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Date: 19980807

Dossier: 96-3585-IT-G

ENTRE :

GERMAIN PELLETIER LTÉE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Archambault, C.C.I.

[1] Germain Pelletier Ltée (GPL) conteste des avis de cotisation pour les années d’imposition 1990, 1991 et 1992 ainsi qu’une cotisation établie le 2 juin 1995 en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (Loi). Cette dernière cotisation s’élève à 681 251,21 $. Toutefois, le ministre du Revenu national (ministre) reconnaît que cette somme doit être réduite à 28 220,38 $ parce que la dette de la Société immobilière Montbeillard inc. (SIM), la débitrice fiscale qui a transféré le bien à GPL, a été réduite par la suite à ce montant. Ces appels soulèvent différentes questions litigieuses dont notamment :

i) à l’égard de l’année d’imposition 1990, celle de savoir si GPL a subi, relativement à une créance irrécouvrable, une perte de 259,776 $ au titre de placements d’entreprise;

ii) à l’égard de l’année d’imposition 1991, celle de savoir si GPL a subi relativement à certains placements (avances et actions) une perte en capital totalisant 646,487 $;

iii) à l’égard de l’année d’imposition 1992, celle de savoir si GPL doit des intérêts et des pénalités au titre d’acomptes provisionnels insuffisants;

iv) à l’égard de la cotisation du 2 juin 1995 établie en vertu de l’article 160 de la Loi, celle de savoir quelle est la juste valeur marchande du bien (terrain Montbeillard) cédé le 8 août 1991 (date d’évaluation) par SIM à GPL et quel est le montant de la dette fiscale de SIM.

[2] Relativement au dernier point, le ministre prétend que le terrain avait une juste valeur marchande de 5 700 000 $ alors que GPL soutient qu’il valait 4 035 000 $. L’intimée reconnaît que, dans l’hypothèse où cette cour croirait que GPL peut contester le montant de la dette fiscale de SIM et que la juste valeur marchande du terrain Montbeillard est inférieure à 5 632 587 $, la dette fiscale de SIM serait alors réduite à zéro et cette cotisation devrait être annulée.

[3] La solution à la troisième question en litige découle entièrement du traitement réservé aux deux premières questions : ce traitement dépend du montant d’impôt à payer pour les deux années d’imposition visées par celles-ci.

Faits

[4] SIM est constituée le 5 août 1988 dans le but d’acquérir le terrain Montbeillard situé dans la ville de Ste-Foy et contigu à l’autoroute Henri IV entre le boulevard Hochelaga et le chemin des Quatre-Bourgeois. L’intention de SIM est d’y construire des immeubles de bureaux (projet commercial) et des immeubles résidentiels (projet résidentiel), soit dans un but de placement à long terme, soit pour les revendre à profit (Projet Montbeillard ou Projet).

[5] Le 28 octobre 1988, GPL signe une convention entre actionnaires (convention) avec les autres actionnaires de SIM, soit les sociétés 2624-9235 Québec Inc. et 2627-3243 Québec Inc. (ces deux sociétés étant appelées ci-après le Groupe Wong), Gestion Donat Flamand Inc. (Gestion Flamand), Paul Martin Inc. (PMI) et Sodéroc Développement Limitée (Sodéroc). Le capital-actions de SIM se répartit alors de la façon suivante :

Le Groupe Wong 26%

Gestion Flamand 26%

Sodéroc 16%

PMI 16%

GPL 16%

Selon les termes de la convention, les actionnaires s’engagent aussi à consentir les avances requises pour le financement de SIM. Au 31 octobre 1988, GPL détient des actions dont le coût s’élève à 18 464 $ et a consenti des avances de 188 576 $.

[6] Tous les actionnaires ont une certaine expérience dans le domaine immobilier. GPL exploite depuis 1975 une entreprise de construction commerciale et résidentielle et gère de nombreux immeubles qu’elle détient, dont plusieurs centres d’achats situés notamment dans la région du Bas-Saint-Laurent. Sa participation dans le Projet Montbeillard constitue pour elle une première expérience dans le marché immobilier de la région de Québec. Le Groupe Wong possède une expertise dans le domaine de la rénovation résidentielle. Sodéroc est une société appartenant à un groupe d’ingénieurs de Québec (Groupe Roche) oeuvrant dans le domaine immobilier. PMI est un promoteur immobilier alors que Gestion Flamand appartient à M. Flamand, qui avait vendu auparavant une entreprise de fabrication de portes et fenêtres et qui était impliquée dans plusieurs placements immobiliers dans la région de Québec.

[7] Le 31 octobre 1988, SIM acquiert le terrain Montbeillard, d’une superficie totale de 1 518 591 pi2, de Centre commercial Côte St-Luc Limitée pour la somme de 5 429 684 $. Ce terrain est alors grevé d’une servitude restreignant son utilisation comme suit : 564,540 pi2 à des fins résidentielles, 954,051 pi2 à des fins d’immeubles de bureaux limités à quatre étages. Les immeubles ne peuvent être utilisés à des fins commerciales, à l’exception de petits locaux n’excédant pas 3 000 pi2 situés au rez-de-chaussée des immeubles de bureaux. La superficie maximale qu’il est permis d’affecter à l’usage commercial est de 35 0000 pi2 pour l’ensemble des édifices à construire.

[8] En participant au Projet Montbeillard, la plupart des actionnaires de SIM espèrent obtenir en sous-traitance une partie du travail à être réalisé. Ainsi, une société du Groupe Roche doit gérer les travaux de construction relatifs au projet commercial, alors que PMI doit réaliser le projet résidentiel. Une société du Groupe Wong doit administrer et gérer la location des immeubles de bureaux et des édifices résidentiels. Quant à GPL, elle n’a aucune intention de s’impliquer dans le développement du terrain Montbeillard. Elle n’agit que comme simple investisseur. C’est à la suite de la recommandation de l’actionnaire principal de PMI que GPL investit dans SIM.

[9] Le Groupe Roche loue un bureau situé sur le boulevard Laurier à Ste-Foy et désire déménager dans de nouveaux locaux qui lui appartiendront. Pour participer à SIM, obtenir le droit de gérer la réalisation du projet commercial et permettre au Groupe Roche d’acquérir au prix coûtant ses nouveaux locaux, Sodéroc s’engage en vertu de la convention à faire en sorte que le Groupe Roche déménage son bureau dans un édifice de la première phase et s’engage en outre à acheter 60 000 pi2 de locaux pour bureaux. Quant à SIM, elle espère permettre ainsi le démarrage rapide du Projet.

[10] Lors d’une réunion tenue le 31 janvier 1989, le conseil d’administration de SIM adopte une résolution décrétant le paiement d’intérêts au taux préférentiel plus 2 % sur toutes les avances consenties à SIM par ses actionnaires. On y discute aussi du développement du Projet Montbeillard. Des représentants du Groupe Roche recommandent de modifier l’ordonnancement des premières phases du Projet. En particulier, on suggère de reporter au printemps 1990, pour délivrance au printemps 1991, la construction de l’immeuble du Groupe Roche. Comme motif, on invoque la multiplicité de nouveaux projets d’immeubles de bureaux annoncés dans la région depuis quelques mois, ce qui laisse prévoir une période plus difficile à court terme pour la mise en marché de nouveaux bureaux en 1989 et 1990.

