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Date: 20000519

Dossier: 98-1306-IT-G

ENTRE :

PAUL TINDALL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Margeson, C.C.I.

[1] Dans le calcul de son revenu pour les années d'imposition 1992 et 1993, l'appelant a déduit les montants de 356 900 $ et de 465 290 $ respectivement qu'il a indiqués, dans sa déclaration de revenus, comme des dépenses d'entreprise à la rubrique “ Frais de gestion et d'administration ”. En établissant une nouvelle cotisation pour l'appelant pour les années d'imposition 1992 et 1993, le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a refusé d'admettre les montants déclarés et a également imposé des pénalités pour production tardive de 6 359,94 $ et 26 278,73 $ pour les années d'imposition 1992 et 1993 respectivement en vertu du paragraphe 162(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”).

[2] L'appelant a interjeté appel à l'encontre de ces cotisations en se basant sur le fait que les dépenses étaient déductibles et que les pénalités n'auraient pas dû être imposées.

[3] Les pièces A-1 et A-2 ont été produites de consentement, sauf l'onglet 8 de la pièce A-1 qui ne devait pas être pris en compte. La Cour devait déterminer la valeur probante de tous les documents.

[4] Clifford Paul Tindall était conseiller en gestion et pilote. Il a interjeté appel à l'encontre des cotisations pour les années d'imposition 1992 et 1993. Il a identifié l'onglet 7 de la pièce A-1 comme étant sa déclaration de revenus T1 générale pour 1992 telle qu'il l'a produite. Il a identifié l’état de revenus se trouvant dans la même pièce et a indiqué qu'il avait déclaré des dépenses totalisant 711 833,04 $. La somme de 356 900 $ figurait parmi ces dépenses à titre de frais de gestion et d'administration. En l'espèce, c'est ce montant qui était en litige.

[5] Au cours de l'année 1992, il était conseiller financier participant à la commercialisation, auprès de clients potentiels et de clients existants, de fonds mutuels et d'actions. Il participait également à des investissements immobiliers. Il faisait de la commercialisation auprès des clients grâce à des colloques, des réunions et des comptes rendus trimestriels. Les colloques qu'il organisait attiraient la plupart de ses investisseurs. En ce qui concerne la portion immobilière de son entreprise, elle comportait principalement la vente d'unités dans ces projets à des investisseurs.

[6] Il a déclaré que Tim Clark décidait de la structure des investissements et présentait ces derniers à ses clients. En d'autres termes, il tentait de convaincre les gens d'investir par l'entremise de l'appelant.

[7] L'appelant a entendu parler de Tim Clark dans un article qu'il a lu. Il a alors pensé qu'il serait opportun de demander à ce dernier de l'assister dans le cadre de la vente de ses projets immobiliers. Il a déclaré : “ Nous étions dans l'ensemble des partenaires. Nous nous entendions bien. ” Il a versé à Tim Clark les frais en litige. Ce dernier l'aidait également à vendre en le rencontrant avec ses clients.

[8] Il a renvoyé à une facture paraissant à l'onglet 2 de la pièce A-1. C'était une facture établie par la société de Tim Clark. La somme s'élevait à 280 000 $US ou 356 900 $CAN. Tim Clark a déclaré à l'appelant qu'il fournissait ses services par l'entremise de cette société. L'appelant a été renvoyé à une société dont la raison sociale est Mountainside Cypress Hills I Investments, Inc. à laquelle il est fait mention à l'onglet 3 de la pièce A-1. Il a reconnu le nom de l'avocat. Tim Clark était administrateur de cette société.

[9] Les frais avaient rapport aux investissements vendus par l'appelant à ses clients canadiens. Ces services lui ont été fournis personnellement. Il a déclaré : “ Tindall Group Inc. était mon fiduciaire et le nom était utilisé pour distinguer mes fonctions comptables. ”

[10] Il a renvoyé à l'onglet 4 de la pièce A-1 et a déclaré qu'il avait payé ces montants. Il a identifié le billet à ordre paraissant à l'onglet 5 et a déclaré que cela représentait un paiement versé à Zeitec Financial Corp. pour Tim Clark. Ce dernier lui avait dit de régler cette facture. Il était personnellement responsable du règlement de cette facture. S'il n'avait pas réglé cette dernière, Tim Clark l'aurait poursuivi en justice. Tim Clark sait que ce montant a été réglé.

