Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 19980810

Dossier: 96-3525-IT-G

ENTRE :

LA GREAT-WEST, COMPAGNIE D'ASSURANCE-VIE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1] Cet appel se rapporte à l'année d'imposition 1988 de l'appelante.

FAITS ADMIS DANS LES ACTES DE PROCÉDURE

[2] L'appelante, La Great-West, Compagnie d'Assurance-Vie (la « GW » ) dit ceci dans son avis d'appel :

[TRADUCTION]

1. L'appelante, une compagnie constituée en vertu des lois du Canada, a son siège au 100, rue Osborne Nord, Winnipeg (Manitoba) R3C 3A5.

2. L'appelante, un résident du Canada, a exploité pendant de nombreuses années, y compris en 1988, et continue d'exploiter une entreprise d'assurance, notamment dans le domaine de l'assurance-vie, au Canada et aux États-Unis.

3. Durant toute la période pertinente, la G.W.L. Properties Ltd.[1] était une compagnie constituée en vertu des lois de la Colombie-Britannique.

4. Durant toute la période pertinente, toutes les actions émises de la G.W.L. Properties Ltd. étaient détenues par l'appelante. À la fin de 1988, l'appelante détenait en outre un billet de 124 500 000 $ (effet à recevoir) de la G.W.L. Properties Ltd. Ces actions et ce billet sont collectivement appelés ci-après les « titres de GWLP » .

5. La fin de l'exercice de l'appelante et de la G.W.L. Properties Ltd. est le 31 décembre.

6. Lors du calcul de son revenu et dans la déclaration de revenus qu'elle a produite pour l'année d'imposition 1988 :

a) l'appelante a considéré que les titres de GWLP étaient des biens entrant dans la catégorie « bien de placement » au sens de l'alinéa d) de la définition figurant au paragraphe 2405(3) du Règlement de l'impôt sur le revenu;

b) l'appelante a désigné les titres de GWLP comme étant inclus dans les biens représentant la valeur de son « fonds de placement canadien pour l'année » en vertu des alinéas 2400(1)b) et d) et a ainsi traité les titres de GWLP comme des « biens utilisés par [elle...] ou détenus par [elle...] dans le cadre de l'exploitation [de son] entreprise d'assurance au Canada » conformément au paragraphe 2400(1) du Règlement de l'impôt sur le revenu;

c) donc, comme l'exige le paragraphe 2400(1) du Règlement de l'impôt sur le revenu et l'alinéa 138(9)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu, l'appelante a inclus dans ses « revenus bruts de placements pour l'année tirés de biens qu'[elle] utilise ou détient dans l'année dans le cadre de l'exploitation de [son] entreprise[...] d'assurance au Canada » le revenu provenant des titres de GWLP et elle a entrepris de calculer son revenu total sur cette base en vertu du paragraphe 138(9).

7. Pour l'année d'imposition 1988, le ministre a établi à l'égard de l'appelante une nouvelle cotisation, dont l'avis est daté du 28 juillet 1994, dans laquelle il a apporté un certain nombre de changements augmentant le calcul du revenu de l'appelante et dans laquelle il a fixé de l'impôt là-dessus.

8. L'appelante a dûment déposé un avis d'opposition à la nouvelle cotisation du 28 juillet 1994, s'opposant à certains des changements apportés par cette nouvelle cotisation.

9. Pour l'année d'imposition 1988, le ministre a ensuite établi à l'égard de l'appelante une autre nouvelle cotisation, dont l'avis est daté du 17 juin 1996, annulant une partie, mais non l'ensemble, des changements apportés par la nouvelle cotisation précédente, soit celle du 28 juillet 1994.

[...]

[3] La GWLP a été créée pour détenir des placements dans le domaine immobilier. Initialement, elle a émis des actions en faveur de la GW, en échange de biens appelés le « groupe Bentall » . Par la suite, des actifs supplémentaires ont été transférés à la GWLP par la GW; la GWLP détenait aussi des intérêts au titre d'hypothèques et de billets. La GWLP était exploitée à partir de bureaux de la division des placements de Winnipeg de la GW. La GWLP n'avait aucun employé et passait des contrats avec la GW pour l'obtention de services.

[4] Pour l'année d'imposition en question, une part des revenus bruts de placements ( « RBP » ) gagnés par la GWLP a été de 47 812 982 $. Les parties reconnaissent que ces RBP provenaient de sources sans lien de dépendance.

[5] Les comptes réciproques entre la GW et la GWLP figuraient dans des feuilles de travail financières de l'appelante. Le compte « 5095 » indiquait les sommes dues à l'appelante par la GWLP, tandis que le compte « 5097 » faisait état des sommes dues à la GWLP par l'appelante. Ces comptes figurant dans les feuilles de travail ont été utilisés pour calculer les intérêts à payer ou à recevoir entre la GW et la GWLP sur une base mensuelle. Pour 1988, un revenu en intérêts supplémentaire de 5 480 029 $ a été tiré de la GW par la GWLP, ce qui représente un calcul d'intérêts gagnés sur des soldes mensuels au cours de l'année d'imposition au titre de sommes avancées à la GW par la GWLP. Ce revenu en intérêts est au coeur du présent différend. L'appelante soutient qu'il s'agit de RBP tirés de sources sans lien de dépendance. Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) soutient pour sa part que ces intérêts proviennent de sources avec lien de dépendance. En l'espèce, le principal point en litige tient à ce revenu en intérêts, c'est-à-dire à la question de savoir s'il s'agit de RBP provenant de sources sans lien de dépendance.

