Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19981201

Dossier: 97-2289-IT-G

ENTRE :

IAN JONES,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bonner, C.C.I.

[1] Il s'agit de l'appel d'une cotisation d'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1995 de l'appelant. La cotisation a été basée sur le motif que l'article 79 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) exigeait qu'un montant de 1 343 384 $ soit inclus dans son revenu à titre de produit réputé de disposition d'une parcelle de terrain à Milton (Ontario).

[2] L'appelant est un promoteur immobilier. Le terrain en question a été acquis en 1990 par la société 731418 Ontario Inc. (la « société 731418 » ). Il y a eu entente sur le fait que la société 731418 agissait pendant toute la période pertinente à titre de fiduciaire de l'appelant.

[3] L'appelant a acquis le terrain pour y construire des appartements condominiaux aux fins de revente. Afin de financer l'achat et certaines activités de lotissement, la société 731418 a emprunté 2 400 000 $ de la Confederation Trust Company (la « CTC » ) en donnant en garantie une première hypothèque sur le terrain. La Mortgage Insurance Company of Canada (la « MICC » ) a assuré le prêt en vertu d'une police achetée aux frais de l'appelant. L'appelant a signé l'hypothèque à titre de garant[1].

[4] En 1992 il y a eu défaut de rembourser le prêt. En 1993 la compagnie d'assurance, la MICC, a déboursé environ 2 400 000 $ à la CTC, ce qui représentait la dette totale. La CTC a par la suite cédé l'hypothèque à la MICC. L'acte de cession se lit en partie comme suit :

PAR LA PRÉSENTE, LA CÉDANTE CÈDE ET TRANSPORTE À LA CESSIONNAIRE les intérêts de la cédante à titre de créancière hypothécaire en vertu de l'hypothèque précitée ainsi que les sommes qui pourraient être exigibles par la suite en rapport avec ladite hypothèque, la charge sur le terrain décrit aux présentes et le plein bénéfice de tous les pouvoirs et tous les engagements pris dans ladite hypothèque et également le plein pouvoir et l'autorité d'utiliser le nom ou les noms de la cédante pour faire respecter les engagements, et n'importe quoi d'autre, contenus dans ladite hypothèque.

[5] En 1995 un règlement a été négocié entre la MICC, sa filiale, la société 1108128 Ontario Ltd. (la « société 1108128 » ), la société 731418, l'appelant et une autre société qui s'était jointe à l'appelant à titre de garant de l'hypothèque. En vertu du règlement, la MICC a libéré la société 731418 et les garants (y compris l'appelant) de toutes ses obligations découlant de l'hypothèque. En échange, la société 731418 a transféré à la société 1108128 son droit de rachat du terrain.

[6] La cotisation en appel a été basée sur le motif que l'article 79 de la Loi exigeait l'inclusion dans le revenu de l'appelant pour l'année d'imposition 1995 d'un produit réputé de disposition calculé tel qu'indiqué à l'article 79. Ce n'était pas le montant de l'inclusion qui était remis en question, mais plutôt la question suivante : est-ce qu'à la suite du règlement le bien avait été « acquis par délaissement » par l'appelant à titre de « débiteur » en vertu du paragraphe 79(3) de la Loi à un « créancier » au sens de ce paragraphe?

[7] L'article 79 s'applique lorsqu'un créancier acquiert, par délaissement, un bien d'une personne. L'introduction du paragraphe 79(3) se lit comme suit :

Lorsqu'un créancier acquiert, par délaissement, un bien donné d'une personne (appelée « débiteur » au présent paragraphe) à un moment quelconque, le produit de disposition du bien donné pour le débiteur est réputé correspondre au résultat du calcul suivant : (A+B+C+D+E-F)x G/H [...]

Le mot « créancier » est défini au paragraphe 79(1) comme suit :

« créancier » Comprend une personne envers laquelle une personne donnée a l'obligation de payer un montant en vertu d'une hypothèque ou d'un droit semblable.

La signification d' « acquisition par délaissement » se trouve au paragraphe 79(2) et se lit comme suit :

Pour l'application du présent article, une personne acquiert, par délaissement, un bien d'une autre personne à un moment donné lorsqu'elle acquiert ou acquiert de nouveau de l'autre personne, à ce moment, la propriété effective du bien par suite du défaut de l'autre personne de payer tout ou partie d'un ou plusieurs montants déterminés d'une dette qu'avait envers elle l'autre personne immédiatement avant ce moment.

L'appelant adoptait la position selon laquelle la MICC avait remboursé à la CTC le plein montant du prêt, soit 2 400 000 $, et qu'aucune dette n'aurait pu, par conséquent, faire l'objet d'une renonciation. Les primes d'assurance (ainsi que d'autres contreparties) avaient été payées à la MICC afin d'assurer le remboursement total du capital du prêt en cas de défaut. Le capital a été remboursé et il ne restait aucune dette qui aurait pu faire l'objet d'une renonciation. En fait, l'argument de l'appelant est relié à l'exigence prévue dans le paragraphe 79(2) qu'une personne ait acquis d'une autre personne la propriété effective d'un bien par suite du défaut de l'autre personne de payer sa dette envers la personne qui a acquis la propriété effective du bien.

[8] À mon point de vue, l'acquisition de la propriété effective par la MICC satisfait à l'exigence du paragraphe 79(2). Il n'existe aucun doute que le droit de rachat qu'un débiteur hypothécaire détient à la suite du transfert d'un titre de propriété sur un immeuble comme garantie de paiement d'une dette hypothécaire constitue la « propriété effective du bien » au sens du paragraphe 79(2). De plus, il est clair que l'acquisition résultait du défaut de l'appelant de payer la dette hypothécaire. L'appelant n'a pas tenu compte dans son argumentation du fait que la CTC avait cédé à la MICC non seulement le titre de propriété qui avait été transféré à la CTC à titre de garantie de remboursement de la dette hypothécaire, mais également la dette hypothécaire elle-même. En dépit du fait que l'appelant avait payé la prime pour la police de la MICC, il est évident que l'assuré était la CTC et non l'appelant. Par son paiement à la CTC, la MICC n'a pas acquitté la dette; il s'agit simplement d'une substitution de la MICC à la CTC à titre de créancière. En conséquence, le règlement entre l'appelant et la MICC a amené l'acquisition, par délaissement, du bien de l'appelant par sa créancière, la MICC, au sens du paragraphe 79(3). Pour les raisons susdites, l'appel sera rejeté avec frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de décembre 1998.

« Michael J. Bonner »

J.C.C.I

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 16e jour de juin 1999.

Stephen Balogh, réviseur



[1] La société 731418 a toujours agi à titre de simple fiduciaire ou de mandataire de l'appelant. Par conséquent, il est difficile d'imaginer que l'appelant n'était pas principalement redevable, mais la question n'a pas été examinée.

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