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Date: 19980519

Dossiers: 96-2055-IT-G; 96-4004-IT-G

ENTRE :

STANLEY WITKIN, PAUL NICHOLL,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1] Ces appels, interjetés sous le régime de la procédure générale, ont été entendus ensemble sur preuve commune par consentement des parties, à Toronto (Ontario) du 4 au 6 mai 1998 inclusivement ainsi que les 8 et 11 mai 1998.

[2] Les appelants ont fait appel du rejet de pertes d'entreprise qu'ils avaient indiquées pour leurs années d'imposition 1988 à 1991. M. Witkin a en outre fait appel du rejet d'un report rétrospectif de sa perte pour 1988, soit un report sur 1987. Les pertes qui avaient été indiquées et qui ont été rejetées étaient, pour chaque appelant, les suivantes :

M. Witkin

M. Nicholl

1987 (report rétrospectif)

1 452 394 $

1988

1 763 855 $

449 892 $

1989

13 854 $

3 533 $

1990

9,542 $

2 432 $

1991

10 465 $

2 667 $

M. Nicholl avait indiqué un report prospectif d'une perte de 224 728 $ pour 1988, soit un report sur 1989, qui a également été rejeté.

[3] Les parties ont déposé un “ exposé conjoint des faits (partiel) ”, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION]

EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS (PARTIEL)

Aux fins de l'audition de ces deux appels seulement, l'appelant et l'intimée conviennent des faits suivants et conviennent que les documents reconnus comme pièces peuvent être admis sans devoir être formellement prouvés.

1. L'appelant est un résident du Canada.

2. La Claridge Associates (“ Claridge Associates ”) était une société en nom collectif qui avait été créée le 20 novembre 1979 en vertu des lois de l'État du Texas. Les deux associés initiaux de la Claridge Associates, soit des associés à parts égales, étaient la Belcourt Construction Company Limited (“ Belcourt ”), société constituée en vertu des lois de la province de Québec, et la Realty Properties Multi-Storey Inc. (“ RPMSI ”), société constituée en vertu des lois de l'État du Texas. Par la suite, la Soza Marine Services Limited (“ Soza ”), société constituée en vertu des lois de la province de Nouvelle-Écosse, a également acquis une participation dans la Claridge Associates. Une copie du contrat de société pour fins limitées de la Claridge Associates en date du 20 novembre 1979 figure à l'onglet 1 du recueil de documents conjoints des appelants (le “ recueil de documents des appelants ”).

3. À la fin de 1986, les associés de la Claridge Associates étaient la RPMSI, qui détenait une participation de 50 p. 100, et la Belcourt et la Soza, qui détenaient collectivement une participation de 50 p. 100.

4. Jusqu'au 31 décembre 1987 inclusivement, la fin de l'exercice de la Claridge Associates a été le 31 décembre.

5. Entre juillet 1987 et octobre 1987, la Belcourt et la Soza ont cessé d'avoir une participation dans la Claridge Associates. Dans un document intitulé “ Modification du contrat de société pour fins limitées de la Claridge Associates ”, dont il est dit qu'il a été signé le 9 octobre 1987, la Multi-Storey Investments Inc. (“ MSI ”), société constituée en vertu des lois de l'État du Texas, a acquis une participation globale de 50 p. 100 dans la Claridge Associates. Une copie d'une modification du contrat de société pour fins limitées de la Claridge Associates figure à l'onglet 4 du recueil de documents des appelants.

6. La Claridge Associates a construit à Dallas (Texas) un ensemble d'unités condominiales résidentielles de luxe appelé “ The Claridge ” et a entrepris la commercialisation visant la vente des unités de ce complexe.

7. Au 31 décembre 1987, la dette impayée de la Claridge Associates concernant la construction et l'achèvement du complexe “ The Claridge ” était d'environ 82 500 000 $ US. La dette impayée de la Claridge Associates était une dette envers la Chase Manhattan Bank (association nationale) “ Chase Manhattan ”) et la Morgan Guarantee Trust Company de New York (“ Morgan Guaranty ”). La dette impayée était garantie par la Beneficial Corporation, soit une société du Delaware, et par la Wasco Properties, Inc. (“ Wasco ”), soit également une société du Delaware.

8. En vertu d'une promesse d'achat modifiée et reformulée en date du 15 octobre 1985 (la “ promesse ”), la Wasco acceptait d'acheter à la Claridge Associates et celle-ci acceptait de vendre à la Wasco toutes les unités condominiales du complexe “ The Claridge ” demeurées invendues à des tiers à une date et à une heure spécifiées dans les modalités de la promesse.

9. De plus, en vertu de la promesse, la Claridge Associates avait le droit d'exiger que la Wasco achète les unités invendues selon certaines modalités. Une copie de la promesse figure à l'onglet 2 et des modifications y afférentes figurent aux onglets 3 et 5 du recueil de documents des appelants.