[11] La même question se pose en ce qui concerne l'année d'imposition 1993. Il a identifié sa déclaration de revenus pour l'année 1993 telle qu'elle paraît à l'onglet 1 de la pièce A-1. Le montant des frais de gestion et d'administration pour cette année-là s'élevait à 465 290 $. Ce montant avait été dépensé relativement à ses services financiers et son entreprise immobilière au cours de l'année en question. Encore une fois, il a déclaré que Tim Clark l'avait assisté dans la réalisation des ventes. La somme représentait des frais versés à Tim Clark pour services rendus.

[12] Il lui a été demandé comment ces montants avaient été calculés et il a déclaré qu'ils étaient fonction de la taille de l'investissement. Ils représentaient un pourcentage du projet que Tim Clark l'avait aidé à vendre. S'il n'avait pas utilisé les services de Tim Clark, il n'aurait pas été en mesure de commercialiser ses services et les résultats atteints n'auraient pas été de la même ampleur.

[13] L'onglet 9 de la pièce A-1 était un chèque certifié d'un montant de 465 290 $ pour les frais en question à verser à Tim Clark. Ledit chèque était libellé au nom de l'une des sociétés de Tim Clark, Meadows Resources Limited. Le témoin a déclaré qu'il avait payé ces frais par l'entremise de Tindall Group Inc. Il a admis que Tindall Group Inc. n'avait réalisé aucune vente. Ce montant était versé par lui-même et il avait simplement utilisé ce compte pour payer les frais.

[14] Il a identifié le document paraissant à l'onglet 11 de la pièce A-1 comme étant le résultat d'une recherche de dénomination sociale. Cette dernière a révélé que Timothy Clark était un administrateur de la société.

[15] À l'onglet 12 de la même pièce paraissait son relevé bancaire indiquant le dépôt de la somme de 465 290 $ par chèque certifié dans le compte de Tindall Group Inc.

[16] Encore une fois, il a déclaré que les montants versés en 1992 et 1993 l'avaient été pour des services lui ayant été fournis par Tim Clark pour l'aider à développer son entreprise. S'il n'avait pas obtenu ces services, il n'aurait pas pu produire les revenus déclarés dans ses déclarations de revenus.

[17] Lors du contre-interrogatoire, il a déclaré que son entreprise offrait des conseils fiscaux et de planification à ses clients. Il était également inscrit auprès de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario pour la vente d’investissements. Plus de 100 millions de dollars en investissements lui ont été confiés. Il était également l'un des meilleurs vendeurs selon les dires du rapport de Fortune Financial Corporation. Il a admis qu'au cours de l'année 1992, il avait un revenu d’entreprise brut.

[18] Il a identifié le document paraissant à l'onglet 5 de la pièce R-1 indiquant un revenu de 711 833,04 $. Il a également identifié les états financiers de son entreprise. Il a indiqué dans ces états qu'il avait payé des frais de gestion et d'administration de 356 900 $ qui représentaient approximativement 50 p. 100 du revenu brut pour l'année 1992. Le document indiquait des dépenses totales de 859 602,83 $. Il a admis qu'il avait déclaré des frais de gestion et d'administration pour l'année 1993 qui représentaient environ les deux tiers de son revenu brut.

[19] Tim Clark lui avait indiqué à quelle société verser les frais de gestion et d'administration. Il lui avait indiqué où effectuer les paiements et ces derniers étaient dirigés vers des sociétés dont il avait le contrôle.

[20] Il n'était pas courant de faire payer une partie des dépenses par les investisseurs. Certains frais sont payés par les clients mais ces dépenses n'en font pas partie.

