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Date : 19971211

Dossiers : 95-2527-IT-G; 95-2531-IT-G

ENTRE :

ANNA VALLOZZI, ANTONELLA GISMONDI,

appelantes,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1] Ces appels ont été entendus ensemble sur preuve commune sur consentement des parties à Toronto (Ontario) les 17 et 18 novembre 1997 sous le régime de la procédure générale. Les appelantes ont témoigné pour leur propre compte et ont appelé leurs maris à témoigner. L'intimée a appelé Lyle Faulkner, Tajinder Kooner et Donald Balanger, agents à Revenu Canada.

[2] Les appelantes ont fait l'objet de cotisations conformément à l'article 227.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “Loi”) pour leurs années d'imposition 1991 à l'égard de la responsabilité qui leur incombait en leur qualité d'administratrices relativement aux sommes retenues à la source qu'Art-Pac Marketing Communications Inc. (“A-P”) avait omis de verser. Aux paragraphes 4 et 5 de leurs avis d'appel, les deux appelantes ont admis qu'elles étaient administratrices d'A-P.

[3] Les maris des appelantes étaient les uniques actionnaires d'une compagnie connue sous le nom de “Graph Line Graphics” qui a été mise sous séquestre en 1989. Les deux maris ont ensuite fait en sorte qu'A-P soit constituée en vue d'exploiter l'entreprise d'arts graphiques. Leur avocat, Rudy Bianchi, a constitué A-P le 5 mars 1990. Il était le fondateur et l'unique administrateur de la compagnie. Le 5 mars 1990, M. Bianchi a signé les documents suivants, qui ont été produits sous la cote A-2.

[TRADUCTION]

RÉSOLUTION DE L'UNIQUE ADMINISTRATEUR

D'ART-PAC MARKETING COMMUNICATIONS INC.

(la “ corporation ”)

IL EST RÉSOLU :

a) que CENT (100) actions ordinaires sans valeur nominale de la corporation (ci-après appelées les “actions ordinaires”) soient par les présentes réparties comme suit :

NOM

NOMBRE D'ACTIONS

MONTANT TOTAL
À RECEVOIR

Anna Vallozzi

50 actions ordinaires

50 $

Antonella Gismondi

50 actions ordinaires

50 $

b) que le conseil d'administration fixe par les présentes à 100 $ la contrepartie totale à verser pour l'émission desdites cent (100) actions ordinaires; et

c) que, sur réception par la corporation du montant à payer à l'égard desdites cent (100) actions ordinaires, lesdites actions soient émises en tant qu'actions entièrement libérées et non susceptibles d'appels subséquents, et qu'un certificat soit délivré à leur égard à chacun desdits souscripteurs.

LA RÉSOLUTION SUSMENTIONNÉE est par les présentes adoptée par l'unique administrateur de la corporation comme en fait foi la signature qu'il a apposée aux présentes, conformément à la Business Corporations Act de 1982.

SIGNÉ le 5 mars 1990.

“ Rudy A. Bianchi ”

Rudy A. Bianchi

DÉMISSION

DESTINATAIRES : ART-PAC MARKETING COMMUNICATIONS INC.

LE CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA COMPAGNIE ET LES ACTIONNAIRES DE LA COMPAGNIE

Je me désiste par les présentes de mes fonctions d'administrateur de la corporation, la démission devant prendre effet à compter de ce jour.

SIGNÉ le 5 mars 1990.

“ Rudy A. Bianchi ”

Rudy A. Bianchi

Ces documents ont été annexés au livre des procès-verbaux. Aucun élément de preuve ne montre à quel moment cela a été fait ou que quelqu'un d'autre a vu ces documents avant l'audition de la présente affaire. Rudy Bianchi a également signé et déposé la formule 1, le 15 mars 1990, en vertu de la Corporations Information Act, laquelle attestait qu'il n'était plus administrateur d'A-P, que les appelantes étaient les dirigeantes et administratrices d'A-P et que l'adresse d'A-P était la même que celle de la résidence de Mme Gismondi (pièce A-1, onglet 5).

