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Date: 20000817

Dossiers: 1999-3956-GST-I; 1999-3958-GST-I; 1999-3959-GST-I

ENTRE :

ANGELO PAPA, LUIGI COCO, JOHN MANCINI

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

Intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bowie, C.C.I.

[1] Les trois appelants ont fait l'objet de cotisations en vertu du paragraphe 323(1), figurant à la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la “ Loi ”). La partie IX impose une taxe (la “ TPS ”) sur la fourniture commerciale de produits et services, et le paragraphe 323(1) prévoit que les administrateurs d'une personne morale peuvent, dans certaines circonstances, faire l'objet de cotisations au titre de la dette de la personne morale en matière de TPS. Les appelants détenaient respectivement 25, 24 et 51 p. 100 des actions de Casa Bella Interiors Ltd. (“ Casa Bella ”). Ils en étaient par ailleurs les trois seuls administrateurs. Aux termes des cotisations qui ont été établies à leur égard, chacun d'eux est solidairement tenu, avec Casa Bella, de payer la taxe impayée, ainsi qu'une pénalité et les intérêts courus, soit un montant total de 41 214,39 $. D'un commun accord, leurs appels ont été entendus ensemble sur preuve commune. Ils soulèvent un certain nombre de questions. Les cotisations sont-elles viciées par certaines erreurs d'écritures qu'elles contiennent? Les appelants peuvent-ils contester le montant de l'obligation de Casa Bella dans le cadre des présents appels? Concernant ces cotisations, les appelants sont-ils en droit de bénéficier de la défense de diligence raisonnable dont peuvent se prévaloir des administrateurs en vertu du paragraphe 323(3) de la Loi?

Les faits

[2] Casa Bella exploitait à Edmonton une entreprise consistant à vendre au détail des meubles et des produits connexes de décoration d'intérieur. Elle avait commencé à exploiter cette entreprise en février 1988 et a cessé ses activités en février 1994, après avoir enregistré des pertes importantes. En janvier 1994, Revenu Canada a effectué une vérification portant sur l'obligation de Casa Bella en matière de TPS. Par suite de cette vérification, Casa Bella a fait l'objet de cotisations au titre des montants suivants, soit la taxe impayée, une pénalité et des intérêts :

Période se terminant le

Rajustement de taxe nette

Pénalité

Intérêts

31 juillet 1993[1]

18 386,18 $

2 099,75 $

2 115,41 $

31 octobre 1993[2]

133,64 $

31 janvier 1994[3]

11 360,23 $

934,04 $

845,96 $

Total

29 880,04 $

3 033,79 $

2 961,37 $

Casa Bella n'a pas déposé d'avis d'opposition aux cotisations pour les deux premières de ces périodes. Elle en a toutefois bel et bien déposé un à l'égard de la cotisation pour la période se terminant le 31 janvier 1994 et a pu, par l'intermédiaire de son avocat, négocier un règlement qui a donné lieu à la nouvelle cotisation suivante concernant l'obligation de Casa Bella pour cette période :

Taxe nette 5 649,60 $

Intérêts nets 420,71 $

Pénalité 464,51 $

Total 6 534,82 $

[3] Des trois appelants, seul M. Coco a témoigné. Sa responsabilité dans l'administration de l'entreprise incluait la tenue de la comptabilité et la production des déclarations de TPS. Il tenait les livres manuellement, a-t-il dit, reportant les opérations mensuellement, à partir de registres qu'il gardait dans des chemises. Il y avait apparemment un ordinateur au bureau, mais M. Coco ne l'utilisait pas. Il a témoigné qu'au moins deux personnes — qui étaient à ce que je comprends des entrepreneurs dont on retenait temporairement les services — introduisaient de temps en temps des données dans un programme informatique, mais cela ne semble pas avoir été fait régulièrement. M. Coco établissait les déclarations de TPS manuellement aussi, utilisant les documents originaux contenus dans ses chemises. Chaque année, M. Ron Heck, c.a., établissait des états financiers non vérifiés, et ce, à partir de l'information qui lui était fournie par M. Coco. Il a témoigné qu'il pensait que les opérations étaient consignées dans un grand livre général informatisé, mais il n'en était pas certain. Un imprimé d'ordinateur du grand livre général pour l'exercice se terminant le 31 juillet 1993 a été produit en preuve au procès, mais la question de savoir si d'autres registres informatisés ont déjà été disponibles demeure sans réponse.