10. La Wasco et la MSI ont conclu une convention en date du 19 novembre 1997 (sic) intitulée “ Convention de vente ” (la “ convention de vente de la Wasco ”), en vertu de laquelle la Wasco consentait à vendre et à transférer à la MSI, sous réserve des modalités de la convention de vente de la Wasco, les unités invendues du complexe “ The Claridge ”, si la Wasco acquérait les unités de la Claridge Associates selon les modalités de la promesse. Une copie de la convention de vente de la Wasco figure à l'onglet 6 du recueil de documents des appelants.

11. Le prix d'achat payable par la MSI en vertu de la convention de vente de la Wasco pour les unités invendues était de 23 000 000 $.

12. Le 30 décembre 1987, la Claridge Associates était propriétaire d'environ 79 unités condominiales du complexe “ The Claridge ” et détenait un intérêt indivis dans les parties communes y afférentes.

13. Le 31 décembre 1987, la juste valeur marchande des unités condominiales invendues du complexe “ The Claridge ” était d'environ 20 000 000 $.

14. La Claridge Holdings No. 2 (“ Claridge No. 2 ”) était une société en nom collectif qui avait été créée en vertu des lois de l'État du Texas. Au 31 décembre 1987, les associés de la Claridge No. 2 étaient la RPMSI, la MSI et la Strauss Investment Construction (“ SICC ”). La SICC était une société constituée en vertu des lois de l'État du Texas. Une copie du contrat de société de la Claridge No. 2 figure à l'onglet 11 du recueil de documents des appelants.

15. La Strauss Investment Realty Corp. (“ SIRC ”) et la Strauss Investment Management Company (“ SIMC ”) ont conclu une convention dont il est dit qu'elle a été établie et conclue le 31 décembre 1987, soit une convention intitulée “ Contrat de société de la Claridge Holdings No. 1 ”. Une copie de ladite convention figure à l'onglet 12 du recueil de documents des appelants.

16. Une convention qui s'intitule “ Cession de participation dans la société de personnes ” et dont il est dit qu'elle a été établie et conclue le 31 décembre 1987 a été conclue entre la MSI, la RPMSI et la Claridge Holdings No. 1. Une copie de ladite convention figure à l'onglet 8 du recueil de documents des appelants.

17. En vertu de ladite convention de cession, la Claridge No. 1 entendait acquérir de la MSI et de la RPMSI une participation de 49,5 p. 100 dans la Claridge Associates.

18. Le 31 décembre 1987, la Claridge Associates a signé un document intitulé “ Transfert de propriété bénéficiaire et prise en charge ”, en vertu duquel la Claridge Associates a transféré à la Claridge No. 2 un intérêt bénéficiaire indivis de 85 p. 100 dans les unités invendues du complexe “ The Claridge ”, avec l'ensemble des améliorations, des accessoires fixes et du matériel qui s'y trouvaient ou qui y avaient été construits. Une copie du document figure à l'onglet 9 du recueil de documents des appelants.

19. En contrepartie de la cession de l'intérêt bénéficiaire de 85 p. 100, la Claridge No. 2 consentait à prendre en charge et à payer 23 000 000 $ sur le principal de la dette de la Claridge Associates envers la Chase Manhattan et la Morgan Guaranty et à prendre en charge une part de 85 p. 100 de toutes autres dettes ou obligations existantes à l'égard des unités invendues du complexe “ The Claridge ”.

20. Dans une lettre en date du 31 décembre 1987, la Claridge Associates consentait à donner une garantie sans recours à la Claridge No. 2, valable seulement à concurrence de la participation dans la Claridge Associates, pour financer l'excédent de 23 000 000 $ sur le prix de vente ou la valeur de disposition des unités invendues du complexe “ The Claridge ” si un tel bien était vendu ou autrement cédé volontairement ou involontairement par la Claridge Associates à un tiers de bonne foi. Une copie de cette lettre d'engagement figure à l'onglet 10 du recueil de documents des appelants.

21. Les états financiers de la Claridge Associates pour son exercice se terminant le 31 décembre 1987 qui avaient été établis par le cabinet d'expertise comptable Lane Gorman Trubitt & Co. indiquaient une “ perte nette ” de 34 341 022 $. La perte nette était constituée d'une “ perte d'exploitation ” de 2 722 084 $, d'une “ perte sur vente de biens ” de 648 526 $, d'une “ provision pour perte sur coûts de projet ” de 24 691 251 $, des “ frais d'intérêt ” de 6 646 942 $, ainsi que des revenus divers de 367 811 $. Une copie de ces états financiers figure à l'onglet 13 du recueil de documents des appelants.

22. Le cabinet d'expertise comptable Cooper, Millson & Foster avait établi les états financiers de la Claridge Associates en dollars canadiens pour l'exercice se terminant le 31 décembre 1987, lesquels états indiquaient une perte de 45 330 148 $. Une copie de ces états financiers figure à l'onglet 14 du recueil de documents des appelants.

23. Le 15 janvier 1988 ou vers cette date, la Wasco a acquis la dette de la Claridge Associates envers la Chase Manhattan et la Morgan Guaranty. Une copie d'une lettre de la Wasco à la CMF Enterprises Limited en date du 30 mars 1988 figure dans les livres de clôture qui ont été déposés en preuve.