[4] Aucun autre procès-verbal de réunion d'administrateurs ou d'assemblée d'actionnaires n'a jamais été signé. Aucun certificat d'actions n'a été signé ou scellé. Aucun règlement n'a été adopté. Les appelantes n'ont pas consenti par écrit à agir comme administratrices. Elles n'ont jamais assisté à une assemblée d'actionnaires. Elles n'ont jamais rencontré M. Bianchi ou un comptable pour parler de quoi que ce soit qui concerne A-P. Ce sont toujours leurs maris qui ont rencontré ces spécialistes. Les maris ont témoigné qu'ils traitaient et considéraient A-P comme leur propre corporation. Les appelantes ont déclaré la même chose dans leurs témoignages.

[5] Les deux appelantes ont admis que leurs maris leur avaient dit qu'A-P avait été inscrite en leurs noms. Toutefois, elles nient toutes les deux qu'elles savaient qu'elles étaient administratrices d'A-P avant que M. Kooner les informe de la chose en mars 1993. Les appelantes ont admis avoir signé des documents bancaires leur permettant de signer les chèques émis par A-P, mais ces documents n'ont pas été produits en preuve. Tout chèque qu'elles ont signé a été signé en blanc à la demande de leurs maris. Les maris géraient l'entreprise d'A-P.

[6] A-P versait des salaires et des dividendes aux appelantes. Les appelantes disent que leurs chèques étaient déposés dans le compte bancaire conjoint de chaque couple par leur mari respectif. Elles admettent toutes les deux qu'elles savaient qu'A-P leur versait un salaire. Elles ont témoigné qu'elles ne savaient pas qu'elles touchaient des dividendes. Mme Gismondi avait travaillé chez Graph Line Graphics; elle a travaillé comme réceptionniste pour A-P deux jours par semaine jusqu'au mois d'octobre 1991, lorsqu'elle a obtenu un emploi de réceptionniste ailleurs. Mme Vallozzi n'a jamais travaillé pour A-P; M. Gismondi est son cousin. Mme Vallozzi avait travaillé à temps partiel chez Graph Line Graphics. Après 1988, elle est restée à la maison avec ses jeunes enfants.

[7] Mme Vallozzi a terminé sa treizième année (en Ontario) et a suivi un cours de cosmétologie. Mme Gismondi a terminé sa douzième année (en Ontario). Ce sont deux jeunes femmes qui ont des enfants pré-adolescents. Ni l'une ni l'autre n'a de l'expérience comme comptable ou comme teneuse de livres. Par le passé, Mme Vallozzi avait vendu des produits de beauté et avait travaillé à temps partiel comme réceptionniste chez Graph Line Graphics. Mme Gismondi avait par le passé travaillé comme réceptionniste. Pendant qu'elle travaillait pour A-P, elle effectuait également les dépôts à la banque pour le compte de la compagnie. Les bordereaux de dépôt étaient préparés par M. Gismondi.

[8] M. Gismondi était l'employé interne qui tenait les dossiers et les livres d'A-P. M. Vallozzi s'occupait des clients. Les deux maris ont témoigné qu'ils ne parlaient pas des affaires d'A-P à leurs femmes et les appelantes ont confirmé la chose. C'était M. Gismondi qui donnait des instructions aux comptables d'A-P et qui veillait à ce que ceux-ci préparent toutes les déclarations de revenu individuelles, que les appelantes signaient. Mme Gismondi a témoigné qu'elle vérifiait le revenu d'emploi inscrit dans sa déclaration de revenu et qu'elle signait la déclaration. Mme Vallozzi a dit qu'elle signait simplement sa déclaration de revenu. M. Gismondi envoyait toutes les déclarations de revenu par la poste. Les deux femmes ont dit que c'étaient leurs maris qui leur avaient remis les documents bancaires qu'elles avaient signés en vue de pouvoir signer les chèques émis par A-P. Elles ont dit qu'elles signaient simplement les chèques pour leurs maris.

[9] Lyle Faulkner a témoigné de mémoire au sujet de la vérification d'A-P qu'il avait effectuée à l'égard des sommes retenues à la source non versées. Il croit avoir effectué la vérification chez les Gismondi. La vérification a eu lieu le 15 octobre 1991. M. Faulkner se rappelait que Mme Gismondi était présente. Il a témoigné qu'il croit avoir demandé à Mme Gismondi qui étaient les administrateurs d'A-P. Mme Gismondi lui a fait savoir que Mme Vallozzi et elle-même étaient les administratrices. M. Faulkner a déclaré qu'après avoir appris que des arriérés étaient dus, il a informé Mme Gismondi de la responsabilité qui incombait aux administrateurs. Les notes que M. Faulkner avait prises au sujet de la vérification du 15 octobre 1991 ont été détruites il y a quelque temps. M. Faulkner a témoigné avoir informé Mme Gismondi de la responsabilité qui lui incombait en sa qualité d'administratrice parce que c'est ce qu'il devait faire une fois qu'il avait appris que celle-ci était une administratrice de la compagnie.

