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Date: 19980709

Dossier: 97-760-IT-I

ENTRE :

SAMSON HOLDINGS LIMITED (anciennement appelée 723960 Ontario Limited),

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Teskey, C.C.I.

[1] Dans l'avis d'appel par lequel elle a interjeté appel des cotisations d'impôt sur le revenu établies en vertu de la partie I.3 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”) pour ses années d'imposition 1990 et 1991, l'appelante a choisi la procédure informelle.

Question en litige

[2] Il s'agit de déterminer si l'appelante doit être considérée comme ayant effectué, avant l'avis de cotisation établi le 30 avril 1993 pour les deux années en question, des paiements au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3 pour ces années, soit les années d'imposition se terminant le 31 mai 1990 et le 31 mai 1991.

Faits

[3] (1) En 1990 et 1991, l'exercice financier de l'appelante se terminait le 31 mai;

conformément à l'article 181.6 de la Loi, l'appelante devait produire au ministre du Revenu national (le “ ministre ”) les déclarations prévues à la partie I.3 pour ses années d'imposition 1990 et 1991 au plus tard le 30 novembre 1990 et le 30 novembre 1991 respectivement;

le 30 novembre 1992, le comptable de l'appelante a mis à la poste (et donc produit, suivant le paragraphe 248(7) de la Loi) la déclaration prévue à la partie I pour l'année se terminant le 31 mai 1992 (avec sa déclaration prévue à la partie I.3 pour la même année) et les déclarations prévues à la partie I.3 pour les années d'imposition 1990 et 1991, sans y joindre de lettre d'accompagnement ni de chèque.

[4] Au bas de la première page de sa déclaration prévue à la partie I.3 pour l'année d'imposition 1990, l'appelante a indiqué “ paiement sur production : 72 362 $ ” et, de même, sur la première page de sa déclaration prévue à la partie I.3 pour l'année d'imposition 1991, elle a indiqué “ paiement sur production : 84 934 $, solde impayé [ ] ”. La déclaration prévue à la partie I pour 1992 indiquait un solde créditeur à rembourser de plus de 500 000 $.

[5] Pour chacune des années d'imposition 1990 et 1991, l'appelante a produit sa déclaration prévue à la partie I.3 au plus tard le 30 novembre, soit la date limite de production, et elle y a indiqué une surtaxe à payer de 42 750 $ pour 1990 et de 42 947 $ pour 1991. L'appelante a payé l'impôt de la partie I pour 1990 et 1991 (y compris la surtaxe) dans le délai prescrit.

[6] Le comptable agréé de l'appelante a témoigné qu'il avait supposé que le ministère du Revenu national (le “ ministère ”) appliquerait le remboursement dû à l'appelante pour l'année d'imposition 1992 au titre de son impôt de la partie I en réduction de l'impôt dû par l'appelante en vertu de la partie I.3 pour les années d'imposition 1990 et 1991. Il s'agit là d'une supposition négligente qui n'aurait jamais dû être faite, étant donné surtout qu'une toute simple autorisation écrite de l'appelante jointe aux déclarations aurait résolu la plupart des problèmes dont il est question en l'espèce.

[7] Sur réception des déclarations d'impôt prévues à la partie I.3 pour 1990 et 1991, qui ont été mises à la poste le 30 novembre 1992, sans chèque, le ministre a fixé les montants suivants pour les années d'imposition 1990 et 1991 :

1990 1991

Impôt de la partie I.3 72 362 $ 84 934 $

Pénalité (article 235) 1 989,90 $ 2 335,63 $

Pénalité (paragraphe 162(1)) 12 301,54 $ 14 438,78 $

Intérêt sur arriérés

(paragraphe 181.8(1)) 31 818,64 $ 20 294,43 $

Intérêt sur acomptes

provisionnels (paragraphe 181.8(2)) 6 191,87 $

Pénalité pour acomptes provisionnels

insuffisants (article 163.1) 2 321,95 $

Total 118 472,08 $ 130 516,66 $

[8] Il est à noter que, conformément à l'article 125.3 de la Loi, l'obligation de payer l'impôt en vertu de la partie I.3 venait éliminer l'obligation de payer la surtaxe prévue à l'article 123.2.

[9] Dans les avis d'opposition, tous deux datés du 29 juillet 1993, déposés en réponse aux avis de cotisation établis en vertu de la partie I.3, l'appelante a demandé expressément que la partie excédentaire des acomptes provisionnels soit appliquée dans la mesure nécessaire en réduction de l'impôt payable en vertu de la partie I.3 pour 1991 et ensuite en réduction de l'impôt payable en vertu de la partie I.3 pour 1990.

