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Date: 19980326

Dossier: 97-2947-IT-G

ENTRE :

SERVICE PAUSE CAFÉ MAT INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge P.R. Dussault, C.C.I.

[1] Il s'agit d'appels de cotisations en matière d'impôt sur le revenu pour les années d'imposition de l'appelante se terminant le 31 janvier 1992, 1993 et 1994.

[2] Par ces cotisations, le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) a refusé à l'appelante, pour les fins des déductions pour amortissement (Règlement de l'impôt sur le revenu, Partie XI et Annexe II), l'inclusion de machines distributrices à café comme biens des catégories 29, 39 et 43 et a inclus ces machines comme biens de la catégorie 8.

[3] De plus, le Ministre a refusé à l'appelante le crédit d'impôt à l'investissement et le crédit d'impôt à l'investissement remboursable en rapport avec l'acquisition des mêmes biens.

[4] D'emblée, l'avocat de l'intimée reconnaît que la cotisation pour l'année 1992 a été émise hors délai et que l'appel pour cette année doit être admis.

[5] Quant aux années 1993 et 1994, l'avocat de l'intimée ne conteste pas qu'il y a eu transformation réalisée grâce aux machines distributrices à café, en l'occurrence la transformation du café en grains ou moulu en café liquide, mais prétend que l'appelante n'a pas elle-même utilisé les biens acquis pour la transformation de marchandises à vendre.

[6] Les catégories 29, 39 et 43 de l'Annexe II concernent toutes trois des biens acquis pour des activités de fabrication et de transformation selon qu'ils ont été acquis au cours de différentes périodes. Pour les fins des présents appels, c'est le fait qu'il soient inclus dans l'une ou l'autre de ces catégories plutôt que dans la catégorie 8 qui importe.

[7] Les biens suivants sont inclus dans la catégorie 29 de l'Annexe II en vertu du sous-alinéa a)(i) qui se lit :

a) ... les biens fabriqués par le contribuable et dont la fabrication a été achevée après le 8 mai 1972 ou autres biens acquis par le contribuable après le 8 mai 1972,

(i) et devant être utilisés directement ou indirectement par lui au Canada surtout pour la fabrication ou la transformation de marchandises en vue de la vente ou de la location, ou

...

(je souligne)

[8] Par ailleurs, au paragraphe 127(9) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), la partie pertinente de la définition de « bien admissible » aux fins du crédit d'impôt à l'investissement se lit comme suit :

« bien admissible » Relativement à un contribuable, bien (à l'exclusion d'un bien d'un ouvrage approuvé et d'un bien certifié) qui est :

a) ...

b) soit une machine ou du matériel visés par règlement et que le contribuable a acquis après le 23 juin 1975,

qui, avant l'acquisition, n'a été utilisé à aucune fin ni acquis pour être utilisé ou loué à quelque fin que ce soit, et :

c) soit qu'il compte utiliser au Canada principalement à l'une des fins suivantes :

(i) la fabrication ou la transformation de marchandises à vendre ou à louer,

...

(je souligne)

[9] Un seul témoin a été entendu. Il s'agit de madame Lise Emond, directrice générale de l'appelante depuis 1996. Au cours des années en litige, elle était en charge de la saisie des données et de la comptabilité.

[10] Madame Emond a expliqué que l'appelante, dont le siège social est situé à Matane (Québec), oeuvrait dans deux secteurs d'activités soit, d'une part, à titre de grossiste en vendant du café à la caisse à différents établissements de restauration et, d'autre part, en vendant au détail du café liquide à la tasse. Selon madame Emond, 80 pour cent des activités de l'appelante se situent dans ce dernier secteur pour lequel l'appelante a acquis de 700 à 750 machines distributrices automatiques de café. Les machines sont placées dans des bureaux, des salles de repos des employés, des dépanneurs ou des stations-service appartenant à ses clients tant sur la côte nord du St-Laurent que sur la rive sud de celui-ci à l'est de Rivière-du-Loup. L'appelante compte une quinzaine d'employés dont sept techniciens-livreurs et deux personnes affectées aux services techniques.