[10] M. Kooner est également vérificateur de l'impôt. Le seul souvenir qu'il garde de quelque contact avec les appelantes se rapporte à des données qu'il avait introduites en mémoire le 22 mars 1991 au sujet d'une rencontre qu'il avait eue avec les appelantes et avec M. Gismondi aux fins de la perception. Il n'a pas parlé de notes disant que les appelantes lui avaient en fait avoué qu'elles étaient administratrices d'A-P. Le libellé des notes citées par M. Kooner montre qu'il a supposé que les appelantes étaient administratrices de la compagnie, et non qu'elles lui avaient avoué qu'elles étaient administratrices ou qu'elles agissaient comme administratrices d'A-P.

[11] Selon la déclaration de revenu et les feuillets T-4 de Mme Gismondi pour 1990, le salaire qu'A-P versait à celle-ci s'élevait à 4 612 $ et les dividendes s'élevaient à 15 062,50 $ (pièce R-1, onglet 17). Mme Gismondi a établi à la main son propre feuillet T-4 pour l'année 1990. En 1991, A-P lui a versé un salaire de 10 416 $ (pièce R-1, onglet 18).

[12] Mme Gismondi ne se rappelait pas avoir rencontré M. Faulkner en 1991. Elle a déclaré qu'il n'était pas possible qu'elle ait discuté de ces choses avec M. Faulkner en 1991. M. Faulkner a non seulement témoigné qu'il avait rencontré Mme Gismondi, mais il a aussi produit la pièce R-3, qu'il affirme avoir reçue de Mme Gismondi le 15 octobre 1991, laquelle indique les créances d'A-P à ce moment-là.

[13] Mme Gismondi a témoigné qu'elle ne savait pas que Graph Line Graphics avait été mise sous séquestre ou qu'A-P avait mis à pied tous ses employés à la fin du mois de décembre 1991 et qu'elle avait vendu ses meubles afin de les payer. Mme Gismondi a quitté en octobre 1991 l'emploi qu'elle exerçait à temps partiel deux jours par semaine chez A-P. Elle a également témoigné qu'elle ne lisait jamais le courrier que Revenu Canada lui envoyait chez elle. Elle affirme que c'est M. Gismondi qui lisait le courrier.

[14] Mme Gismondi est une personne intelligente et éveillée. Elle a témoigné qu'on lui avait dit qu'A-P avait été inscrite en son nom aux fins de la signature des chèques. Elle a déclaré que l'avocat et le comptable avaient dit à son mari d'inscrire A-P aux noms des femmes lorsque Graph Line Graphics avait fermé ses portes. Mme Gismondi a travaillé dans le monde des affaires pendant toute sa vie professionnelle. On ne saurait croire le témoignage qu'elle a présenté, lorsqu'elle a affirmé qu'elle n'était pas au courant des activités ou des affaires d'A-P, que c'était son mari qui s'occupait du courrier reçu de Revenu Canada et qu'elle ne savait rien d'A-P. Le témoignage de M. Faulkner, en ce qui concerne la rencontre qu'il a eue avec Mme Gismondi et la réception de la liste des créances d'A-P, est reconnu comme exact. M. Faulkner a également témoigné que Mme Gismondi lui avait dit qu'A-P avait des problèmes de trésorerie, de sorte qu'elle ne pouvait pas verser les sommes retenues à la source en septembre 1991, et qu'en outre elle avait dit que les pénalités étaient trop élevées. M. Faulkner a déclaré que Mme Gismondi lui avait dit que Mme Vallozzi et elle détenaient chacune 50 p. 100 des actions d'A-P, et qu'elles étaient dirigeantes et administratrices de la compagnie. La Cour croit M. Faulkner. L'issue de ces appels n'intéressait pas M. Faulkner. Il a reçu la liste des créances qui a été produite en preuve, laquelle fait état de la rencontre qu'il avait eue avec Mme Gismondi. Aucun autre témoin n'a déclaré avoir remis la liste des créances d'A-P à M. Faulkner. Lorsque les deux témoignages se contredisent, c'est le témoignage de M. Faulkner qui est retenu plutôt que celui de Mme Gismondi.