[11] Au cours de l’année 1989, des démarches sont entreprises pour obtenir du financement. La CIBC offre à SIM de fournir un prêt-relais de 5 400 000 $. Une hypothèque de premier rang est enregistrée le 7 juillet 1989. Le prêt hypothécaire comporte la clause usuelle de dation en paiement.

[12] Un an plus tard, les relations entre Sodéroc et les autres actionnaires sont tendues. Les coactionnaires ont appris que le Groupe Roche reporte son déménagement et qu’il a renouvelé le bail pour ses bureaux du boulevard Laurier. SIM décide alors de révoquer le contrat de gestion de Sodéroc lors de la réunion du 17 janvier 1990. Sodéroc s’adresse à un arbitre pour contester cette décision. Sodéroc obtient même une injonction pour empêcher SIM d’accorder un contrat de construction à une autre société. Les administrateurs songent à liquider SIM. Toutefois, le 30 avril 1990, les parties en viennent à une entente : SIM vend au Groupe Roche une partie du terrain Montbeillard, soit 180 882 pi2 , à un prix de 4,94 $ le pi2. Le Groupe Roche s’engage à débuter les travaux de construction au plus tard le 30 juin 1990 et SIM s’engage à racheter les actions de Sodéroc dans SIM pour une somme de 98 464 $ et à rembourser les avances de 281 536 $ que Sodéroc lui a consenties. Deux billets pour une somme totale de 380 000 $, remboursables le 17 mai 1991 et portant intérêts au taux de 10 % l’an sont garantis par une hypothèque de deuxième rang sur le terrain Montbeillard.

[13] Au cours de l’été 1990, PMI fait face à de sérieuses difficultés financières. SIM s’entend avec le banquier de PMI pour racheter les actions que PMI détient dans SIM et pour rembourser les avances qui lui avaient été consenties. Un billet est émis pour 300 000 $, payable sans intérêt le 17 mai 1991. Il doit toutefois porter intérêt après l’échéance, au taux préférentiel de la Banque Nationale du Canada majoré de 2 %. Ce billet est remis à la Banque Nationale du Canada, cessionnaire de l’universalité des créances de PMI.

[14] Le 12 juillet 1990, SIM convient avec les Entreprises HLP Inc. (Groupe Pomerleau) de former une nouvelle société pour réaliser le projet commercial. Cette entente prévoit notamment qu’Hervé Pomerleau Inc. doit obtenir les contrats de construction à forfait pour chacune des phases du projet commercial. Un an plus tard, ce contrat sera annulé.

[15] Le 22 août 1990, SIM s’entend avec Gestion Denis Beaubien Inc. (Gestion Beaubien) sur la réalisation du projet résidentiel. Une nouvelle société doit être formée à cette fin. SIM doit y détenir une participation de 50 % et Gestion Beaubien une participation de 50 % également. En vertu de cette entente, la nouvelle société doit octroyer à Construction Debeau Inc. (Debeau) un contrat de gestion des travaux requis pour la réalisation du projet.

[16] Au 30 septembre 1990, soit à la fin de l’exercice financier de GPL, les avances que GPL a consenties à SIM s’élèvent à 259 776 $.

[17] Conformément à son entente avec Gestion Beaubien, SIM vend le 5 octobre 1990 à Les Appartements Montbeillard phase I, société en commandite, et à Les Appartements Montbeillard phase II, société en commandite (Sociétés en commandite), une partie du terrain Montbeillard pour la réalisation du projet résidentiel. Le prix de vente est de 5 $ le pi2 .

[18] En novembre 1990, les tensions sont grandes entre certains des actionnaires de SIM, particulièrement entre Gestion Flamand et le Groupe Wong. Ces deux coactionnaires avaient fait ensemble des placements dans un autre projet immobilier de la région de Québec et ce projet faisait face à de sérieux problèmes financiers. D’ailleurs, CIBC intentera le 23 avril 1991 une poursuite judiciaire réclamant 2 000 000 $ aux deux coactionnaires susdits. Le 29 novembre 1990, se tient une réunion que les parties ont décrite comme la réunion de la « nuit des longs couteaux » . Aux premières heures du matin, un protocole d’entente (protocole) est signé. La solution retenue est de séparer les intérêts des différents actionnaires dans le projet Montbeillard. Le Groupe Wong héritera du projet résidentiel tandis que GPL et Gestion Flamand conserveront pour SIM le projet commercial.

[19] Le protocole prévoit que le Groupe Wong échangera ses actions dans SIM et ses avances à celle-ci contre des participations dans les Sociétés en commandite. Pour que le projet résidentiel puisse être réalisé, il est essentiel toutefois que GPL et Gestion Flamand maintiennent leur garantie afin d’obtenir du financement auprès de l’Assurance-Vie Desjardins et de la Caisse populaire Les Boulevards de Trois-Rivières. Ils doivent aussi fournir à la ville de Ste-Foy un dépôt d’environ 106 286 $ de même que des lettres de crédit bancaire pour un montant de 956 571 $ pour garantir le paiement des améliorations (aqueduc et égouts) à être effectuées par la ville. Par contre, les Sociétés en commandite acceptent de payer une somme supplémentaire de 1 000 000 $ pour leurs terrains, ce qui représente un coût additionnel de 2,77 $ le pi2. Cette somme doit être garantie par une hypothèque de troisième rang[1].

[20] Lorsque GPL et Gestion Flamand se présentent le 6 décembre 1990 à la CIBC pour obtenir les lettres de crédit bancaire, le banquier exige des garanties que Gestion Flamand n’est pas en mesure de fournir. Il faut ajouter qu’en plus de ses problèmes financiers M. Flamand a des problèmes de santé. GPL réalise qu’il lui faudra acquérir toutes les actions de SIM et en devenir l’unique actionnaire car elle ne désire pas assumer tous les risques du financement tout en ne possédant qu’environ la moitié des actions de SIM.

[21] Le 21 décembre 1990, Gestion Flamand révoque par écrit toutes ses garanties en faveur de la CIBC, de la Caisse populaire Les Boulevards et d’Assurance-Vie Desjardins, ce qui entraîne le gel du financement du projet résidentiel.

[22] Le 4 janvier 1991, Debeau informe les Sociétés en commandite, SIM ainsi que M. Germain Pelletier que le gel du financement du projet résidentiel met en péril la poursuite des travaux de construction. Le 14 janvier 1991, SIM et ses actionnaires sont mis en demeure par Debeau d’avancer les fonds nécessaires à la réalisation du projet.

[23] Le 21 janvier 1991, les administrateurs de GPL se réunissent pour discuter du projet Montbeillard. On annonce à ce moment-là : « que la compagnie sera appelée à prendre le contrôle et à faire des investissements importants; cependant, M. Germain Pelletier et Marc Pelletier reconnaissent au site situé dans la ville de Ste-Foy une grande valeur » .

[24] Vu le défaut de Gestion Flamand d’honorer ses engagements, GPL se voit obligée de financer seule les activités de SIM et notamment de déposer la somme de 106 286 $ et de fournir les lettres de crédit bancaire pour la réalisation du projet des Sociétés en commandite. Elle doit aussi i) déposer à l’Assurance-Vie Desjardins une lettre de garantie pour un montant de 300 000 $; ii) déposer à la CIBC un cautionnement pour un montant de 1 500 000 $ servant à garantir le paiement du coût des services d’aqueduc et d’égouts s’élevant à 1 100 000 $ et à éponger les dépassements de la marge de crédit qui se chiffrent à 400 000 $; iii) verser des intérêts de 197 603 $ à la CIBC à l’égard du prêt hypothécaire consenti à SIM.