[6] En outre, durant l'année d'imposition, des honoraires de gestion de 0,5 p. 100 étaient payables par la GWLP à la GW au titre de services de gestion se rapportant à un montant de 49 709 601 $, soit des honoraires de 248 548 $.

[7] En décembre 1988, la GWLP a racheté certaines de ses actions privilégiées pour la somme de 199 500 000 $. Le prix de rachat a été payé de deux manières : la dette de la GW envers la GWLP a été réduite de 75 000 000 $, et la GWLP a émis en faveur de la GW un billet à vue de 124 500 000 $ (15 décembre 1988), au taux préférentiel plus 1 p. 100. Pour le reste de l'année (du 15 au 31 décembre 1988), des intérêts de 739 325 $ étaient payables par la GWLP à la GW sur ce billet à vue. Le compte de rachat d'actions figurait dans une colonne distincte des feuilles de travail financières de l'appelante.

[8] Comme note de bas de page, numérotée, afférente aux états financiers pour 1988, il y avait un avis au lecteur (note 7c., pièce A-1, onglet 8) faisant état d'un revenu en intérêts. Cette note indiquait que 5 480 029 $ de revenus en intérêts (d'après les comptes « 5095 » et « 5097 » ) étaient allés dans un sens (de la GW à la GWLP) et que 739 325 $ étaient allés dans l'autre sens (de la GWLP à la GW) (revenu en intérêts sur le billet à vue au titre du rachat d'actions pour la période allant du 15 au 31 décembre 1988).

[9] Ces deux calculs (honoraires de gestion (248 548 $) et frais d'intérêt (739 325 $)) font partie des arguments subsidiaires de l'appelante, qui seront examinés plus en détail ultérieurement.

CADRE LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE

[10] L'article 138 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) a pour objet d'énoncer les règles servant à calculer le revenu, le revenu imposable et l'impôt exigible d'une compagnie d'assurance[2].

[11] Pour 1988, les dispositions pertinentes disposent ce qui suit :

[12] Alinéa 138(2)a). Le revenu que l'appelante a gagné pour une année d'imposition comme assureur exploitant une entreprise au Canada et aux États-Unis était « le montant de son revenu pour l'année, tiré de l'exploitation de cette entreprise d'assurance au Canada » .

[13] Paragraphe 138(9). Dans le calcul de son revenu pour l'année tiré de l'exploitation de son entreprise d'assurance au Canada, l'assureur doit inclure la partie de ses RBP pour l'année tirés de biens qu'il utilise ou détient dans l'année dans le cadre de l'exploitation de cette entreprise d'assurance au Canada, ainsi que le montant supplémentaire prescrit par règlement.

[14] Alinéa 138(12)l). Les « biens » utilisés par l'assureur pendant l'année (dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise d'assurance au Canada) sont réputés être des biens devant être déterminés conformément aux règles prescrites.

[15] Le paragraphe 2400(1) du Règlement de l'impôt sur le revenu (le « Règlement » ) précisait qu'il s'agissait des biens désignés ou devant être désignés par l'assureur pour une année d'imposition, sous réserve de certaines règles.

[16] Le paragraphe 2400(1) établit une distinction entre les « biens de placement » et tous les autres « biens non réservés » .

[17] Paragraphe 2400(1) du Règlement. Les « biens de placement » d'un assureur se trouvaient être désignés ou devaient être désignés en vertu des alinéas 2400(1)a), b), c), d) et f), tandis que, aux termes de l'alinéa 2400(1)e), les autres « biens non réservés » de l'appelante étaient réputés avoir été désignés par l'assureur.

[18] Aux fins de l'appel considéré en l'espèce, le paragraphe 2405(3) est décisif. Un « bien de placement » y est défini comme désignant un bien d'un assureur qui est une action d'une corporation désignée ou une créance exigible par l'assureur d'une telle corporation, à la condition que les RBP provenant des biens de placement de la corporation désignée (à l'exclusion des RBP versés par des personnes avec lesquelles la corporation a un lien de dépendance) représentent au moins 90 p. 100 des revenus bruts ( « RB » ) de la corporation.

[19] Autrement dit, les placements détenus par un assureur dans une corporation étaient admissibles comme « biens de placement » de l'assureur seulement si au moins 90 p. 100 des RB de la corporation étaient des RBP provenant de sources sans lien de dépendance.

[20] Les RBP représentent tous les dividendes imposables, les intérêts, [...] inclus dans le revenu brut pour l'année.

[21] Les RB représentent toutes les sommes reçues ou à recevoir dans l'année autrement qu'au titre de capital.

[22] Ce n'était pas tous les « biens de placement » qui pouvaient ou devaient être désignés — seulement les parties égalant le montant du fonds de placement canadien ( « FPC » )[3] de l'assureur et les parties des biens de placement de l'assureur auxquelles il n'était pas nécessaire de satisfaire. Le FPC n'avait pas à être désigné, de sorte que les « biens de placement » non désignés ne se trouvaient pas à être inclus dans le calcul du revenu.

