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Date: 19980210

Dossier: 96-3559-GST-I

ENTRE :

LES ENTREPRISES PHILIPPE PLAMONDON INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

La juge Lamarre, C.C.I.

[1] L’appelante interjette appel d’une cotisation portant le numéro 5213281 émise par le ministre du Revenu national ( « Ministre » ) en vertu de la Loi sur la taxe d’accise ( « Loi » ) relativement à la taxe sur les produits et services ( « TPS » ) non perçue sur la fourniture de repas, d’aliments et boissons au cours de la période du 1 janvier 1992 au 30 juin 1995. Le montant cotisé s’élève à 29 611,64 $ de TPS auquel s’ajoute des intérêts de 2 676,89 $ et des pénalités de 2 676,39 $.

[2] Pour cotiser l’appelante, le Ministre s’est fondé sur les faits qui se retrouvent au paragraphe 6 de la Réponse à l’avis d’appel et qui se lisent comme suit :

a) l’appelante est un inscrit aux fins de l’application de la TPS;

b) pour la période du 1er janvier 1992 au 30 juin 1995, l’appelante exploitait une cafétéria dans une base de plein air connue sous le nom de « Le Centre de Plein Air 4 Saisons » ( « la Base de plein air » );

c) l’appelante était un mandataire du ministre aux fins de la perception de la TPS;

d) au cours de la période ci-avant mentionnée, ni l’appelante ni la Base de plein air n’étaient une école, une administration scolaire, une université ou un collège public;

e) au cours de la période ci-avant mentionnée, l’appelante a effectué par vente la fourniture de repas, d’aliments et de boissons sans percevoir la TPS payable par les acquéreurs;

f) ces fournitures étaient assujetties à la TPS puisqu’elles constituaient des fournitures taxables;

g) la TPS non perçue par l’appelante au cours de cette période s’établit à 29 611,64 $, laquelle représente la taxe nette due par l’appelante pour la période ci-avant mentionnée.

[3] Monsieur Michel Robitaille, comptable, qui a témoigné pour le compte de l’appelante a admis les alinéas 6 a), b) et e). Il soutient que l’appelante n’avait pas à percevoir la TPS sur la fourniture de repas, d’aliments et de boissons puisque ceux-ci sont fournis dans une base de plein air, le Centre de Plein Air 4 Saisons ( « Centre » ), qui est un organisme de bienfaisance rendant des services à des jeunes de moins de 14 ans, qui est lui-même exonéré de percevoir la TPS en vertu de l’article 12 de la partie VI de l’annexe V de la Loi.

[4] Il soutient également que le Centre est un organisme scolaire aux termes de l’article 123 de la Loi, et que la fourniture de services d’alimentation à un organisme scolaire est exonérée de la TPS aux termes de l’article 14 de la partie III de l’annexe V de la Loi.

[5] Selon les documents soumis en preuve, le Centre est administré par la Corporation de l’Institut des Frères de N.D. de la Miséricorde, laquelle corporation est reconnue comme organisme de bienfaisance. Le Centre offre prioritairement accès aux groupes scolaires pour des activités éducatives. Il offre aussi des possibilités de séjour à d’autres groupes, comme à des familles ou à des groupes du « YMCA » par exemple, sur réservation et sur approbation des Frères de la Corporation. Le Centre charge des prix forfaitaires comprenant l’hébergement, la collation, l’utilisation des équipements et l’animation.

[6] Le Centre offre également le service de cafétéria. Pour offrir ce service, il a donné par contrat à l’appelante l’administration de la cuisine. L’appelante loue ainsi un local du Centre. C’est l’appelante qui fait les achats de nourriture. Elle facture par la suite le Centre qui à son tour recharge le prix des repas offerts à la cafétéria aux usagers du Centre. Les frais de cuisine sont clairement identifiés sur les factures aux usagers et sont chargés en sus des prix forfaitaires pour un séjour au Centre (pièce A-3). D’ailleurs, on retrouve aux états financiers du Centre un poste « cafétéria » au chapitre des dépenses qui est distinct du poste « entretien et fonctionnement » , lequel regroupe toutes les dépenses reliées à l’exploitation du Centre.

[7] Par ailleurs, l’appelante est une société constituée en vertu de la Loi sur les compagnies du Québec, qui produit un rapport financier annuel et qui est complètement distincte du Centre. Ses revenus proviennent exclusivement de ses ventes à la cafétéria au Centre. Elle assume ses propres dépenses.

Analyse

[8] L’appelante soutient en premier lieu que la fourniture d’aliments au Centre est exonérée de TPS aux termes de l’article 14 de la partie III de l’annexe V de la Loi. Elle soutient qu’elle fournit des aliments et boissons au Centre qu’elle qualifie d’administration scolaire.

[9] L’annexe V de la Loi établit une liste des fournitures exonérées. L’article 14 de la partie III de l’annexe V exonère de la TPS la fourniture d’aliments ou de boissons aux termes d’un contrat. Il se lit comme suit :

14. Fourniture d’aliments ou de boissons aux termes d’un contrat. La fourniture d’aliments et de boissons, y compris les services de traiteur, effectuée au profit d’une administration scolaire, d’une université ou d’un collège public aux termes d’un contrat visant à offrir des aliments ou des boissons soit à des étudiants dans le cadre d’un régime visé à l’article 13, soit dans la cafétéria d’une école primaire ou secondaire principalement aux élèves de l’école, sauf dans la mesure où les aliments, les boissons et les services sont offerts dans le cadre d’une réception, d’une conférence ou d’un autre occasion ou événement spécial.

