motif de mettre en doute sa déclaration selon laquelle le système est en cours de mise au point depuis quelque huit ans. Les 28 000 entrées saisies — j'ai pu constater de visu le contenu de certaines — sont la preuve d'un engagement à long terme, engagement dont le respect exige une très haute compétence technique.

C'est toutefois l'existence même du prototype qui représente la preuve la plus convaincante du contenu technique et des progrès accomplis en vue d'atteindre l'objectif visé. Ce prototype est dans les faits un appareil technologique complexe, construit à l'aide de nombreuses composantes, entre autres l'ordinateur portatif et le scanneur de poche, qui constituent en eux-mêmes des triomphes de la technologie moderne.

À la question relative au critère du contenu technique, la réponse est évidente.

Enfin, bon nombre des entrées faites dans le système sont le fruit de réflexions sans lien les unes avec les autres. On est loin de la documentation courante.

[13] M. Stan Matwin a rédigé un document[3] réfutant le rapport de M. Gotlieb et a assisté aux deux premiers jours du procès, ce qui lui a permis d'entendre le témoignage de ce dernier ainsi que le contre-interrogatoire. Tout comme son collègue, M. Matwin est hautement compétent. Il a obtenu un doctorat en sciences informatiques en 1977 et est professeur au département d'informatique de l'Université d'Ottawa depuis 1991. Il est à l'heure actuelle directeur de l'Institut d'informatique Ottawa-Carleton et directeur des études supérieures en informatique à l'École d'ingénierie et de technologie de l'information. Je ne vais pas tenter de récapituler ses nombreuses réalisations, me contentant simplement de dire qu'il a accumulé un bagage éloquent en technologie de l'information. Il a assisté à une démonstration faite par KSI en mars 2000. Dans sa réfutation du rapport de M. Gotlieb, il décrit KDS comme un dépôt de connaissances se composant d'une base de données qui contient maintenant 28 000 éléments de connaissance. Des centaines d'exemples ont été déposés en preuve, dont cinq[4], choisis plus ou moins au hasard, sont reproduits ci-après :

[TRADUCTION]

Page 25

Résumé : Test KDS – À quel point mon gestionnaire de données personnelles (GDP) est important

Date : 07/27/93

Temps écoulé : 00 00 00

Descripteur : GDP

Descripteur : packrat

Descripteur : test kds

Descripteur : information

Descripteur : copie de sauvegarde

Descripteur : reprise

Descripteur : kds trouver *******

Descripteur : perte

Descripteur : défaillance

Descripteur : base de connaissances

Lorsque PackRat 5.0 a cessé de fonctionner, ce fut un dur coup pour moi. J'ai perdu plusieurs éléments. J'ignorais au juste ce que j'avais perdu. J'ai perdu confiance. J'avais accumulé des éléments que je ne savais plus où mettre. En fin de compte, j'ai opté pour une version antérieure du logiciel, et je me suis résigné à l'amnésie pour la période intermédiaire.

KDS — deux leçons apprises

1. J'ai compris que je ne voulais pas réutiliser la version 5.0 après avoir consulté le forum CompuServe. Si je l'avais fait plus tôt, je n'aurais pas eu ce problème.

2. La sensibilisation au problème par rapport à KDS et la tenue d'essais préalables auraient mis tous les abonnés à l'abri du problème.

Autre perte en nov. 1998 .....................

Entrées perdues

Certains numéros de téléphone ont été récupérés

Éléments de NOTES perdus

Ma base de connaissances est désormais d'une telle envergure et représente une telle valeur que je n'ai d'autre choix que de continuer, en faisant preuve de plus de prudence.