CALCUL DU FPC POUR LA GW

[23] Dans son témoignage, Douglas Samuel Magnusson (vice-président de la section Impôt de l'appelante) a décrit le calcul du FPC et la façon dont la déclaration de revenus de la GW avait été remplie[4].

En réponse à une question concernant

[TRADUCTION]

Q. [...] le calcul du fonds de placement canadien [...]?

il a dit :

[TRADUCTION]

R. Le concept sous-jacent à l'article 2400 du Règlement part du principe que les actifs de la compagnie sont divisés en deux types de biens, soit les biens de placement et les biens autres. Il est présumé que les biens autres que les biens de placement peuvent être répartis entre les entreprises canadiennes et les entreprises non canadiennes sur une base factuelle.

Concernant les biens de placement, il y avait à un moment donné une répartition sur une base factuelle, avant 1978, puis des formules ont été intégrées au Règlement suivant la théorie selon laquelle il est difficile de déterminer dans quelle entreprise ou dans quel pays un actif donné est utilisé, notamment s'il y a une motivation fiscale à un changement de lieu; on considérait qu'une formule permettait davantage de déterminer sinon les faits de la situation, du moins une base fiscale raisonnable.

Ainsi, le total des biens de placement est déterminé, selon une valeur unitaire définie, au début et à la fin de l'année. On fait certains ajustements concernant ce total pour arriver à une définition appropriée quant à savoir quels biens de placement sont utilisés au Canada.

Donc, comme vous le disiez plus tôt, on commence par déterminer le total des biens de placement. On ajoute les prêts sur police, car ce sont des éléments très apparentés aux biens de placement. On multiplie ce total par le ratio réserves canadiennes sur réserves totales, puis on soustrait les prêts canadiens sur police, puisqu'on avait ajouté le total des prêts sur police au début.

En déterminant le total des biens de placement, on fait certains ajustements de manière à tenir compte tout d'abord des dettes de la compagnie, qui entrent dans deux catégories. La première catégorie, ce sont les dettes qui ont servi à acquérir un bien de placement donné, et ces dettes sont soustraites de la valeur du bien.

La deuxième catégorie, ce sont les dettes ne pouvant être attribuées à l'acquisition d'un bien donné, lesquelles dettes sont soustraites du total suivant la théorie selon laquelle, bien qu'on ne puisse les attribuer à un bien donné, au bout du compte, si la compagnie a davantage de dettes, elle doit également avoir davantage d'actifs.

Ayant alors déterminé la proportion des actifs utilisés au Canada au début de l'année, le FPC au début de l'année et le FPC à la fin de l'année, on prend la moyenne pour établir le FPC pour l'année, tout en faisant un autre ajustement compte tenu de la possibilité que, entre le début et la fin, le flux de trésorerie présente une structure irrégulière. Il s'agit des quatre ou cinq dernières lignes que vous voyez concernant le calcul du FPC.

Q. Donc, après avoir fait tout cela, vous avez déterminé une valeur en dollars?

R. Eh bien, une valeur en dollars — il s'agit du FPC pour l'année — qui représente, si l'on veut, un ensemble devant être constitué d'actifs. Et ces actifs, ce sont des biens de placement et —

Q. En vertu de l'alinéa 2400(1)d)?

R. Oui.

Q. Quand vous dites que cet ensemble doit être constitué de biens de placement, comment cela est-il accompli? Est-ce obligatoire en vertu du Règlement ou cela relève-t-il du pouvoir discrétionnaire de l'assureur; comment cela est-il accompli?

R. Il y a un certain pouvoir discrétionnaire. Un assureur doit avoir le pouvoir discrétionnaire de désigner des actifs, c'est-à-dire qu'il a bel et bien ce pouvoir, mais la désignation suit un ordre et commence par des actifs qui sont essentiellement surtout des actifs canadiens, des actifs immobiliers canadiens; ensuite, il y a des actifs qui sont, dirons-nous, moins canadiens, puis, à peu près la dernière chose que l'on puisse désigner, ce sont des actifs non canadiens, disons des actifs immobiliers étrangers.

[24] Pour 1988, concernant le calcul du FPC, M. Magnusson a répondu ceci aux questions suivantes (pages 110 et 111 de la transcription) :

[TRADUCTION]

Q. Après tous ces calculs habiles, vous arrivez au chiffre qui est indiqué au bas, soit 4 000 564 000 $, n'est-ce pas?

R. C'est exact.

Q. Ayant établi ce chiffre concernant le FPC [... l'assureur doit] constituer de biens le FPC [...]

[...]

Q. [...] et quels que soient les biens constituant le FPC, c'est ce revenu que doit ensuite déclarer la GW dans son revenu canadien?

R. Oui.

Q. Le moment venu de produire sa déclaration de revenus, la GW a manifestement désigné [...] les actions de GWLP et les créances sur cette dernière comme éléments constitutifs du FPC [...]?

R. Oui.

[...]

R. À notre avis, ces actions et ces créances étaient des biens de placement.

[25] Ayant déterminé que les titres de GWLP n'étaient pas des « biens de placement » de l'appelante, le ministre a désigné d'autres « biens de placement » de l'appelante comme éléments constitutifs du « fonds de placement canadien pour l'année » de l'appelante en vertu de l'alinéa 2400(1)f) du Règlement, le revenu provenant de ces « biens de placement » n'ayant pas précédemment été inclus par l'appelante dans le calcul de son revenu.

