Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 20000209

Dossier: 98-1944-IT-I

ENTRE :

RAE E. WALLIN,

appelant,

et

sa majesté la reine,

intimée.

motifs du jugement

Le juge Bowman, C.C.I.

[1] Le présent appel est interjeté à l'encontre d'une cotisation à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1993.

[2] La seule question en litige porte sur la déductibilité de certaines dépenses engagées par l'appelant relativement à un condominium dont il est le propriétaire et qui se trouve à Burlington (Ontario).

[3] En 1989, l'appelant a acheté 60 p. 100 des actions de Ryans Pet Food Terminals Inc. (“ Ryans ”) de Burlington; 30 p. 100 des actions ont été achetées par son avocat et 10 p. 100 par la Banque Royale. Une entente souple existait entre Ryans et une autre chaîne d'aliments pour animaux, Berry's Pet Foods, mais il n'y avait pas de coentreprise formelle.

[4] Pendant que l'appelant était propriétaire de Ryans et exploitait cette entreprise, il se déplaçait de façon hebdomadaire à Burlington, où se trouvaient le centre de distribution et le siège social de cette société. Il avait également un petit bureau à son domicile à Maitland (Ontario).

[5] Il passait en moyenne 2 à 5 jours par semaine à Burlington. Les premiers mois, il demeurait dans des hôtels. Mais comme cela était cher, il a proposé au conseil d'administration de Ryans que celle-ci achète un condominium. Le conseil ne voulait pas le faire parce que cela aurait nécessité une immobilisation de capital.

[6] L'appelant a décidé que l'achat d'un condominium serait pour lui un bon investissement. Le 30 mai 1990, il a acheté pour 160 000 $ un condominium à deux chambres à coucher qu'il a grevé d'une hypothèque de 130 000 $. C'est là qu'il demeurait les 2 à 5 jours par semaine qu'il se trouvait à Burlington.

[7] Ryans a payé toutes les dépenses relatives au condo, c'est-à-dire le capital et les intérêts hypothécaires, les charges de copropriété, les taxes foncières et l'assurance.

[8] Il en a été ainsi jusqu'au 11 août 1992 environ, date à laquelle Ryans a été vendue. L'appelant a offert de vendre le condominium aux nouveaux acheteurs, mais cela ne les intéressait pas. Il a chargé un agent immobilier de vendre le condominium. Il a également dit qu'il avait essayé de le louer, mais sans succès. Dans sa correspondance avec le ministère du Revenu national il ne mentionne pas qu'il a tenté de louer le bien. Dans sa lettre du 22 janvier 1998, il dit :

[TRADUCTION]

Nous l'avons mis en vente le 4 novembre 1992. Après avoir constaté l'échec de la tentative de location du condo et après avoir considéré les autres possibilités, nous avons décidé de le vendre et de nous en laver les mains.

[9] Dans l'avis d'opposition il est déclaré:

[TRADUCTION]

Plutôt que de louer le bien à quelqu'un d'autre, M. Wallin a décidé de le mettre en vente.

[10] Je crois que M. Wallin voulait surtout vendre le bien, même si j'admets qu'il a probablement demandé à l'agent immobilier de chercher à le louer au cas où aucun acheteur ne serait trouvé.

[11] Le bien a été vendu le 26 juillet 1993 et l'affaire conclue le 1er septembre 1993. Entre le moment de la vente de Ryans en août 1992 et le moment de la vente du condominium en septembre 1993, le condominium était inoccupé.