Page 27

Résumé : Test KDS – Trouver ce que j'ignorais même détenir

Date : 01/18/96

Temps écoulé : 00 00 00

Descripteur : kds — trouver ******

Descripteur : oublié

Descripteur : extraire

Descripteur : hélice

Descripteur : vide sanitaire

Descripteur : test kds

Descripteur : test kds

Descripteur :

Descripteur :

Descripteur :

J'ai vu une hélice de rechange pour bateau dans le vide sanitaire, et j'ai décidé d'ajouter une entrée dans KDS afin de pouvoir retrouver l'hélice en cas de besoin. J'ai saisi l'entrée, puis j'ai lancé une recherche portant sur “ vide sanitaire ” pour savoir quelles autres entrées avaient ce descripteur. J'ai trouvé une entrée antérieure pour l'hélice qui était presque identique.

Page 28

Résumé : Test KDS – notes écrites sur une poubelle...

Date : 11/16/95

Temps écoulé : 00 00 00

Descripteur : test kds

Descripteur : borne-fontaine

Descripteur : Las Vegas

Descripteur : kds — trouver *******

Descripteur : gestion du temps

Descripteur : borne d'incendie

Descripteur : borne fontaine

Descripteur : bureau mobile

Descripteur : inactivité

Descripteur : test KDS

[...] tandis que j'attendais l'autobus à destination de l'aéroport de Las Vegas. Je ne perdais pas mon temps comme eux, et l'autobus avait du retard.

[...] ça, c'est un “ bureau mobile ”!

[...] plus tard, dans l'autobus, sur une poubelle de l'aéroport et dans l'avion

VOILÀ QUI S'APPELLE RÉDUIRE AU MINIMUM L'INACTIVITÉ

Page 29

Résumé Test KDS – Conséquences d'une méthode itérative

Date 02/19/99

Temps écoulé 00 00 00

Descripteur : cause et effet

Descripteur : kds — cour *******

Descripteur : prototype

Descripteur : kds — trouver ***********

Descripteur : philosophie

Descripteur : borne d'incendie

Descripteur : adn

Descripteur : connaissance

Descripteur : contexte

Descripteur :

Conséquence d'une méthode itérative

[...] par rapport à un élément : notre compréhension est fonction du point de vue adopté [...]

[...] au fil de l'apprentissage, nos modèles perceptuels évoluent, ce qui en retour modifie notre point de vue. Dès lors, nous voyons les choses que nous connaissons déjà de façon différente, et nous percevons des choses entièrement nouvelles. D'autres personnes, dans un contexte différent, verront les choses d'une autre manière encore. Cela signifie qu'il n'existe pas de réalité proprement dite, mais seulement des perceptions choisies, limitées et changeantes, assorties d'interprétations différentes et changeantes elles aussi.

Voilà pourquoi il est si important d'adopter une approche reposant sur l'utilisation d'un prototype, et pourquoi une base de connaissances personnelles a un caractère dynamique et doit faire l'objet de mises à jour constantes.

C'est pour cette raison que de nombreux philosophes professent que la vérité n'existe pas, qu'aucun livre, aucun message n'a de sens spécifique, que McLuhan a observé que le médium constitue le message même, et que le code de l'ADN prend un sens différent selon le mode de lecture et le contexte.

Page 32

Résumé : Test KDS – Des grands avantages de la simplicité

Date : 02/22/95

Temps écoulé : 00 00 00

Descripteur : test kds

Descripteur : expérience

Descripteur : notes

Descripteur : quotidien

Descripteur : kds — trouver*****

Descripteur : concentrer son attention

Descripteur : Simple *****

Descripteur : simplicité

Descripteur : valeur

Descripteur : kds — vérification

950222

Un article du Globe and Mail commente un rapport paru dans Business Week, selon lequel l'industrie a dépensé un billion de dollars en micro-ordinateurs, pour un gain de productivité nul ou minime pour le moment, mais il semble que ce gain soit imminent. La persévérance.

950222

L'usage que j'en fais est devenu une habitude, peut-être même une obsession. Je dois limiter le nombre d'outils que j'utilise. Je justifie mon labeur en y voyant un coût en vue de mettre au point KDS, et je me demande si je peux réellement en tirer quelque chose; je conclus que oui, pourvu que je m'en tienne à la simplicité.