POINT EN LITIGE

[26] Pour l'essentiel, il s'agit de déterminer si les titres de GWLP étaient des « biens de placement » de l'appelante (GW) au sens du sous-alinéa 2405(3)d)(v) du Règlement pris en application de la Loi.

THÈSE DE L'APPELANTE

[27] Comme l'indique son avis d'appel, l'appelante fait valoir ce qui suit :

[TRADUCTION]

16. [...] dans l'application du critère énoncé au sous-alinéa d)(v) de la définition de « bien de placement » figurant au paragraphe 2405(3) du Règlement de l'impôt sur le revenu, le ministre s'est trompé en incluant dans les « revenus bruts » de la GWLP un montant de 5 480 029 $ comme représentant un revenu en intérêts tiré de l'appelante par la GWLP. L'appelante dit que ce montant n'était pas un montant tiré de l'appelante, qu'il s'agissait d'un revenu en intérêts tiré de tiers sans lien de dépendance et reçu par l'appelante en sa qualité de fiduciaire, au nom de la GWLP, et que ce montant doit donc être inclus à la fois dans les « revenus bruts » et les « revenus bruts de placements » de la GWLP.

17. Subsidiairement, l'appelante fait valoir que, si ledit revenu en intérêts de la GWLP a été tiré de l'appelante et non de tiers sans lien de dépendance, le montant exact du revenu en intérêts qui doit être inclus dans les « revenus bruts » de la GWLP est non pas de 5 480 029 $, mais plutôt de 5 480 029 $ moins les deux montants suivants :

(i) les 248 548 $ enregistrés comme frais payés par la GWLP à l'appelante en 1988;

(ii) les 739 325 $ enregistrés comme intérêts payés par la GWLP à l'appelante en 1988.

THÈSE DE L'INTIMÉE

[28] Comme l'indique la réponse à l'avis d'appel, l'intimée soutient ce qui suit :

[TRADUCTION]

11. [...] les titres de GWLP n'étaient pas des « biens de placement » de l'appelante au sens du sous-alinéa 2405(3)d)(v) du Règlement de l'impôt sur le revenu, car moins de 90 p. 100 des revenus bruts de la GWLP étaient des « revenus bruts de placements » provenant de sources sans lien de dépendance, de sorte que le ministre du Revenu national a à bon droit désigné d'autres « biens de placement » de l'appelante comme constitutifs de son « fonds de placement canadien pour l'année » (1988); de plus, vu l'augmentation consécutive des « revenus bruts de placements pour l'année » de l'appelante, vu l'augmentation du revenu de l'appelante attribuable au fait que les titres de GWLP ont été réputés avoir été désignés comme autres « biens non réservés » de l'appelante et vu le nouveau calcul du montant supplémentaire que l'appelante était tenue d'inclure dans son revenu en vertu de l'alinéa 138(9)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu et de l'article 2411 du Règlement de l'impôt sur le revenu, il en est résulté que le revenu de l'appelante pour l'année (1988) tiré de l'exploitation de son entreprise d'assurance au Canada, au sens des paragraphes 138(2) et 138(9) de la Loi de l'impôt sur le revenu, a été augmenté de 16 678 039 $.

PREMIER ARGUMENT DE L'APPELANTE

[29] En raison de la nouvelle cotisation établie par Revenu Canada, le partage des placements entre la GWLP et l'appelante (au lieu de l'attribution de tous les placements à l'une ou l'autre des deux compagnies) donne lieu à un revenu supplémentaire de plus de 16 millions de dollars, car les titres de GWLP ne sont plus considérés comme des biens de placement.

[30] La GWLP était une compagnie de placement; tous les fonds étaient transférés à l'appelante, étaient investis par l'appelante et étaient intégrés à l'ensemble des placements de l'appelante. L'appelante agissait comme fiduciaire à l'égard des fonds de la GWLP. L'appelante soutient que, bien qu'elle ait payé des intérêts de 5 480 029 $ correspondant à un calcul d'intérêts sur des soldes mensuels dus par elle à la GWLP, le montant de 5 480 029 $ représente dans ces circonstances une somme tirée, quoiqu'indirectement, de sources sans lien de dépendance; autrement dit, il s'agit d'un revenu gagné sur les sommes avancées à l'appelante par la GWLP et investies par l'appelante.

[31] De plus, les circonstances de la présente espèce sont, d'après ce que soutient l'appelante, semblables à celles de l'affaire R A Jodrey Estate v. Min. of Finance (NS), [1980] C.T.C. 437 (C.S.C.), dans laquelle la Cour suprême du Canada avait conclu qu'une compagnie n'était qu'un intermédiaire de l'autre pour la détention de biens. L'appelante ajoute à cet égard que la Cour suprême du Canada n'est pas parvenue à sa conclusion en faisant fi du statut juridique distinct des compagnies et a plutôt considéré les conséquences économiques globales pour la succession du contribuable.

DEUXIÈME ARGUMENT DE L'APPELANTE

[32] Le montant approprié du revenu en intérêts qui doit être utilisé aux fins de la définition d'un « bien de placement » est non pas de 5 480 029 $, mais de 5 480 029 $ moins 248 548 $[5].