[4] Lorsque, à la fin de 1993, le vérificateur de Revenu Canada, M. Erfani, s'est rendu dans les locaux de Casa Bella pour effectuer sa vérification, M. Coco lui a fourni des caisses contenant des chemises, lesquelles renfermaient des factures originales concernant les achats et les ventes de Casa Bella. M. Coco n'a fourni aucun grand livre ni autre registre organisé. Le témoignage de M. Erfani était clair et, pour ce qui est des cas où il ne concorde pas avec celui de M. Coco ou celui de M. Heck, ma préférence va au témoignage de M. Erfani. Les souvenirs de M. Heck étaient très incertains quant à un certain nombre de points, et M. Coco, je pense, était enclin à se présenter sous son meilleur jour au cours de son témoignage. Fréquemment, son témoignage était vague et intéressé. Il a témoigné que les livres et registres s'étaient perdus à l'époque de la fermeture de l'entreprise, ce qui est possible. Chose certaine, ils n'ont pu être examinés au procès.

[5] Pour ce qui est de la nouvelle cotisation établie par suite de la vérification effectuée par M. Erfani pour la période se terminant le 31 juillet 1993, M. Coco a témoigné qu'il ne l’avait reçue que le 20 mai 1998, lorsqu'une copie lui avait été remise au cours d'une réunion avec des fonctionnaires de Revenu Canada. M. Erfani a terminé sa vérification peu avant que l'entreprise cesse d'être exploitée, à la fin de février 1994. Sa lettre à M. Coco indiquant les résultats et précisant que l'avis de cotisation suivrait est datée du 11 mars 1994; elle a été envoyée par la poste aux locaux que Casa Bella avait alors quittés. Les appelants n'avaient pris aucune mesure pour faire suivre le courrier de la société.

[6] M. Heck a témoigné que M. Coco et lui avaient établi une estimation de la TPS dont Casa Bella était redevable à l'automne 1994. À cause du manque de registres, il avait dû à cette fin travailler à partir des états financiers des années en question. Essentiellement, ils avaient établi l'estimation en appliquant un taux de 7 p. 100 aux revenus de chaque exercice pour calculer la TPS qui aurait dû être perçue. Ils ont ensuite ajouté au coût des ventes pour chaque période les dépenses de cette période, déduction faite d'éléments comme les salaires et les primes d'assurance, qui ne sont pas assujettis à la TPS, et ont appliqué un taux de 7 p. 100 pour évaluer le droit à un crédit de taxe sur les intrants (CTI). Ils ont fait un rajustement de manière à prendre en considération le stock d'ouverture en date du 1er janvier 1991, date à laquelle la TPS a été introduite. Par cette méthode, ils ont estimé que la TPS totale perçue était de 94 473 $ et que le CTI auquel Casa Bella avait droit était de 89 951 $, de sorte que l'obligation de Casa Bella aurait dû être de 4 522 $ au lieu des 29 880 $ fixés par M. Erfani. Pour sa part, M. Erfani avait dû effectuer un calcul semblable pour déterminer l'obligation en matière de TPS. Pour ce qui est du droit à un CTI, son approche a toutefois été différente. Il a examiné les demandes de CTI faites dans les déclarations de TPS et a entrepris de vérifier les droits à des CTI à partir des documents originaux qui lui avaient été fournis. Il n'a admis de CTI que dans les cas où il avait été possible de trouver les pièces justificatives exigées par la Loi[4] et par le Règlement sur les renseignements nécessaires à une demande de crédit de taxe sur les intrants[5]. Je ne doute nullement que l'écart entre les résultats obtenus par M. Heck et ceux obtenus par M. Erfani au terme de sa vérification soit attribuable en grande partie au fait que M. Coco n'a pu produire pour M. Erfani tous les registres requis pour étayer des demandes de CTI. Je conclus de la preuve présentée par M. Heck et de celle présentée par M. Erfani que ce dernier était fondé à établir les cotisations qu'il a établies, car les registres de Casa Bella étaient dans un état tel que Casa Bella n'a pu établir son droit au montant intégral des CTI. Je conclus également que, si les registres de Casa Bella avaient été correctement tenus, la taxe nette due aurait été d'environ 4 500 $ comme l'avait estimé M. Heck.