[11] Même si les machines sont de différents modèles et formats leur mécanisme de fonctionnement est similaire. Le café moulu est transformé en café frais liquide à raison d'une tasse à la fois par un mécanisme d'infusion et de filtrage automatique. Certaines machines possèdent un moulin permettant d'offrir un café dont les grains ont été fraîchement moulus à chaque tasse. Plusieurs comportent également l'option d'un autre breuvage tel un chocolat chaud ou un bouillon de poulet. L'appelante fournit gratuitement le sucre et les bâtonnets. Les verres ou contenants sont vendus séparément au client.

[12] L'appelante s'approvisionne en achetant des lots de café tous les trois mois par l'entremise d'un torréfacteur. Les achats s'élèvent à environ 300,000 livres de café par année.

[13] Les machines distributrices placées chez les clients demeurent la propriété de l'appelante et sont simplement prêtées au client en vertu d'un contrat de prêt à titre gratuit. Selon madame Emond, ce contrat constitue une protection pour l'appelante qui peut récupérer plus facilement la machine advenant la faillite d'un client par exemple. De plus, cela facilite aussi la tâche concernant la réclamation d'assurance advenant un vol ou du vandalisme. En effet, le contrat stipule que le client n'a qu'un droit d'usage normal de la machine, qu'il est responsable de la garde de l'équipement, des accessoires et des appareils inhérents et qu'il assume les risques de dommages à la machine quelle qu'en soit la cause.

[14] Les machines sont installées par les techniciens de l'appelante, généralement sur un petit meuble fourni par celle-ci et dans lequel sont laissé des sacs de café moulu ou en grains pour le remplissage du contenant de la machine. Selon le contrat, les travaux d'électricité et de plomberie requis pour l'installation sont aux frais du client et présumés faits à sa demande. Avant l'installation et la mise en service, les machines sont ajustées et calibrées par ces mêmes techniciens qui voient ensuite au remplissage, au nettoyage et généralement à l'entretien tous les 21 jours. Certaines pièces d'équipement dont les valves d'eau et les infuseurs doivent être changés assez fréquemment. En cas de bris ou de mauvais fonctionnement, les techniciens de l'appelante se déplacent sur appel et procèdent aux réparations ou aux ajustements nécessaires. À son siège social, l'appelante possède, outre un entrepôt, un atelier pour la réparation, la modification ou la remise à neuf des machines.

[15] C'est l'appelante qui assume les coûts d'entretien et de réparation des machines. Il arrive qu'une ou deux personnes responsables chez le client soient chargées du remplissage du contenant à café s'il arrivait qu'il en manque. Pour ce faire, ces personnes utilisent les sacs de café laissés sur place par les techniciens et qui sont considérés faire partie des stocks de l'appelante. Là s'arrête leur tâche. Pour le reste, ce sont les techniciens-livreurs de l'appelante qui s'occupent de tout.

[16] Le contrat de prêt d'équipement prévoit aussi que le client s'engage à s'approvisionner exclusivement auprès de l'appelante. Selon madame Emond, cette disposition n'a pas beaucoup d'importance puisque le client est de toute façon facturé en fonction du nombre de tasses de café selon ce qui est indiqué aux compteurs.

[17] Lors de leur visite périodique d'entretien, les techniciens-livreurs de l'appelante prennent également la lecture des compteurs aux fins de la facturation. Chaque client est facturé selon un tarif établi par l'appelante en fonction du nombre de tasses de café consommées au cours d'une période de 21 jours ou selon un prix à la tasse préalablement négocié avec le client. Bien que la plupart des machines distributrices automatiques contiennent un changeur à monnaie, les techniciens ne retirent pas l'argent qui s'y trouve, celui-ci étant considéré la propriété du client de l'appelante qui a décidé pour sa part de faire payer un montant prédéterminé aux consommateurs qu'ils soient ses employés, ses clients ou autres plutôt que de leur offrir le café gratuitement. Lors de l'installation ou par la suite, le changeur est simplement programmé par les techniciens de l'appelante selon le prix fixé par chaque client de l'appelante.

[18] L'avocat de l'appelante soutient que cette partie des activités de l'appelante est essentiellement la vente de café liquide à la tasse et que pour ce faire l'appelante utilise les machines distributrices qu'elle a acquises, lesquelles transforment le café en grains ou moulu en café liquide. Selon lui, l'entente avec chaque client porte sur la vente de café sous forme liquide et la facturation est en fonction d'un prix (négocié ou selon le tarif) basé sur le nombre de tasses de café liquide consommées. Dans ce contexte, il importe peu que le client revende au consommateur le café ainsi transformé par la machine appartenant à l'appelante à un prix déterminé.