[33] Le revenu en intérêts tiré de l'appelante par la GWLP devrait être réduit de ces frais de gestion d'actifs payés par la GWLP à l'appelante sur la créance de 49 709 601 $ détenue sur l'appelante, car ces frais ont été payés/reçus entre les mêmes compagnies, portaient sur le même actif et ont été calculés conformément aux modalités de la même entente que celle qui s'appliquait au revenu en intérêts.

[34] L'appelante soutient que la véritable situation économique du contribuable est le principe important aux fins de l'impôt sur le revenu.

TROISIÈME ARGUMENT DE L'APPELANTE

[35] L'appelante dit que le montant approprié du revenu en intérêts qui doit être utilisé aux fins du sous-alinéa 2405(3)d)(v) de la définition de « bien de placement » est non pas de 5 480 029 $, mais plutôt de 5 480 029 $ moins 739 325 $[6].

[36] De façon générale, les opérations réciproques entre la GWLP et l'appelante consignées dans les comptes « 5095 » et « 5097 » ont été consolidées aux fins du calcul des intérêts sur une base mensuelle moyenne. Les intérêts n'ont pas été comptabilisés opération par opération ou au jour le jour.

[37] Un troisième compte réciproque était le compte de « prêt de rachat d'actions » , qui indiquait séparément un calcul d'intérêts de 739 325,41 $, de la GWLP à la GW, sur le billet de 124 500 000 $ émis en faveur de la GW en décembre 1988.

[38] Le compte de prêt de rachat d'actions représentait simplement une autre opération réciproque de 1988, non différente des diverses opérations consignées dans les comptes « 5095/5097 » .

[39] De l'avis de l'appelante, la réalité économique est la suivante : si la GWLP doit être considérée comme ayant tiré un revenu en intérêts d'une source avec lien de dépendance (l'appelante), les RBP provenant de cette source avec lien de dépendance doivent être pris en compte par rapport à toutes les opérations réciproques, y compris le prêt de rachat d'actions, et les 5 480 029 $ doivent donc être réduits de 739 325,41 $.

RÉPONSE DE L'INTIMÉE AU PREMIER

ARGUMENT DE L'APPELANTE

[40] Il faut toujours déterminer la véritable nature de l'opération ou de l'événement; il n'y a aucune place à l'application d'une doctrine voulant que « le fond prime la forme » , soit un principe en vertu duquel les résultats économiques ou financiers de l'opération ou de l'événement l'emportent sur les droits et obligations juridiques auxquels l'opération ou l'événement a donné naissance.

[41] Les comptes réciproques « 5095 » et « 5097 » étaient non pas des comptes en fiducie, mais simplement des comptes indiquant des dettes intersociétés, c'est-à-dire entre l'appelante et la GWLP.

[42] Bien que certaines des sources de ces dettes semblent tenir à des dividendes gagnés par la GWLP, ces dividendes ne sont pas une composante des 5 480 029 $ en cause, car ce montant représente, sur la foi de la preuve, le total des frais d'intérêt sur des soldes mensuels dus par l'appelante à la GWLP.

[43] L'intimée conclut que, comme cette partie des RBP de la GWLP provenait d'une source avec lien de dépendance (l'appelante) et comme les revenus de la GWLP provenant de sources sans lien de dépendance (47 812 982 $) représentaient moins de 90 p. 100 du total de ses RBP (53 293 011 $), soit 89,72 p. 100, les actions que l'appelante détenait dans la GWLP et la créance de 124 500 000 $ qu'elle avait sur la GWLP n'étaient pas des « biens de placement » au sens de l'alinéa d) de la définition de « bien de placement » figurant au paragraphe 2405(3) du Règlement, de sorte que ces actions et cette créance ne pouvaient être désignées comme « biens utilisés par [elle] pendant l'année ou détenues par [elle] pendant l'année dans le cadre de » l'exploitation de l'entreprise d'assurance de l'appelante au Canada au sens de l'alinéa 138(12)l) de la Loi et du paragraphe 2400(1) du Règlement.

RÉPONSE DE L'INTIMÉE AU DEUXIÈME

ARGUMENT DE L'APPELANTE

La question de savoir si le montant de 248 548 $

réduit les RB et les RBP de l'appelante

[44] L'intimée soutient que les définitions des RBP et des RB qui figurent respectivement à l'alinéa 138(12)e) et au paragraphe 248(1) de la Loi établissent clairement que les intérêts font partie des RB et des RBP, sans déductions. Elle fait valoir que, si le législateur avait voulu permettre des déductions, il l'aurait précisé.

RÉPONSE DE L'INTIMÉE AU TROISIÈME

ARGUMENT DE L'APPELANTE

La question de savoir si le montant de 739 325 $

réduit les RB et les RBP de l'appelante

[45] L'intimée soutient que ce montant de 739 325 $ représentait des intérêts payés ou payables à l'appelante par la GWLP sur la dette de 124 500 000 $ à laquelle a donné lieu le rachat, par la GWLP, de ses actions privilégiées.

[46] Les intérêts de 5 480 029 $ représentaient la somme des intérêts payés ou payables sur les soldes mensuels des comptes réciproques, tandis que les intérêts de 739 325 $ étaient des intérêts payés ou payables sur la dette de 124 500 000 $.

[47] Les RBP et les RB de la GWLP au titre d'intérêts reçus ou à recevoir par la GWLP ne peuvent être réduits du montant des intérêts payables par elle, eu égard aux définitions des RB et des RBP figurant respectivement au paragraphe 248(1) et à l'alinéa 138(12)e) de la Loi.