24. La SIMC et la SIRC ont signé un document en date du 28 mars 1988 dans lequel il est dit que ce document reflète une convention au 5 février 1988 intitulée “ Première modification du contrat de société de la Claridge Holdings No. 1 ”. Une copie de ce document figure à l'onglet 15 du recueil de documents des appelants.

25. Dans une convention par voie de lettre en date du 7 mars 1988 acceptée par la SIMC et la SIRC le 24 mars 1988, la SIMC et la SIRC ont accordé à la CMF Enterprises Limited (“ CMF ”), en contrepartie du paiement de 25 $ US, une option d'achat de participations dans la Claridge No. 1 représentant globalement 99 p. 100, option qui pouvait être levée le 31 mars 1988 ou avant cette date. Une copie de ladite convention par voie de lettre figure à l'onglet 16 du recueil de documents des appelants.

26. Dans des conventions, dont chacune était datée du 28 mars 1988, la CMF Enterprises cédait son option à chacun des acheteurs canadiens, pour la contrepartie globale de 1 800 000 $ CAN. Des copies de cette cession d'option concernant l'appelant et la CMF Investments (dans laquelle l'appelant Nicholl détenait une participation de 19 p. 100) figurent aux onglets 18 et 19, respectivement, du recueil de documents des appelants.

27. Relativement à la cession de l'option, l'appelant Witkin a payé à la CMF 82 302 $ et la CMF Investments a payé 109 739 $.

28. Une “ convention d'achat ” en date du 28 mars 1988 a été conclue entre les acheteurs canadiens, Richard C. Strauss, la SIMC, la SIRC, la MSI et la RPMSI, soit une convention visant l'acquisition, par les acheteurs canadiens, de participations dans la Claridge Holdings No. 1 totalisant 99 p. 100. Le prix d'achat total était de 99 $ US et, à la date de clôture, les acheteurs étaient tenus de faire des apports de capital à la Claridge Holdings No. 1 d'un montant global de 1 342 000 $ US. Une copie de la convention d'achat figure à l'onglet 21 du recueil de documents des appelants.

29. Chacun des acheteurs a signé un avis de levée d'option en date du 28 mars 1988. Une copie de l'avis signé par M. Witkin et la CMF Investments figure aux onglets 19 et 20 du recueil de documents des appelants.

30. Par un document intitulé “ Acte ”, signé le 31 mars 1988 mais dont il est dit qu'il prenait effet au 30 mars 1988, la Claridge Associates a transféré à la Claridge Holdings No. 2 la participation restante de 15 p. 100 dans les unités invendues du complexe “ The Claridge ”. Une copie du document figure à l'onglet 23 du recueil de documents des appelants.

31. La clôture des opérations entre les Canadiens et le groupe Strauss a eu lieu à Dallas (Texas), le 31 mars 1988. La série de livres de clôture, en trois volumes, contenant les documents livrés et échangés à la date de clôture sera déposée en preuve.

32. Le 8 septembre 1988, la Claridge No. 2 a transféré à la MSI les unités invendues du complexe “ The Claridge ”. Une copie de l'acte de garantie spéciale figure à l'onglet 34 du recueil de documents des appelants.

33. Le 9 septembre 1988, la MSI a transféré à la Claridge Associates un intérêt bénéficiaire indivis de 5,4 p. 100 dans le complexe “ The Claridge ”. Une copie du “ Transfert de propriété bénéficiaire ” figure à l'onglet 35 du recueil de documents des appelants.

34. Le 3 novembre 1988, un document intitulé “ Première modification du Transfert de propriété bénéficiaire ” a été signé par la MSI. Une copie du document figure à l'onglet 36 du recueil de documents des appelants.

35. Un contrat de vente a été passé par la MSI et la Winton Equities Inc. le 2 février 1990, soit un contrat visant la vente de toutes les unités du complexe “ The Claridge ” décrites dans une annexe (faisant état de 65 unités au total), et du matériel ainsi que des droits afférents au complexe “ The Claridge ”, pour un prix de 18 248 806,97 $ US. La vente s'est conclue le 22 mars 1990.

[4] Les deux appelants ont témoigné. Leurs avocats ont appelé Anthony Young, ainsi que John Campbell, un avocat, et Thomas Weir, un avocat du Texas qui a été admis à déposer comme témoin expert en ce qui a trait au droit des sociétés de personnes dans l'État du Texas (États-Unis). L'intimée a appelé Andrew McRoberts, qui a été admis à déposer comme évaluateur expert concernant l'immobilier à Dallas. Les appelants ont en outre appelé Harry Hunsicker — également admis à déposer comme évaluateur expert concernant l'immobilier à Dallas — pour qu'il témoigne en contre-preuve. Les sociétés de personnes Claridge seront appelées ci-après la “ Cl A ”, la “ Cl 1 ” et la “ Cl 2 ” respectivement.

[5] M. Witkin a acheté à la CMF une participation de 4,03 p. 100 dans la Cl 1 pour 82 302 $ par voie de cession de l'option de la CMF qu'il a levée en payant à la Cl 1 5 $ plus un apport de 67 693 $ à la Cl 1 le 28 mars 1988 (pièce A-1, onglet 17).