[25] Le 7 février 1991, GPL acquiert de SIM la créance hypothécaire de $1 million sur Société en commandite phase I et s’engage en contrepartie à acquitter le coût des services municipaux, qui s’élève à 1 062 857 $, et à éponger le dépassement des marges de crédit offertes par les banquiers de SMI. Le même jour, le Groupe Wong vend à GPL toutes ses actions de SIM pour une somme de 25 000 $ et sa créance relative aux avances totalisant 475 000 $ qu’il avait consenties à SIM. Le prix total de 500 000 $ est payable 100 000 $ comptant et le solde est garanti par une cession partielle de la créance hypothécaire de $1 million.

[26] En raison de tous les problèmes survenus entre les actionnaires, la CIBC se désintéresse du financement du Projet. Le 4 février 1991, elle révise son offre de financement en réduisant la limite de crédit à 3 200 000 $ tout en maintenant les mêmes exigences au niveau des mises de fonds des actionnaires.

[27] Les conditions de financement offertes par la CIBC sont telles que GPL ne voit plus d’avantage à maintenir en vie SIM, qui a d’ailleurs accumulé un important déficit d’environ $ 1 million[2]. Elle décide de réaliser elle-même le Projet Montbeillard. Pour acquérir le reste du terrain Montbeillard, qui représente une superficie de 603 110 pi2, GPL décide de rembourser toutes les sommes que SIM doit à la CIBC, soit un total de 3 429 070,65 $, et obtient de cette dernière, le 29 avril 1991, la cession de sa créance hypothécaire avec droit de subrogation.

[28] Le 17 mai 1991, GPL enregistre un avis de 60 jours conformément aux articles 1040a) et suivants du Code civil dans lequel elle dénonce les omissions ou contraventions de SIM. On informe SIM qu’elle peut empêcher l’exercice de la dation en paiement en remédiant aux omissions mentionnées dans cet avis.

[29] Par lettres du 10 janvier 1991 et du 19 février 1991, GPL avait mis Gestion Flamand en demeure de rectifier ses fautes contractuelles ou de lui vendre ses actions pour un prix égal à 75 % de leur juste valeur, tel qu’il était prévu à la convention entre actionnaires. GPL estime cette valeur à 1$. Pour arriver à cette valeur, GPL tient pour acquis que le coût moyen des 608 000 pi2 restants s’élève à 8,68 $ le pi2, que la juste valeur du terrain selon une évaluation obtenue en octobre 1990 s’élève à 9,50 $ le pi2 et que le déficit (même en tenant compte d’une vente hypothétique à 9,50 $ le pi2) s’élève à 510 195 $[3]. Après que GPL a eu fait une demande d’arbitrage, Gestion Flamand accepte, le 12 juin 1991, de céder à GPL pour une somme de 1 $ toutes ses actions dans SIM. À compter de cette date, GPL devient la seule actionnaire de SIM.

[30] À la suite d’une lettre de mise en demeure expédiée par Sodéroc le 23 mai 1991, soit quelques jours après avoir envoyé l’avis de 60 jours, GPL acquiert de Sodéroc, le 16 juillet 1991, pour une somme de 375 000 $, la créance que cette dernière avait sur SIM, soit les deux billets totalisant 380 000 $. GPL se fait ainsi subroger dans les droits de Sodéroc sur sa créance hypothécaire de deuxième rang.

[31] Peu après, soit le 8 août 1991, n’ayant pas remédié aux fautes contractuelles mentionnées dans l’avis de 60 jours, SIM cède à GPL, en vertu de la clause de dation en paiement, le terrain Montbeillard qu’il lui reste. À la suite de cette cession, SIM ne possède plus d’actifs lui permettant de continuer l’exploitation de son entreprise. Elle cesse d’ailleurs ses opérations et se déclarera en faillite le 15 avril 1994.

[32] Le ministre a ajouté comme revenu d’entreprise le gain réalisé par SIM lors de la cession du terrain Montbeillard en faveur de GPL. Il a d’abord estimé la juste valeur marchande du terrain à $7,2 millions de dollars, ce qui a entraîné un impôt de 681 251 $ pour SIM. N’ayant plus les ressources financières pour le faire, SIM n’a pas acquitté cet impôt. Le ministre a alors établi, le 2 juin 1995, en vertu de l’article 160 de la Loi, une cotisation tenant GPL responsable de cet impôt.

[33] Par la suite, soit le 24 juin 1996, le ministre a diminué la juste valeur marchande du terrain Montbeillard à $5,7 millions de dollars. À l’appui de cette valeur, le ministre a fait témoigner un évaluateur agréé, M. Yvon Ouellet, employé du ministre. Cet évaluateur est d’avis que le terrain Montbeillard valait au 8 août 1991 une somme de 6 564 000 $. Pour établir cette valeur, l’évaluateur du ministre a adopté la technique de parité qui consiste à faire l’étude de ventes récentes de propriétés similaires dans le même arrondissement que le terrain à être évalué et à en extraire des données qui pourront servir de base à la détermination de la valeur de l’immeuble à l’étude.

[34] Cet évaluateur a pu relever 21 transactions survenues sur le territoire de la ville de Ste-Foy (secteur Haute-ville). Certaines de ces ventes ont été exclues parce qu’elles se rapportaient à des terrains situés sur le boulevard Laurier. Il s’agit-là d’une zone offrant un potentiel d’utilisation supérieure à celui du terrain Montbeillard. D’autres transactions ont été éliminées parce qu’elle se rapportaient à des ventes de terrains à vocation purement résidentielle et cet évaluateur considérait leur potentiel d’utilisation comme inférieur à celui du terrain à l’étude.

[35] Monsieur Ouellet a retenu trois ventes qui lui apparaissait les plus représentatives. Le prix au pi2 allait de 9,79 $ à 11 $. La vente à 11 $ se rapporte au terrain de 180 882 pi2 qu’a acquis le Groupe Roche de SIM à un prix de 4,94 $ le pi2 et qu’il a transféré à une société dans laquelle il détenait une participation majoritaire. Cette vente s’est faite le 12 septembre 1990. C’est sur cet emplacement que le Groupe Roche a érigé ses nouveaux locaux. Ce site est situé à l’extrémité nord du terrain Montbeillard et a son front sur le chemin des Quatre-Bourgeois.

[36] Comme le précédant, les deux autres terrains relevés par M. Ouellet sont situés sur le chemin des Quatre-Bourgeois. Contrairement au terrain du Groupe Roche, ces terrains ont un accès direct à ce chemin. L’un est d’une superficie de 76 114 pi2 et s’est vendu à 9,79 $ le pi2 tandis que l’autre, ayant une superficie de 92 644 pi2 , a été vendu à 10,25 $ le pi2. Ce dernier terrain est zoné CC/4, zonage plus permissif que celui du terrain Montbeillard. Ce zonage autorise l’utilisation commerciale des groupes I, II, et III. Le rapport plancher-sol est de 3,0 alors que celui du terrain Montbeillard ne peut dépasser 2,0.

