Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19990325

Dossiers: 98-401-UI; 98-66-CPP; 98-994-IT-I

ENTRE :

SVEN SKOLD S/N GRAND FORKS RECYCLING & METALS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bowman, C.C.I.

[1] Les appels en l'instance ont été entendus ensemble. Ils soulèvent essentiellement la même question : quel est le montant que M. Skold aurait dû remettre au receveur général au titre de l'impôt sur le revenu et des cotisations au régime de l'assurance-emploi et au Régime de pensions du Canada que sont tenus de verser les employés?

[2] Heureusement, cette question n'est pas soumise à la Cour très souvent. Si la présente affaire montre une chose, c'est le genre de difficultés que se créent les employeurs lorsqu'ils s'engagent à verser à un employé un salaire net et de remettre les retenues normalement faites sur le salaire de cet employé. Le problème est encore pire lorsque, comme en l'espèce, il y a une entente orale vague et mal définie.

[3] En 1996 et pendant une partie de 1997, M. Skold exploitait une entreprise individuelle sous le nom de Grand Forks Recycling & Metals. Il employait un certain nombre de personnes, mais seuls Ian Taylor, Ronald Holtum et Dennis McLellan sont concernés en l'instance. Je n'entends rien dire de plus au sujet de Ronald Holtum et de Dennis McLellan. L'écart entre les chiffres de l'appelant et ceux de l'intimée est infime : 62,13 $ dans le cas de M. Holtum et 23,69 $ dans le cas de M. McLellan. Aucune preuve n'a été produite en vue de mettre en doute le calcul par l'intimée des cotisations au régime de l'assurance-emploi et au régime de pensions du Canada qui auraient dû normalement être remises par l'appelant pour ces deux employés.

[4] Le cas de M. Ian Taylor est un peu plus complexe. M. Skold a engagé M. Taylor à titre de gérant de l'entreprise. Il a convenu de lui verser 800 $ toutes les deux semaines « avant impôt » , ce qui, pour lui, signifiait apparemment que M. Taylor toucherait 800 $ toutes les deux semaines et que lui-même, M. Skold, enverrait au fisc l'impôt sur le revenu et les cotisations au régime d'assurance-emploi et au régime de pensions du Canada applicables. Cela nécessite une opération appelée « majoration » qui permet de déterminer, au moyen d'une série concrète de calculs mathématiques ou d'une formule, le montant brut qu'il faut payer pour que l'employé touche le montant net convenu (dans ce cas-ci, 800 $) et le montant exact de l'impôt et des cotisations au régime de l'assurance emploi et au régime de pensions du Canada qui doit être remis au receveur général.

[5] Les calculs étaient évidemment effectués par le comptable, qui a été victime d'un infarctus en 1996. À ce moment-là, M. Taylor a pris la tenue de livres en main. Apparemment incapable de s'acquitter de cette tâche, il a été remplacé par M. Skold, qui a déclaré que le montant majoré pour chaque période de deux semaines aurait dû être 883,73 $ (800 $ + 37 $ au titre de l'impôt sur le revenu, 26,07 $ au titre de l'assurance-emploi et 20, 66 $ au titre du régime de pensions du Canada).

[6] Du 16 novembre au 31 décembre 1996, le salaire net de M. Taylor a été réduit à 750 $ et, d'après M. Skold, le nouveau montant majoré pour cette période aurait dû être 811,63 $ (750 $ + 19,05 $ au titre de l'impôt sur le revenu, 23,94 au titre de l'assurance-emploi et 18,64 $ au titre du régime de pensions du Canada).

[7] Pour les trois premiers mois de 1997, les chiffres, d'après M. Skold, étaient à peu près identiques (811,77 $).

[8] M. Edward Kandulsky, un examinateur des fiducies pour le ministère du Revenu national, a conclu que le montant majoré pour chaque période de deux semaines aurait dû être 1 006,44 $ (800 $ + 152,65 $ au titre de l'impôt sur le revenu, 29,69 $ au titre de l'assurance-emploi et 24,10 $ au titre du régime de pensions du Canada) (il a subséquemment rajusté ce montant pour tenir compte du fait que le salaire avait été réduit à 750 $ en novembre 1996).