ANALYSE

LA QUESTION DE LA FIDUCIE

[48] Les revenus en intérêts doivent être inclus dans les RBP en vertu du paragraphe 138(12) de la Loi : voir l'affaire Munich Reinsurance Company (Canada Branch) v. M.N.R., 91 DTC 1137 (C.C.I.). Cependant, si les 5 480 029 $ étaient des revenus tirés par la GW de tiers sans lien de dépendance, ce montant aurait dû être inclus dans les « biens de placement » . C'est ce que reconnaît le ministre dans l'énoncé d'hypothèses figurant à l'alinéa k). Le ministre fait valoir que ces revenus étaient des revenus en intérêts provenant de prêts réciproques reçus de l'appelante par la GWLP. L'appelante soutient simplement que ce montant représentait un revenu de placement gagné par la GW.

[49] Une fiducie expresse est une fiducie dans laquelle la personne qui l'a créée a exprimé son intention de faire en sorte que des biens soient détenus par une ou plusieurs personnes au profit d'une ou plusieurs autres personnes et c'est une fiducie qui peut être attestée verbalement, par un acte ou par un accord : voir l'ouvrage de D. W. M. Waters intitulé Law of Trusts in Canada (2e éd., Carswell, Toronto, 1984), à la page 15.

[50] Dans l'affaire Cadillac Fairview Corp. Ltd. v. R., [1996] 2 C.T.C. 2197 (C.C.I.), le juge Bowman, commentant la question du fardeau de la preuve dans les appels en matière d'impôt, citait à la page 2202 un extrait de l'ouvrage intitulé Odgers' Principles of Pleading and Practice, 22e édition, soit un extrait figurant à la page 532 de cet ouvrage :

[TRADUCTION]

Le « fardeau de la preuve » désigne l'obligation pour une partie d'établir le bien-fondé de sa cause. Il incombe à la partie A lorsque celle-ci, faute de présenter des éléments de preuve, verra le jugement prononcé contre elle. En règle générale (mais pas invariablement), le fardeau de la preuve incombe à la partie qui, dans son acte de procédure, affirme la question [...]

[51] Considérés ensemble, les principes juridiques précités indiquent que c'est à l'appelante qu'incombait la charge de prouver qu'une fiducie avait été créée en droit entre la GW et la GWLP, soit une fiducie en vertu de laquelle l'appelante détenait le revenu de placements de la GWLP. L'appelante ne s'est pas acquittée de cette charge. On n'a présenté aucun élément de preuve étayant l'existence d'une fiducie expresse en l'espèce, et l'appelante n'a pas fait valoir au procès qu'une fiducie induite des faits avait été créée. En outre, la preuve révélait que tous les fonds supposément détenus « en fiducie » pour la GWLP étaient combinés avec les propres fonds de l'appelante et ne pouvaient être attribués à un placement particulier fait par l'appelante au nom de la GWLP. Me fondant là-dessus, je conclus qu'il n'existait aucune fiducie.

LA QUESTION DE L'INTERMÉDIAIRE

ET DU RÉSULTAT ÉCONOMIQUE

[52] L'appelante invoque la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Jodrey, précitée, pour étayer la proposition selon laquelle la GW était simplement un intermédiaire grâce auquel la GWLP détenait certains biens. Donc, soutient l'avocat de l'appelante, la GWLP a indirectement tiré un revenu de sources sans lien de dépendance, car la GW détenait simplement certaines sommes en son nom, soit des sommes auxquelles elle avait droit à titre bénéficiaire.

[53] Dans l'affaire Jodrey, précitée, le contribuable avait cherché à éviter de payer des droits successoraux par un plan de succession complexe. Le contribuable avait transféré des biens à une société albertaine qui était une filiale en propriété exclusive d'une deuxième société albertaine, dont les actions étaient détenues par les enfants du contribuable. Cette structure à deux niveaux visait à faire en sorte que, le contribuable laissant le reliquat de sa succession à la première société albertaine, la deuxième société soit considérée comme étant le bénéficiaire plutôt que les petits-enfants du contribuable. Autrement dit, en interposant deux sociétés entre le contribuable et les bénéficiaires de sa succession, on évitait d'avoir à payer des droits successoraux. La Cour suprême du Canada a statué que la société mère avait droit à titre bénéficiaire au reliquat de la succession au sens de la législation de la Nouvelle-Écosse en matière de droits successoraux, législation en vertu de laquelle le reliquat était donc réputé avoir été reçu par les petits-enfants.

[54] L'affaire Jodrey, précitée, était une affaire de planification successorale se rapportant à des droits successoraux, tandis que la présente espèce concerne l'inclusion, dans le revenu, de certaines sommes à recevoir par une compagnie exploitant une entreprise d'assurance au Canada. De plus, dans l'affaire Jodrey, précitée, le contribuable avait constitué un certain nombre de sociétés de portefeuille dans un but précis. Dans la présente espèce, la GW était une compagnie d'assurance en exploitation, et la GWLP était une compagnie en exploitation qui détenait des placements, y compris des placements immobiliers, des actions et des billets. Enfin, l'affaire Jodrey, précitée, se rapportait à des opérations structurées dans le seul but d'éviter d'avoir à payer de l'impôt, ce qui n'est pas le cas dans la présente espèce.