La capacité de concentrer son attention est un outil très puissant. Prenons le cas de Susan Powter, ou d'un ministre du Cabinet.

[14] Voici un extrait de la position de l'intimée telle qu'exposée par M. Matwin dans son rapport de réfutation du 17 mars 2000 :

[TRADUCTION]

J'ai comme tâche d'évaluer les travaux en fonction des critères précis énoncés au paragraphe 2900(1) du Règlement de l'impôt sur le revenu et en tenant compte de la circulaire d'information 86-4R3. Les trois critères pertinents sont : l'avancement de la science ou de la technologie, l'incertitude scientifique ou technologique et le contenu scientifique et technique.

Avancement

Je suis incapable de saisir quel progrès représente KDS en matière de recherche scientifique et de développement expérimental. Il n'y a pas de recherche fondamentale en jeu puisque, à ma connaissance, aucun objectif (hypothèse) clair et vérifiable n'a été formulé à quelque moment que ce soit au cours de ce projet; de plus, il y a une application pratique en vue.

Les travaux ne relèvent pas du développement expérimental, puisqu'aucun développement d'ordre informatique (programmes, algorithmes ou documentation sur la conception que l'on puisse réutiliser) n'a été fait. La documentation encodée dans le cahier de développement n'a pas, à mon avis, la rigueur et la précision requises pour pouvoir servir de fondement à la mise au point d'un logiciel et, en outre, la nature de ce logiciel éventuel demeure imprécise.

[...] Il n'y a pas non plus de preuve d'une progression de la compréhension scientifique ou technologique, hormis la capacité de mieux organiser les connaissances personnelles d'un particulier, celui-là même qui a mis au point le système. Les travaux n'aboutissent à aucun avancement en matière d'extraction de l'information, car toutes les fonctions touchant l'extraction sont exécutées par le logiciel PackRat.

[...]

La principale preuve de progrès est que le système aide son concepteur à organiser ses pensées et à accéder à ses connaissances. Toutefois, aucun procédé systématique n'a été mis au point qui permette à d'autres personnes d'obtenir les mêmes résultats. Un ensemble d'éléments a été constitué, mais quelles sont au juste les fonctions mises à la disposition de l'utilisateur? [...]

Incertitude scientifique ou technologique

Les travaux n'ayant pas un objectif bien défini, il est difficile de les évaluer en fonction du critère d'incertitude scientifique ou technologique. J'observe cependant que les travaux effectués et les résultats obtenus jusqu'ici étaient, sans le moindre doute, à la portée de tout spécialiste compétent en technologie de l'information. En d'autres termes, à partir des connaissances technologiques déjà disponibles de façon générale, il est possible de constituer une base de données contenant quelque 14 000 éléments textuels et d'en extraire des éléments. De plus, toujours en faisant fond sur les connaissances technologiques déjà disponibles de façon générale, un tel système serait manifestement portable dans n'importe quel environnement informatique moderne, y compris les ordinateurs portatifs (le terme “ portage ” désigne le processus d'adaptation d'un logiciel exploité par un système informatique à un nouveau système, habituellement plus avancé technologiquement). Le fait que le développement s’inscrive nettement dans les limites des normes technologiques actuelles et qu'on puisse le définir comme un procédé technologique courant signifie qu'il n'y a pas d'incertitude technologique.

Contenu scientifique et technique

Je ne parviens pas à trouver une preuve suffisante de contenu scientifique et technique lorsque j'examine les travaux effectués jusqu'ici. Pour juger les travaux en cause selon ce critère, on cherchera à établir l’existence d'un processus systématique ayant servi à vérifier expérimentalement une hypothèse formulée au départ. Aucune hypothèse de ce genre n'est formulée ici. [...]

[...] Aucune fonction précise n'est indiquée pour le prototype.