14. A supply of food and beverages, including catering services, made to a person that is a school authority, university, or public college under a contract to provide food or beverages

(a) to students under a plan referred to in section 13; or

(b) in an elementary or secondary school cafeteria primarily to students of the school,

except to the extent that the food, beverages and services are provided for a reception, conference or other special occasion or event.

[10] Une administration scolaire est définie à l’article 123 de la Loi comme une institution ou partie d’institution qui administre dans une province une école primaire ou secondaire dont le programme d’études est conforme aux normes du gouvernement provincial en matière d’enseignement.

[11] Je suis d’accord avec l’avocat de l’intimée que la preuve ne me permet pas de conclure que le Centre répond à une telle définition. Pour ce faire, il faudrait que le Centre offre un programme d’études conforme aux normes du gouvernement du Québec en matière d’enseignement et ceci n’a pas été démontré.

[12] L’appelante suggère dans un deuxième temps qu’elle a fourni ses services de cafétéria au profit d’une administration publique, puisque les élèves des commissions scolaires, elles-mêmes des administrations publiques, sont ceux qui fréquentent le Centre. Je ne souscris pas non plus à ce deuxième argument. D’une part, si les élèves des commissions scolaires fréquentent ce Centre, c’est dans le cadre d’activités parascolaires organisées par les commissions scolaires elles-mêmes et assumées financièrement par ces dernières. Le fait pour ces commissions scolaires d’utiliser les services du Centre ne transforme pas ce dernier en administration scolaire. D’autre part, le Centre offre des séjours à d’autres organismes que les administrations scolaires. Ainsi par exemple, la clientèle du « YMCA » y a accès de même que des familles qui désirent en profiter.

[13] L’on ne peut pas dire que parce que les services sont offerts prioritairement à des élèves fréquentant des commissions scolaires que le service de cafétéria est offert « au profit » d’une administration publique. Le service de cafétéria est offert par le biais d’une entente contractuelle entre une société exploitant une entreprise, l’appelante, et le Centre. Le contrat soumis en preuve (sous la pièce A-2) en fait clairement état. De la même façon qu’un musée contracte avec une entreprise pour les services de cafétéria, cette entreprise ne sera pas exonérée de charger la TPS parce que la cafétéria est fréquentée par des groupes scolaires.

[14] Je conclus donc que l’article 14 de la partie III de l’annexe V ne trouve pas application dans la présente instance et n’exonère pas l’appelante de charger la TPS pour la fourniture de ses repas.

[15] Finalement, l’appelante ne peut bénéficier non plus de l’exemption prévue à l’article 12 de la partie VI de l’annexe V en ce qu’elle n’est pas visée dans la définition d’un organisme du secteur public qui offre un service dans le cadre d’un programme de formation prévu par cet article.

[16] L’article 12 de la partie VI de l’annexe V se lit comme suit :

12. Droit d’adhésion à un programme consistant en une série de cours ou d’activités de formation. La fourniture par un organisme du secteur public d’un droit d’adhésion à un programme, établi et administré par l’organisme, qui consiste en une série de cours ou d’activités de formation, sous surveillance, dans des domaines tels l’athlétisme, les loisirs de plein air, la musique, la danse, les arts, l’artisanat ou d’autres passe-temps ou activités de loisir, ainsi que des services offerts dans le cadre d’un tel programme, si :

12. A supply made by a public sector body of a membership in, or services supplied as part of, a program established and operated by the body that consists of a series of supervised instructional classes or activities involving athletics, outdoor recreation, music, dance, arts, crafts or other hobbies or recreational pursuits where

a) il est raisonnable de s’attendre, compte tenu de la nature des cours ou des activités ou du niveau d’aptitude ou de capacité nécessaire pour y participer, à ce que le programme soit offert principalement aux enfants de quatorze ans ou moins, sauf si une grande partie du programme comporte une surveillance de nuit;

(a) it may reasonably be expected, given the nature of the classes or activities or the degree of relevant skill or ability required for participation in them, that the program will be provided primarily to children 14 years of age or under, except where the program involves overnight supervision throughout a substantial portion of the program; or

b) le programme est offert principalement aux particuliers défavorisés ou ayant un handicap physique ou mental.

(b) the program is provided primarily for underprivileged individuals or individuals with a disability.

[17] Un organisme du secteur public est défini à l’article 123 de la Loi comme étant le gouvernement ou un organisme de services publics, ce dernier étant défini comme un organisme à but non-lucratif, un organisme de bienfaisance, une municipalité, administration scolaire, administration hospitalière, collège public ou université.

[18] Bien que le Centre soit un organisme du secteur public aux termes de la Loi, ce n’est pas le Centre qui fournit les services de cafétéria mais l’appelante qui se fait régulièrement payer pour ces services et qui pourrait en tirer des profits si elle augmentait ses ventes ou si elle réduisait ses dépenses.

[19] On ne peut dire non plus que les services de cafétéria sont offerts dans le cadre du programme offert par le Centre, ou selon la version anglaise, « as part of a program established and operated by the [public sector] body » puisque les frais de cafétéria sont chargés séparément des frais de séjour au Centre qui offre le programme des loisirs de plein air. De plus, les services de cafétéria ne sont pas administrés par le Centre tel que requis par l’article 12 pour donner ouverture à l’exonération.

[20] Je conclus donc que le service de cafétéria offert par l’appelante n’est pas un service offert dans le cadre d’un programme établi et administré par un organisme du secteur public au sens de l’article 12 de la partie VI de l’annexe V de la Loi. En conséquence, l’appelante devait percevoir la TPS sur la fourniture de repas, d’aliments et de boissons aux usagers du Centre puisqu’elle effectuait une fourniture taxable au sens de la Loi.

[21] L’appel est donc rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de février 1998.

« Lucie Lamarre »

J.T.C.C.

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