[37] Monsieur Ouellet a aussi tenu compte d’un terrain que SIM a vendu à Bell Cellulaire en 1992. Il est situé à l’extrémité sud du terrain Montbeillard et a son front sur le chemin Hochelaga. Bell Cellulaire a acheté non seulement le terrain, d’une superficie de 42 481 pi2, mais aussi un édifice construit par SIM. En ventilant le prix d’achat entre le terrain et le bâtiment, les parties ont attribué une valeur de 6,60 $ le pi2 au terrain. Selon l’évaluateur du ministre, la valeur attribuée au bâtiment ne comprenait pas la marge de profit qu’un entrepreneur est en droit d’exiger habituellement. Il a donc ajouté au coût de la construction une somme de 153 900 $, ce qui a fait monter le prix unitaire du terrain à 13,30 $ le pi2.

[38] Monsieur Ouellet a consulté une étude d’une firme d’évaluateurs-conseils de la région de Québec ¾Racine, Larochelle et Associés ¾, qu’un article du journal Les Affaires du 9 novembre 1991 a résumée. Dans cet article, on note que le taux moyen d’absorption de nouveaux locaux pour bureaux a été de 350 000 pi2 au cours des dix années précédentes, alors que le taux pour les 18 mois précédents s’élevait à 723 000 pi2. Le taux d’inoccupation pour la ville de Québec s’élevait à tout près de 10 % en octobre 1991 alors qu’à 6,2 % il était plus faible dans le secteur Ste-Foy, Haute-ville. L’auteur de l’étude, M. Larochelle, se disait confiant que le surplus de locaux pour bureaux pouvait être absorbé sur une période de deux ans.

[39] Monsieur Ouellet en a donc conclu qu’il serait possible à SIM de disposer de ses 603 110 pi2 sur une période de quatre ans à un rythme d’environ 150 000 pi2 par année. Après avoir fait l’analyse des ventes, il a conclu que le prix unitaire applicable aux emplacements d’une superficie moyenne d’environ 150 000 pi2 était de 12 $ le pi2. Il a estimé à 5 % par année le coût de rétention net des terrains au cours de cette période. Voici comment il a déterminé la valeur marchande nette du terrain :

Année 1 150 000 p.c. X 12 $ = 1 800 000 X 0,97561 = 1 756 000 $

Année 2 150 000 p.c. X 12 $ = 1 800 000 X 0,92860 = 1 671 500 $

Année 3 150 000 p.c. X 12 $ = 1 800 000 X 0,88385 = 1 590 900 $

Année 4 153 110 p.c. X 12 $ = 1 837 000 X 0,84126 = 1 545 700 $

Total: 6 564 100 $

Valeur Arrondie @ 6 564 000 $

[40] Monsieur Martin Isabel, évaluateur agréé, a aussi produit un rapport d’évaluation pour GPL et à la demande de celle-ci. Dans son rapport, il indique que la valeur du terrain au 1 juillet 1990, selon l’évaluation municipale, s’élevait à 2 905 340 $, ce qui représente une valeur de 4,95 $ le pi2. Pour établir sa valeur, M. Isabel a aussi adopté la technique de parité. Son étude du marché lui a permis de retenir 14 ventes d’emplacements destinés à la construction résidentielle et commerciale.

[41] Comme M. Ouellet, M. Isabel a accordé plus d’importance aux terrains vacants à vocation commerciale. Essentiellement, il a considéré les mêmes quatre ventes que M. Ouellet, à savoir les trois ventes de terrains situés sur le chemin des Quatre-Bourgeois et la vente à Bell Cellulaire. Toutefois, M. Isabel est d’avis que les trois emplacements situés sur le chemin des Quatre-Bourgeois représentent des terrains de valeur supérieure au terrain Montbeillard qui a son front sur une rue secondaire. Non seulement faut-il tenir compte du potentiel commercial inférieur d’un terrain situé sur une telle voie, mais il faut aussi considérer les restrictions ayant trait à l’usage commercial du rez-de-chaussée de bâtiments pouvant être érigés sur le terrain Montbeillard. Cette situation justifie, selon M. Isabel, une valeur unitaire moindre, soit de l’ordre de 8,50 $ le pi2.

[42] Comme M. Ouellet, M. Isabel croit qu’il faudra une certaine période pour écouler l’ensemble du terrain Montbeillard. À son avis, une période de six ans serait requise. Il appuie cette conclusion sur son appréciation du marché des locaux pour bureaux dans la région urbaine de Québec. Au cours de la période de 1986 à 1990 on assiste à une grande activité dans la construction de nouveaux édifices, principalement dans le secteur Lebourneuf ainsi que dans la Haute-ville de Québec. L’offre de locaux pour bureaux s’est accrue de 1,5 million de pi2. À partir de 1989, les taux d’inoccupation commencent à montrer des tendances à la hausse, alors que les effets négatifs de la récession se font sentir. Selon une étude réalisée par Desjarlais Prévost et Associés Inc., le taux d’inoccupation pour la région urbaine de Québec passe de 6,6 % en 1988 à 12 % en 1991.

[43] À la date d’évaluation, le marché des locaux pour bureaux de la région urbaine de Québec a déjà amorcé une phase extrêmement difficile. Les taux d’inoccupation à la hausse se traduisent par une augmentation importante des incitatifs à la location. L’étude qu’a produite M. Isabel à l’appui de son rapport est datée du mois d’avril 1994. Cette étude révèle que la demande de bureaux est à la baisse depuis 1989 pour le secteur privé et depuis 1990 pour le secteur public. La demande est pratiquement inexistante dans le secteur privé en 1992 et 1993.

[44] Monsieur Isabel a aussi tenu compte du fait qu’une superficie extrêmement importante nécessite une longue période de mise en valeur et entraîne donc des coûts de rétention élevés pour le propriétaire. À la date d’évaluation, le rendement des placements sans risque s’élevait à 10 % et le taux d’inflation historique était de l’ordre de 5 %. Il a donc estimé un coût de rétention annuel net de 5 %. Quant au taux d’actualisation, il a retenu le taux de 10 % auquel il a ajouté 1 % pour les taxes annuelles à payer. Voici comment M. Isabel a déterminé la juste valeur marchande pour le terrain Montbeillard au 8 août 1991 :

Recettes Actualisé à

   11%

Année 1 100 000 pi2 @ 8,50 $ 850 000 $ 765 800 $

Année 2 100 000 pi2 @ 8,92 $ 892 500 $ 724 400 $

Année 3 100 000 pi2 @ 9,37 $ 937 000 $ 685 100 $

Année 4 100 000 pi2 @ 9,84 $ 984 000 $ 648 200 $

Année 5 100 000 pi2 @ 10,33 $ 1 033 000 $ 613 000 $

Année 6 103 110 pi2 @ 10,85 $ 1 119 000 $ 598 300 $

603 110 pi2 4 034 800 $

Arrondie @ 4 035 000 $

Soit: 6,69 $/pi2

Analyse

Article 160 de la Loi

[45] Il est utile de citer la disposition en vertu de laquelle le ministre a établi sa cotisation, à savoir le paragraphe 160(1) de la Loi. Cet article édicte :

160(1) Lorsqu’une personne a, depuis le 1er mai 1951, transféré des biens, directement ou indirectement, au moyen d’une fiducie ou de toute autre façon,

a) à son conjoint ou à une personne devenue depuis son conjoint,

b) à une personne qui était âgée de moins de 18 ans, ou

c) à une personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance,

les règles suivantes s’appliquent:

d) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont conjointement et solidairement responsables du paiement d’une partie de l’impôt de l’auteur du transfert en vertu de la présente Partie pour chaque année d’imposition, égale à l’excédent de l’impôt pour l’année sur ce que cet impôt aurait été sans l’application des articles 74 à 75.1 à l’égard de tout revenu tiré des biens ainsi transférés ou des biens y substitués ou à l’égard de tout gain tiré de la disposition de tels biens, et

e) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont conjointement et solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d’un montant égal au moins élevé des deux montants suivants:

(i) la fraction, si fraction il y a, de la juste valeur marchande des biens à la date du transfert qui est en sus de la juste valeur marchande à cette date de la contrepartie donnée pour le bien, et

(ii) le total des montants dont chacun représente un montant que l’auteur du transfert doit payer en vertu de la présente loi au cours de l’année d’imposition dans laquelle les biens ont été transférés ou d’une année d’imposition antérieure ou pour une de ces années,

mais aucune disposition du présent paragraphe n’est réputée limiter la responsabilité de l’auteur du transfert en vertu de toute autre disposition de la présente loi.