[21] Pour étayer ses demandes, il a produit la facture paraissant à l'onglet 2 de la pièce R-1 qui était une facture établie par Mountainside Cypress Hills I Investments, Inc. Il a également identifié la lettre paraissant à l'onglet 3 et le billet à ordre à l'onglet 4. Il était tenu de payer la dette. Il n'a utilisé Tindall Group Inc. que pour “ séparer les comptes ”.

[22] Il n'a pas réglé le billet à ordre en 1992 et il ne dispose d'aucune preuve du contraire. Il a produit le chèque paraissant à l'onglet 9 de la pièce A-1 pour étayer sa demande de déduction. À l'onglet 10 se trouve l'avis de débit du compte bancaire s'élevant au même montant. L'onglet 12 renvoie au compte de Tindall Group Inc. à La Banque Toronto-Dominion indiquant un dépôt de 465 290 $ et il a déclaré avoir déposé ce montant dans le compte mais ne dispose d'aucun document le mentionnant.

[23] Il a identifié le document paraissant à l'onglet 6 de la pièce R-1 comme étant une demande de renseignements émanant de Revenu Canada. En outre, le document paraissant à l'onglet 8 de la pièce R-1 est une nouvelle demande de renseignements. Il n'a pas répondu à la première demande effectuée par l'entremise de cette lettre. Il a déclaré : “ Je pensais que nous y avions répondu après. ”

[24] L'avocate de l'intimée a suggéré à l'appelant qu'aucun renseignement concernant le fait que Tindall Group Inc. était un simple fiduciaire n'avait été fourni avant les deux semaines précédant le procès. L'appelant a répondu qu'il ne pensait pas que l'une des demandes de renseignements concernait Tindall Group Inc. et son statut de simple fiduciaire. Il a reconnu que ni l'avis d'appel, ni l'avis d'appel modifié ne contenait quoi que ce soit à ce sujet.

[25] Il a de nouveau été renvoyé à l'onglet 5 de la pièce R-1 où se trouve la déclaration de revenus pour 1992. Il lui a été demandé si Tindall Group Inc. était mentionné dans cette dernière, y compris les états financiers. Il a répondu qu'aucune mention n'en était faite. Il a de nouveau identifié la déclaration de revenus pour 1993 paraissant à l'onglet 1 de la pièce R-1 et a encore une fois confirmé qu'elle ne contenait aucune mention de cette société.

[26] En réponse à la question de la Cour, il a déclaré qu'il n'avait pas produit de preuve supplémentaire concernant les paiements sauf qu'il avait réglé la facture en question. Il a reconnu que la tenue de ses livres comptables manquait de rigueur malgré l'aide d'un comptable.

Arguments de l'appelant

[27] L'avocat a déclaré que la seule question en l'espèce était celle de la preuve du paiement et, qu'en la matière, nous possédons la preuve, fournie par le contribuable, qui était acceptable et qui devrait être suffisante pour le décharger du fardeau en l'espèce. Il a fait référence à l'affaire Hickman Motors Limited c. La Reine, [1997] 2 R.C.S. 336 (97 DTC 5363) pour étayer sa thèse selon laquelle l'appelant avait produit des éléments de preuve probants pour réfuter les hypothèses du ministre. Le simple fait que la preuve documentaire n'ait pas été disponible ne signifie pas qu'il n'a pas été démontré que la dépense a été effectuée. Le ministre n'a rien fait pour démolir la crédibilité de ce témoin. Il fut un temps au cours de cette affaire où personne n'était en mesure de trouver quelque document que ce soit.

[28] L'avocat a plaidé que trop d'importance a été accordée au mouvement de fonds. M. Tindall avait des revenus importants et a droit aux déductions qu'il demande. Sans l'expertise de Tim Clark, l'appelant n'aurait pas amassé les mêmes revenus. L'avocat n'était pas d'avis que le billet à ordre était très important. La dette était payable et est, en fin de compte, déductible dans l'année au cours de laquelle elle est déclarée puisque l'appelant réalisait sa comptabilité sur la base de la méthode de la comptabilité d'exercice.

