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Date : 19980102

Dossier : 97-1559-IT-I

ENTRE :

DAVID J. ELLIOTT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge en chef adjoint Christie, C.C.I.

[1] L'appel en instance est régi par la procédure informelle prévue aux articles 18 et suivants de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt. L'année considérée est 1995. L'avis d'appel se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Je désire interjeter appel auprès de la Cour canadienne de l'impôt concernant la déduction de 957 $ que j'ai indiquée à la ligne 229 au titre d'autres frais relatifs à un emploi pour l'année 1995. Vous trouverez ci-joint copie des documents suivants :

A) lettre par laquelle le chef des appels du bureau de Belleville répond à mon opposition;

B) avis de ratification du ministre;

C) motifs de mon appel.

Veuillez noter que je désire opter pour la « procédure informelle » .

Le bureau d'impôt qui a traité mon avis d'opposition est celui qui est mentionné à l'alinéa A) du présent avis. Je préférerais que, dans la mesure du possible, la Cour tienne une audience à Belleville (Ontario).

Pour de plus amples renseignements, n'hésitez pas à communiquer avec moi.

La lettre mentionnée à l'alinéa A) est simplement une lettre de Revenu Canada à l'appelant informant ce dernier que la cotisation d'impôt sur le revenu pour 1995 établie à son égard a été ratifiée et que, s'il n'est pas d'accord sur la décision, il peut en appeler auprès de la Cour canadienne de l'impôt. L'avis de ratification mentionné à l'alinéa B) dit que la cotisation pour 1995 est ratifiée pour le motif suivant : « Vous n'étiez pas obligé de voyager pendant au moins 4 heures à l'extérieur de la municipalité dans laquelle était situé l'établissement de votre employeur où vous deviez vous présenter pour votre travail. Vous ne pouvez donc déduire 957 $ de votre revenu pour l'année en vertu de l'alinéa 8(1)g). » Les motifs dont il est question à l'alinéa C) sont les suivants :

[TRADUCTION]

J'exerce un emploi de chauffeur d'autobus scolaire pour la Laidlaws Transit Ltd., 3, McSteven Drive, Picton (Ontario), K0K 2T0. En 1995, mes fonctions m'obligeaient à voyager à l'extérieur de cet endroit, où je dois me présenter pour mon travail. Les affectations de base consistaient à effectuer un parcours scolaire le matin, le midi et l'après-midi. Mon employeur me chargeait souvent d'effectuer des parcours sous affrètement entre les affectations du matin, du midi et de l'après-midi et il me chargeait parfois d'effectuer de tels parcours le soir. Les jours où il n'y avait pas de parcours sous affrètement, je restais à Belleville (soit à 35 minutes de voiture de ma gare d'attache de Picton, où je dois me présenter pour mon travail) en disponibilité, c'est-à-dire que le radiorécepteur de l'autobus me permettait de répondre à tout appel d'urgence que pouvait faire mon employeur, ce qui arrivait souvent.

Journée typique :

7 heures Je me présente pour mon travail; je procède à l'inspection quotidienne de l'autobus, puis je fais partir le moteur et attends un certain temps qu'il se réchauffe, notamment l'hiver.

7 h 25 Je pars pour Belleville (Ontario), c'est-à-dire que, m'installant au volant de l'autobus de la compagnie, je quitte la gare d'attache.

8 heures J'arrive à Belleville.

8 h 10 J'entreprends le parcours scolaire du matin.

8 h 50 Fin du parcours scolaire du matin.

8 h 50 à 11 heures J'effectue des parcours sous affrètement s'il y en a de prévus à l'horaire. Sinon, je reste en disponibilité pour un parcours scolaire à effectuer vers des points situés au nord de la région de Stirling (Ontario).

11 h 25 Début du parcours scolaire du midi.

13 h 30 Je suis de retour à Belleville — l'heure varie légèrement selon les circonstances, c'est-à-dire selon qu'il manquait des étudiants ou non, selon le temps qu'il fait, etc.

13 h 30 à 15 h 15 J'effectue des parcours sous affrètement s'il y en a de prévus à l'horaire. Sinon, je reste en disponibilité à Belleville (sauf pour ce qui est de la pause que je fais pour le repas du midi).

15 h 15 J'arrive à l'école pour le parcours de l'après-midi.

15 h 30 Début du parcours scolaire de l'après-midi.

16 h 10 Fin du parcours scolaire de l'après-midi.

16 h 45 Je suis de retour à la gare d'attache, je vérifie si l'autobus doit être nettoyé, s'il faut faire le plein, etc.

