Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 20000524

Dossiers: 1999-2456-IT-I; 1999-2918-IT-I

ENTRE :

EVAN WILLIAMS, JILLIAN WILLIAMS,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Teskey, C.C.I.

[1] Dans les avis d'appel au moyen desquels ils ont porté en appel des nouvelles cotisations d'impôt sur le revenu établies à leur égard pour les années 1993, 1994 et 1995, les deux appelants ont choisi la procédure informelle.

[2] Les deux appels ont été entendus sur preuve commune.

Question en litige

[3] Il s'agit de déterminer si les appelants pouvaient raisonnablement s'attendre à tirer un profit de la location d'une unité condominiale de deux chambres à coucher à Hawaii.

[4] Les faits non contestés sont les suivants :

L'appelant, Evan Williams (“ Evan ”), et sa conjointe, Jillian Williams (“ Jillian ”), ont acheté une unité condominiale située au 77-6469, Alii Drive, 307, White Sands Village, Kailua-Kona, Hawaii, É.-U. 96740; ils ont conclu l'achat le 2 avril 1990, date à laquelle ils ont commencé à louer l'unité (“ unité ”);

les appelants ont payé l'unité 159 000 $ US et ils ont financé le prix d'achat au complet par emprunt;

le prix d'achat a été financé au moyen d'une hypothèque de premier rang de 90 000 $ US détenue par les vendeurs de l'unité et portant intérêt de 10,5 p. 100, et d'une hypothèque de deuxième rang de 69 000 $ US grevant leur résidence principale et portant intérêt de 12,75 p. 100;

l'unité a une superficie de 1 050 pieds carrés approximativement et comprend deux chambres à coucher, deux salles de bain, un salon, une cuisine et une véranda;

l'unité était louée 100 $ US par jour; un rabais de 10 p. 100 était consenti pendant la saison morte et pour les séjours de huit jours, ce rabais étant porté à 15 p. 100 pour les séjours d'au moins 15 jours;

l'unité a été louée approximativement neuf jours par mois en 1993, deux jours par mois en 1994 et cinq jours par mois en 1995;

Evan a soutenu qu'il ignorait si cela était exact. Même s'il avait tous les registres en sa possession, aucun n'a été produit en preuve, et aucune preuve contraire n'a été produite.

les frais fixes se sont élevés en moyenne sur une période de trois ans à 22 228 $ par année; il faut aussi ajouter une déduction pour amortissement (“ DPA ”) de 2 960 $;

Evan a également admis ce fait tenu pour acquis, mais il n'a jamais ventilé le prix d'achat selon qu'il s'agissait du terrain, de l'immeuble et des biens meubles; il a fait une ventilation approximative.

l'appelant a remplacé les moquettes, le réservoir à eau chaude, l'ameublement, le téléviseur, le magnétoscope à cassettes, la machine à laver et la sécheuse pendant la période qui s'est terminée en 1996, ce qui lui a coûté au total 4 500 $;

pendant toutes les périodes pertinentes, Evan, un ingénieur, exploitait une entreprise de services administratifs et d'experts-conseils en Colombie-Britannique, et son épouse, Jillian, comptable, fournissait des services de comptabilité à des clients;

de 1990 à 1995, Evan a déclaré le revenu suivant et il a déduit la moitié des pertes découlant de la location de l'unité :

1990 7 741,19 $ 22 187,79 $ (14 446,60 $) (7 223,30 $)

1991 18 678,41 27 502,75 (8 824,34) (4 412,17)

1992 6 330,72 24 572,73 (18 242,01) (9 121,00)

1993 11 150,25 27 888,73 (16 738,48) (8 369,24)

1994 2 400,00 24 254,14 (21 854,14) (10 927,07)

1995 5 400,00 23 487,71 (18 087,71) (9 043,85)

Total 51 700,57 $ 149 893,85 $ (98 193,28 $) 49 096,64 $)

[5] Les faits non établis ou contestés sont les suivants :

Ni le contrat de vente original ni une copie de l'hypothèque de premier rang n'a été produit. Evan a allégué que, selon le contrat conclu avec les vendeurs concernant l'hypothèque de premier rang, il n'était tenu de payer que 700 $ par mois, mais qu'il payait volontairement 1 000 $ par mois, principal et intérêt compris; il a produit un tableau d'amortissement. En multipliant simplement le montant de 90 000 $ par le taux d'intérêt de 10,5 p. 100, on obtient un intérêt annuel de 9 450 $, alors que 12 paiements de 700 $ par mois totalisent 8 400 $. Cela signifie qu'aucune partie du capital ne devait être remboursée et que, à la fin d'une année, des intérêts de 1 050 $ demeuraient impayés puisque le montant de 700 $ par mois ne permettait pas de payer l'intérêt accumulé;