En vertu de cet article, un contribuable qui a acquis un bien d’une personne (le débiteur fiscal) avec lequel il a un lien de dépendance et qui doit des impôts (dette fiscale) au ministre devient responsable des impôts du débiteur fiscal pour un montant égal à l’excédent de la juste valeur marchande du bien sur la contrepartie versée, jusqu’à concurrence du montant de la dette fiscale. Pour déterminer si la cotisation du ministre est bien fondée il faut considérer trois montants : la juste valeur marchande du bien, la juste valeur marchande de la contrepartie et le montant de la dette fiscale.

[46] Avant d’aborder la question de la juste valeur marchande, il est important de constater ici que cette valeur joue un rôle important non seulement pour les fins de l’article 160 mais aussi pour la détermination de la dette fiscale. Nous sommes en effet en présence d’une circonstance assez exceptionnelle. La dette fiscale découle principalement, sinon en totalité, du gain réalisé par SIM lors de la cession du terrain Montbeillard à GPL. Le procureur du ministre a reconnu que, si la juste valeur marchande du terrain était inférieure à 5 632 587 $, SIM n’aurait aucun impôt à payer.

[47] La première question qu’il faut donc résoudre est celle de la juste valeur marchande du terrain Montbeillard. C’est d’ailleurs sur cette question qu’a porté une grande partie des débats lors de l’audience. C’est la technique de parité utilisée par les deux évaluateurs agréés qui doit servir de base pour la détermination de la juste valeur marchande à la date d’évaluation. Non seulement les évaluateurs ont-ils utilisé la même technique d’évaluation mais ils se sont fondés aussi sur les mêmes transactions immobilières pour déterminer le prix unitaire du terrain.

[48] À mon avis, il faut rejeter les deux transactions portant sur les terrains faisant partie à l’origine du terrain Montbeillard. Il s’agit de la vente à 11 $ le pi2 effectuée par le Groupe Roche à une société liée et celle par SIM en faveur de Bell Cellulaire. Ces deux ventes n’offrent pas les meilleures garanties pour ce qui est de l’établissement d’une juste valeur marchande. Dans le premier cas, il s’agit d’une transaction entre parties liées. Dans le deuxième cas, le contrat entre les parties ne permet pas de déterminer avec certitude le prix du terrain.

[49] Dans la détermination du prix attribué au terrain, GPL et Bell Cellulaire avaient selon toute probabilité le même intérêt. En effet, il est généralement plus avantageux pour un acheteur d’attribuer une plus grande valeur au bâtiment puisque le coût du terrain ne peut être amorti. De façon générale, pour le vendeur, il importe peu que le prix soit attribué au terrain ou au bâtiment. Dans ce cas-ci, il pouvait même être avantageux à GPL de mettre la valeur du terrain la plus basse possible afin de lui permettre de mieux se défendre contre une cotisation fiscale à la suite de l’acquisition du terrain de SIM à un prix possiblement inférieur à la juste valeur marchande.

[50] Les ajustements apportés par l’évaluateur du ministre à la ventilation du prix fait par Bell Cellulaire et GPL n’offrent pas non plus de meilleures garanties pour ce qui est de la détermination de la valeur du terrain. Il faut plutôt s’en remettre aux deux autres transactions se rapportant à des terrains situés sur le chemin des Quatre-Bourgeois. Elles se sont faites à des prix allant de 9,79 $ à 10,25 $ le pi2.

[51] Je partage le point de vue de M. Isabel que le terrain Montbeillard n’offre pas un potentiel commercial aussi élevé que ces deux terrains. Les terrains situés sur le chemin des Quatre-Bourgeois offrent une plus grande visibilité et un meilleur accès que le terrain Montbeillard. Pour accéder au terrain Montbeillard, il faut utiliser un chemin résidentiel à partir soit du chemin des Quatre-Bourgeois, soit du chemin Hochelaga. De plus, il faut tenir compte de la servitude grevant le terrain Montbeillard. Le potentiel très restreint d’utilisation des rez-de-chaussée à des fins commerciales justifie une valeur unitaire moindre que celles établies à l’égard des deux terrains du chemin des Quatre-Bourgeois. Toutefois, j’estime qu’une valeur de 9,25 $ le pi2 serait plus raisonnable que celle de 8,50 $ le pi2 pour tenir compte de ces contraintes[4].

[52] Reste à déterminer la période d’écoulement pour ce grand terrain. Je crois que M. Isabel a été trop influencé par les événements survenus en 1992 et 1993 alors que le marché immobilier était à son plus déprimé dans la région urbaine de Québec. Il s’est d’ailleurs inspiré d’une étude du mois d’avril 1994 pour sa propre étude. Or, il est important de se situer au 8 août 1991 pour évaluer les conditions du marché immobilier existant dans le secteur du terrain Montbeillard.

[53] Tel que le révèle l’article du 9 novembre 1991 du journal Les Affaires —qui est d’ailleurs presque contemporain à la date d’évaluation —, les gens n’avaient pas encore réalisé l’ampleur des difficultés auxquelles allait faire face le marché des locaux pour bureaux dans la région de Québec. Par exemple, M. Lachapelle était confiant que le surplus des nouveaux locaux pouvait se résorber sur une période de deux ans.

[54] Il faut aussi noter que les données utilisées par M. Isabel pour se faire une image de la situation de l’immobilier dans la ville de Ste-Foy étaient fondées sur l’ensemble de la région urbaine de Québec. Comme le révèle l’article du journal Les Affaires, le secteur Ste-Foy, Haute-ville, se démarquait du reste de la région urbaine de Québec par un taux d’inoccupation plus faible : 6,2 % au lieu de 10 %. Compte tenu du fait qu’à la date d’évaluation la détérioration du marché immobilier ne faisait que commencer et que toute son ampleur n’avait pas encore été saisie, il m’apparaît plus raisonnable d’adopter une période d’écoulement de quatre ans comme l’a fait l’expert du ministre.

[55] Si j’incorpore les modifications déjà décrites plus haut aux calculs effectués par M. Isabel, j’arrive à une juste valeur marchande arrondie de 4 630 000 $, soit 7,68 $ le pi2, déterminée de la façon suivante :

Recettes Actualisé à

   11%

Année 1 150 000 pi2 @ 9,25 $ 1 387 500 $ 1 250 000 $

Année 2 150 000 pi2 @ 9,71 $ 1 456 875 $ 1 182 432 $

Année 3 150 000 pi2 @ 10,20$ 1 529 719 $ 1 118 517 $

Année 4 153 100 pi2 @ 10,71$ 1 639 507$ 1 079 994 $

Total 4 630 943 $

Arrondie @ 4 630 000 $

soit :    7,68 $[5]

[56] Si le ministre avait utilisé, pour établir sa cotisation de SIM pour l’année 1991, une juste valeur marchande de 4 630 000 $ pour le terrain Montbeillard, SIM n’aurait eu aucun impôt à payer. Le procureur hésite à reconnaître que la cotisation du 2 juin 1995 devrait être annulée parce qu’il est incertain si cette cour a compétence pour considérer le montant de la dette fiscale de SIM.