17 heures Fin de mes fonctions (s'il n'y a pas de travail pour la soirée; s'il y en a, l'heure du retour est plus tardive).

Revenu Canada a refusé ma déduction, soutenant que j' « exécute un contrat » au sens de la circulaire 73-21R7, article 7 (p. 3 de la version anglaise).

Je renvoie à cette circulaire et au guide de 1995 Dépenses d'emploi.

1. Chapitre 5 du guide de 1995 Dépenses d'emploi (page 11 de la version anglaise) :

Je travaille pour une compagnie d'autobus.

Je voyage dans des véhicules que mon employeur utilise pour le transport de voyageurs.

Je suis régulièrement obligé de voyager à l'extérieur de la municipalité ou est située ma gare d'attache, soit Picton (Ontario).

J'engageais des frais pour mes repas pendant que j'étais ainsi absent de cette municipalité.

La version anglaise (deuxième colonne, dernier paragraphe de la page 11 se terminant à la page 12) indique que, dans les circonstances propres à ma situation, je peux déduire des frais pour un repas par jour.

Je soutiens que je réponds à toutes les conditions qui sont requises d'après le guide d'impôt de 1995 concernant les frais relatifs à un emploi.

2. Le guide de 1995 Dépenses d'emploi ne mentionne pas les termes « exécute un contrat » ou « établissement de l'employeur » .

3. Le guide de 1995 Dépenses d'emploi (page 11, colonne 2, paragraphe 3 de la version anglaise) dit que, si l'emploi ne consistait pas à transporter des voyageurs ou des marchandises, on peut déduire des frais en se reportant à la circulaire 73-21R7. Comme mon emploi consistait à transporter des voyageurs, je n'ai pas à me reporter à la circulaire 73-21R7.

4. Dans la circulaire 73-21R7 (page 3 de la version anglaise), le sous-alinéa 7c)(ii) indique qu'il y a changement de gare d'attache lorsque l'employé est affecté à une autre gare volontairement ou à sa demande, par exemple lorsqu'il prend des mesures pour changer d'endroit de travail. Je n'ai pris aucune mesure semblable. C'est mon employeur qui m'a demandé de faire ce travail. Aucun engagement contractuel ou permanent n'a jamais été pris par mon employeur ou par moi, et mon travail pouvait ainsi être modifié n'importe quand. L'arrangement conclu visait donc une période temporaire. C'est sur cette question que Revenu Canada se fonde pour refuser ma déduction. Je soutiens respectueusement que, pour les motifs énoncés précédemment, cette question ne s'applique pas à ma situation. Je dois me présenter pour mon travail à la gare de Picton de mon employeur. La Laidlaw Transit Ltd. n'a aucun bureau ou établissement à Belleville.

Motifs d'appel

5. Je soutiens que mon emploi consistant à transporter des voyageurs était en 1995 assujetti exactement aux mêmes conditions que dans le cas d'autres contribuables qui occupent des postes semblables et qui se voient accorder cette déduction. En n'admettant pas ma déduction, Revenu Canada peut à mon avis ne pas avoir appliqué la législation fiscale d'une manière juste et conforme à la déclaration des droits du contribuable.

6. Je soutiens que les termes « exécute un contrat » et « établissement de l'employeur » auraient dû, avec les conditions que j'ai énumérées au paragraphe 1, être mentionnés dans le guide de 1995 Dépenses d'emploi, avec renvoi à la circulaire 73-21R7. Une telle adjonction au guide aurait clairement indiqué à des contribuables comme moi de se reporter à ladite circulaire pour déterminer la pertinence des termes « exécute un contrat » et « établissement de l'employeur » . À mon humble avis, dans sa forme actuelle, la circulaire 73-21R7 infirme en fait l'information contenue dans le guide de 1995 Dépenses d'emploi, qui disait clairement que j'avais droit à la déduction que j'ai indiquée.

Compte tenu de toute l'information que j'ai présentée, je demande respectueusement à la Cour canadienne de l'impôt de m'accorder une audience.

[2] Le début de la réponse à l'avis d'appel et les paragraphes 1 à 10, inclusivement, se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

En réponse à l'avis d'appel pour l'année d'imposition 1995, qui a été déposé le 20 mai 1997, le sous-procureur général du Canada dit ceci :

A. ÉNONCÉ DES FAITS

1. Il admet les faits énoncés dans l'avis d'appel.

2. Il dit que la lettre de A. N. (Tony) Kelly en date du 15 mai 1997 et l'avis de ratification en date du 15 mai 1997 qui sont mentionnés dans l'avis d'appel et qui sont annexés à celui-ci parlent d'eux-mêmes.