Dans le cadre de son examen, M. Gotlieb fait mention d'une expérience très récente et non documentée visant à mesurer la précision et les résultats de la fonction de rappel de KDS. Je conviens que ces mesures s'appliquent au genre de travaux effectués par KSI. Il faut toutefois remarquer que les mesures en question sont en grande partie subjectives. En temps normal, de telles expériences, ainsi que l'évaluation subséquente de la précision et des résultats de la fonction de rappel, sont effectuées par un tiers indépendant. De plus, on ne sait trop au juste quelle est l'incidence de ces résultats (précision et rappel) sur KDS.

Analyse

[15] Pour l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu, la définition de la RS & DE à l'article 2900 du Règlement est la suivante :

2900(1) Pour l'application de la présente partie ainsi que des articles 37 et 37.1 de la Loi, “ activités de recherche scientifique et de développement expérimental ” s'entend d'une investigation ou recherche systématique d'ordre scientifique ou technologique, effectuée par voie d'expérimentation ou d'analyse, c'est-à-dire :

a) la recherche pure, à savoir les travaux entrepris pour l'avancement de la science sans aucune application pratique en vue;

b) la recherche appliquée, à savoir les travaux entrepris pour l'avancement de la science avec application pratique en vue;

c) le développement expérimental, à savoir les travaux entrepris dans l'intérêt du progrès technologique en vue de la création de nouveaux matériaux, dispositifs, produits ou procédés ou de l'amélioration, même légère, de ceux qui existent;

d) [...]

L'appelante se fonde en particulier sur l'alinéa c). Les encouragements fiscaux prévus ont pour objet d'appuyer la recherche scientifique au Canada. La circulaire d'information IC86-4R3 est reconnue comme étant le document qui énonce les critères servant à établir l'admissibilité des activités de RS & DE[5].

[16] Les deux spécialistes ont adopté une approche similaire, consistant à appliquer les critères contenus dans la circulaire d'information IC86-4R3 à la situation présente. L'un et l'autre ont eu peine à déterminer avec précision la manière dont KDS s'y prend pour atteindre les objectifs tels qu’ils sont formulés au paragraphe 13 de l'avis d'appel modifié[6]. Je ne prétends pas être un expert en informatique, et je me fonde donc sur la preuve fournie par les spécialistes dans le contexte de l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le fait que des spécialistes hautement compétents ne puissent s'entendre sur la question de savoir si l'appelante satisfait aux critères applicables — a) l'avancement de la science ou de la technologie, b) l'incertitude et c) le contenu scientifique et technique — montre qu'il n'existe pas de réponse simple en l'instance. Après avoir analysé leurs rapports exhaustifs, on constate que la question qui les oppose est d'établir si les activités de l'appelante constituaient des travaux courants de mise au point ou si elles ont conduit à des progrès technologiques. Les motifs suivants m'amènent à souscrire à la conclusion de M. Matwin, selon laquelle aucun progrès technologique n'a été réalisé.

Examen du témoignage de M. Gotlieb

[17] M. Gotlieb voyait dans KDS un aide-mémoire et un système d'extraction de l'information. Il le comparait à l'agenda électronique qu'il porte dans sa poche de poitrine. Seul M. Leppik pouvait effectuer des essais. Le système sous sa forme actuelle ne peut être utilisé par d'autres personnes et, les entrées étant d'une nature très personnelle, M. Leppik tient à préserver sa vie privée. M. Gotlieb jugeait que d'autres essais seraient requis, idéalement par un certain nombre d'utilisateurs établissant des comparaisons. M. Gotlieb a décrit KDS comme étant “ un système d'extraction de l'information ”. M. Leppik a déclaré que la fonction de KDS n'est pas à proprement parler l'extraction de l'information.