[55] Il est à noter que dans ses motifs, auxquels souscrivaient les juges Ritchie et McIntyre, le juge Dickson (titre qu'il portait alors) exprimait très fortement sa dissidence, disant à la page 464 :

Règle générale, en l'absence de fraude ou de conduite malhonnête, les tribunaux ne peuvent écarter l'existence juridique distincte d'une compagnie: voir Pioneer Laundry and Dry Cleaners Ltd. v. Minister of National Revenue [[1938-39] CTC 411; 1 DTC 499-69].

[56] Il poursuivait en disant, à la page 465 :

On tend généralement à croire qu'une compagnie mère est propriétaire de l'actif de sa filiale à part entière, mais ce n'est pas vrai en droit. Personne ne prétendrait que quelqu'un qui est propriétaire de 100 actions du Canadien Pacifique est propriétaire de son actif ou a un droit à titre bénéficiaire sur celui-ci. On ne peut établir de distinctions de principe entre la propriété de 100 actions d'une compagnie importante et la propriété de toutes les actions émises d'une petite compagnie. Dans un cas comme dans l'autre, l'actionnaire n'est propriétaire d'aucun autre bien que des actions. Il importe peu qu'un ou plusieurs actionnaires aient un contrôle majoritaire leur permettant d'acquérir l'actif ou une partie de celui-ci à la liquidation ou à l'occasion d'une répartition des biens autre qu'une liquidation. Si les actionnaires avaient un droit à titre bénéficiaire sur les biens d'une compagnie dont ils détiennent des actions, le par. 2(5) n'aurait pas été nécessaire.

[57] Dans l'affaire Otineka Development Corporation Limited et al. v. The Queen, 94 DTC 1234 (C.C.I.), dans laquelle une société avait été constituée et était détenue par une bande indienne au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens et dans laquelle la société appelante soutenait qu'elle était mandataire ou fiduciaire du conseil, le juge Bowman disait, à la page 1236 :

Lorsqu'une corporation laisse voir à des tiers qu'elle est elle-même propriétaire de l'entreprise qu'elle exploite et des biens-fonds connexes, tient des registres financiers distincts, dépose ses propres déclarations de revenus et agit comme toute autre corporation qui est indépendante de ses actionnaires, il faudrait qu'elle présente une preuve extrêmement convaincante pour établir que, pendant tout ce temps, elle n'était réellement que mandataire ou fiduciaire de ses actionnaires en vertu d'une entente verbale ou d'une présomption de la part de certains des actionnaires ou des administrateurs.

[58] Dans l'affaire Continental Bank of Canada et al. v. The Queen, 94 DTC 1858 (C.C.I.), à la page 1869, le juge Bowman disait au sujet de la situation d'une filiale et de sa société mère :

En règle générale, il faut présenter des éléments de preuve extrêmement convaincants pour qu'une compagnie - même une filiale - soit considérée comme le mandataire d'une autre compagnie (Denison Mines Ltd. v. M.N.R., 71 DTC 5375, aux pages 5388 à 5399, confirmé sur une autre question à 72 DTC 6444 (CAF) et à 74 DTC 6525 (CSC)). Il est encore plus difficile de considérer une corporation mère comme le mandataire de sa filiale.

[59] L'appelante se fondait en outre sur les propos suivants tenus par le juge Iacobucci dans l'arrêt Canderel Limited v. The Queen, 98 DTC 6100 (C.S.C.), à la page 6108, où il disait au sujet de la détermination du revenu exact :

À mon avis, l'intérêt de cet énoncé est qu'il confirme une proposition beaucoup plus juste: le critère juridique du « bénéfice » devrait viser à déterminer quelle méthode comptable dépeint le mieux la situation financière du contribuable concerné.

[60] Je conclus que cet arrêt ne saurait étayer l'argumentation de l'appelante. Dans la présente espèce, des sommes avaient été prêtées à l'appelante par la GWLP. Le revenu provenant du prêt n'a pas été redistribué à la GW. Ce revenu en intérêts a été traité par la GWLP comme lui appartenant en propre. Ces fonds sont devenus pour la GW des RBP provenant d'une source avec lien de dépendance. Les fonds qui provenaient de ce prêt et qui ont été investis n'étaient pas expressément délimités et ont en fait été combinés avec d'autres fonds de la GW. Il y avait pourtant une claire délimitation de comptes entre les deux entités. De plus, le principe énoncé par le juge Iacobucci ne va pas jusqu'à permettre de faire fi des personnalités juridiques distinctes de sociétés de manière que l'une soit réputée être le véritable propriétaire du revenu d'une ou plusieurs filiales. Les droits et obligations juridiques auxquels a donné naissance la constitution de la GWLP ne peuvent être passés sous silence simplement parce que ce serait commode pour l'appelante.

[61] Dans la même veine, l'appelante soutenait que du point de vue du fond, mais pas du point de vue de la forme, les sommes détenues par l'appelante étaient réellement la propriété de la GWLP. À mon avis, la doctrine selon laquelle « le fond prime la forme » ne s'applique pas à la présente espèce. Un principe fondamental du droit en matière d'impôt sur le revenu veut que l'obligation fiscale découlant d'une opération ou d'un événement soit déterminée par les droits et obligations juridiques auxquels a donné naissance cette opération ou cet événement et non par les résultats économiques de cette opération ou de cet événement. Comme le disait le juge Bowman dans l'affaire Carma Developers Ltd. v. The Queen, 96 DTC 1798 (C.C.I.), à la page 1801, « on ne peut modifier la nature fondamentale d'une opération aux fins de l'impôt sur le revenu en lui donnant un nom différent. C'est le rapport juridique véritable, et non l'appellation, qui importe » .