[10] Le ministère n'a pas pu donner suite aux instructions données dans les avis d'opposition puisque, le 5 avril 1993, il avait versé à l'appelante le remboursement de l'impôt de la partie I relatif à l'année d'imposition 1992.

[11] Sur les instances de l'unité de perception du ministère, l'appelante a demandé dans une lettre qu'un montant d'argent soit puisé dans le compte d'une autre société et qu'il soit affecté au paiement des montants dus par l'appelante sous le régime de la partie I.3 pour les années d'imposition 1990 et 1991. Ces transferts ont été effectués le 11 avril et le 6 juin 1996 pour l'année d'imposition 1990, et le 11 avril 1996 pour l'année d'imposition 1991.

[12] L'appelante a versé un acompte provisionnel de 100 000 $ le 21 juin 1991, de même qu'en août, en septembre et en octobre. Ces paiements ont été effectués au moyen de la formule de versement T9 qui, je suppose, indiquait les acomptes provisionnels se rapportant à l'année d'imposition se terminant le 31 mai 1992. Cette formule est utilisée par les sociétés pour tous les acomptes provisionnels, et les montants versés sont alors inscrits au crédit du contribuable pour être portés en déduction de l'impôt sur le revenu qu'il doit, peu importe à quel titre.

[13] Lorsqu'il recevait les acomptes provisionnels, le ministère ignorait à quelle dette fiscale ces paiements allaient finalement être affectés. Ce n'est que sur réception des déclarations de revenus produites en vertu de la partie I et de la partie I.3 et sur l'établissement des cotisations y relatives que le ministre pouvait imputer les acomptes provisionnels à une dette fiscale particulière.

[14] Dans ses déclarations de revenus de la partie I pour 1992, l'appelante a demandé le remboursement d'un paiement en trop, remboursement qui lui a été envoyé.

Analyse

[15] L'article 235 de la Loi prescrit une pénalité pour omission de produire une déclaration de revenus. Il est libellé en partie dans les termes suivants :

Toute corporation qui ne produit pas de déclaration pour une année d'imposition de la manière et dans le délai prévus [...] encourt, outre toute pénalité prévue par ailleurs, une pénalité pour chaque défaut de produire une déclaration égale au [...]

[16] De toute évidence, aucune défense ne peut être invoquée contre cette pénalité puisque l'appelante a admis que les déclarations de revenus de la partie I.3 pour les années 1990 et 1991 n'avaient été produites que le 30 novembre 1992, alors qu'elles auraient dû être produites au plus tard le 30 novembre 1990 et le 30 novembre 1991 respectivement.

[17] L'article 162 prévoit lui aussi une pénalité dans le cas où l'impôt sur le revenu n'est pas payé à la date à laquelle il est dû. Cet article se lit en partie comme suit :

Toute personne qui ne produit pas de déclaration de revenu pour une année d'imposition de la manière et dans le délai prévus au paragraphe 150(1) est passible d'une pénalité égale au total des montants suivants :

5 % de l'impôt payable pour l'année en vertu de la présente partie qui était impayé à la date où, au plus tard, la déclaration devait être produite;

le produit de 1 % de cet impôt impayé par le nombre de mois entiers, jusqu'à concurrence de 12, compris dans la période commençant à la date où, au plus tard, la déclaration devait être produite et se terminant le jour où la déclaration est effectivement produite.

[18] Encore une fois, comme dans le cas de la pénalité prescrite à l'article 235, les déclarations de la partie I.3 pour les années d'imposition 1990 et 1991 n'ont pas été produites et l'impôt payable n'a pas non plus été acquitté dans le délai prévu. Un montant égal à 5 p. 100 de l'impôt impayé est par conséquent dû. En ce qui concerne le montant correspondant à 1 p. 100 par mois, il se limite à une période de 12 mois et, même si une lettre avait été envoyée pour demander que le remboursement de l'impôt de la partie I pour l'année 1992 soit affecté à la réduction de l'impôt de la partie I.3 pour 1990 et 1991, les pénalités en question ici seraient maintenues.

[19] En réponse à la question de savoir quand l'appelante a payé l'impôt de la partie I.3, je conclus qu'elle ne l'a payé que le 11 avril 1996. La production des déclarations de revenus pour 1990, 1991 et 1992 sous un même pli, sans instructions écrites bien claires précisant à quoi devait être affecté le remboursement demandé dans la déclaration de la partie I pour 1992 et indiquant que les acomptes provisionnels étaient à affecter à l'acquittement de l'impôt payable en 1992, de façon que le premier acompte provisionnel versé en 1992 puisse être utilisé pour l'année 1991, n'a pas l'effet voulu par l'appelante. L'acompte provisionnel versé en 1992 ne peut être considéré comme l'ayant été au titre de l'impôt de la partie I.3 payable pour l'année 1991, le montant de cet impôt n'étant pas connu du ministre à ce moment-là.