Les dispositions législatives

[7] Les dispositions suivantes de la Loi sont pertinentes aux fins du règlement des questions soulevées dans les présents appels.

299(1) Le ministre n'est pas lié par quelque déclaration, demande ou renseignement livré par une personne ou en son nom; il peut établir une cotisation indépendamment du fait que quelque déclaration, demande ou renseignement ait été livré ou non.

(2) L'inexactitude, l'insuffisance ou l'absence d'une cotisation ne change rien aux taxes, pénalités, intérêts ou autres montants dont une personne est redevable aux termes de la présente partie.

(3) Sous réserve d'une nouvelle cotisation et d'une annulation prononcée par suite d'une opposition ou d'un appel fait selon la présente partie, une cotisation est réputée valide et exécutoire.

(3.1) Dans le cas où une cotisation est établie à l'égard d'une personne (appelée “ entité ” au présent paragraphe) qui n'est ni un particulier ni une personne morale, les règles suivantes s'appliquent :

a) la cotisation n'est pas invalide du seul fait qu'une ou plusieurs autres personnes (chacune étant appelée “ représentant ” au présent paragraphe) qui sont responsables des obligations de l'entité n'ont pas reçu d'avis de cotisation;

b) la cotisation lie chaque représentant de l'entité, sous réserve d'une nouvelle cotisation établie à l'égard de celle-ci et de son droit de faire opposition à la cotisation, ou d'interjeter appel, en vertu de la présente partie;

c) une cotisation établie à l'égard d'un représentant et portant sur le même question que la cotisation établie à l'égard de l'entité lie le représentant, sous réserve seulement d'une nouvelle cotisation établie à son égard et de son droit de faire opposition à la cotisation, ou d'interjeter appel, en vertu de la présente partie, pour le motif qu'il n'est pas une personne tenue de payer ou de verser un montant visé par la cotisation établie à l'égard de l'entité, qu'une nouvelle cotisation portant sur cette question a été établie à l'égard de l'entité ou que la cotisation initiale établie à l'égard de l'entité a été annulée.

(4) Sous réserve d'une nouvelle cotisation et d'une annulation prononcée lors d'une opposition ou d'un appel fait selon la présente partie, une cotisation est réputée valide et exécutoire malgré les erreurs, vices de forme ou omissions dans la cotisation ou dans une procédure y afférent en vertu de la présente partie.

(5) L'appel d'une cotisation ne peut être accueilli pour cause seulement d'irrégularité, de vice de forme, d'omission ou d'erreur de la part d'une personne dans le respect d'une disposition directrice de la présente partie.

300(1) Une fois une cotisation établie à l'égard d'une personne, le ministre lui envoie un avis de cotisation.

(2) L'avis de cotisation peut comprendre des cotisations portant sur plusieurs périodes de déclaration, opérations, remboursements ou montant à payer ou à verser en application de la présente partie.

301(1) Pour l'application du présent article, la personne à l'égard de laquelle est établie une cotisation au titre de la taxe nette pour sa période de déclaration, d'un montant (autre que la taxe nette) qui est devenu à payer ou à verser par elle au cours d'une telle période ou du remboursement d'un montant qu'elle a payé ou versé au cours d'une telle période est une personne déterminée relativement à la cotisation ou à un avis d'opposition à celle-ci si, selon le cas :

a) elle est une institution financière désignée visée à l'un des sous-alinéas 149(1)a)(i) à (x) au cours de la période en question;

b) elle n'était pas un organisme de bienfaisance au cours de la période en question et le montant déterminant qui lui est applicable, déterminé en conformité avec le paragraphe 249(1), dépasse 6 000 000 $ pour son exercice qui comprend cette période ainsi que pour son exercice précédent.