[15] Mme Vallozzi a témoigné qu'on lui avait dit qu'A-P avait été inscrite en son nom et au nom de Mme Gismondi parce que l'ancienne entreprise de leurs maris, Graph Line Graphics, n'avait pas bien marché. Les deux femmes se sont donc vues obligées de signer pour A-P. Mme Vallozzi a témoigné qu'elle n'a appris qu'A-P faisait face à des difficultés financières que lorsqu'elle a été obligée d'emprunter 5 000 $ à ses parents pour subvenir aux besoins de sa famille. Elle restait à la maison avec ses enfants, mais elle a nié avoir reçu les lettres que Revenu Canada lui avait envoyées. Elle a déclaré que c'est son mari qui reçoit le courrier. Elle a témoigné qu'on ne lui avait jamais dit qu'elle était une administratrice d'A-P ou qu'A-P devait les sommes retenues à la source tant que son mari ne lui a pas fait savoir qu'elle devait rencontrer M. Kooner en 1993.

[16] Mme Vallozzi a reçu d'A-P un salaire de 10 000 $ en 1990 et de 4 000 $ en 1991. En 1990, elle a également reçu des dividendes.

[17] M. et Mme Vallozzi ont tous les deux témoigné. De l'avis de la Cour, Mme Vallozzi est plus éveillée et avisée que M. Vallozzi. La Cour ne croit pas que Mme Vallozzi ne lisait pas son propre courrier et qu'elle s'en remettait entièrement à M. Vallozzi. Elle ne croit pas non plus que Mme Vallozzi avait simplement accepté la déclaration selon laquelle A-P avait été inscrite en son nom ou qu'elle avait signé les documents bancaires ou les chèques d'A-P sans savoir pourquoi et en quelle qualité elle le faisait.

[18] Rudy Bianchi n'a pas témoigné. Aucune explication n'a été donnée à ce sujet. M. Bianchi était avocat. La Cour ne peut croire qu'un avocat constituerait A-P et déposerait la formule 1 désignant les appelantes à titre d'administratrices et de dirigeantes d'A-P sans obtenir leur autorisation de le faire.

[19] A-P a été constituée en vertu de la Business Corporations Act de l'Ontario. Le mot “administrateur” y est défini comme suit :

[TRADUCTION]

1.(1) “administrateur” Indépendamment de son titre, le titulaire de ce poste; “ conseil d'administration ” pouvant s'entendre également de l'administrateur unique.

S.O. 1982, ch. 4

Dans l'arrêt The Queen v. Harvey Kalef, 96 DTC 6132, à la page 6134, le juge d'appel McDonald, qui parlait au nom de la Cour d'appel fédérale dans son ensemble, a décrit cette définition comme suit :

Aux termes du paragraphe 1(1) de cette loi, “ le titulaire [...] du poste [d'administrateur] ” d'une compagnie en est un administrateur. Cette définition est assez passive. La Loi n'exige pas que l'intéressé exerce les pouvoirs d'un administrateur ou qu'il exerce un contrôle direct sur les biens de la compagnie pour être un “ administrateur ”.