Avancement de la science

[18] M. Gotlieb décrit KDS comme “ une base de données multimédias dont le contenu peut se présenter sous forme de texte, de sons ou d'images ”. Il a fait erreur sur ce point, puisque les bases de données gérées par PackRat ne peuvent contenir de sons ni d'images. Il a déclaré que “ la portabilité de KDS constitue un progrès ”. Or, la portabilité des ordinateurs n'a rien à voir avec KDS et les travaux de M. Leppik. Au chapitre de l'incertitude scientifique ou technologique, il se demande si KDS obtiendra de bons résultats au chapitre de la précision et de la fonction de rappel lorsqu'il sera utilisé par d'autres personnes, ajoutant qu'il s'agirait d'un test utile. S'il s'agit d'une incertitude, celle-ci n'a jamais fait l'objet d'essais. M. Leppik est le seul à pouvoir tester son projet.

Contenu scientifique

[19] Dans ses commentaires généraux, il écrit que la documentation de KDS n'est pas de nature courante et démontre de la compétence technique. Il n'a pas testé personnellement le système et ne pouvait le faire, devant se fier à M. Leppik. Il a supposé, en raison des antécédents scientifiques de M. Leppik, que la documentation, rédigée par ce dernier, était valable. En raison de la carrière de M. Leppik chez IBM et de ses connaissances supérieures dans le domaine de l'extraction de l'information, M. Gotlieb avait foi en la validité du projet. J'estime qu'une telle mesure du contenu scientifique est insuffisante. Pour en finir avec l'examen du rapport de M. Gotlieb, il convient de remarquer qu'il estimait que n'importe quel brillant étudiant de quatrième année en informatique pourrait réunir les composantes de KDS, ce qui m'amène à conclure que le projet s'apparente davantage à des travaux courants de mise au point qu'à un progrès technologique.

[20] Dans l'affaire RIS – Christie Ltd c. La Reine[7], le juge Roberston a fait mention de l'arrêt Northwest Hydraulic, précité, auquel il souscrit, relativement à l'analyse approfondie du sens de l'expression “ recherche scientifique ” pour l'application de la loi. Il appartient à notre cour d'établir ce qui constitue de la RS & DE. Un spécialiste peut aider la Cour à évaluer la preuve technique. La RS & DE vise la mise au point de produits ou de procédés nouveaux ou améliorés. Voici un commentaire du juge Robertson, aux pages 5089-5990, qui est pertinent ici :

[...] La recherche doit donc avoir pour but une importante avancée technologique et doit comporter un élément de créativité, elle ne peut être la simple application de principes techniques courants. Il faut aussi que l'objectif visé soit réaliste. L'alchimiste déterminé qui cherche à transformer des métaux communs en or ne saurait chercher un encouragement fiscal dans la Loi de l'impôt sur le revenu. À supposer que le projet de recherche soit admissible à un avantage fiscal, la loi ne pose nullement pour condition, expresse ou implicite, qu'il soit couronné par une avancée technologique. L'article 2900 du Règlement vise la recherche effectuée pour l'avancement de la science ou dans le but de créer de nouveaux produits. Il ne spécifie pas que pour être admissible, elle doit atteindre effectivement ces objectifs. Une disposition en sens contraire reviendrait à faire échec aux fins mêmes que poursuit la loi.

[21] La question en cause ici semble se résumer à savoir si les travaux de M. Leppik pour le compte de l'appelante avaient pour but une importante avancée technologique et comportaient un élément de créativité, ou s'ils ne consistaient qu'en la simple application de principes courants. Il est clair que ses efforts n'ont pas porté fruit jusqu'ici, mais cela n'a pas pour effet d'enlever toute validité à la position de l'appelante[8]. Celle-ci cherche à mettre au point un système fondé sur la connaissance. La question est de savoir s'il s'agit ou non de l'application de principes techniques existants. Est-ce que l'objectif de recherche de l'appelante peut conduire à une avancée technologique? Tout comme M. Matwin, je me demande quelle technologie au juste l'appelante espère mettre au point. Je pense que même le témoin de l'appelante souffre d’une certaine confusion à ce sujet. À la page 4 de son rapport, M. Gotlieb déclare que l'une des caractéristiques importantes de KDS est qu'il constitue “ une base de données multimédias dont le contenu peut se présenter sous forme de texte, de sons ou d'images ”; or, il s'est avéré que le logiciel PackRat utilisé pour KDS ne stocke pas de sons ni d'images.