[6] M. Nicholl avait une participation de 19 p. 100 dans la CMF Investments, qui a payé à la CMF 109 739 $ pour une cession de l'option pour une participation de 5,41 p. 100 dans la Cl 1. La CMF Investments a payé à la Cl 1 7 $ plus un apport de 90 254 $ le 31 mars 1988. Le document était daté du 28 mars 1988 (pièce A-1, onglet 21).

[7] La Cl 1 était une société de personnes qui se composait de deux sociétés et qui avait été créée aux termes d'un contrat écrit (pièce A-1, onglet 13) en vertu des lois du Texas le 31 décembre 1987, son premier exercice devant se terminer le 31 mars 1988.

[8] Le 31 décembre 1987, la Cl A a, de trois façons, subi des pertes relativement au complexe d'unités condominiales de luxe “ The Claridge ” de Dallas (Texas) :

1. Elle a vendu à la Cl 2 un intérêt bénéficiaire de 85 p. 100 dans les unités condominiales invendues (pièce A-1, onglet 9) contre la prise en charge, par la Cl 2, d'une dette de 23 000 000 $ US garantie par les unités condominiales restantes pour une valeur d'environ 20 000 000 $.

2. Elle a inscrit dans ses livres une provision pour perte sur le coût du complexe “ The Claridge ”.

3. Dans ses livres, elle a réduit la participation restante dans ses éléments d'inventaire étant donné “ l'effritement du marché immobilier local et régional et la probabilité d'une baisse continue de l'activité ainsi que des valeurs ”.

(Pièce A-1, onglet 13)

Ainsi, le bilan de la société de personnes “ The Claridge Associates ” qui avait été établi en dollars canadiens par le cabinet torontois d'expertise comptable Cooper, Millson and Foster, dans lequel M. Nicholl était un associé, indiquait une provision pour perte sur coûts de projet de 32 592 451 $ (pièce A-1, onglet 24). La perte totale attribuée à la Cl 1 dans cet état était de 43 768 104 $.

[9] En résumé, la chronologie des opérations est la suivante :

1. Le 31 décembre 1987, la Cl 1 a reçu de la MSI et de la RPMSI 99 p. 100 de la Cl A.

2. Le 31 décembre 1987, la Cl 2 a reçu de la Cl A 85 p. 100 du complexe “ The Claridge ” en contrepartie de :

- la prise en charge d'une somme de 23 000 000 $ US sur le principal de la dette de la Cl A;

- la prise en charge de 85 p. 100 de toutes autres dettes à l'égard des unités restantes du complexe “ The Claridge ”.

3. Le 15 janvier 1988, la Wasco a acquis la dette de 82 500 000 $ US relative au complexe “ The Claridge ”, qui était garantie par une hypothèque. Le 30 mars 1988, la Wasco a écrit une lettre à la CMF et à ses cessionnaires disant que son seul recours à l'égard de cette dette était le bien hypothéqué (pièce A-2, vol. 2, onglet 13).

4. Le 7 mars 1988, la CMF a acquis une option permettant d'acquérir 99 p. 100 de la Cl 1. Le 28 mars 1988, cette option a été cédée à 36 acheteurs canadiens, dont les appelants.

5. Le 31 mars 1988, la Cl A a transféré à la Cl 2 ses 15 p. 100 restants du complexe “ The Claridge ”, ainsi que les apports des acheteurs canadiens au capital de la Cl 1, ce qui totalisait 1 342 000 $ US. La Cl 2 a en outre pris en charge le solde de la dette garantie à l'égard des unités condominiales.

6. Le 31 mars 1988, la Cl A a signé avec la Cl 2, la MSI et Richard Strauss (qui en fait détenait ou contrôlait toutes les sociétés ayant un intérêt dans le complexe “ The Claridge ”) une “ convention de transfert de participation ” (pièce A-2, vol. 2, onglet 18). En vertu de cette convention :

1) il était entendu que la MSI transférerait à la Cl A une participation de 5,4 p. 100 dans les unités condominiales, à la condition que la MSI les acquière, sous réserve

a) de la charge de 23 000 000 $ US;

b) de la participation aux “ profits nets ” de 3 000 000 $ US à laquelle Wasco avait droit.

Si la MSI ne transférait pas la participation de 5,4 p. 100, elle devait payer à la Cl A 250 000 $ US, et Richard Strauss devait céder à la Cl A sa participation de 50 p. 100 dans la “ coentreprise en equity ” (paragraphes 4.2 à 4.5 et annexe 7). La participation de 5,4 p. 100 a été transférée à la Cl A le 9 septembre 1988. Un certain “ Robert S. Strauss ” était un associé dans la “ coentreprise en equity ” — voir la pièce A-1, vol. 2, onglet 22, page 3.