[20] Les deux appelantes savaient qu'A-P était inscrite en leurs noms. Elles ont signé les documents bancaires. Elles signaient régulièrement des chèques. Chacune a déclaré qu'elle croyait qu'elle ne pouvait pas prendre connaissance des documents ou des activités commerciales d'A-P. Cependant, Mme Gismondi signait des chèques et effectuait des dépôts à la banque. Malgré tout, elle a témoigné qu'elle ne déposait pas ses propres chèques de paie. Les lettres adressées à la compagnie étaient envoyées chez elle. Mme Vallozzi signait régulièrement des chèques. Mme Vallozzi avait travaillé dans le monde des affaires. Les deux appelantes savaient qu'elles exerçaient un contrôle sur A-P du fait qu'elles étaient autorisées à signer les chèques. Les deux appelantes savaient qu'A-P leur appartenait. Les deux appelantes savaient que leurs maris, ensemble, n'avaient pas réussi dans les affaires. Les deux appelantes avaient reçu des chèques de paie et savaient quelles étaient les sommes retenues à la source sur leur salaire. Les deux appelantes recevaient un salaire d'A-P et savaient que leurs maris recevaient un salaire d'A-P au moyen des chèques qu'elles signaient. Les deux appelantes ont reçu des dividendes importants d'A-P en 1990. Le salaire commun que chaque couple a reçu d'A-P en 1990 et en 1991 était peu élevé selon la norme qui s'appliquait ces années-là. Il est donc naturel que chaque femme ait discuté de la situation d'A-P avec son mari. Les appelantes affirment ne pas l'avoir fait. Pourtant, Mme Gismondi a accepté un emploi ailleurs en 1991 et les choses allaient si mal que Mme Vallozzi s'est vue obligée de demander à ses parents de l'aider financièrement. Dans ces conditions, les affirmations qu'elles ont faites, à savoir qu'elles n'étaient pas au courant de la façon dont leurs maris exploitaient A-P et qu'elles s'en remettaient entièrement à leurs maris à cet égard n'est pas crédible. Ni l'une ni l'autre des appelantes n'a un comportement servile.

[21] Il ressort de toute évidence de l'observation des témoins que Mme Vallozzi avait une personnalité plus forte que M. Vallozzi et qu'elle semble être la personne dominante dans ce couple. M. et Mme Gismondi semblaient avoir le même genre de personnalité. M. Gismondi semble être passablement sûr de lui. Mme Vallozzi et Mme Gismondi ont de toute évidence le sens des affaires et un esprit pratique. Les deux appelantes sont des personnes sensées et intelligentes et semblent s'y connaître beaucoup plus que le Canadien moyen en affaires.

[22] De l'avis de la Cour, le fait que les appelantes savaient qu'A-P avait été inscrite en leurs noms revient à dire qu'elles savaient qu'A-P leur appartenait. Le fait qu'elles savaient qu'A-P avait été inscrite en leurs noms, ainsi que le fait qu'elles étaient autorisées à signer les chèques et la façon dont elles agissaient, était suffisant pour qu'elles sachent qu'elles étaient administratrices d'A-P au sens de la définition figurant dans la Business Corporations Act de l'Ontario.

[23] Les appelantes n'ont pas été induites en erreur ou trompées au sujet des affaires d'A-P. Elles affirment qu'on ne les a pas mises au courant des affaires de la compagnie. Cependant, Mme Gismondi était dans le bureau deux jours par semaine, et ce, jusqu'au mois d'octobre 1991. Les deux familles recevaient leurs revenus d'A-P. Pourtant, les appelantes affirment qu'elles ne se sont pas renseignées au sujet des affaires ou des finances d'A-P même si elles savaient que leurs maris n'avaient pas réussi dans les affaires et même si elles savaient quels étaient les revenus familiaux tirés d'A-P.

[24] De l'avis de la Cour, compte tenu de la preuve dans son ensemble, les deux appelantes auraient dû savoir, dès qu'A-P a ouvert ses portes, que des problèmes se poseraient peut-être à l'égard des sommes à verser. Elles étaient toutes les deux au courant de l'échec antérieur de leurs maris. Les maris s'occupaient des activités commerciales quotidiennes d'A-P et ils savaient qu'A-P avait été inscrite aux noms des appelantes.

[25] Selon la preuve, les appelantes n'ont rien fait au sujet des activités commerciales d'A-P. Elles n'ont pas demandé de renseignements. Elles n'ont pas pris de mesures. Cela étant, elles ont omis de s'acquitter de l'obligation qui leur incombait en vertu de l'article 227.1, et ce, même si le fait qu'A-P avait été inscrite en leurs noms les invitait clairement à faire preuve de prudence dans la conduite des activités commerciales d'A-P, notamment en ce qui concerne le versement des sommes retenues à la source.

[26] Les appels sont rejetés.

[27] L'intimée a droit aux dépens entre parties à l'égard de chaque appel. Un seul mémoire de frais doit être taxé en ce qui concerne l'audience elle-même, mais les parties sont conjointement et solidairement tenues de payer les frais liés à l'audience.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 11e jour de décembre 1997.

“ D. W. Beaubier ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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