[62] Les deuxième et troisième arguments « subsidiaires » de l'appelante partaient du principe que le revenu en intérêts gagné par la GWLP aurait dû être réduit du montant des frais de gestion payés par la GWLP à l'appelante ou du montant des paiements d'intérêt faits par la GWLP à l'appelante à l'égard d'autres prêts impayés. Autrement dit, le chiffre utilisé pour calculer le revenu en intérêts aux fins de la détermination des « biens de placement » au sens de la Loi aurait dû être diminué de certaines sommes payées par la GWLP à l'appelante. Cette thèse n'est pas étayée par la législation.

[63] Les RBP sont définis comme suit au paragraphe 138(12) de la Loi :

e) « revenus bruts de placements » d'un assureur pour une année d'imposition désigne le total des montants suivants:

(i) tous les dividendes imposables, les intérêts, les loyers et les redevances inclus dans son revenu brut pour l'année,

[64] Il n'y a aucune raison valable de soustraire certains paiements faits par la GWLP à l'appelante pour déterminer les RBP.

[65] Le ministre a inclus dans les RBP de la GWLP des intérêts devant être reçus de l'appelante. Je ne vois aucune erreur là-dedans. Je conclus que les titres de GWLP étaient des « biens de placement » de l'appelante au sens du sous-alinéa 2405(3)d)(v) du Règlement de l'impôt sur le revenu.

[66] Pour tous ces motifs, l'appel est rejeté.

[67] L'intimée a droit à ses frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour d'août 1998.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 10e jour de mars 1999.

Mario Lagacé, réviseur



[1]           La G.W.L. Properties Ltd. est appelée ci-après la « GWLP » .

[2]               La note technique afférente au projet de règlement pour les années d'imposition 1997 et suivantes présente une explication très utile de l'objet des dispositions en cause dans cet appel. Cette note dit ceci :

            Selon l'alinéa 138(9)a) de la Loi, les assureurs-vie multinationaux et les assureurs non-résidents sont tenus d'inclure dans le calcul de leur revenu pour une année provenant d'une entreprise d'assurance au Canada les revenus bruts de placements tirés de biens qui sont considérés, selon certaines dispositions réglementaires, comme étant utilisés dans le cadre de cette entreprise. L'alinéa 138(9)b) prévoit que ces assureurs sont également tenus d'inclure dans leur revenu provenant de l'exploitation d'une entreprise d'assurance au Canada le montant prescrit à l'article 2411 du Règlement.

            L'article 2411 a pour objet d'empêcher les assureurs multinationaux de réduire leur revenu imposable en incluant, dans le calcul de leur revenu canadien, seulement le revenu provenant de biens dont le taux de rendement est faible. Selon la partie XXIV du Règlement, un assureur doit choisir (dans le cadre d'un processus appelé « désignation de biens » ), parmi l'ensemble de ses biens de placement, ceux qui peuvent être considérés comme étant utilisés dans le cadre de l'exploitation de la partie canadienne de ses entreprises d'assurance. La valeur des biens à désigner pour une année d'imposition doit être au moins égale à la valeur du fonds de placement canadien de l'assureur pour l'année [...]

            En l'absence de l'alinéa 138(9)b) de la Loi et de l'article 2411 du Règlement, le fonds de placement canadien d'un assureur pourrait être constitué de ses biens à plus faible rendement, ce qui ne serait pas représentatif de son revenu tiré de ses activités d'assurance au Canada.

[3]           Dans un article intitulé « The Taxation of the Life Insurance Industry: The 1978 Tax Reform » (Revue fiscale canadienne, vol. 28, no 1, janv.-fév. 1980, page 9), Ronald C. Knechtel traite des revenus bruts de placements ainsi que des gains et pertes connexes. À la page 17, il dit :

[TRADUCTION]

            Un assureur multinational détient des placements de portefeuille à l'égard de l'ensemble de ses engagements, au Canada ou ailleurs. Sous réserve des exigences réglementaires, ce n'est pas nécessairement dans chaque pays où il exploite une entreprise que l'assureur détient des placements en proportion de ses engagements et du capital et surplus connexes dans ce pays. Il est donc évident qu'une règle spéciale était nécessaire pour attribuer le niveau approprié de revenus de placements, ainsi que les gains et pertes de placements connexes, à l'entreprise canadienne des assureurs multinationaux canadiens et étrangers.

[...]

Fonds de placement canadien (FPC)

Le FPC sert à déterminer la valeur, en dollars, de l'ensemble des biens considérés comme étant utilisés ou détenus relativement à l'entreprise canadienne de l'assureur.

[4]           Transcription de son témoignage, pages 106 à 109.

[5]           honoraires de gestion : 0,5 p. 100 x 49 709 601 $ (créance de la GWLP sur la GW) = 248 548 $.

[6]           Intérêts sur un billet à vue de 124 500 000 $ émis par la GWLP en faveur de la GW en décembre 1988.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.