2) La MSI accordait à la Cl A une option pour deux ans permettant d'acheter 94,6 p. 100 (le solde après déduction des 5,4 p. 100) des unités invendues restantes de temps à autre, pour 40 000 000 $ US, moins 94,6 p. 100 du produit net et sous réserve de la dette prévue au sous-alinéa 4.2(ii) (paragraphe 5). M. Witkin a déclaré qu'il avait les moyens de payer sa part du prix de l'option. Je le crois. M. Young a, avec des sociétés de construction qu'il gérait et auxquelles il était associé, acheté à la CMF des participations dans la Cl 1. Au cours de la période de l'option, il s'est rendu au complexe “ The Claridge ” pour inspecter les lieux et examiner ce qu'il considérait comme étant des frais élevés de vente et d'exploitation. M. Young estimait que ces frais étaient plus de deux fois supérieurs à ce qu'ils auraient dû être et que sa visite l'avait confirmé. M. Witkin estimait également que les frais d'exploitation du complexe “ The Claridge ” étaient beaucoup trop élevés. Les deux étaient de cet avis avant d'acheter leurs participations dans la société de personnes.

3) La Cl A faisait irrévocablement de la MSI son mandataire pour la gestion et la vente des unités condominiales (paragraphe 7). La MSI avait ainsi le pouvoir d'agir “ [...] d'une manière conforme à ce que dicte la prudence en matière de propriété et de vente d'unités condominiales de tours d'habitation de Dallas (Texas) ”. Cela a été confirmé par une modification du contrat de société de la Cl A le 31 mars 1988 (pièce A-1, vol. 2, onglet 25).

[10] Les questions énoncées par l'intimée concernant chaque appel sont décrites dans les paragraphes suivants de la réponse à l'avis d'appel de M. Witkin :

[TRADUCTION]

27. Il soutient que l'appelant n'est pas devenu membre d'une société de personnes appelée Claridge No. 1 et qu'il n'était donc pas en droit de déduire des pertes de la Claridge Associates déclarées par cette dernière pour son exercice se terminant le 31 décembre 1987.

28. Il soutient que, la Claridge Associates n'étant pas par la suite une source de revenu, l'appelant n'avait aucune perte provenant de la Claridge Associates ou de la Claridge No. 1 au sens de l'article 9 de la Loi qui fût déductible pour les années d'imposition en cause. Il soutient que, l'appelant n'ayant aucune perte en vertu de l'article 9 de la Loi, il n'avait pas de perte autre qu'en capital pour son année d'imposition 1988 [...]

29. Il soutient qu'aucune perte provenant d'une réduction de la valeur ou d'un transfert de participations par la Claridge Associates n'était attribuable à l'appelant, car de telles pertes devaient être reconnues en vertu de l'article 10 de la Loi et de l'article 1801 du Règlement avant que l'appelant acquière une participation dans la Claridge Associates par l'intermédiaire de la Claridge No. 1.

30. Il soutient que toutes pertes indiquées par l'appelant n'étaient pas déductibles en vertu du paragraphe 245(1) de la Loi tel qu'il se lisait avant le 13 septembre 1988.

[11] Cependant, la première question à traiter, qui est énoncée succinctement dans chaque avis d'appel, est de savoir si les appelants sont en droit de déduire les pertes indiquées pour chaque année d'imposition (paragraphe 37 dans le cas de M. Witkin et paragraphe 36 dans le cas de M. Nicholl). Les hypothèses de l'intimée en réponse à cela sont les hypothèses x) et y) respectivement. Ces hypothèses sont identiques; le texte en est le suivant :

[TRADUCTION]

l'appelant n'a pas investi dans la Claridge No. 1 aux fins de l'exploitation d'une entreprise en commun en vue de réaliser un profit ou avec une attente raisonnable de profit;

La charge de réfuter cette hypothèse incombe à chaque appelant.

[12] Le 28 mars 1988, les appelants et les autres associés canadiens ont acheté une participation de 99 p. 100 dans la Cl 1, qui détenait pour sa part une participation de 99 p. 100 dans la Cl A. Il s'agit donc de savoir si, lorsqu'ils ont acheté leurs participations dans la Cl 1, les appelants avaient une attente raisonnable de profit à l'égard de leur investissement dans la Cl 1, dont le seul actif était la participation de 99 p. 100 dans la Cl A. Le 28 mars 1988, les associés canadiens s'attendaient que les conventions des 30 et 31 mars soient signées, et elles l'ont été. La Cl A a conservé 15 p. 100 du complexe “ The Claridge ” après le 31 décembre 1987. Elle a transféré cela à la Cl 2 le 31 mars 1988 en échange de ses droits en vertu de la convention de transfert de participation.