(1.1) La personne qui fait opposition à la cotisation établie à son égard peut, dans les 90 jours suivant le jour où l'avis de cotisation lui est envoyé, présenter au ministre un avis d'opposition, en la forme et selon les modalités déterminées par celui-ci, exposant les motifs de son opposition et tous les faits pertinents.

[...]

302 La personne, ayant présenté un avis d'opposition à une cotisation, à qui le ministre a envoyé un avis de nouvelle cotisation ou de cotisation supplémentaire concernant l'objet de l'avis d'opposition peut, dans les 90 jours suivant cet envoi :

a) interjeter appel devant la Cour canadienne de l'impôt;

b) si un appel a déjà été interjeté, modifier cet appel en y joignant un appel concernant la nouvelle cotisation ou la cotisation supplémentaire, en la forme et selon les modalités fixées par cette cour.

[...]

313(1) Les taxes, taxes nettes, intérêts, pénalités, coûts et autres montants payables en vertu de la présente partie sont des créances de Sa Majesté du chef du Canada et sont recouvrables à ce titre devant la Cour fédérale ou devant tout autre tribunal compétent ou de toute autre manière prévue par la présente partie.

(2) Une action en recouvrement de taxes, taxes nettes, pénalités, intérêts et autres montants à payer ou à verser par une personne en vertu de la présente partie ne peut être intentée :

a) dans le cas de montants pouvant faire l'objet d'une cotisation aux termes de la présente partie, que si, au moment où l'action est intentée, la personne a fait l'objet d'une cotisation pour ces montants ou peut en faire l'objet;

b) dans les autres cas, plus de quatre ans après que la personne devient redevable des montants.

(3) Dans le cas où un jugement est obtenu pour des taxes, taxes nettes, pénalités, intérêts et autres montants à payer ou à verser en vertu de la présente partie, y compris un certificat enregistré aux termes de l'article 316, les dispositions de la présente partie en application desquelles une pénalité et des intérêts sont payables pour défaut de paiement ou de versement du montant s'appliquent, compte tenu des adaptations de circonstance, au défaut de paiement du jugement, et la pénalité et les intérêts sont recouvrables de la même manière que la créance constatée par jugement.

[...]

323(1) Les administrateurs de la personne morale au moment où elle était tenue de verser une taxe nette comme l'exigent les paragraphes 228(2) ou (2.3), sont, en cas de défaut par la personne morale, solidairement tenus, avec cette dernière, de payer cette taxe ainsi que les intérêts et pénalités y afférents.

(2) L'administrateur n'encourt de responsabilité selon le paragraphe (1) que si :

a) un certificat précisant la somme pour laquelle la personne morale est responsable a été enregistré à la Cour fédérale en application de l'article 316 et il y a eu défaut d'exécution totale ou partielle à l'égard de cette somme;

b) la personne morale a entrepris des procédures de liquidation ou de dissolution, ou elle a fait l'objet d'une dissolution, et une réclamation de la somme pour laquelle elle est responsable a été établie dans les six mois suivant le premier en date du début des procédures et de la dissolution;

c) la personne morale a fait une cession, ou une ordonnance de séquestre a été rendue contre elle en application de la Loi sur la faillite, et une réclamation de la somme pour laquelle elle est responsable a été établie dans les six mois suivant la cession ou l'ordonnance.

(3) L'administrateur n'encourt pas de responsabilité s'il a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement visé au paragraphe (1) que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

(4) Le ministre peut établir une cotisation pour un montant payable par une personne aux termes du présent article. Les articles 296 à 311 s'appliquent, compte tenu des adaptations de circonstance, dès que le ministre envoie l'avis de cotisation applicable.

(5) L'établissement d'une telle cotisation pour un montant payable par un administrateur se prescrit par deux ans après qu'il a cessé pour la dernière fois d'être administrateur.

(6) Dans le cas du défaut d'exécution visé à l'alinéa (2)a), la somme à recouvrer d'un administrateur est celle qui demeure impayée après l'exécution.

(7) L'administrateur qui verse une somme, au titre de la responsabilité d'une personne morale, qui est établie lors de procédures de liquidation, de dissolution ou de faillite a droit au privilège auquel Sa Majesté du chef du Canada aurait eu droit si cette somme n'avait pas été versée. En cas d'enregistrement d'un certificat relatif à cette somme, le ministre est autorisé à céder le certificat à l'administrateur jusqu'à concurrence de son versement.