3. Concernant le document de trois pages qui est mentionné dans l'avis d'appel, qui est annexé à celui-ci et dans lequel sont énoncés les motifs d'appel de l'appelant :

a) il admet les faits énoncés dans la première et la troisième phrases du premier paragraphe non numéroté de la première page et dans la première et la deuxième phrases du paragraphe 1 de la deuxième page dudit document;

b) il nie les faits allégués dans la deuxième phrase du premier paragraphe non numéroté de la première page, dans la troisième, la cinquième et la sixième phrases du paragraphe 1 de la deuxième page et au paragraphe 5 de la troisième page dudit document;

c) il ne sait rien au sujet de ce qui est dit dans le reste de ce document, il soutient que ce qui y est dit relève essentiellement d'une argumentation et il n'admet aucune allégation de fait formulée en passant dans le reste de ce document.

4. Par voie d'avis de cotisation en date du 18 mars 1996, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi une cotisation initiale d'impôt sur le revenu à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1995.

5. Dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1995, l'appelant avait déduit 957 $ au titre des autres frais relatifs à un emploi.

6. Par voie d'avis de nouvelle cotisation en date du 31 janvier 1997, le ministre a établi une nouvelle cotisation d'impôt sur le revenu à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1995, a refusé la déduction des autres frais relatifs à un emploi mentionnés au paragraphe 5 ci-dessus et a porté le revenu d'entreprise net de l'appelant de 0 à 2 168 $, soit un redressement qui n'est pas actuellement contesté par l'appelant.

7. L'appelant a signifié au ministre un avis d'opposition en date du 13 février 1997 concernant l'année d'imposition 1995.

8. Par voie d’avis de ratification en date du 15 mai 1997, le ministre a confirmé que la nouvelle cotisation indiquant qu'il refusait la déduction de 957 $ au titre d'autres frais liés à un emploi pour l'année d'imposition 1995 avait été établie conformément aux dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ).

9. Ratifiant ainsi la nouvelle cotisation d'impôt sur le revenu établie à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1995, le ministre se fondait sur les hypothèses de fait suivantes :

a) dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1995, l'appelant a déduit des frais relatifs à un emploi en tant qu'employé d'une compagnie de transport, soit des frais de repas de 957 $, calculés comme il est indiqué à l'annexe « A » ;

b) durant l'année d'imposition 1995, l'appelant exerçait un emploi de chauffeur d'autobus scolaire pour la Laidlaw Transit Ltd. (l' « employeur » );

c) durant l'année d'imposition 1995, la principale activité d'entreprise de l'employeur était le transport de voyageurs et de marchandises;

d) durant l'année d'imposition 1995, le lieu d'affaires de l'employeur était situé à Picton (Ontario);

e) durant l'année d'imposition 1995, l'employeur avait un contrat avec le conseil de l'éducation du comté de Hastings (le « Conseil » );

f) le contrat visé à l'alinéa 9d) ci-dessus (le « contrat ) consistait à assurer des services quotidiens de transport par autobus à des étudiants de la région de Belleville, soit des étudiants relevant du Conseil, c'est-à-dire à conduire ces étudiants à l'école le matin et à passer les prendre l'après-midi, et à conduire des étudiants à Stirling le midi;

g) durant l'année d'imposition 1995, les fonctions de l'emploi de l'appelant consistaient à exécuter le contrat en se servant de l'autobus scolaire de l'employeur (le « véhicule » );

h) durant l'année d'imposition 1995 et relativement à l'appelant, l'établissement de l'employeur au sens du sous-alinéa 8(1)g)(i) de la Loi était l'endroit où l'employeur exécutait le contrat, donc la municipalité et la région métropolitaine de Belleville;

i) durant l'année d'imposition 1995, la gare d'attache de l'appelant était l'endroit où l'appelant devait se présenter pour son travail, donc la municipalité et la région métropolitaine de Belleville;

j) durant l'année d'imposition 1995, l'appelant retournait chaque soir chez lui, à Hillier (Ontario), en utilisant le véhicule de l'employeur, et le véhicule restait garé chez l'appelant durant la nuit;

k) les frais relatifs aux déplacements effectués pour se rendre au travail et en revenir sont des frais personnels ou de subsistance de l'appelant;

l) durant l'année d'imposition 1995, les fonctions de l'emploi que l'appelant exerçait pour l'employeur ne l'obligeaient pas régulièrement à voyager, pendant au moins quatre heures quotidiennement, à l'extérieur de la municipalité et de la région métropolitaine où était située la gare d'attache de l'appelant;