[13] La question de savoir si les participations des appelants dans une société de personnes étaient une source de revenu dépend de la question de savoir si la société de personnes avait une attente raisonnable de profit. Parmi les critères servant à trancher cette question, mentionnons l'état des profits et pertes pour les années antérieures, la formation des appelants concernant l'entreprise acquise, la voie sur laquelle les appelants entendaient s'engager et la capacité de l'entreprise de réaliser un profit après déduction pour amortissement (William Moldowan v. The Queen (C.S.C.), 77 DTC 5213, à la page 5215). La situation de la Cl A du 31 décembre 1987 au 31 mars 1988 est décrite aux paragraphes 18 à 20 de l'exposé conjoint des faits (partiel). La Cl A avait réduit considérablement la valeur de ses unités condominiales. Elle négociait en vue du transfert de sa participation restante de 15 p. 100 dans les unités. Sa dette garantie avait été vendue à la Wasco 23 000 000 $ US. M. Weir a déclaré dans son témoignage que, comme elle avait un actif commercial (la participation de 15 p. 100 dans le complexe “ The Claridge ”) qui pouvait être la source d'un revenu d'entreprise ou d'une perte d'entreprise, elle demeurait une société de personnes en droit texan. Toutefois, pour autant qu'on le sache, la Cl A avait perdu plus de 59 000 000 $ US au cours d'une période d'environ quatre ans. Toute son histoire a été marquée par des pertes importantes. Plus tard, on s'est rendu compte que le marché immobilier de Dallas avait atteint son niveau le plus bas au début de 1988 ou vers le milieu de 1988. Il n'y a cependant aucune preuve que les appelants aient eu les moyens de déterminer cela lorsqu'ils ont acheté. Ils pensaient bien que le marché immobilier de Dallas avait atteint son niveau le plus bas lorsqu'ils ont acheté. Malheureusement, il ne semble pas que cela ait correspondu au niveau le plus bas du marché concernant le complexe “ The Claridge ” lui-même.

[14] Les appelants sont devenus associés dans la Cl 1 en levant leurs options le 28 mars 1988 (exposé conjoint des faits (partiel), paragraphe 29). Au 31 mars 1988, la Cl A avait leurs apports au capital de la Cl 1 qu'elle a versés à la Cl 2 comme élément de la contrepartie transférée au titre de ce qui était accordé dans la convention de transfert de participation. Lorsque les appelants sont devenus associés dans la Cl 1, la Cl A pouvait raisonnablement s'attendre à ce que la convention de transfert de participation soit conclue. Cette convention donnait à la Cl A le droit à la participation de 5,4 p. 100 dans le complexe “ The Claridge ” ou 250 000 $ US et 50 p. 100 de la coentreprise en equity, qui détenait au Texas un immeuble de 45 000 pieds carrés partiellement occupé par une banque et dont le taux d'inoccupation était élevé. La Cl A obtenait en outre l'option de 40 000 000 $.

[15] Les appelants et M. Young ont déclaré dans leur témoignage qu'ils s'attendaient à en tirer un profit. Les appelants s'attendaient à un léger profit. M. Young, promoteur d'expérience, s'attendait à 1 500 000 $. Ils pensaient tous que le marché immobilier de Dallas avait atteint son plancher. Ils ont tous admis que les possibilités offertes du point de vue de l'impôt sur le revenu étaient un facteur, mais ils ont dit que c'était un facteur secondaire et non pas leur intention primordiale. Ils étaient tous des investisseurs et hommes d'affaires avisés. MM. Witkin et Young étaient des experts en promotion immobilière ayant connu du succès pendant de nombreuses années relativement à des biens de l'ampleur du complexe “ The Claridge ”. M. Nicholl était un comptable agréé d'âge mûr, d'expérience, qui faisait la commercialisation et le courtage d'abris fiscaux, de fusions et d'acquisitions ainsi que d'entités à capital de risque et qui s'occupait de gestion de placements pour la CMF, soit une entreprise appartenant à ses associés du cabinet d'expertise comptable.

[16] Les deux appelants semblent avoir eu divers intérêts commerciaux ou avoir joué un rôle à cet égard. M. Witkin, notamment, était membre d'autres sociétés de personnes immobilières du Canada et des États-Unis. Il avait été un employé et un cadre de grandes sociétés de promotion immobilière canadiennes, dont la Cadillac Fairview. L'activité de M. Nicholl consistait à faire de la recherche d'entreprises au Canada et aux États-Unis. M. Nicholl détient maintenant une participation dans une entreprise qui vend et loue des remorques et il s'occupe de la gestion de cette entreprise. Les deux appelants étaient et sont encore des hommes d'affaires très avisés.

[17] Il reste à savoir si, objectivement, la Cour peut conclure que l'achat des participations, par les appelants, pouvait donner lieu à une attente raisonnable de profit. Les critères sont énoncés dans le jugement Enno Tonn et al. v. The Queen, 96 DTC 6001. Dans la présente espèce, il s'agissait d'une entreprise immobilière ne comportant aucun élément personnel de satisfaction pour l'un ou l'autre appelant. Aucun élément de preuve n'établit que l'un ou l'autre appelant avait emprunté de l'argent aux fins de l'investissement. Ils ont conclu des conventions très détaillées, très étudiées, qui ont été négociées sur plusieurs mois par des avocats de la CMF de Toronto et de Dallas. Les appelants disent qu'ils s'attendaient à réaliser un profit en deux ans à peu près. La meilleure façon de décrire leur plan est de dire que ce plan tenait aux contrats de société et à la convention de transfert de participation ainsi qu'aux occasions de rechange qu'ils offraient à la Cl A et aux associés de la Cl 1. Ils soutiennent que c'est ainsi qu'ils s'attendaient à gagner un revenu, mais le marché immobilier de Dallas n'a pas remonté aussi vite que les appelants s'y attendaient, et ces derniers n'ont pas réalisé de profit.