[19] L'avocat de l'appelante insiste non seulement sur le fait que l'appelante demeure toujours propriétaire des machines distributrices prêtées et placées chez le client mais également sur le fait qu'elle en demeure l'opératrice grâce au travail de ses techniciens et employés. En effet, ce sont eux qui installent les machines après avoir procédé aux ajustements et calibrages nécessaires, les nettoient sur une base régulière, les réparent, changent les pièces, les réaménagent ou refont même la peinture au besoin. Ainsi, même si les machines sont mises à la disposition des clients, c'est toujours l'appelante qui en contrôle le fonctionnement et qui est, somme toute, responsable du processus de transformation nécessaire à la vente de café liquide qui est l'objet de l'entente avec chaque client. C'est également l'appelante qui supporte les coûts d'entretien et de réparation.

[20] Même si l'on peut prétendre que le consommateur utilise la machine au sens physique du terme — en réalité il ne fait que donner la commande en appuyant sur le bouton approprié — c'est véritablement l'appelante qui utilise la machine dans un sens plus large soit celui de pouvoir livrer avec la machine dont le fonctionnement est sous son contrôle la commande de café liquide qui est l'objet de son entente avec le client. Sur ce point, l'avocat de l'appelante s'appuie sur la décision de cette Cour dans l'affaire Funtronix Amusements Ltd. v. M.N.R., 89 DTC 545.

[21] Selon l'avocat de l'appelante la relation contractuelle avec le client est claire : il s'agit de la vente de café liquide. Pour vendre ce produit, l'appelante doit donc posséder et utiliser les machines permettant de faire la transformation nécessaire.

[22] Au soutien de ses arguments, l'avocat de l'appelante se réfère également à la décision de cette Cour dans l'affaire Versa Services Ltd. et al. v. M.N.R., 92 DTC 1769 (C.C.I.), et au Bulletin d'Interprétation IT-147R3, Déduction pour amortissement - Amortissement accéléré des machines et du matériel de fabrication et de transformation.

[23] Pour sa part, l'avocat de l'intimée soutient que l'appelante ne vend pas de café liquide mais uniquement du café moulu à ses clients. Ce sont ces derniers qui utilisent les machines en acceptant de procurer du café liquide aux consommateurs soit en les faisant payer un prix déterminé soit en leur donnant le café. Ainsi, selon lui, comme la vente doit être d'un produit fabriqué — le café liquide — ce sont les clients de l'appelante et non cette dernière qui effectuent ces ventes ou ces transactions avec les consommateurs. Selon l'avocat de l'intimée, ces clients n'achètent en réalité que du café moulu et utilisent la machine prêtée par l'appelante pour réaliser l'opération de transformation en café liquide requis par les consommateurs. Ainsi, la facturation à la tasse ne serait qu'une méthode de contrôle des stocks de café vendus par l'appelante qui pourrait tout aussi bien facturer en fonction du nombre de doses de café moulu utilisées ou encore vendre le café au sac ou au poids. D'ailleurs, les clients, selon leur entente avec l'appelante, s'engagent à s'approvisionner en café exclusivement chez elle. Le café est acheté à l'avance à tous les trois mois et l'appelante fixe le prix en fonction de ses propres coûts. De plus, l'avocat de l'intimée estime qu'ultimement c'est le consommateur qui utilise la machine lorsque l'opération de transformation se produit et il insiste sur le fait que l'appelante ne reçoit rien de ce consommateur en rapport avec cette opération.

[24] L'avocat de l'intimée met également en doute le fait que les avantages fiscaux réclamés par l'appelante aient pu être destinés à encourager les activités d'une entreprise de services.