[29] L'avocat a plaidé que l'appelant avait effectué les paiements, qu'il a déclaré les dépenses, que son revenu était important, qu'il avait l'obligation de payer les montants en question et les a effectivement payés. L'intimée n'a produit aucune preuve démontrant que l'appelant n'était pas un témoin sincère.

[30] L'appel devrait être admis avec dépens.

Arguments de l'intimée

[31] L'avocate de l'intimée a indiqué qu'au départ trois questions étaient en litige mais que la seule question devant la Cour aujourd'hui était celle de la déductibilité des frais d'administration. Les deux premières questions ont fait l'objet d'une renonciation.

[32] L'avis d'appel a été déposé en mai 1998 et les avocats de l'appelant ont disposé du temps nécessaire pour recueillir toute la documentation.

[33] La société est une entité distincte de la personne en question. L'ensemble des documents produits indiquait que toutes les factures ont été adressées à Tindall Group Inc. Rien n'indiquait l'objet du billet à ordre. L'appelant n'a déclaré un revenu que pour Paul Tindall et non pour Tindall Group Inc. Il ne lui suffit pas de déclarer qu'en fin de compte la compagnie n'était qu'un simple fiduciaire de l'appelant. Les déclarations de l'appelant ont été déposées en juillet 1993 et en juillet 1994 et la demande de renseignements supplémentaires a été effectuée par le ministre en avril 1996. À cette époque, l'appelant a déclaré qu'à sa connaissance, personne ne disposait d'aucun document. Cependant, ils auraient dû être disponibles.

[34] L'appelant n'a produit aucune preuve indiquant à quoi se rapportait la dette. La facture était émise pour une somme globale et n'indiquait pas la période qu'elle couvrait. En tout état de cause, le paiement émanait du compte d'une société et non de celui de l'appelant. En outre, aucune preuve n'a été produite concernant le transfert des fonds. Pourquoi a-t-il utilisé le compte bancaire de la société? Les hypothèses du ministre n'ont pas été réfutées.

[35] Il ne devrait pas être permis à l'appelant de déduire les montants en question et l'appel devrait être rejeté avec dépens.

Analyse et décision

[36] Lorsqu'il a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant dans laquelle il rejetait les dépenses que l'appelant avait déclarées, le ministre s'est fondé sur l'hypothèse, ainsi formulée, à l'alinéa 8(d) de la réponse :

[TRADUCTION]

ces frais de gestion et d'administration n'ont pas été engagés, ou s'ils l'ont été, ils ne l'ont pas été en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

À la lumière de cette hypothèse, il incombe à l'appelant d'établir, selon la prépondérance des probabilités concernant les preuves acceptées par la Cour, que les montants prétendument dépensés l'ont effectivement été et que lesdits montants dépensés l'ont été en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien.

[37] Le paragraphe 230(1) de la Loi énonce que :

Quiconque exploite une entreprise et quiconque est obligé, par ou selon la présente loi, de payer ou de percevoir des impôts ou autres montants doit tenir des registres et des livres de comptes (y compris un inventaire annuel, en la manière prescrite) à son lieu d'affaires ou de résidence au Canada ou à tout autre lieu que le Ministre peut désigner, dans la forme et renfermant les renseignements qui permettent d'établir le montant des impôts payables en vertu de la présente loi, ou des impôts ou autres sommes qui auraient dû être déduites, retenues ou perçues.

Il est évident, malgré le libellé très informel de ce paragraphe, qu'il incombe à l'appelant de conserver les livres et les registres nécessaires qui permettront au ministre de déterminer, en l’espèce, si les montants déclarés ont effectivement été dépensés et s'ils l'ont été aux fins alléguées qui permettraient à l'appelant d'effectuer la déduction pour les années en question.