[18] Les appelants ont acheté une participation dans la Cl 1 dans laquelle ils n'étaient pas majoritaires pour fins de contrôle. Les associés canadiens étaient assujettis au paragraphe 3.1 du contrat de société de la Cl 1, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION]

3. Gestion

3.1 Toutes les décisions relatives à la gestion ou à l'exploitation de la société de personnes seront prises par consentement écrit unanime des associés, qui géreront conjointement l'entreprise de la société de personnes. La société de personnes ne pourra être liée par une mesure prise par l'un ou l'autre associé agissant seul, sauf disposition contraire prévue aux présentes.

(Pièce A-1, onglet 12)

De même, le contrat de société de la Cl A définissait “ consentement des associés ” comme désignant le consentement unanime des associés (pièce A-1, onglet 1, alinéa 1.1e). La Cl A avait seulement droit à une participation de 5,4 p. 100 dans le complexe “ The Claridge ” le 31 mars 1988. Elle avait, par contrat, conféré à la MSI (une société Strauss) le droit irrévocable de gérer le complexe “ The Claridge ”. Cela avait également été intégré au contrat de société de la Cl A par la modification du 31 mars 1988 (pièce A-1, vol. 2, onglet 25), ce qui ne pouvait être modifié que par consentement unanime des associés, dont deux étaient la SIMC et la SIRC, soit des sociétés Strauss. La Cl A avait aussi acquis l'option sur deux ans de 40 000 000 $ permettant d'acheter les unités restantes de temps à autre. Toutefois, pour que les associés canadiens lèvent l'option, il fallait que les associés de la Cl 1 et ceux de la Cl A soient unanimes. Les sociétés Strauss avaient un droit de veto dans chaque société de personnes. Si un profit pouvait être réalisé sur l'option, elles pouvaient empêcher les Canadiens d'acquérir le complexe “ The Claridge ” et d'avoir le profit. Les problèmes inhérents à ces restrictions ont été démontrés lorsque M. Hunsicker a déclaré dans son témoignage que l'activité de vente de la direction du complexe “ The Claridge ” avait été “ épouvantable, ridicule, moche ” jusqu'en mai 1990, c'est-à-dire jusqu'à la nomination d'un nouvel agent des ventes, Judy Pitman. Cette dernière a réussi en peu de temps à vendre l'ensemble du complexe “ The Claridge ”. L'option de 40 000 000 $ expirait le 31 mars 1990. Compte tenu du fait que les appelants ne contrôlaient pas la Cl 1 ou la Cl A, qu'ils ne contrôlaient pas le complexe “ The Claridge ” ou la gestion de celui-ci ou encore les ventes d'unités de ce complexe et qu'ils ne contrôlaient pas non plus la levée de l'option d'achat ou, à cet égard, l'acquisition de recettes par les associés canadiens, la preuve est que le plan des appelants était que l'exploitation du complexe “ The Claridge ” soit poursuivie par les sociétés Strauss d'une manière aussi médiocre qu'avant.

[19] MM. Witkin et Young ont déclaré que les coûts d'exploitation et de commercialisation du complexe “ The Claridge ” étaient à peu près deux fois supérieurs à la norme. Ils disent que, lorsqu'ils ont acheté leurs participations dans la Cl 1, ils entendaient les réduire. Toutefois, les appelants n'avaient aucun droit de réduire les coûts. Cela restait sous le contrôle irrévocable de la société Strauss qui gérait le complexe “ The Claridge ”. Les sociétés Strauss avaient déjà perdu presque 3/4 de 82 500 000 $ dans le complexe “ The Claridge ”, à la connaissance des appelants. En mars 1988, il y avait un certain nombre d'années que les sociétés Strauss vendaient des unités du complexe “ The Claridge ”. Les appelants n'avaient droit qu'à 99 p. 100 des 5,4 p. 100 de toutes recettes pouvant être réalisées. Les appelants avaient reçu les projections des sociétés Strauss concernant le complexe “ The Claridge ” avant d'investir (pièce R-1, onglet 5). M. McRoberts a démontré que ces projections étaient optimistes en 1988 concernant aussi bien les prix au pied carré que les taux annuels d'augmentation. Selon une augmentation de valeur des unités de 18 p. 100 par année, il avait calculé un léger rendement du capital investi; à un taux d'augmentation de valeur de 9 p. 100 et 4½ p. 100, les appelants pouvaient avoir un rendement de leurs investissements. M. Hunsicker a décrit les associés canadiens comme étant “ très avisés ”. Assurément, les deux appelants l'étaient. Ils étaient bien capables de se rendre compte que les projections étaient optimistes aux fins de la promotion et d'effectuer les calculs que M. McRoberts a effectués. M. Witkin avait en outre son frère, soit un comptable agréé d'un cabinet national d'expertise comptable, qui lui avait fait part de cet investissement et qui aurait pu effectuer les calculs relatifs aux projections. M. Nicholl avait des associés qui auraient pu effectuer les calculs. Les deux ont témoigné qu'ils ne s'étaient pas basés sur les projections. Toutefois, ils les avaient et ont choisi de ne pas se fonder là-dessus. De l'avis de la Cour, il n'était pas raisonnable de ne pas les utiliser ou de les faire examiner par des conseillers si leur but était de tirer un profit du complexe “ The Claridge ”, ainsi que de la Cl A et de la Cl 1. Cela est particulièrement vrai lorsque des investisseurs avisés, d'expérience, tels les appelants procèdent à des achats comme ceux qui sont en cause dans la présente espèce. Les calculs de M. McRoberts, le témoignage de ce dernier et son rapport modifié relatif aux projections figurant dans la pièce R-1, onglet 5, sont acceptés par la Cour comme reflétant fidèlement les projections contenues dans la pièce R-1, onglet 5. Ainsi, la Cour conclut que, lorsque les appelants ont acheté leurs participations dans la Cl 1, l'entreprise ne pouvait raisonnablement donner lieu à un profit.