m) durant l'année d'imposition 1995, l'appelant n'a pas, pendant qu'il était ainsi absent de la municipalité et de la région métropolitaine de Belleville, engagé des frais pour ses repas relativement aux fonctions de l'emploi qu'il exerçait pour l'employeur;

n) les sommes indiquées au titre des autres frais relatifs à un emploi en tant qu'employé d'une entreprise de transport pour l'année d'imposition 1995 étaient des frais personnels ou de subsistance de l'appelant;

o) l'appelant ne pouvait, dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1995, déduire des frais relatifs à un emploi en tant qu'employé d'une entreprise de transport.

B. QUESTION À TRANCHER

10. La question est de savoir si l'appelant peut, dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1995, déduire des frais relatifs à un emploi en vertu de l'alinéa 8(1)g) de la Loi.

ANNEXE « A »

Calcul des frais relatifs à un emploi

indiqués par l'appelant

pour l'année d'imposition 1995

Frais pour repas

Mode de calcul utilisé : Méthode simplifiée

Coût uniforme accepté par le ministre 11 $ par repas

Nombre de jours/voyages 174

Coût uniforme total 1 914 $

Partie assujettie à une limitation 50 %*

Montant déduit 957 $

[3] C'est à l'appelant qu'incombe la charge de démontrer que la nouvelle cotisation est erronée. Cela peut être établi selon la prépondérance des probabilités. La question de savoir à qui incombe la charge de la preuve a été réglée par de nombreux jugements qui font jurisprudence et par lesquels notre cour est liée. Qu'il suffise de mentionner deux arrêts de la Cour suprême du Canada à cet égard : Anderson Logging Co. v. The King, [1925] S.C.R. 45, et Johnston v. M.N.R., [1948] S.C.R. 486.

[4] Au procès, l'appelant a déposé trois documents en preuve, soit : la circulaire d'information 73-21R7 de Revenu Canada en date du 8 mars 1991, dont il souligne le paragraphe 7; une lettre de Revenu Canada à l'appelant en date du 29 avril 1997 traitant d'une manière assez détaillée de la position de l'appelant, laquelle lettre renferme le paragraphe suivant :

[TRADUCTION]

Un avis de ratification sera recommandé concernant la nouvelle cotisation pour 1995 en date du 31 janvier 1997 vous refusant une déduction de frais de repas en vertu des dispositions de l'alinéa 18(1)g) de la Loi de l'impôt sur le revenu, dans l'attente de votre réponse encerclée ci-dessous.

L'appelant avait encerclé un mot indiquant qu'il n'était pas d'accord sur la décision mentionnée dans la lettre; enfin, une publication de l'Ontario School Bus Association intitulée « SCHOOL PURPOSE VEHICLE DRIVER'S DAILY INSPECTION LOG BOOK » comme l'exige le règlement 612 du Code de la route de l'Ontario. Il y est dit au début : « Période visée : du 1er septembre 1997 au 30 juin 1998 » .

[5] L'alinéa 8(1)g) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) dispose ceci :

8. (1) Sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant :

[...]

g) lorsque le contribuable a été employé par une personne dont la principale activité d'entreprise était le transport de voyageurs, de marchandises, ou de voyageurs et marchandises et que les fonctions de son emploi l'obligeaient régulièrement :

(i) d'une part, à voyager à l'extérieur de la municipalité dans laquelle était situé l'établissement de son employeur où il devait se présenter pour son travail, et, le cas échéant, hors de la région métropolitaine où était situé cet établissement, dans des véhicules utilisés par l'employeur pour transporter les voyageurs ou marchandises,

(ii) d'autre part, pendant qu'il était ainsi absent de cette municipalité et région métropolitaine, à engager des frais pour ses repas et son logement,

les sommes qu'il a ainsi déboursées au cours de l'année, dans la mesure où il n'a pas le droit d'être remboursé à cet égard;

[6] L'appelant allègue qu'il devait se présenter pour son travail à Picton et que c'est là qu'est située sa gare d'attache. La thèse de l'avocate de l'intimée est que l' établissement de l'employeur au sens du sous-alinéa 8(1)g)(i) est dans la municipalité et région métropolitaine de Belleville et que, pour 1995, la gare d'attache de l'appelant était dans ce territoire. J'estime que l'ensemble de la preuve établit qu'il en est ainsi. Donc, non seulement l'appelant n'a pas réussi à s'acquitter de la charge de la preuve mentionnée précédemment, mais la preuve établit indéniablement que la nouvelle cotisation portée en appel est fondée.