Je rejette le témoignage de l'appelant relativement à cette allégation.

aucune copie de l'hypothèque de deuxième rang ni aucun tableau d'amortissement n'a été produit;

seulement deux des états financiers ont été produits, l'un pour l'année 1997 (pièce A-5) et l'autre, pour l'année 1998 (pièce A-6);

les états de 1996 n'ont pas été produits et aucun des documents d'appui pour les années 1993 à 1998 n'a été produit. J'arrive à la conclusion que, puisque Jillian n'a pas témoigné et qu'aucune explication raisonnable n'a été offerte, son témoignage et les registres eux-mêmes auraient nuit aux appels en l'instance. Je conclus également que, puisque les livres et les registres n'ont pas été produits pour la période de 1993 à 1998, ils n'auraient pas résisté à un examen, et que les dépenses étaient probablement exagérées et le revenu déclaré était peut-être inférieur à ce qu'il était vraiment.

[6] Les états financiers (pièce A-6) sont censés viser toute l'année civile 1998; or, l'unité a été vendue et l'affaire a été conclue le 30 octobre 1998.

[7] Aucun des écarts entre les états financiers pour les deux années n'a été expliqué. Je ne peux donc accepter aucune des déclarations non corroborées de l'appelant. Ce dernier soutient que la pièce A-3 consiste en trois feuilles de calcul qu'il a préparées au moment de l'achat. Les chiffres figurant à la deuxième page sont censément fondés sur le fait que, en 1989, les vendeurs de l'unité avaient loué celle-ci pendant 231 jours et l'avaient utilisée à des fins personnelles pendant 60 jours.

[8] La location alléguée pendant 231 jours est on ne peut plus douteuse. Peut-être les vendeurs ou les agents de location ont-ils menti à l'appelant. Toujours est-il qu'il n'y avait aucune raison acceptable pour que le nombre de jours de location chute en 1990. Les appelants ont été propriétaires de l'unité pendant neuf mois complets et ils ont déclaré un revenu de location brut de 7 741,19 $. Même si l'unité avait été louée à temps plein pendant les mois de janvier, de février et de mars, le revenu total aurait été de 16 741 $. Le revenu brut pour 1991 était de 18 678 $. Il me semble que le nombre de jours de location pendant ces deux années était tout à fait juste. Par la suite, le nombre de jours de location a pu diminuer en raison de circonstances indépendantes de la volonté des appelants.

[9] Donc, les feuilles de calcul ne sont d'aucune utilité puisqu'elles étaient basées sur une hypothèse de location erronée. Même la page un de la pièce en question, la feuille de calcul du seuil de rentabilité, n'était pas juste. Elle fait état de dépenses de 19 375 $ pour une année. Or, les appelants ont déduit pour neuf mois en 1990 des dépenses de 22 187,79 $ et, en 1991, des dépenses de 27 502,75 $. Elle fait état également, en ce qui concerne l'hypothèque de premier rang, d'intérêts qui sont inférieurs de 1 200 $ à ce qu'ils étaient en réalité et, en ce qui concerne l'hypothèque de deuxième rang, d'intérêts qui sont inférieurs de 2 500 $ à ce qu'ils étaient réellement. Par conséquent, pour ce qui est de l'intérêt hypothécaire seulement, les dépenses sont de 3 700 $ inférieures à ce qu'elles étaient vraiment.

[10] Je rejette donc tous les chiffres que l'appelant a produits puisque aucun d'entre eux n'a été appuyé par des documents originaux.

[11] Les appelants ne m'ont pas convaincu que, selon les remarques incidentes du juge Dickson, tel était son titre, dans l'affaire Moldowan c. La Reine, [1978] 1 R.C.S. 480 (77 DTC 5213), au moment où ils ont acheté l'unité et pendant toutes les années au cours desquelles ils en ont été propriétaires, ils pouvaient raisonnablement s'attendre à réaliser un profit après avoir tenu compte de la DPA.

[12] Bien qu'Evan affirme qu'il y a eu un profit en 1998, les chiffres sont à ce point suspects que j'ignore complètement s'il y a eu un profit ou si les chiffres ont été fabriqués pour donner l'impression qu'un profit avait été réalisé parce que, à ce moment-là, Evan savait qu'une nouvelle cotisation serait établie à son égard et que les pertes qu'il avait subies seraient refusées.

[13] Je suis convaincu qu'il existait un fort élément personnel dans la présente affaire et que les appelants songeaient également au gain en capital qu'ils pourraient réaliser, et que ces deux facteurs les ont motivés à acheter la propriété en cause.

[14] Conséquemment, les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour de mai 2000.

“ Gordon Teskey ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 17e jour d'octobre 2000.

Isabelle Chénard, réviseure

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