[20] Si l'intention des appelants n'était pas de gagner un revenu, il faut déterminer si leur intention véritable était d'obtenir un remboursement d'impôt ou une perte fiscale (voir le jugement Tonn, page 6011). La perte fiscale offerte par la CMF aux appelants était beaucoup plus élevée que tout profit qui pouvait raisonnablement être envisagé dans les projections ou que les appelants disent qu'ils envisageaient. La perte fiscale a été immédiate et était très importante, qu'elle soit considérée en soi ou par rapport à l'investissement fait par les appelants. Elle pouvait être calculée à partir de l'information fournie. Dans le cas de M. Witkin, la perte offerte pour 1988 pouvait être reportée rétrospectivement sur son revenu très important pour 1987, qu'il connaissait en mars 1988. M. Nicholl était un comptable agréé travaillant dans le domaine des abris fiscaux, de sorte que sa compréhension de sa position fiscale à quelque moment que ce soit était grande. Les pertes provenant de la société de personnes que les appelants ont indiquées pour 1988 étaient importantes et, en mars 1988, ils pouvaient eux-mêmes les calculer et pouvaient s'attendre à les utiliser de la manière dont ils l'ont fait. Dans le cas de M. Witkin, la perte fiscale qui lui a été présentée était une certitude, tout comme le fait qu'il l'a reportée rétrospectivement sur 1987.

[21] Les appelants n'avaient aucune attente raisonnable de profit à l'égard de leurs investissements dans la Cl 1 en mars 1988. En vertu du contrat conclu avec la Cl A, la gestion du complexe “ The Claridge ” continuait d'être confiée aux sociétés Strauss, dont la façon de gérer ce complexe avait donné lieu à des pertes considérables pendant des années. Seul un consentement unanime au sein de la Cl 1 et de la Cl A pouvait permettre de modifier la gestion, et cela exigeait l'accord des sociétés Strauss. Un calcul du rendement des 99 p. 100 de la Cl 1 sur la participation de 5,4 p. 100 dans le complexe “ The Claridge ”, compte tenu des projections optimistes fournies aux appelants et figurant à l'onglet 5, indiquait, à toutes fins utiles, une simple possibilité de rendement des investissements pour les appelants. En s'assujettissant au vieux mode de gestion, les appelants rendaient cette possibilité très lointaine. L'occasion de rechange que représentait les 250 000 $ US et la coentreprise en equity n'a pas été calculée pour ce qui est du rendement dans ce qui a été présenté à la Cour, et aucun élément de preuve n'établit que les appelants avaient l'information nécessaire pour effectuer un tel calcul en mars 1988. Donc, les appelants n'avaient aucun moyen de déterminer l'existence d'une attente raisonnable à l'égard de cette occasion de rechange. La levée de l'option de 40 000 000 $ US exigeait le consentement unanime des associés de la Cl 1 et de la Cl A, chacune de ces sociétés de personnes incluant des sociétés Strauss. Même si on admettait la possibilité, aussi mince soit-elle, qu'il valait la peine de lever cette option, le droit de veto des sociétés Strauss garantissait que M. Strauss en tirerait les avantages. Sur la foi de la preuve, les appelants ont acheté des pertes fiscales, et c'est ce qu'ils entendaient faire.

[22] La Cour conclut que les appelants n'avaient aucune intention de réaliser un profit ni aucune attente raisonnable de profit à l'égard de leurs participations dans la société de personnes Cl 1, ainsi que de la participation dans la CMF Investments pour ce qui est de M. Nicholl, lorsqu'ils les ont achetées. Ils n'exploitaient pas une entreprise. En vertu de la jurisprudence fiscale canadienne, la Cl 1 n'exploitait pas une entreprise non plus. Sur la foi de l'ensemble de la preuve, la Cour conclut que les appelants entendaient acheter et utiliser des pertes fiscales et que c'est ce qu'ils ont fait. Les appelants ne sont pas en droit de déduire les pertes qu'ils avaient indiquées pour chaque année d'imposition, et M. Witkin n'a pas droit à un report rétrospectif de perte sur 1987.

[23] Les appels sont rejetés.

[24] L'intimée se voit adjuger ses frais à l'égard de chaque appel. Toutefois, un seul mémoire de frais est adjugé à l'intimée à l'égard de l'audience elle-même; ces frais doivent être divisés également entre les appelants.

Signé à London (Ontario) ce 19e jour de mai 1998.

“ D. W. Beaubier ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 16e jour d'octobre 1998.

Mario Lagacé, réviseur

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