[12] L'appelant a effectué des dépenses relatives au condominium après que Ryans eut été vendue. En 1992, il a effectué des dépenses s'élevant à 5 132,17 $. Ce montant a été réclamé comme déduction et, de toute évidence, la déduction a été accordée. En 1993, il a effectué des dépenses s'élevant à 14 030,73 $, ainsi réparties :

Intérêts hypothécaires $ 9 355,88

Charges communes $ 3 694,00

Taxes foncières $ 1 214,57

Assurance $ 160,00

Rajustements (vente) - taxes $ ( 132,15)

- charges de

copropriété $ ( 258,57)

Total $ 14 033,73

[13] De plus, la vente a entraîné pour l'appelant une perte d'environ 43 525,03 $. Il prétend que le bien était un bien locatif et que, pour cette raison, il devrait avoir le droit de déduire cette somme à titre de perte finale en vertu du paragraphe 20(16) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[14] Quant à savoir si l'appelant est en droit de se prévaloir d'une perte finale relative à la vente du bien, cela dépend de la réponse à la question de savoir si entre ses mains ce bien était un bien amortissable. Et la réponse à cette question dépend de celle donnée à la question de savoir si le bien a été acquis aux fins de gagner ou de produire un revenu (alinéa 1102(1)c) du Règlement de l'impôt sur le revenu). Aux termes du paragraphe 9(3) de la Loi, le revenu tiré d'un bien exclut le gain en capital réalisé à la disposition de ce bien et la perte résultant d'un bien exclut la perte en capital résultant de la disposition de ce bien. Par conséquent, aux fins de l'alinéa 18(1)a) et aux fins des dispositions de la Loi et du Règlement concernant les déductions pour amortissement, avoir pour but de réaliser un gain en capital n'équivaut pas à avoir pour but de gagner ou de produire un revenu. Bien sûr, on peut se demander si, dans un cas où une personne acquiert un bien en ayant comme objectif principal de le revendre et de réaliser un gain en capital, il n'y a pas là contradiction du fait que l'intention de revendre à profit enlève au bien sa qualité de bien en immobilisation et le transforme en élément de stock. Toutefois, il ne convient pas en l'espèce d'approfondir cette intéressante et difficile question.

[15] La question en l'espèce est plus terre-à-terre. M. Wallin peut-il déduire les frais engagés pour l'appartement en 1993 pendant la période de l'inoccupation de celui-ci précédant sa vente? S'il le peut, ce doit être parce que, pendant cette période, il exploitait une entreprise de location. Si je tranchais ce point en faveur de l'appelant, il s'ensuivrait que l'appartement était un bien amortissable et que l'appelant était en droit de se prévaloir d'une perte finale. La Couronne admet qu'il peut se prévaloir d'une perte en capital déductible équivalant aux trois quarts des 43 525,03 $.

[16] L'appelant qualifie son acquisition du condominium de pure opération commerciale et d'investissement. Il dit que lorsque Ryans le remboursait de ses dépenses cela constituait essentiellement le paiement d'un loyer, mais qu'il ne l'a pas mentionné dans ses déclarations de revenus pour les années 1989, 1990, 1991 et 1992 parce qu'aucun profit n'avait été réalisé. Les remboursements ont simplement eu pour effet que l'appelant n'a rien gagné ni rien perdu. Or, cela n'est pas tout à fait exact. Il est probable que la fraction du remboursement représentant les remboursements du capital dépassait le montant de ses dépenses déductibles et constituait un profit réalisé au cours de ces années, auquel une déduction pour amortissement était applicable.

[17] Une explication plus simple est qu'il a acheté le condominium pour pouvoir y demeurer lors de ses déplacements à Burlington et que les coûts y liés lui ont été remboursés de la même façon qu'il se serait fait rembourser s'il était demeuré dans un hôtel. Il est permis de se demander, dans l'hypothèse où il n'aurait pas été remboursé par la société, si les coûts liés à l'appartement auraient été déductibles.

[18] Cette explication me semble concorder davantage avec la réalité. Je ne crois pas qu'il y ait jamais eu d'intention de réaliser un profit sur la location de ce condominium. Il représentait un investissement dont l'appelant espérait qu'il prendrait de la valeur. Malheureusement tel n'a pas été le cas. Si l'acquisition a été faite pour des raisons d'affaires, celles-ci étaient liées aux affaires de la société de l'appelant, et non à celles de l'appelant lui-même.

[19] L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de février 2000.

“ D.G.H. Bowman ”

J.C.C.I

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 19e jour de juillet 2000.

Erich Klein, réviseur

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