[38] C'est sans doute parce que le paragraphe cité ci-dessus et l'obligation qu'il impose à tout contribuable sont tellement fondamentaux pour le fonctionnement de la Loi que cette obligation va sans dire et qu'aucun des avocats des parties n'a, dans son exposé ou dans ses arguments, renvoyé à ce paragraphe. Cependant, l'obligation imposée à chaque contribuable par ce paragraphe consiste à conserver des registres suffisants pour permettre au ministre de déterminer, quelle que soit l'affaire, l'étendue du revenu du contribuable et de déterminer si la déduction qui est demandée est une déduction permise par la Loi. En fin de compte, le paragraphe établit un moyen, pour l'appelant, de s'acquitter de son obligation de prouver que la cotisation est incorrecte et que la déduction demandée est permise par la loi. Ce paragraphe s'applique non seulement aux personnes morales mais également aux particuliers comme l'appelant.

[39] Il est clair, d'après la preuve produite en l'espèce, que l'appelant recevait des conseils d'un comptable et, en réponse à des questions posées par la Cour à l'appelant, il ne fait aucun doute que celui-ci était conscient de cette exigence. L'avocat de l'appelant, dans ses arguments, l'a déclaré sans ambiguïté lorsqu'il a souligné que son client utilisait la méthode de la comptabilité d'exercice. En outre, il ne fait également aucun doute que l'appelant était conscient des lacunes dans la tenue des livres et dans les registres comptables de son entreprise, qu'elles soient connexes à ces questions particulières ou au fonctionnement de son entreprise en général.

[40] Les montants en cause dans les années en question représentaient des sommes importantes. Il est pratiquement impossible d'imaginer qu'une entreprise engageant des dépenses et produisant des revenus de cette ampleur, selon les prétentions de l'appelant, aurait pu être exploitée sans que l'appelant soit en mesure de fournir une preuve documentaire des montants dépensés mais également des dates des dépenses, de l'objet de ces dépenses ainsi que de la justification des dépenses pour qu'en fin de compte le ministre ne soit pas obligé de deviner, à la lumière de l'ensemble des facteurs présents, si les montants que l'appelant visait à déduire étaient corrects.

[41] Au moment de l'établissement de la cotisation dans cette affaire, il est évident que c'est la situation dans laquelle le ministre se serait retrouvé. Cela paraît clairement dans la lettre envoyée à l'appelant par Revenu Canada le 30 avril 1996 dans laquelle le ministre pose des questions précises et particulières concernant les “ frais de gestion et d'administration ” lorsqu'il examinait les déclarations de revenus de l'appelant pour les années 1992, 1993 et 1994. Aucune réponse convenable n'a été donnée à cette lettre et, le 26 novembre 1996, Revenu Canada a écrit à l'appelant une nouvelle fois concernant les frais de gestion et d'administration et a indiqué que l'appelant n'avait pas fourni les détails suffisants concernant les prétendues déductions. À cause de son défaut de répondre à la demande de renseignements, le Ministère a indiqué qu'il n'allait pas admettre la déduction des montants en cause.

[42] Dans cette lettre, le Ministère a renvoyé spécifiquement au fait que l'appelant n'avait produit aucun renseignement concernant le paiement versé par Paul Tindall à Tindall Group Inc. pour que cette société effectue le paiement au nom de M. Tindall et que l'appelant n'avait produit aucune autre preuve pour étayer la position selon laquelle les paiements avaient effectivement été réalisés.

[43] La Cour est convaincue que le ministre était en droit de recevoir les renseignements qu'il cherchait à obtenir et, qu'en l'absence de ces renseignements, le ministre a eu raison, à cette époque, d'établir cette cotisation.

[44] Malgré le fait que l'appelant n'ait pas fourni les renseignements nécessaires au ministre lorsque la demande lui en a été faite, il pouvait encore obtenir gain de cause au moment du procès en produisant des éléments de preuve probants démontrant que les paiements avaient été effectués et ce qu'ils représentaient. De fait, le seul espoir de l'appelant d'obtenir les déductions était de répondre à ces deux questions en litige.

