Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19990520

Dossiers: 98-989-IT-I; 98-991-IT-I

ENTRE :

GEORGIA GALANAKIS, EMMANUEL GALANAKIS,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Motifs du jugement

Le juge Bowman, C.C.I.

[1] Les présents appels ont été entendus ensemble. M. Galanakis s’est représenté lui-même et a représenté son épouse.

[2] M. Galanakis interjette appel à l’encontre de cotisations établies pour les années 1992 et 1993. Mme Galanakis interjette appel à l’encontre d’une cotisation établie pour l’année 1993.

[3] Il y a deux questions en litige. En ce qui concerne M. Galanakis seulement, le ministre du Revenu national a décidé d’ajouter en 1992 et 1993 respectivement des revenus de 4 119,79 $ et de 2 864,03 $ et des pourboires de 2 403,68 $ et de 3 309,39 $ au revenu que M. Galanakis a tiré d’une entreprise, soit l’exploitation d’un taxi.

[4] En ce qui concerne les deux appelants, le ministre réclame de l’impôt sur un gain en capital de 258 195 $ réalisé en 1993 lorsqu’ils ont transféré deux maisons à leurs fils sans contrepartie. Lors de ce transfert, les appelants auraient réalisé un gain en capital de 193 646,25 $, dont 50 %, soit la somme de 96 823,12 $ a été attribuée à chaque appelant. Une déduction pour gains en capital moyennement importante, 70 000 $ environ, a été autorisée.

[5] J’examinerai en premier la question du revenu de M. Galanakis provenant de l'exploitation d'un taxi. Il avait l’habitude d’inscrire sur une “ feuille de route ” l’endroit où il avait pris le client, l’endroit où il l’avait laissé et combien il avait reçu, y compris le pourboire.

[6] Quand il commençait à travailler le matin, il appelait la compagnie de taxi North Shore Taxi Co (“ NST ”) pour dire où il se trouvait et quelle heure il était. Il informait également NST quand il arrêtait de travailler. NST inscrivait ces renseignements sur une “ feuille de travail ”.

[7] En 1992, l’appelant a déclaré avoir tiré un revenu brut de 24 651 $ de l’exploitation du taxi no 63 de NST. En 1993, il a déclaré un revenu brut de 30 650 $. Une fois ses dépenses déduites, son revenu net comme chauffeur de taxi s’élevait à 5 970 $ en 1992 et à 7 173 $ en 1993.

[8] Le répartiteur, John Marquis a examiné les feuilles de route remplies par M. Galanakis et les a comparées avec les feuilles de travail remplies par NST. Il a remarqué que M. Galanakis ne pouvait fournir de feuilles de route pour un certain nombre de journées durant lesquelles, d’après les feuilles de travail de NST, le taxi no 63 était sur la route. M. Galanakis lui ayant déclaré que parfois une autre personne conduisait le taxi no 63 ou bien qu’il était malade ou en congé, M. Marquis n’a pas tenu compte de ces journées dans ses calculs.

[9] M. Marquis a accepté les chiffres de M. Galanakis en ce qui concerne les journées pour lesquelles il avait rempli des feuilles de route. Quant aux journées pour lesquelles M. Galanakis n’était pas en mesure de fournir de feuille de route ni de justifier son absence par un congé, par exemple, M. Marquis leur a attribué un revenu quotidien moyen en assumant que M. Galanakis avait travaillé comme les feuilles de travail de NST le laissaient croire. Il a aussi assumé que les pourboires représentaient, en moyenne, 9,23 % du prix total de la course.

[10] Je ne décèle aucune erreur importante dans cette méthode. Elle est, je le reconnais, un peu arbitraire mais elle représente selon moi la meilleure méthode qui pouvait être établie en l’absence de données précises sur les journées pour lesquelles aucune feuille de route n’était fournie. M. Galanakis n’a présenté aucune preuve qui contredit les chiffres employés pour établir la cotisation.

[11] Je n'ai qu'une réserve à émettre concernant la méthode employée par M. Marquis. Son calcul du revenu quotidien moyen semble fondé sur la prémisse que les chiffres utilisés pour établir la moyenne ne comprenaient pas les pourboires. Il n’est pas tout à fait certain qu’il en soit ainsi et en multipliant la moyenne qu’il a obtenue par le pourcentage moyen de pourboires qu’il a assumé soit, 9,23 %, il se peut que le chiffre multiplié comprenait déjà le pourboire. Cependant, on ne m’a présenté aucune preuve sur cette question et je ne suis pas en mesure de déterminer s’il y a un excédent.

[12] J’examine maintenant la seconde question, c’est-à-dire le transfert de deux maisons aux fils de M. et Mme. Galanakis.

[13] En mai 1988, M. et Mme Galanakis ont acheté la propriété au 543, 3e rue Est à North Vancouver pour 96 500 $. En juin 1988, ils ont acheté la propriété au 1857, ave. Chesterfield à North Vancouver pour 130 000 $. Leur fils Markos habitait la maison sur la 3e rue et leur fils Nick celle sur l’avenue Chesterfield.