[25] Je suis d'accord avec l'avocat de l'appelante et j'estime que cette dernière a droit aux déductions et crédits réclamés car elle a acquis des biens qu'elle utilise pour la transformation de biens à vendre. Certes, l'entreprise de l'appelante consiste à vendre du café. Toutefois, la plus grande partie de ses activités est concentrée dans un marché particulier et vise une clientèle spéciale. Les clients de l'appelante sont intéressés à pouvoir offrir en tout temps à leurs employés, clients ou autres un café prêt à boire et fraîchement infusé à chaque tasse. Cela peut être réalisé grâce à des appareils-robots programmés pour produire ce résultat. L'appelante a acquis des centaines de ces appareils qu'elle installe chez les clients qui désirent obtenir ce café ou autre breuvage prêt à boire. L'appelante fournit ses appareils aux clients par voie de prêt et elle s'engage à les nettoyer et à faire l'entretien de façon régulière de même qu'à les réparer et changer des pièces au besoin, le tout à ses frais. Ces appareils demeurent sa propriété et elle conserve le contrôle de leur bon fonctionnement grâce au travail de ses employés, principalement les techniciens-livreurs. Les coûts assumés par l'appelante à cet égard sont évidemment reflétés dans les prix et le tarif établi en tient très certainement compte. Je crois qu'il est inexact de prétendre que l'appelante ne vend que du café moulu à ses clients. En réalité elle leur procure un café liquide prêt à boire ainsi transformé par les appareils qu'elle fournit elle-même et dont le bon fonctionnement exige l'intervention régulière de ses employés. À mon avis, la facturation basée sur un tarif à la tasse de café liquide n'est pas étrangère au fait que la transformation est réalisée par les appareils qu'elle fournit et dont le bon fonctionnement, fut-il automatisé, requiert l'intervention régulière de ses employés. En ce sens, j'estime que l'appelante utilise les machines distributrices de café pour transformer un bien destiné à la vente. Ce que le client désire c'est du café prêt à boire. C'est ce que lui fournit l'appelante et ce pourquoi le client paie selon le tarif convenu à la tasse. Qu'il décide de revendre ce café au consommateur en faisant placer un changeur à monnaie programmé en fonction du prix qu'il désire obtenir ne modifie en rien ses obligations envers l'appelante. Que le client puisse ainsi être désigné comme l'utilisateur de la machine, tout comme puisse l'être également le consommateur qui appuie sur le bouton, n'enlève rien au fait qu'au premier titre c'est l'appelante qui utilise les appareils ou les machines distributrices pour procurer et vendre à ses clients ce qu'ils désirent : un café prêt à boire. L'appelante ne peut satisfaire cette exigence de sa clientèle que d'une seule façon : en achetant, en plaçant et en entretenant les appareils appropriés chez ses clients.

[26] La transformation du café moulu en café liquide se produit dans l'appareil de l'appelante placé chez le client. Ce dernier fournit assurément l'électricité et l'eau nécessaire mais c'est l'appareil qui transforme et cet appareil est la propriété de l'appelante et ce sont ses employés qui en font l'entretien régulier pour assurer leur bon fonctionnement. En ce sens, les appareils acquis par l'appelante sont utilisés par elle pour transformer le café moulu en café sous forme liquide. Sans l'achat et l'utilisation de ces appareils, l'appelante ne pourrait sûrement pas vendre du café moulu ou en grains à la clientèle visée.

[27] Cette approche logique et cette interprétation plus large que celle proposée par l'avocat de l'intimée m'apparaît celle qui a été retenue par le juge Garon de cette Cour dans l'affaire Funtronix (précitée). Dans cette affaire, l'une des questions à déterminer était celle de savoir qui était l'utilisateur de jeux électroniques acquis par l'appelante et placés chez des clients aux fins de l'application de l'alinéa 1104(2)a) du Règlement de l'impôt sur le revenu. Bien que le contexte était différent et que la condition énoncée dans cette disposition était libellée dans des termes différents de ceux utilisés dans les dispositions dont l'appelante réclame ici l'application, on ne peut manquer de faire un parallèle entre les deux situations. L'approche adoptée par le juge Garon m'apparaît être celle qui doit être également retenue ici. Aux pages 4 à 6 de la version française officielle il s'exprimait en ces termes :

Pour ce qui est de la deuxième exigence, l'argument a porté principalement sur la définition du mot "utilisateur". Le procureur de l'intimé a fait valoir que l'utilisateur du matériel était le client, c'est-à-dire la personne qui s'en servait pour jouer. Par contre, le procureur de l'appelante a indiqué que, dans le contexte du Règlement de l'impôt sur le revenu portant sur la déduction pour amortissement, c'est plutôt l'appelante qui était l'utilisateur dudit matériel.

En ce qui concerne l'exigence énoncée à l'alinéa b) de la définition susmentionnée, il existe donc deux façons possibles d'interpréter le mot "utilisateur". Selon une interprétation restreinte, ce terme désignerait, dans le cas du matériel en question, les différents joueurs qui utilisent les appareils. Il ne fait aucun doute que les personnes de cette catégorie se servent dans un sens très concret des jeux vidéo électroniques ou du matériel en question. Par contre, selon une interprétation plus large, le terme pourrait comprendre les propriétaires du matériel, comme l'appelante.