[57] Cette incertitude provient probablement d’une récente décision de mon collègue le juge Mogan dans Schafer v. The Queen, 95-1730(GST)G, dans laquelle il a conclu qu’un contribuable à l’égard duquel une cotisation a été établie en vertu d’un article analogue à l’article 160 ne pouvait contester le montant de l’impôt dû par le débiteur fiscal. Il se fonde sur un article analogue au paragraphe 152(8) de la Loi, qui crée une présomption de validité à l’égard de la cotisation du ministre. Cette décision va toutefois à l’encontre d’un certain courant jurisprudentiel de cette cour qui reconnaît qu’un contribuable peut contester le montant de la dette fiscale. Voir notamment Kraychy v. The Queen, 96 DTC 1479 (juge Sobier), Route Canada Real Estate Inc. v. Canada, (No. 1) [1995] 2 C.T.C. 2421 (juge Bell), Route Canada Real Estate Inc. v. Canada, (No. 2), [1995] 2 C.T.C. 2430 (juge Sarchuk), Acton v. The Queen, 95 DTC 107 (juge Bowman), Sarraf et al. v. M.N.R., [1994] 1 C.T.C. 2519, 94 DTC 1506 (juge Bowman), Ramey v. The Queen, [1993] 2 C.T.C. 2119, 93 DTC 791 (juge Bowman), Thorsteinson v. M.N.R., [1980] C.T.C. 2415, 80 DTC 1369 (le commissaire Taylor). À ma connaissance, la Cour d’appel fédérale n’a pas encore eu à se pencher sur cette question.

[58] Ici, il serait tout à fait injuste de conclure que GPL ne peut pas contester le montant de la dette fiscale du débiteur fiscal. Au moment de la cotisation de SIM, cette dernière était en faillite et c’est le syndic qui devait prendre la décision de contester la cotisation du ministre. Il est facile d’imaginer que le syndic puisse avoir eu des intérêts différents de ceux de GPL pour qu’il n’en appelle pas de la cotisation établie à l’égard de SIM.

[59] Il ne faut pas oublier non plus le contexte dans lequel le ministre établit des cotisations en vertu de l’article 160 de la Loi. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une cotisation de l’impôt dû par un contribuable mais plutôt d’une procédure de perception auprès d’un tiers de sommes qui sont dues par un autre contribuable. Il s’agit d’une sorte d’action paulienne exercée par le ministre. Il m’apparaît essentiel que le tiers contre lequel un tel recours est exercé puisse contester le montant de la dette due par le débiteur. Je ne crois pas que la présomption de validité édictée par le paragraphe 152(8) de la Loi s’applique à l’égard d’un tiers.

[60] Il est difficile d’imaginer un meilleur exemple que celui des circonstances de cet appel pour illustrer la nécessité de permettre à un contribuable faisant l’objet d’une cotisation en vertu de l’article 160 de contester le montant de la dette fiscale. On pourrait même se demander s’il ne serait pas plus équitable que le fardeau de la preuve incombe au ministre et qu’il soit tenu d’établir que la dette fiscale est bien exigible. Toutefois, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur cette question ici puisque le ministre reconnaît que la dette fiscale est nulle si la juste valeur marchande est inférieure à 5 632 587 $. Or, la valeur que je retiens est bien inférieure à ce montant.

[61] Même si cette cour n’avait pas compétence pour vérifier la légitimité de la dette fiscale de SMI, j’en viendrais quand même à la conclusion que la cotisation doit être annulée parce que la juste valeur marchande du terrain Montbeillard ne dépasse pas la valeur de la contrepartie reçue par SIM. En effet, au moment du transfert du terrain Montbeillard, soit le 8 août 1991, SIM devait à GPL une somme de 4 641 727 $ dont voici les différents éléments :

Avance au 30-9-90 de GPL 259 776 $

Avance de GPL en 1991 102 880 $

Créance acquise le 7-2-91 du Groupe Wong 475 000 $

Créance acquise le 29-4-91 de la CIBC 3 429 071 $

Créance acquise le 16-7-91 de Sodéroc 375 000 $

TOTAL 4 641 727 $

[62] Si GPL et SIM n’avaient pas eu entre elles de lien de dépendance au 8 août 1991, je suis convaincu que SIM aurait exigé que le terrain soit cédé en contrepartie d’une remise de dette d’au moins 4 630 000 $, soit la valeur du terrain, et GPL aurait accepté une telle demande. Je ne vois pas de raison d’adopter une interprétation différente dans un cas comme celui-ci où les parties ont entre elles un lien de dépendance. Il n’était pas essentiel que SIM obtienne une quittance écrite dans ces circonstances. Une fois le terrain transféré, elle devenait insolvable et savait bien que GPL ne reviendrait pas exiger son dû.

[63] Pour obtenir le terrain, GPL s’est mise à acquérir toutes les actions de ses coactionnaires et les avances que certains d’entre eux avaient consenties à SIM. Pour obtenir le contrôle de SIM, GPL a acheté les actions et les avances faites par le Groupe Wong. Par la suite, elle a acquis la créance hypothécaire de la CIBC, ce qui lui permettrait d’obtenir le terrain Montbeillard tout en se soustrayant aux poursuites de certains autres créanciers de SIM, dont notamment la Banque Nationale, à laquelle SIM devait 300 000 $ pour les actions de PMI et les avances consenties par celle-ci , de même que Gestion Flamand, dont les avances semblent n’avoir jamais été remboursées. Finalement, pour acquérir le droit de conserver le terrain, GPL a dû désintéresser Sodéroc qui détenait une hypothèque de 380 000 $ sur le terrain.

[64] À mon avis, toutes ces étapes préliminaires étaient essentielles à la prise de contrôle du terrain Montbeillard. Au moment de la cession du terrain par SIM en faveur de GPL, il s’est opéré une compensation équivalant au paiement des sommes dues par SIM à GPL jusqu’à concurrence de 3 630 000 $. La cotisation en vertu de l’article 160 de la Loi doit donc être annulée.