[20] L'obligation de verser des acomptes provisionnels pour l'année d'imposition 1991 est prévue à l'alinéa 181.7(1)a) de la Loi. Pour la même année d'imposition, la société qui omettait de verser un acompte provisionnel au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3 au plus tard le jour où l'acompte provisionnel devait être fait, se voyait obligée de payer des intérêts. Ceux-ci sont calculés à compter du jour où, au plus tard, l'acompte provisionnel doit être versé, jusqu'au premier en date du jour du versement de l'acompte ou du jour où la société doit commencer à payer les intérêts sur arriérés conformément au paragraphe 181.8(1). L'intérêt se calcule sur le montant que la société a omis de payer.

[21] Les paragraphes 181.8(1) et 181.8(2) portent que :

La corporation dont l'impôt payable pour une année d'imposition en vertu de la présente partie dépasse, à un moment donné après le jour où elle est tenue de payer le solde de son impôt payable pour l'année en vertu de la présente partie, le total des montants dont chacun représente le montant payé au plus tard à ce moment au titre de son impôt payable et appliqué à ce moment par le ministre en réduction du montant dont elle est redevable pour l'année en vertu de la présente partie doit payer au receveur général des intérêts, calculés au taux prescrit, sur l'excédent déterminé pour la période au cours de laquelle celui-ci demeure impayé.

La corporation qui est tenue par la présente partie de verser un acompte provisionnel d'impôt mais qui n'a pas versé tout ou partie de cet acompte au plus tard le jour où celui-ci devait l'être doit payer au receveur général, outre les intérêts payables selon le paragraphe (1), des intérêts sur le montant qu'elle n'a pas versé, calculés au taux prescrit pour la période allant du jour où elle était tenue de verser le montant jusqu'au premier en date du jour du versement ou du jour qui marque le début de la période pour laquelle elle est tenue de payer des intérêts sur le montant selon le paragraphe (1).

[22] En vertu de l'article 181.9, l'article 163.1 s'applique à la partie I.3 de la Loi, avec les adaptations nécessaires.

[23] Aux termes de l'article 163.1 de la Loi, une société est passible d'une pénalité si elle omet de verser tout ou partie d'un acompte provisionnel d'impôt de la partie I.3 au plus tard le jour où il doit être versé. La pénalité est calculée, en partie, en pourcentage de l'intérêt payable en application de l'article 161 sur tous les acomptes provisionnels pour l'année en question.

[24] En ce qui concerne l'année d'imposition 1991, l'intérêt sur les acomptes provisionnels d'impôt de la partie I.3 a été calculé conformément au paragraphe 181.8(2) et non à l'article 161. La pénalité prévue à l'article 163.1 est calculée en pourcentage de l'intérêt payable en vertu du paragraphe 181.8(2) relativement aux acomptes provisionnels d'impôt de la partie I.3. Aux termes du paragraphe 181.8(2), l'intérêt payable se calcule sur le montant que la société a omis de payer.

[25] L'article 163 se lit en partie comme suit :

Toute personne qui ne déclare pas un montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une déclaration produite conformément à l'article 150 pour une année d'imposition donnée et qui a déjà omis de déclarer un tel montant dans une telle déclaration pour une des trois années d'imposition précédentes est passible d'une pénalité égale à 10% du montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une telle déclaration, sauf si elle est passible d'une pénalité en application du paragraphe (2) sur ce montant.

[26] Puisqu'il a été reconnu que les déclarations de revenus prévues à la partie I.3 pour les années 1990 et 1991 n'ont été produites qu'en novembre 1992, comme j'ai conclu sur le fondement de la preuve produite qu'aucun paiement de l'impôt sur le revenu payable en vertu de la partie I.3 pour les années d'imposition 1990 et 1991 n'a été fait avant le 11 avril 1996, et compte tenu de la seule indication quant à la façon dont les acomptes provisionnels d'impôt versés en 1991 devaient être appliqués en réduction de l'impôt de la partie I pour 1992, les appels sont rejetés.

[27] Il me semble évident que le comptable a été négligent à de nombreux égards : d'une part, il ignorait que l'appelante devait produire des déclarations en vertu de la partie I.3 pour 1990 et 1991 et, d'autre part, il s'est contenté de mettre ces déclarations à la poste avec la déclaration de 1992, sans aucune instruction ni explication précise. Une autorisation expresse et des instructions précises auraient éliminé certains des problèmes qu'a connus l'appelante en l'espèce.

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de juillet 1998.

“ Gordon Teskey ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 20e jour de mai 1999.

Erich Klein, réviseur

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