Je suis d'avis que les propriétaires du matériel vidéo qui mettent ce dernier à la disposition de joueurs en faisant des arrangements avec les propriétaires d'une salle de jeux, c'est-à-dire en partageant avec ces derniers le produit de ce que payent les joueurs en question, utilisent le matériel vidéo dans le but d'en tirer un revenu, au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu et du Règlement de l'impôt sur le revenu. Ce sont eux les utilisateurs du matériel en question dans le contexte de la Loi et du Règlement.

En fait, il est tout à fait conforme à l'esprit et à la lettre de la Loi de l'impôt sur le revenu et du Règlement de l'impôt sur le revenu de dire du propriétaire d'un bien qui met ce dernier à la disposition d'autres personnes moyennant rétribution qu'il utilise le bien en question dans le but d'en tirer un revenu, même si ces autres personnes sont celles qui s'en servent habituellement. Le paragraphe 13(7) de la Loi de l'impôt sur le revenu illustre cette prétention. Ledit paragraphe, de par ses dispositions expresses, s'applique notamment aux règlements qui sont établis en vertu de l'alinéa 20(1)a) de la Loi. C'est en vertu de cette dernière disposition législative que la partie XI du Règlement de l'impôt sur le revenu, qui a trait aux déductions pour amortissement, a été établie. L'alinéa b) de ce paragraphe est rédigé en ces termes :

"13(7) Aux fins du présent article, de l'article 20 et des règlements établis sous le régime de l'alinéa 20(1)a), les règles suivantes s'appliquent :

...

b) lorsqu'un contribuable, qui a acquis des biens à toute autre fin, commence à une date postérieure à les utiliser dans le but d'en tirer un revenu ou de leur faire produire un revenu ou de tirer un revenu d'une entreprise ou de faire produire un revenu à cette entreprise, il est réputé les avoir acquis à cette date postérieure sur la base de la juste valeur marchande qu'ils avaient à cette date."

Le passage qui est souligné dans la citation qui précède figure dans de nombreux autres alinéas du paragraphe 13(7). De plus, le paragraphe 45(1) de la Loi est rédigé, à certains endroits, en des termes quasi identiques à ceux du paragraphe 13(7). Il est généralement admis, je crois, que la mention qui est faite dans de telles dispositions aux contribuables qui utilisent des biens dans le but d'en tirer un revenu ou de leur faire produire un revenu englobe, par exemple, le cas d'un locateur qui a loué un bien lui appartenant.

Selon le texte de la Loi, dans un contexte de location, le locateur utilise le bien en question pour en tirer un revenu, encore qu'au cours de la période de location ce soit le locataire qui jouisse habituellement dudit bien. De la même façon, le locataire peut aussi "utiliser" le bien loué dans certaines circonstances dans le but d'en tirer un revenu.

On peut aussi examiner la question sous un angle différent. En fait, la preuve montre clairement que l'appelante était l'utilisateur des biens, en ce sens qu'elle avait accès au matériel en tout temps et qu'elle pouvait modifier les programmes d'informatique qui y étaient enregistrés. Il a été établi que ces jeux vidéo déprécient très rapidement et que, pour en tirer un revenu, l'appelante était tenue de changer ou de modifier de temps à autre les programmes d'informatique.

[28] Quant à l'argument de l'avocat de l'intimée basé sur ce qui aurait été l'intention du législateur, je ne crois pas qu'il doive être retenu en l'absence d'une indication claire de la volonté d'exclure de l'application des dispositions mentionnées les activités dont il est ici question et à l'égard desquelles il a même été concédé par l'intimée qu'elles visaient un processus de transformation que l'on a toutefois refusé d'attribuer à l'appelante.

[29] En conséquence de ce qui précède, les appels pour les années d'imposition 1992, 1993 et 1994 de l'appelante sont admis et les cotisations sont déférées au Ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant pour acquis que l'appelante peut se prévaloir des déductions pour amortissement réclamées ainsi que du crédit d'impôt à l'investissement et du crédit d'impôt à l'investissement remboursable pour les années en litige.

[30] Le tout avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de mars 1999.

« P.R. Dussault »

J.C.C.I.

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