[14] En 1990, la propriété sise sur la 3e rue a été détruite lors d’un incendie et les appelants ont reçu 51 000 $ environ à titre d’indemnité d’assurance. Ils ont construit une nouvelle maison sur le même lot. Les parties ne s’entendent pas sur le coût de la maison. À l’origine, il était assumé que le coût s’établissait à 101 240 $ et le prix de base rajusté à 148 105 $. L’intimée concède maintenant que le prix de base rajusté devait s’élever à 158 387,28 $.

[15] En avril 1993, M. et Mme Galanakis ont transféré la propriété de la 3e rue à Markos en contrepartie de la somme de 1 $, de son amour filial et de son affection. Dans l’acte de transfert déposé au bureau d’enregistrement, la valeur indiquée est de 318 000 $ pour la maison, et le ministre s’est servi de ce chiffre pour établir la cotisation.

[16] En mai 1993, ils ont transféré la propriété de l’avenue Chesterfield à Nick en contrepartie de la somme de 1 $, de son amour filial et de son affection.

[17] Le ministre a estimé que la propriété avait une juste valeur marchande de 220 000 $.

[18] Il n’y a pas de preuve établissant que la juste valeur marchande des propriétés telle qu’estimée à la date du transfert doit être mise en doute.

[19] Lors de l’établissement de la cotisation, le ministre a appliqué l’art. 69 et a assumé que les appelants avaient reçu une contrepartie égale à la juste valeur marchande des propriétés puisqu’ils les avaient transférées à des personnes avec lesquelles ils avaient des liens de dépendance.

[20] Les appelants ont fait valoir qu’ils avaient acheté les propriétés pour leurs deux fils mais qu’à la date de l’acquisition ils étaient trop jeunes et manquaient trop de maturité pour qu’elles soient transférées à leurs noms et qu’ils avaient attendu quelques années pour le faire. Ils pensaient évidemment que les fils, qui en 1993 étaient dans la vingtaine avancée, avaient alors acquis la maturité voulue.

[21] M. Galanakis a affirmé que, depuis le début, lui et son épouse n’avaient eu que le titre en common law tandis que les fils avaient toujours eu le titre bénéficiaire des propriétés.

[22] Il a cité deux témoins qui ont corroboré son témoignage selon lequel lui et son épouse avaient toujours déclaré qu’ils avaient acheté les maisons “ pour ” Markos et Nick. Je reconnais que telle était leur intention et qu’ils avaient prévu transférer le titre de propriété à leurs fils à une date ultérieure. Les deux fils ont aussi témoigné qu’ils habitaient dans les maisons et qu’ils avaient toujours compris que leurs parents les avaient achetées pour eux. Les parents payaient la majorité des dépenses, quoique les fils y ont probablement contribué. Tous les témoins m’ont semblés crédibles, et les Galanakis m’ont donné l’impression de former une famille très unie et d’être enclins à partager généreusement leurs actifs entre eux.

[23] Quoi qu’il en soit, je ne pense pas que le simple fait de désigner une propriété comme en étant une qui serait transférée à un membre de la famille en particulier à une date future quelconque choisie par les parents constitue une déclaration de fiducie. Les parents avaient l’entière liberté de choisir la date à laquelle le transfert du titre aurait lieu et, quant à y être, de transférer ou non la propriété. Si l’un ou l’autre des fils s’était mis dans le pétrin, avait éprouvé des difficultés financières, avait accumulé des dettes importantes ou avait été mêlé à une dispute matrimoniale acrimonieuse, les parents auraient pu conserver le titre et l’aurait probablement fait. Je ne pense pas qu’aucun créancier des fils aurait eu la moindre chance de saisir les maisons tant que les parents en détenaient le titre.

24] Je m’exprime ainsi parce que je ne crois pas qu’il puisse être dit que les fils avaient un quelconque intérêt bénéficiaire ou quelque droit légal dans les maisons qu’ils auraient pu faire valoir avant que le transfert de titre ne soit effectué en 1993. Le plus qu’on puisse inférer c’est qu’ils avaient la possession des maisons et étaient réellement justifiés de s’attendre à ce que leurs parents leur transfèrent éventuellement le titre de propriété. Les faits en l’espèce sont très similaires à ceux dans l’affaire Ramsey v. The Queen, 93 DTC 791.

[25] L’appel de M. Galanakis pour l’année 1992 est rejeté. Les appels des deux appelants pour l’année 1993 sont admis, sans frais, et les cotisations déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que le prix de base rajusté de la propriété sur la 3e rue était de 158 387,28 $.

Signé à Ottawa, Ontario, ce 20e jour de mai 1999.

“ D.G.H. Bowman ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 23e jour de février 2000.

Benoît Charron, réviseur

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