(8) L'administrateur qui a satisfait à la réclamation peut répéter les parts des administrateurs tenus responsables de la réclamation.

Les points en litige

(i) Les cotisations sont-elles viciées par les erreurs d'écritures?

[8] Au sujet de cette question litigieuse, les appelants soutiennent que les détails donnés dans les cotisations qui ont été établies à l'égard de chacun d'eux et dont ils font maintenant appel indiquent inexactement la période pour laquelle Casa Bella est devenue redevable des 41 214,39 $ de TPS, de pénalité et d'intérêts fixés dans les cotisations, et que ces détails indiquent en outre inexactement, à l'annexe “ A ” de chaque cotisation, la composition de ce montant. Le dispositif des cotisations contestées et l'annexe “ A ” se lisent comme suit[6] :

[TRADUCTION]

Le présent avis de cotisation est établi relativement à la responsabilité encourue aux termes :

du paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d'accise, soit une responsabilité à l’égard d’une somme s’élevant 41 214,39 $ et se rapportant à l'omission de Casa Bella Interiors Ltd. de verser de la taxe nette comme l'exige le paragraphe 228(2) de la Loi sur la taxe d'accise. La somme de 41 214,39 $ se compose des montants suivants :

— 16 536,36 $ de taxe nette devant être versés par Casa Bella Interiors Ltd. pour les périodes de déclaration trimestrielle allant du 1er novembre 1993 au 31 janvier 1994 et du 1er mai 1993 au 31 juillet 1993, comme cela a été déterminé par voie de vérification et comme l'indique l'annexe “ A ” ci-jointe, qui fait état de la somme de 41 214,39 $ que Casa Bella Interiors Ltd. a omis de verser au plus tard aux dates prévues au paragraphe 228(2) de la Loi sur la taxe d'accise;

— 11 570,98 $ d'intérêts courus sur le montant indiqué ci-dessus comme taxe nette;

— 13 107,05 $ de pénalité accumulée sur le montant indiqué ci-dessus comme taxe nette, conformément à la répartition figurant à l'annexe “ A ” ci-jointe.

MONTANT DE LA COTISATION : 41 214,39 $

---

Casa Bella Interiors Ltd.

Annexe “ A ”

Période se terminant le Taxe Intérêts Pénalité Total pour la période

31 janvier 1994 4 754,82 $ 1 946,20 $ 2 325,57 $ 9 026,59 $

31 juillet 1993 11 781,54 $ 9 624,78 $ 10 781,48 $ 32 187,80 $

16 536,36 $ 11 570,98 $ 13 107,05 $ 41 214,39 $

[9] Il ressort de la cotisation que celle-ci indique à tort comme période globale relative à l'obligation de Casa Bella une période allant du 1er mai 1993 au 31 janvier 1994 au lieu d'une période commençant le 1er janvier 1991. Le fait que la répartition indiquée à l'annexe “ A ” est inexacte est admis dans la réponse de l'intimée à l'avis d'appel. Les paragraphes 7 et 8 se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

7. Par voie d'avis de cotisation – tierce partie numéro 10BP – 10083354ORT-72095, daté du 28 mai 1998, le ministre a établi à l'égard de l'appelant une cotisation de 41 214,39 $ relativement à l'omission de la personne morale de verser de la taxe nette conformément au paragraphe 228(2) de la Loi sur la taxe d'accise (la “ Loi ”) pour la période pertinente. Le montant de la cotisation a été calculé comme suit :

Période se terminant le Taxe nette Intérêts Pénalité Total

31 janvier 1994 4 754,82 $ 1 946,20 $ 2 325,57 $ 9 026,59 $

31 juillet 1993 11 781,54 $ 9 624,78 $ 10 781,48 $ 32 187,80 $

Total 16 536,36 $ 11 570,98 $ 13 107,05 $ 41 214,39 $

8. Le montant total de la cotisation, soit 41 214,39 $, qui est indiqué au paragraphe 7 ci-dessus est exact. Cependant, le ministre dit qu'il y a eu une erreur d'écritures concernant la répartition du montant de la cotisation, lequel montant aurait dû être réparti comme suit :