[45] Les seuls éléments de preuve présentés à ce procès proviennent de l'appelant lui-même. Essentiellement, l'appelant indiquait que les montants dont il demandait la déduction avaient effectivement été versés en tant que frais de gestion et d'administration. Selon la preuve fournie par l'appelant, ces montants avaient été versés à un certain Tim Clark en tant que frais pour des “ services d'expert-conseil ”. Le même libellé est utilisé dans la facture pour ces frais présentée par la société dont Tim Clark était un administrateur. Dans chaque cas, les factures étaient adressées à Tindall Group Inc. et non pas à l'appelant lui-même. Selon l'appelant, M. Clark lui avait donné le nom des sociétés auxquelles il devait verser les montants.

[46] Au cours des années en question, l'appelant faisait affaire sous son propre nom et c'est sous son nom qu'il demande les déductions. Cependant, la preuve démontre que ce n'est pas à l'appelant que les factures étaient adressées. En outre, les frais d'expert-conseil étaient prétendument fournis à l'appelant par Paul Tindall mais les factures ne provenaient pas de Paul Tindall mais de sociétés dans lesquelles ce dernier avait prétendument un intérêt.

[47] Qui plus est, les factures, lorsqu'elles ont prétendument été réglées, l'ont été par le biais d'un compte bancaire au nom de Tindall Group Inc. et non par l'appelant lui-même. Encore une fois, il est à noter que l'avis de débit du compte à La Banque Toronto-Dominion était au nom de Tindall Group Inc. et non à celui de l'appelant.

[48] À l'audience, l'appelant a cherché à expliquer ces divergences en déclarant qu'il avait payé ce montant mais qu'il avait simplement utilisé ce compte pour payer les frais et que “ Tindall Group Inc. était mon fiduciaire et le nom était utilisé pour distinguer mes fonctions comptables ”. Aucune autre explication n'a été fournie à la Cour quant à la signification de cette affirmation et aucune question supplémentaire n'a été posée à ce sujet. Par conséquent, ces déclarations doivent être interprétées telles quelles en vue d'y trouver des éléments de réponse qu'elles peuvent apporter aux questions qui nous préoccupent.

[49] Encore une fois, en ce qui concerne la raison pour laquelle les montants ont été versés, non pas au prétendu expert-conseil mais à d'autres entités, les seules preuves produites par l'appelant étaient qu'ils avaient été versés de cette façon car Tim Clark lui avait indiqué de les régler de cette façon.

[50] Comme l'avocate de l'intimée l'a fait remarquer, la question portant sur le fait que Tindall Group Inc. agissait en tant que simple fiduciaire de l'appelant n'a pas été mentionnée dans l'avis d'appel ou à quelque moment que ce soit au cours du processus de recherche de renseignements.

[51] Aucune preuve n'a été produite, à quelque moment que ce soit du procès, pour démontrer la nature des services d'expert-conseil fournis, aucun contrat ou accord passé entre l'expert-conseil et l'appelant n'a été produit pour établir à quoi se rapportaient les frais, la nature des services d'expert-conseil, les détails des montants dépensés et le moment précis, au cours des années en question, de la prestation des services d'expert-conseil. D'ailleurs, au cours du procès, il découlait, sans ambiguïté, des preuves produites par l'appelant lui-même qu'aucun document de cette sorte n'était disponible, ce qu'il a tout simplement mis sur le compte d'une “ tenue des livres manquant de rigueur ”.

[52] L'avocat de l'appelant s'est appuyé de façon intrinsèque sur la décision rendue dans l'affaire Hickman Motors Limited,précitée. En particulier, l'avocat de l'appelant a plaidé que dans cette affaire, à l'instar de la présente affaire, l'appelant avait produit des preuves qui “ démolissaient les hypothèses essentielles du ministre ”. Au fond, l'avocat a plaidé que l'appelant, par le biais de son témoignage, avait prouvé qu'il avait l'obligation de payer les montants en question, qu'il l'a fait et que ces montants étaient déductibles. Il a trouvé une consolation dans le fait que l'intimée n'avait produit aucune preuve démontrant que l'appelant n'était pas un témoin sincère.