Perte de 259 776 $ au titre d’un placement entreprise

[65] La prochaine question qu’il faut aborder est celle du droit de GPL à la déduction d’une perte au titre d’un placement d’entreprise à l’égard de l’avance de 259 776 $ qu’avait consentie GPL à SIM au 30 septembre 1990. Pour qu’il puisse y avoir une perte déterminée selon l’alinéa 39(1)c) de la Loi, il est essentiel qu’il y ait eu une disposition à cette date. GPL soutient que cette avance était une créance irrécouvrable au 30 septembre 1990 et qu’elle est réputée en avoir disposé en vertu de l’alinéa 50(1)a) de la Loi. Cette disposition édicte :

50(1) Aux fins de la présente sous-section,

a) lorsqu’un contribuable établit qu’une créance qui lui est due à la fin d’une année d’imposition (autre qu’une créance qui lui serait due du fait de la disposition d’un bien à usage personnel) s’est révélée être au cours de l’année une mauvaise créance, ou

b) lorsqu’une action du capital-actions d’une corporation (autre qu’une action reçue par un contribuable en contrepartie de la disposition d’un bien à usage personnel) appartient au contribuable à la fin d’une année d’imposition et que

(i) ou bien la corporation est devenue au cours de l’année un failli au sens du paragraphe 128(3),

(ii) ou bien elle est une corporation visée à l’article 6 de la Loi sur les liquidations, insolvable au sens de cette loi et au sujet de laquelle une ordonnance de mise en liquidation en vertu de cette loi a été rendue dans l’année, ou

(iii) ou bien la corporation est insolvable à la fin de l’année et ni elle ni une corporation qu’elle contrôle n’exploite alors d’entreprise et, à la fois:

(A) à la fin de l’année, la juste valeur marchande de l’action est nulle et il est raisonnable de s’attendre à ce que la corporation soit dissoute ou liquidée et ne commence pas à exploiter une entreprise,

(B) le contribuable fait un choix, dans sa déclaration de revenu en vertu de la présente partie pour l’année, pour que le présent paragraphe s’applique à l’action,

le contribuable est réputé avoir disposé de la créance ou de l’action à la fin de l’année pour un produit nul et l’avoir acquise de nouveau immédiatement après à un coût nul.

[66] GPL soutient que son avance était irrécouvrable en raison de la situation financière très précaire de SIM. Deux des coactionnaires s’étaient retirées soit PMI et Sodéroc. Le conseil d’administration avait même décidé de procéder à la liquidation et dissolution de SIM et, dans un tel contexte, les créanciers hypothécaires auraient repris les immeubles et les actionnaires n’auraient pu obtenir le remboursement de leur avance.

[67] Je ne crois pas que cette prétention de GPL soit bien fondée. Il est vrai que l’article 50 édicte que c’est le contribuable qui doit établir qu’une créance qui lui est due s’est révélée être une créance irrécouvrable. Toutefois, il est important que la décision du contribuable quant au caractère irrécouvrable ait été prise de façon raisonnable. Dans l’affaire Hogan v. M.N.R., 56 DTC 183, à la page 193, le commissaire Fisher affirme qu’un contribuable doit « honnêtement et raisonnablement » considérer les facteurs pertinents dans la prise de sa décision :

For the purposes of the Income Tax Act, therefore, a bad debt may be designated as the whole or a portion of a debt which the creditor, after having personally considered the relevant factors mentioned above in so far as they are applicable to each particular debt, honestly and reasonably determines to be uncollectable at the end of the fiscal year when the determination is required to be made, notwithstanding that subsequent events may transpire under which the debt, or any portion of it, may in fact be collected. The person making the determination should be the creditor himself ...

[68] Je n’ai pas été convaincu ici par la preuve offerte par GPL qu’elle avait agi de façon raisonnable en déterminant que son avance de 259 776 $ était devenue irrécouvrable. Tout d’abord, aucun représentant de GPL n’est venu expliquer la démarche suivie pour en venir à cette conclusion. Seul l’avocat s’occupant des affaires commerciales de GPL est venu raconter les événements qui auraient pu inciter GPL à conclure que la créance était devenue irrécouvrable. Toutefois, il n’avait pas participé personnellement à la prise de cette décision.

[69] Je ne crois pas non plus qu’il ait été raisonnable dans les circonstances qui se dégagent de la preuve dans cet appel de conclure que l’avance était irrécouvrable. Tout d’abord, nous ne sommes pas en présence d’une créance à l’égard d’un bien vendu ou d’un service fourni par GPL. Il s’agit d’avances qui ont servi à financer les besoins en capital de SIM pour financer la mise en valeur du terrain Montbeillard. Je crois que les propos du juge Rip dans l’affaire Business Art Inc. v. M.N.R., 86 DTC 1842, à la page 1848, cités par le procureur de GPL dans ses notes d’argumentation, décrivent bien cette situation :

It is not unusual for a person to invest in a corporation by subscribing for share capital and lending money without interest; as far as he is concerned the shares and his loans constitute a single investment and if later on, he is called on to advance further funds without interest he is only increasing his investment.

[70] Ici, il n’y avait aucun terme pour le remboursement des avances. Au départ, il n’y avait même pas d’intérêt qui courait. Ce n’est que lors de la réunion du 31 janvier 1989 que les actionnaires ont adopté une résolution prévoyant des intérêts sur les avances. Il s’agit donc essentiellement d’un financement à long terme. Les actionnaires savaient fort bien que leurs avances ne pourraient pas être remboursées rapidement et que d’autres avances seraient nécessaires pour subvenir aux futurs besoins financiers de SIM.

[71] De plus, on n’a produit aucune preuve établissant que GPL a eu l’intention, au 30 septembre 1990, de se retirer de SIM comme l’avaient d’ailleurs fait auparavant PMI et Sodéroc. On n’a produit aucune preuve établissant que GPL a demandé le remboursement de son avance de 259 776 $ avant le 1er octobre 1990. Non seulement GPL est-elle demeurée actionnaire de SIM, mais elle a avancé des sommes supplémentaires par la suite. Investisseur passif au tout début, GPL est devenue au cours des mois qui ont suivi la seule actionnaire de SIM à poursuivre la réalisation du projet commercial Montbeillard. Alors que les contretemps s’accumulaient, que les coactionnaires se retiraient et qu’il fallait investir de plus en plus de sommes importantes pour réaliser le Projet Montbeillard, GPL a mis les fonds nécessaires pour réaliser ce projet. Pourquoi? En partie parce que GPL croyait à la « grande valeur » du terrain (réunion du 21 janvier 1991). Il est donc difficile de conclure que l’avance de 259 776 $ n’aurait pas été remboursée. De toute façon, il aurait fallu que cette somme soit exigible. Comment cette avance pouvait-elle être irrécouvrable si elle n’était pas devenue exigible?

[72] Il est vrai que les administrateurs ont envisagé de demander aux actionnaires d’approuver la dissolution de SIM. Toutefois, il est important de remettre ce projet dans son contexte. Sodéroc avait obtenu une injonction interlocutoire empêchant SIM de donner le contrat de gestion du projet commercial à d’autres entrepreneurs. SIM cherchait à ce moment-là un moyen de contourner l’application de cette injonction. Rapidement, SIM a dû se résigner à s’entendre avec Sodéroc et les affaires de SIM ont continué par la suite de façon normale; « it was business as usual » comme disent les anglophones. Avant le 30 septembre 1990, SIM a négocié une entente avec Gestion Beaubien pour la réalisation du projet résidentiel et a conclu une entente similaire avec le Groupe Pomerleau relativement au projet commercial. Ces ententes indiquent clairement que SIM allait de l’avant même après avoir accepté de rembourser les avances dues à PMI et Sodéroc.

[73] En conclusion, je n’ai pas été convaincu que la contribuable a déterminé de façon raisonnable que l’avance de 259 776 $ était devenue irrécouvrable au 30 septembre 1990. Je crois au contraire que GPL pouvait s’attendre à être remboursée parce que le terrain avait une grande valeur.