[7] Je tiens à citer deux décisions qui ont été publiées. Dans Nelson v. M.N.R., 81 DTC 190, soit une décision de la Commission de révision de l'impôt, l'honorable L. G. Cardin, président de la Commission, disait ceci à la page 192 au sujet des termes « lieu même de l'entreprise de son employeur » figurant alors au sous-alinéa 8(1)h)(i) de la Loi :

Je pense également que pour dégager le sens exact de l'expression "lieu même de l'entreprise de son employeur", il faut, comme l'a suggéré le savant juge, lire le sous-alinéa 8(1)h)(i) en corrélation avec le paragraphe 8(4) de la Loi. Compte tenu du paragraphe 3(1) de la Loi d'interprétation, S.R.C. 1970, chap. I-23, il semble tout à fait vraisemblable de considérer que le "lieu même de l'entreprise de son employeur", au sens du sous-alinéa 8(1)h)(i) de la Loi, ne signifie pas nécessairement le siège social ou l'un des bureaux de l'employeur, mais précisément le lieu de l'entreprise pour lequel le contribuable a été engagé, auquel il a été affecté et où il s'acquitte habituellement de ses fonctions. En d'autres termes, l'expression "lieu même de l'entreprise de son employeur" doit, selon moi, être interprétée par rapport au contribuable.

Dans l'affaire Derrien v. M.N.R., 80 DTC 1951, M. J. Bonner, membre de la Commission, disait à la page 17531 :

Selon moi, la solution ressort d'elle-même lorsque l'alinéa 8(1)g) est lu à la lumière des autres dispositions. Dans la Loi de l'impôt sur le revenu,les déductions du traitement ou du salaire dans le calcul du revenu provenant d'une charge ou d'un emploi sont envisagées, en général, de façon restrictive. À cet égard, il faut se reporter au paragraphe 8(2) de la Loi. Il ne faudrait pas penser que les exceptions prévues au paragraphe 8(1) sont arbitraires. L'exception prévue pour les employés des entreprises de transport à l'alinéa 8(1)g) reconnaît que la nature du travail oblige souvent les employés à s'éloigner beaucoup de la région où ils vivent et se présentent pour travailler. Ces voyages imposent des frais pour les repas et le logement que ne supporte pas le travailleur ordinaire qui, la plupart du temps du moins, peut dormir et manger chez lui. La réserve apportée par l'expression "pendant qu'il était ainsi absent" et l'emploi du terme "et" dans l'expression "frais pour ses repas et son logement" tendent à appuyer cette conclusion. Pour le travailleur ordinaire, les frais de nourriture et de logement sont des dépenses personnelles. Pour un employé d'une entreprise de transport, ces frais, qu'il doit engager dans le cours de ses fonctions, sont reliés beaucoup plus directement au gain du revenu.

Il est facile de constater, si l'alinéa 8(1)g) est lu dans son contexte, que certaines des définitions du dictionnaire du terme "voyager", comme "aller d'un endroit à l'autre", ne conviennent pas. Lorsque l'alinéa 8(1)g) parle de voyager à l'extérieur d'une municipalité et de sa région métropolitaine, il prévoit des déplacements sur des distances assez éloignées et de durée assez longue pour que l'intéressé soit obligé d'engager des frais pour ses repas et son logement. Il ne porte pas sur les cas où le contribuable va d'un endroit, à l'intérieur de la région métropolitaine, à un autre, à l'extérieur, mais tout près. [L'italique est de moi.]

En l'espèce, l'appelant a limité sa demande aux frais de repas. Il n'est pas nécessaire de juger si ses voyages l'ont amené à l'extérieur des limites de la région métropolitaine où est située l'île Sea. Il est impossible d'alléguer que les voyages étaient effectués à l'extérieur de la région métropolitaine au sens de l'alinéa 8(1)g). L'appel est donc rejeté.

Les propos en italiques sont réitérés dans les jugements Kraushar v. M.N.R., 86 DTC 1210 (C.C.I.), et MacDonald v. The Queen, [1995] A.C.I. no 1084 (C.C.I.).

[8] L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de janvier 1998.

« D. H. Christie »

J.C.A.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 26e jour de mai 1998.

Benoît Charron, réviseur



1 Concernant ce qui est dit dans l'affaire Derrien, il faut garder à l'esprit que la déduction de 957 $ demandée par l'appelant ne se rapporte qu'à des repas.

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