[53] Cependant, la question de la crédibilité n'est que l'une des questions en l’espèce. Une question plus importante est celle de savoir si suffisamment d'éléments de preuve avaient été produits pour convaincre la Cour que les hypothèses essentielles du ministre telles qu'elles ont été indiquées précédemment dans les motifs du présent jugement, étaient “ démolies ” de sorte qu'en fin de compte la Cour pouvait statuer que l'appelant l'avait convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que les dépenses avaient été engagées et qu'elles étaient déductibles en vertu de la Loi.

[54] La présente cour n'est pas convaincue que l'affaire Hickman Motors Limited, précitée, appuie dans une large mesure la position prise par l'avocat de l'appelant. Dans cette affaire, la Cour était convaincue que :

[...] l'appelante a produit une preuve qui respecte non seulement la norme prima facie, mais, selon moi, une norme encore plus sévère. À mon avis, l'appelante a “ démoli ” les présomptions suivantes : a) la présomption de l'existence de “ deux entreprises ”, en produisant une preuve claire de l'existence d'une seule entreprise; b) la présomption qu'il n'y a “ aucun revenu ”, en produisant une preuve claire de l'existence d'un revenu. Il est établi en droit qu'une preuve non contestée ni contredite “ démolit ” les présomptions du ministre : voir par exemple MacIsaac c. M.R.N., 74 D.T.C. 6380 (C.A.F.), à la p. 6381; Zink c. M.R.N., 87 D.T.C. 652 (C.C.I.). Comme je l'ai déjà dit, aucune partie de la preuve produite par l'appelante en l'espèce n'a été contestée ni contredite. Par conséquent, à mon avis, l'appelante a “ démoli ” les présomptions sur l'existence de “ deux entreprises ” et sur le fait qu'il n'y a “ aucun revenu ”.

[55] Dans l'affaire précitée, la Cour était convaincue que puisque les présomptions (ou hypothèses) avaient été “ démolies ”, alors le fardeau de la preuve incombait au ministre qui devait prouver que les présomptions étaient correctes. Cependant, dans la présente affaire, l'appelant n'a produit aucune preuve de ce genre qui respecte cette norme prima facie et, sans aucun doute, aucune preuve qui respecte une norme encore plus élevée. En ce qui concerne les questions essentielles de savoir si les fonds ont été engagés et si les déductions pouvaient être accordées, seule était disponible la preuve produite par l'appelant lui-même qui, même si elle avait été acceptée totalement, n'aurait démontré que le fait que les dépenses avaient été engagées. Cependant, étant donné la façon peu limpide dont les paiements ont été effectués, et le manque d'éléments de preuve crédibles concernant la véritable relation existant entre l'appelant et sa société, l'appelant et M. Tim Clark, ainsi qu'entre l'appelant et les sociétés de M. Clark, la Cour n'est pas convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que ces montants ont effectivement été versés.

[56] Encore une fois, cela ne constitue qu'une moitié de l'équation et, pour que l'appelant obtienne gain de cause, la Cour devrait être convaincue selon la prépondérance des probabilités que les montants ont été payés pour la prestation de services destinés à tirer un revenu d'une entreprise. Pour ce faire, l'appelant aurait dû produire une preuve documentaire indiquant les services fournis, le moment de leur prestation et les projets auxquels ils s'apparentaient pour que la Cour puisse conclure si tout ou partie de ces dépenses était déductible.

[57] Le ministre a été confronté au même problème au moment de l'établissement de la nouvelle cotisation de l'appelant. Le ministre a fourni à l'appelant toutes les occasions nécessaires de produire les renseignements exigés à partir de ses livres et registres. L'appelant n'a pas produit ces renseignements. Au cours du présent procès, l'appelant n'a pas produit ces renseignements à partir de livres, de registres ou d'aucun autre élément de preuve.

[58] La Cour n'est pas convaincue qu'en l'espèce l'appelant s'est acquitté du fardeau de la preuve.

[59] Les appels sont rejetés avec dépens et les cotisations du ministre sont confirmées.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de mai 2000.

“ T. E. Margeson ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 28e jour de septembre 2000.

Mario Lagacé, réviseur

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