Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 20000426

Dossier: 1999-4108-IT-I

ENTRE :

DAVID CHARLES WOODS,

EXÉCUTEUR TESTAMENTAIRE DE FEUE EDNA LILIAN WOODS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Teskey, C.C.I.

[1] L’appelant interjette appel de la nouvelle cotisation d’impôt établie à l’égard de la succession de feue Edna Lillian Woods pour l’année d’imposition 1998 et dans l’avis duquel il a choisi la procédure informelle.

Question en litige

[2] L’unique question en litige est celle de savoir si une maison, sise au 2021, avenue Lenester à Ottawa (la “ maison ”), constituait un bien à usage personnel entre les mains de la fiducie administrant la succession.

Faits

[3] Mme Woods a vécu dans la maison avec son époux pendant de nombreuses années. Son époux, le père de ses deux enfants, est décédé en 1979.

[4] Mme Woods, aux alentours de 1985, a renouvelé des liens d’amitié avec un ami d’enfance, Elmore Halpeny (“ M. Halpeny ”).

[5] M. Halpeny a emménagé dans la maison et n’a jamais payé de loyer ni contribué aux dépenses du ménage. Mme Woods et M. Halpeny étaient de bons amis et ce dernier est devenu un bon ami de David Charles Woods (“ David ”) et de la soeur de ce dernier.

[6] Mme Woods est décédée subitement le 9 juillet 1993, à l’âge de 76 ans, laissant un testament portant fiducie qui nommait David exécuteur testamentaire et léguant l’ensemble de ses biens à parts égales à ses deux enfants, à savoir David et la fille de Mme Woods.

[7] David vivait dans sa propre maison à Chelsea, au Québec, et la fille de Mme Woods vit dans sa propre maison à Calgary, en Alberta.

[8] M. Halpeny avait entre 80 et 85 ans en 1993. Il a continué de vivre dans la maison après le décès de Mme Woods. En janvier 1994, David a suggéré qu’il commence à chercher un appartement pour lui-même à Ottawa. Au printemps 1994, un appartement a été trouvé, mais M. Halpeny est demeuré dans la maison sans contribuer aux dépenses jusqu’en août 1994 et il n’a jamais fait de demande relativement à la succession.

[9] David a tenté de vendre lui-même la maison au printemps 1994, tout en faisant effectuer des travaux de peinture ainsi que de légères rénovations aux fins de la vente.

[10] En juin 1994, la propriété a été mise en vente par un agent immobilier. Une offre a été reçue et acceptée en octobre 1994, et la vente a été conclue en janvier 1995.

[11] Pendant que David préparait la maison au transfert de titre, il est allé à la maison à de nombreuses occasions afin d’y effectuer de petits travaux et d’enlever les biens mobiliers. À quelques reprises, il y a passé la nuit afin de faciliter ces tâches.

[12] David a accordé à une tierce partie l’utilisation partielle de la maison pendant les mois de novembre et décembre 1994, conservant le droit de pénétrer dans les lieux afin de préparer la maison avant le transfert. Les titulaires de l’autorisation ne sont demeurés qu’un mois et n’ont payé que pour un mois d’utilisation partielle de la maison.

Analyse

[13] Selon l'hypothèse de ministre du Revenu national (le “ ministre ”), la maison n’était pas détenue ou utilisée à des fins lucratives. En me fondant sur les faits de l’espèce, j’appuie cette hypothèse.

[14] En ce qui a trait aux quelques nuits que David a passées dans la maison, je ne considère pas qu’elles représentent un usage personnel. David effectuait ces séjours en sa qualité d’exécuteur testamentaire dans le but de rénover et d’enlever des articles. Il épargnait l'argent de la fiducie.

[15] Par conséquent, je conclus que ni David ni sa soeur n’a fait un usage personnel de la maison entre le moment du décès de leur mère jusqu’à la vente de la maison en janvier 1995.

[16] L'expression “ biens à usage personnel ” n'est pas définie dans la Loi de l’impôt sur le revenu (la “ Loi ”). Toutefois, à l’article 54 de la Loi, certains biens y sont assimilés. La disposition pertinente est ainsi formulée :

“ biens à usage personnel ”

Sont compris parmi les biens à usage personnel :

a) les biens qui appartiennent au contribuable et qui sont affectés principalement à l’usage ou à l’agrément personnels du contribuable ou à l’usage ou à l’agrément personnels d’une ou plusieurs personnes qui sont :

(i) le contribuable,

(ii) une personne liée au contribuable,

(iii) lorsque le contribuable est une fiducie, un bénéficiaire de cette fiducie ou toute personne liée au bénéficiaire;

[17] Cette disposition peut être paraphrasée de la manière suivante : Un bien à usage personnel d’une fiducie est un bien possédé par la fiducie qui est affecté principalement à l’usage ou à l’agrément personnels d’un bénéficiaire de cette fiducie ou de toute personne liée au bénéficiaire.

[18] Le bien qui est détenu par une fiducie n’est pas un bien à usage personnel à moins que le bénéficiaire de la fiducie ou une personne liée au bénéficiaire n’affecte le bien principalement à un usage personnel. Si cela n’était pas le cas, il ne serait pas nécessaire de se pencher sur le sous-alinéa 54a)(iii) de la Loi.

[19] Compte tenu de la preuve soumise devant moi, je ne suis pas disposé à conclure que Mme Woods et M. Halpeny vivaient dans une situation assimilable à une union de fait.

[20] Par conséquent, David et sa soeur n’étaient pas liés à M. Halpeny.

[21] Comme M. Halpeny n’était pas lié à David ni à sa soeur, son usage de la maison ne faisait pas de cette dernière un bien à usage personnel et, comme ni David ni sa soeur n’a affecté la maison principalement à un usage personnel, cette maison ne constitue pas un bien à usage personnel.

[22] Puisque la maison n’est pas un bien à usage personnel, la restriction figurant au sous-alinéa 40(2)g)(iii) de la Loi ne s’applique pas, et la succession a le droit de déclarer une perte en capital nette de 18 140,67 $. Le montant effectif de la perte n’était pas contesté.

[23] Pour ces motifs, l’appel est admis avec dépens et la cotisation est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que la succession de feue Edna Lilian Woods a le droit de déclarer, aux fins du calcul du revenu imposable pour l’année d’imposition 1998, un montant de 18 140,67 $ au titre des pertes en capital nettes des années précédentes.

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour d’avril 2000.

“ Gordon Teskey ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 30e jour de juin 2000.

Mario Lagacé, réviseur

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