[22] M. Gotlieb a également dit que la portabilité de KDS constitue un progrès; pourtant, les travaux de l'appelante n'incluent pas la mise au point d'un logiciel compact. L'appelante doit compter que quelqu'un d'autre mettra au point un ordinateur de petite taille que l'on puisse doter du logiciel requis. Il semble qu'elle ignore totalement si un ordinateur convenant à ses besoins sera mis au point ni, le cas échéant, quand, où et comment. M. Gotlieb écrit encore :

[TRADUCTION]

[...] des facteurs comme la polyvalence, découlant de la représentation multimédias des connaissances, le fait que le produit soit axé sur un usage personnalisé par les particuliers, la portabilité, plus les caractéristiques des micro-ordinateurs modernes, comme la vitesse, la simplicité et le coût modique, font que KDS constitue un progrès technologique indéniable et de grand intérêt.

Ce commentaire apparaît encore une fois curieux, du fait que KDS ne possède pas de capacités multimédias et n'est ni polyvalent, ni portable, ni simple du tout. En effet, comment le qualifier de simple alors que des spécialistes ont peine à le comprendre.

[23] À l'heure actuelle, M. Leppik est le seul à pouvoir extraire de l'information de KDS, et rien ne démontre que le système ait jamais été de quelque utilité pour lui. C'est lui qui choisit les descripteurs associés aux entrées, et ces dernières ne semblent présenter aucune valeur pour qui que ce soit d'autre. Personne d'autre que M. Leppik ne peut tester KDS. Après dix années consacrées à la saisie d'entrées, il semble que l'appelante n'a fait aucun progrès en vue d'atteindre ses objectifs[9]. Ce que l'appelante a fait a été d'utiliser la technologie et le matériel informatique existants ainsi que le logiciel PackRat, puis d'enregistrer des messages personnels que nul ne peut comprendre ni tester à part M. Leppik. Cela ne constitue pas de la RS & DE.

[24] La question est manifestement complexe. L'une des opinions fournies par les spécialistes doit prévaloir. À mes yeux, le raisonnement de M. Matwin est plus convaincant. Je pense comme lui que toute personne versée en informatique serait en mesure d'assembler les composantes de KDS et de saisir des entrées dans une “ base de connaissances ” au moyen du logiciel PackRat.

[25] J'ai cherché à exposer de façon concise la démarche adoptée par mon collègue le juge Bowman dans l'affaire Northwest Hydraulic et à appliquer les mêmes critères aux faits en cause ici.

a) Existe-t-il un risque ou une incertitude technologique qui ne puisse être éliminé par les études techniques courantes?

Je ne suis pas persuadé qu'une incertitude existe en l'instance. Je souscris à la conclusion de M. Matwin voulant que l'incertitude puisse être éliminée en faisant appel aux “ techniques, aux procédures et aux données qui sont généralement accessibles aux spécialistes compétents dans le domaine ”[10], ainsi qu'à celle selon laquelle “ le fait que le développement s’inscrive nettement dans les limites des normes technologiques actuelles et qu'on puisse le définir comme un procédé technologique courant signifie qu'il n'y a pas d'incertitude technologique ”.

b) L'appelante a-t-elle formulé des hypothèses visant expressément à réduire ou à éliminer cette incertitude?

Je souscris à l'opinion de M. Matwin selon laquelle plusieurs hypothèses différentes ont été formulées. À défaut d'une hypothèse précise à des fins d'investigation, il est difficile d'évaluer le projet de l'appelante.

c) Les procédures adoptées par l'appelante sont-elles conformes à la méthode scientifique?