Perte en 1991 sur les avances et les actions

[74] Dans le calcul de son revenu pour l’année 1991 GPL a déduit des pertes en capital à l’égard d’avances qu’elle avait faites à SIM et à l’égard d’actions qu’elle détenait dans SIM. Ces pertes totalisent 646 487 $, dont 484 865 $ représente une perte en capital déductible. Les pertes déduites se rapportaient aux créances et aux actions suivantes :

Créance acquise du Groupe Wong 475 000 $

Avance de GPL en 1991 102 880 $

Actions de GPL (acquises à l’origine) 18 464 $

Actions de GPL (acquises du Groupe Wong) 25 000 $

Avance à la Société en commandite phase I 25 143 $

Total 646 487 $

[75] À mon avis, à ce montant il faut rajouter deux sommes. Tout d’abord il y a la somme de 259 776 $ représentant une avance faite au cours de l’exercice financier 1990 par GPL et à l’égard de laquelle la contribuable a déduit une perte dans le calcul de son revenu pour l’année 1990. Ayant conclu qu’elle n’était pas devenue irrécouvrable durant cette année, il m’apparaît tout à fait juste d’examiner si cette avance l’était devenue en 1991. On ne peut pas reprocher à GPL de ne pas l’avoir déduite en 1991 puisqu’elle croyait avoir droit à la déduction en 1990.

[76] L’autre créance qu’il faut ajouter est celle de 375 000 $ acquise de Sodéroc. Le motif qui a incité GPL à ne pas la déduire comme perte n’a pas été expliqué au cours de l’audience. Je ne vois pas de motif de traiter cette créance différemment des autres. Le total de la perte en capital passerait donc de 646 487 $ à 1 237 799 $ [646 487 $ + 259 776 $ + 375 000 $].

[77] Voyons dans quelle mesure GPL a pu subir une perte à l’égard de ces créances. Tout d’abord, les aveux faits au début de l’audience et les témoignages entendus par la suite ne révèlent pas dans quelles circonstances l’avance de 25 143 $ aurait été faite à la Société en commandite. Je n’ai aucune preuve non plus qui me permette de déterminer si cette créance est devenue irrécouvrable. Faute de preuve, je ne peux conclure que GPL a droit à la déduction d’une perte au titre de cette créance.

[78] Quant au reste des créances à l’égard desquelles une perte en capital pourrait être déduite, soit un montant de 1 212 656 $, je ne crois pas que GPL ait subi de perte, sauf pour ce qui est d’une somme de 11 727 $. En effet, comme je l’ai déjà énoncé plus haut, ces créances faisaient partie de la contrepartie donnée à SIM pour l’acquisition du terrain Montbeillard. Si l’on soustrait de la juste valeur marchande du terrain, soit 4 630 000 $, le montant de la créance hypothécaire de 3 429 071 $ acquise de la CIBC, il reste une somme de 1 200 929 $ à verser à SIM pour le terrain Montbeillard. Cette somme a été versée à même la créance de 1 212 656 $, laissant une créance impayée de 11 727 $[6]. Ayant conclu que GPL a reçu le terrain en échange des créances totalisant 4 630 000 $ (3 429 071 $ + 1 200 929 $), il va de soi que GPL ne peut déduire aucune perte à leur égard.

[79] Reste à déterminer si le solde impayé de 11 727 $ représente une perte en capital. Tout d’abord, la preuve ne révèle pas à laquelle des créances se rapporte cette créance impayée. Je crois qu’il est raisonnable de l’attribuer à une créance à l’égard de laquelle une perte pourrait manifestement être déductible. Si on considère qu’une partie de l’avance de 259 776 $ ayant été effectuée au 30 septembre 1990 n’a pas été remboursée au moment de l’acquisition du terrain Montbeillard, alors le solde impayé de 11 727 $ pourrait donner droit à une perte en capital.

[80] En effet, cette créance portait intérêt et était donc détenue dans le but d’en tirer un revenu; elle n’est pas réputée être nulle en vertu du sous-alinéa 40(2)g)(ii) de la Loi. De plus, il s’agit d’une créance irrécouvrable. Selon la preuve que j’ai entendue, au 30 septembre 1991, SIM avait cessé d’exploiter son entreprise. Comme elle n’avait plus d’actifs et qu’elle avait un passif important, dont notamment la somme de 300 000 $ due à la Banque Nationale à l’égard des actions de PMI et des avances consenties par celle-ci, il est raisonnable de conclure que SIM était devenue insolvable. Par conséquent, GPL a subi une perte de 11 727 $ et est en droit de réclamer la déduction d’une perte en capital déductible de 8 795 $.

[81] En ce qui concerne la perte déduite à l’égard des actions acquises à l’origine par GPL pour une somme de 18 464 $ et à l’égard de celles acquises du Groupe Wong pour une somme de 25 000 $, est-ce que les conditions énoncées à l’article 50 sont réunies ici? En plus de la situation financière de SIM déjà constatée dans l’analyse de la perte de 11 727 $, il faut ajouter qu’il était raisonnable de croire que SIM serait dissoute et qu’elle ne commencerait pas à exploiter à nouveau une entreprise. À la suite du transfert du terrain Montbeillard, SIM n’avait plus d’actifs lui permettant de continuer l’exploitation de son entreprise. Elle était aux prises avec un déficit important et elle s’est d’ailleurs déclarée en faillite en 1994. À la suite du transfert du terrain Montbeillard, SIM avait perdu toute raison d’être. Les actions de SIM n’avaient donc plus aucune valeur. En conclusion, les conditions de l’alinéa 50(1)b) de la Loi sont toutes réunies et toutes les actions de SIM détenues par GPL sont réputées avoir fait l’objet d’une disposition à la fin de l’année pour un produit nul. En conséquence, GPL a subi une perte de 43 464 $ dont 32 598 $ constituent une perte en capital déductible.

[82] Pour ces motifs, l’appel de GPL à l’égard de la cotisation de 1990 est rejeté. Celui à l’encontre de la cotisation du 2 juin 1995 est admis et la cotisation est annulée. Les appels à l’égard des années d’imposition 1991 et 1992 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant pour acquis que GPL a droit à la déduction d’une perte en capital déductible de 41 393 $ (8 795 $ + 32 598 $). Le tout sans frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 7e jour d’août 1998.

« Pierre Archambault »

J.C.C.I.



[1] Dans les faits, seule Société en commandite phase I, s’engagera le 15 janvier 1991 à verser cette somme de $1 million, ce qui a comme conséquence d’augmenter le prix unitaire à 9,61 $ le pi2.

[2] Voir le mémoire (mémoire Deblois) du 24 mai 1991 préparé par Deblois, Samson, Thivierge, que GPL devait présenter à l’arbitre (produit sous la cote I-3). Ce mémoire contient les faits et les motifs que GPL entendait présenter à l’arbitre pour défendre une valeur de 1 $ pour les actions de Gestion Flamand. Voir le paragraphe 29 ci-après.

[3] Selon le mémoire Deblois.

[4] Cette valeur est inférieure à la juste valeur marchande de 9,50 $ le pi2 qu’a obtenue par SIM en octobre 1990 et qu’elle a utilisée pour convaincre l’arbitre que les actions détenues par Gestion Flamand ne valaient que $1. (Voir le mémoire Deblois.)

[5] Cette valeur est inférieure au coût unitaire de 8,68 $ estimé dans le mémoire Deblois. Elle est à peu près égale au prix négocié en novembre 1990 avec le Groupe Wong pour le terrain résidentiel, soit 7,77 $. (Voir paragraphe 19.)

[6] 1 212 656 $ - 1 200 929 $ = 11 727 $.

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