[9] Dans les faits, il semble que les remises faites correspondaient en grande partie aux montants calculés par M. Kandulski. M. Skold a décidé qu'elles étaient trop élevées et il a réclamé un remboursement de 3 004,83 $. Dans les cotisations et les évaluations en litige, ce remboursement lui a été refusé. Le feuillet T4 qu'il a préparé relativement à la rémunération de M. Taylor paraît être compatible avec les chiffres suivants, que j'ai énoncés précédemment :

Revenu tiré d'un emploi avant retenues 20 960,91 $

Cotisations de l'employé au régime de

pensions du Canada 488,94 $

Cotisations de l'employé à l'assurance-emploi 605,32 $

Impôt sur le revenu retenu 803,63 $

[10] Les chiffres de M. Kandulski sont les suivants :

Revenu tiré d'un emploi 24 054,90 $

Retenues au titre de l'impôt sur le revenu 3 719,67 $

Cotisations d'assurance-emploi 709,62 $

Cotisations au régime de pensions du Canada 575,61 $

[11] L'écart entre les deux calculs, soit 3 093,99 $, correspond à 89,16 $ près au remboursement réclamé par M. Skold — pour ainsi dire l'écart entre le calcul du ministère et celui de M. Skold relativement à M. Holtum et M. McLellan.

[12] L'écart est directement attribuable au fait que M. Kandulski a calculé le montant des remises au titre de l'impôt sur le revenu et des cotisations au régime de pensions du Canada et au régime de l'assurance-emploi en se fondant sur l'hypothèse que M. Taylor était un célibataire sans personne à charge.

[13] Il a fait ces calculs sur le fondement des paragraphes 227(2) et (3) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[14] Le paragraphe 153(1) est libellé ainsi en partie :

Toute personne qui verse au cours d'une année d'imposition l'un des montants suivants :

un traitement, un salaire ou autre rémunération;

[...]

doit en déduire ou en retenir la somme fixée selon les modalités réglementaires et doit, au moment fixé par règlement, remettre cette somme au receveur général au titre de l'impôt du bénéficiaire ou du dépositaire pour l'année en vertu de la présente partie ou de la partie XI.3 [...]

[15] Les paragraphes 227(2) et (3) sont libellés dans les termes suivants :

(2) Déclaration à produire auprès de la personne qui fait les retenues. Lorsqu'une personne (appelée le « payeur » au présent paragraphe) est tenue en vertu des dispositions réglementaires prises en application du paragraphe 153(1) de déduire d'un paiement à un autre personne ou de retenir sur un tel paiement un montant au titre de l'impôt de cette autre personne pour l'année, cette autre personne doit, selon les modalités de temps fixées par ces dispositions, produire auprès du payeur une déclaration selon le formulaire prescrit.

Articles liés: Art. 227(3); 235

Règlement: Partie I (art. 107(1))

Formule prescrite: TD1

(3) Défaut de produire la déclaration. Toute personne qui omet de produire un formulaire, ainsi que le requiert le paragraphe (2), est susceptible de subir la déduction ou retenue en vertu de l'article 153 au titre de son impôt au même titre que si elle était célibataire et sans personne à charge.

[16] La « déclaration » dont il est question aux paragraphes 227(2) et (3) est la formule TD1, où sont énoncés les crédits, déductions, exemptions et personnes à charge de l'employé, et ainsi de suite.

[17] Aucune formule TD1 n'a été produite; M. Kandulski a donc correctement calculé le montant majoré auquel il est arrivé. La révision subséquente des chiffres par M. Skold et sa demande de remboursement étaient fondées sur l'opinion selon laquelle l'épouse de M. Taylor avait un handicap et qu'il avait un enfant.

[18] Même si cela est vrai, et je ne vois aucune raison d'en douter, aucune formule TD1 n'a été produite, et le paragraphe 227(3) est très explicite.

[19] La conclusion à tirer de cela est que les employeurs qui acceptent de payer les employés un montant net et de s'occuper des remises au titre de l'impôt et des cotisations au régime de l'assurance-emploi et au régime de pensions du Canada (c.-à-d. qui partent d'un montant net pour en arriver à un montant brut au lieu d'adopter la méthode plus courante qui consiste à faire les retenues sur un salaire brut) devraient énoncer de façon claire et détaillée les modalités de l'entente avec l'employé et produire la formule TD1 prescrite. La Loi de l'impôt sur le revenu ne fait aucun cas des ententes contractuelles privées du genre de celle qui est en cause ici. Elle s'intéresse à la perception du montant d'impôt approprié sur le traitement ou le salaire de l'employé. Si l'employeur a remis un montant trop élevé au titre de l'impôt de l'employé et que le ministre rembourse l'excédent à l'employé à titre de paiement en trop d'impôt, je crois que le recours de l'employeur, le cas échéant, serait contre l'employé et non pas contre le ministre.

[20] Les appels sont rejetés.

Signé à Toronto, Canada, ce 25e jour de mars 1999.

« D. G. H. Bowman »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 14e jour de janvier 2000.

Mario Lagacé, réviseur

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