La méthode scientifique doit comporter une expérimentation systématique. M. Matwin a constaté que les entrées ne présentaient pas le degré de rigueur et de précision permettant de les utiliser comme fondement pour la mise au point d'un logiciel.

d) Le processus a-t-il abouti à un progrès technologique?

En un mot, la réponse est non. Seul M. Leppik peut tester KDS. Les deux spécialistes ont convenu que des essais plus poussés doivent être faits en vue d'établir si KDS constitue un progrès et si d'autres personnes pourraient en tirer profit. M. Matwin a bien indiqué que l'on peut se procurer la technologie utilisée dans le projet KDS à un magasin de produits informatiques.

e) Un compte rendu détaillé des hypothèses, des essais et des résultats doit être fait, et ce, au fur et à mesure que les travaux progressent. Personne ne peut établir ce que M. Leppik a fait au juste, ni mesurer ce qu'il a accompli. M. Matwin a écrit que les entrées n'ont pas “ la rigueur et la précision requises pour pouvoir servir de fondement à la mise au point d'un logiciel ”.

[26] Des recherches n'ont pas forcément à être couronnées de succès pour être admissibles à titre d'activités de RS & DE, mais, de toute évidence, elles ne doivent pas non plus se poursuivre indéfiniment. Rien ou presque ne semble indiquer que l'appelante avait fait quelque progrès que ce soit en vue d'atteindre ses objectifs en 2000 par rapport à 1991. Il est indéniable que M. Leppik a consacré de nombreuses heures à son projet. S'il ne s'agissait pas de recherche scientifique, de quoi s'agissait-il au juste? Je crois qu'il s'agissait davantage d'un loisir, d'une activité récréative ou d'un journal personnel quotidien que de RS & DE. Bon nombre des entrées sont des réflexions sans lien les unes avec les autres et enregistrées pour des raisons personnelles. Si le système ne peut être testé par des spécialistes de l'informatique de renommée mondiale au bout de presque dix ans, je vois mal comment l'appelante peut démontrer que le projet KDS est de la RS & DE.

[27] J'ai pris en considération les affaires Northwest Hydraulic et R.I.S. Christie, qui sont les seules décisions de la Cour que l'un et l'autre avocats ont invoquées de façon relativement détaillée. J'ai lu les six autres affaires contenues dans le recueil conjoint de jurisprudence, et j'estime qu'elles sont de peu d'utilité au regard de la présente affaire. Puisque je juge que l'activité de l'appelante n'est pas de la RS & DE, je n'ai pas à me prononcer sur l'exposé conjoint partiel des faits. Les appels sont rejetés, avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de juillet 2000.

“ C. H. McArthur ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 19e jour de mars 2001.

Mario Lagacé, réviseur



[1]               M. Leppik est l'âme dirigeante de l'appelante.

[2]               Pièce A-5, page 1.

[3]               Pièce R-2.

[4]                On trouvera ces entrées du système d'extraction KDS aux pages 25, 27, 28, 29 et 32 de la pièce A-3.

[5]               Northwest Hydraulic Consultants Ltd. c. La Reine, C.C.I., no 97-531(IT)G, 1er mai 1998, aux pages 5, 6, 7 et 8 (98 DTC 1839, aux pages 1840 et 1841).

[6]               L'hypothèse de l'appelante, exposée au deuxième paragraphe des présents motifs de jugement.

[7]               C.A.F., no A-710-96, 21 décembre 1998 (99 DTC 5087).

[8]                Affaire R.I.S. Christie Ltd. c. La Reine, précitée.

[9]               Les objectifs de l'appelante demeurent quelque peu nébuleux.

[10]             Définition donnée par le juge Bowman de l'expression “ études techniques courantes ” dans l'affaire Northern Hydraulic, à la page 6 (DTC : à la page 1841).

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