Période se terminant le Taxe nette Intérêts Pénalité Total

31 janvier 1994 5 649,60 $ 1 520,95 $ 1 856,04 $ 9 026,59 $

31 juillet 1993 15 996,70 $ 7 509,37 $ 8 681,73 $ 32 187,80 $

Total 21 646,30 $ 9 030,32 $ 10 537,77 $ 41 214,39 $

[10] L'avocat des appelants invoque l'opinion incidente formulée par le juge Cullen, de la Section de première instance de la Cour fédérale, dans l'affaire La Reine c. Riendeau[7], à savoir que, si elle contient une erreur “ substantielle et fondamentale ”, une cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu sera invalidée, malgré les paragraphes 152(3) et (8) et l'article 166 de cette loi. L'avocat des appelants affirme que les erreurs contenues dans les cotisations considérées en l'espèce sont substantielles et fondamentales.

[11] Dans l'affaire Willow Pond Services Ltd.c. La Reine[8], le juge Hamlyn, de notre cour, n'a pas admis un argument semblable concernant une cotisation de TPS qui indiquait à tort une période allant du 1er août 1991 au 31 août 1991, alors que la cotisation visait en fait la période du 1er janvier 1991 au 31 juillet 1991. Il était d'avis que l'erreur commise dans ce cas-là n'était pas “ substantielle et fondamentale ”. Plus récemment, la Cour d'appel fédérale a déclaré que le critère est de savoir si le contribuable a été induit en erreur par la cotisation[9].

[12] À mon avis, les appelants ne peuvent avoir gain de cause sur ce point. Ces cotisations se rapportent à l'obligation de Casa Bella en date du dépôt du certificat, soit une obligation de 41 214,39 $ selon les cotisations. Les autres renseignements indiqués dans les cotisations, y compris la répartition figurant à l'annexe “ A ”, sont des détails superflus. Il n'était nullement nécessaire de les inclure. En outre, aucune preuve n'indique que l'un ou l’autre des appelants a de quelque manière été induit en erreur ou victime d'un préjudice en raison de l'information erronée quant aux périodes relatives aux divers éléments de l'obligation de Casa Bella. Le paragraphe 299(4) de la Loi n'est pas ambigu. Sous réserve d'une opposition ou d'un appel, les cotisations sont valides et exécutoires, malgré les erreurs admises. Aucune opposition n'a été déposée à part celle qui a conduit à la nouvelle cotisation pour la période se terminant le 31 janvier 1994. Il n'y a eu aucun appel.

(ii) Les appelants peuvent-ils maintenant contester les cotisations relatives à Casa Bella?

[13] Comme j'ai déjà conclu que M. Erfani était fondé à fixer la cotisation qu'il a fixée concernant l'obligation de Casa Bella et que Casa Bella n'aurait pu établir un droit supplémentaire à des CTI si elle avait fait appel de la cotisation, il n'est pas strictement nécessaire de trancher cette question. Néanmoins, je suis d'avis que les appelants ne peuvent contester l'exactitude des cotisations relatives à Casa Bella dans les présents appels.

[14] Un point de vue contraire avait été adopté par notre cour dans plusieurs décisions sur des appels de cotisations établies en vertu de l'article 160 de la Loi de l'impôt sur le revenu, soit des causes dans lesquelles des personnes à qui des contribuables avaient transféré leur bien dans le cadre d'opérations avec lien de dépendance et moyennant une contrepartie insuffisante ou nulle cherchaient à attaquer les cotisations sous-jacentes établies à l'égard des auteurs des transferts. La plupart de ces causes ont été examinées par le juge Mogan dans l'affaire Schafer c. La Reine[10]. Cette affaire se rapportait à l'article 325 de la Loi, qui est semblable du point de vue de son objet et de sa structure à l'article 160 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Après avoir examiné les causes portant sur l'article 160, le juge Mogan a conclu, en se fondant en grande partie sur l'article 299 de la Loi, qu'une telle attaque à l'égard de la cotisation sous-jacente ne peut être faite selon une interprétation appropriée de la législation. Je suis d'accord sur l'analyse et la conclusion du juge Mogan, pour les raisons que ce dernier a énoncées dans cette affaire. Aux termes des paragraphes 299(3) et (4) de la Loi, la cotisation sous-jacente ne peut être l'objet d'une contestation parallèle dans un appel d'une cotisation dérivée. La cotisation sous-jacente, si elle n'a pas été modifiée ni annulée par suite d'une opposition ou d'un appel couronné de succès, fixe de manière absolue le montant de l'obligation de la personne morale. C'est de cette obligation, ainsi fixée, que les administrateurs peuvent devenir responsables en application de l'article 323, si les conditions prévues à cet article sont réunies.

[15] Donc, ce motif d'appel est rejeté, à la fois parce qu'aucune contestation parallèle à l'égard de la cotisation relative à Casa Bella n'est possible et que, si une telle contestation était possible, elle ne serait pas couronnée de succès.

(iii) Les appelants ont-ils exercé une diligence raisonnable?

[16] L'avocat des appelants affirmait que, même si les appelants ne pouvaient avoir complètement gain de cause en présentant une défense de diligence raisonnable en vertu du paragraphe 323(3), leur responsabilité aux termes du paragraphe 323(1) devrait être limitée à un montant raisonnable, c'est-à-dire, à ce que j'ai compris, au montant de 4 522 $ estimé par M. Heck comme étant le montant de l'obligation de Casa Bella. Voilà simplement une autre tentative pour attaquer les cotisations sous-jacentes, d'une manière indirecte. L'avocat des appelants n'a tenu aucun raisonnement indiquant que le paragraphe 323(3) pourrait avoir cet effet, et aucun raisonnement semblable ne me vient à l'esprit. La preuve présentée en l'espèce n'étaye simplement pas le point de vue selon lequel les administrateurs — ou l'un d'entre eux — ont exercé une diligence raisonnable pour prévenir l'omission de Casa Bella de payer la TPS qu'elle était tenue de payer. La preuve établit que la tenue de la comptabilité assurée par M. Coco était déficiente. Un système approprié de tenue de la comptabilité aurait permis à Casa Bella d'établir avec précision son obligation de temps en temps. Il est vrai que cette société a omis de verser de la taxe principalement parce qu'elle a omis de produire des déclarations appropriées quant au montant de son obligation, mais cela n'est nullement utile aux administrateurs, car ils n'ont pas démontré qu'ils avaient fait ce que des gens d'affaires raisonnables feraient pour veiller à ce que des déclarations exactes soient produites. Ils n'ont pas non plus tenu de registres adéquats pour étayer les demandes de CTI. Selon le témoignage de M. Erfani, les registres qui lui ont été remis étaient simplement des reçus, non totalisés, qui avaient été déposés dans des enveloppes et dans des caisses. Ni M. Papa ni M. Mancini n'ont témoigné, et aucune preuve d'autres sources n'a été présentée pour démontrer que l'un ou l'autre avait pris des mesures pour veiller à ce que la société produise des déclarations exactes et verse de la taxe en temps opportun. Sur la foi de la preuve, ce motif d'appel est rejeté.

[17] Les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'août 2000.

“ E. A. Bowie ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 19e jour de février 2001.

Philippe Ducharme, réviseur



[1]               Pièce A-1, onglet 6.

[2]               Pièce A-1, onglet 7.

[3]               Pièce A-1, section 8.

[4]               Alinéa 169(4)a).

[5]               C.P. 1990-2755.

[6]                Pièce A-1, onglet 11.

[7]               C.F. 1re inst., no T-329-86, 27 novembre 1989, à la page 11 ([1990] 1 C.T.C. 141, à la page 147).

[8]               C.C.I., no 96-507 (GST)G, 22 juin 1998 ([1998] G.S.T.C. 71).

[9]               Friedberg c. La Reine, C.A.F., no A-665-97, 6 avril 2000 ([2000] 2 C.T.C. 370).

[10]             C.C.I., no 95-1730 (GST)G, 16 janvier 1998 ([1998] G.S.T. 7).

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