Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 19990316

Dossier: 96-3792-IT-G

ENTRE :

CARL CARDELLA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bonner, C.C.I.

[1] L’appelant interjette appel contre les cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la “ Loi ”) pour les années d’imposition 1989, 1990 et 1991.

[2] L’appelant exerce la profession de médecin dans la région métropolitaine de Toronto et il tire son revenu de cette occupation et de l’enseignement.

[3] Il s’agit de déterminer si l’appelant a le droit dans le calcul de son revenu de déduire les dépenses engagées à l’égard des deux parts qu’il détient dans les sociétés en commandite Gerrard Associates Limited Partnership (“ GA ”) et Collegeway Associates Limited Partnership (“ CA ”).

[4] GA a été constituée en décembre 1986 dans le but d’acheter un ensemble immobilier locatif situé au 86, rue Gerrard Est, à Toronto, Ontario. L’ensemble compte 57 logements et des places de stationnement. L’achat de la propriété a été financé en partie par la vente de parts dans la société en commandite à des investisseurs. En décembre 1988, l’appelant et les autres investisseurs ont souscrit à une émission de parts dans GA.

[5] Avant d’investir dans GA, l’appelant a examiné les projections financières préparées par les promoteurs de la société en commandite. Les projections démontraient que les commanditaires devaient s’attendre à subir des pertes pendant au moins dix ans, période durant laquelle la société déduirait de ses revenus les versements à l’égard des billets à ordre que les commanditaires devaient souscrire à titre de paiement partiel du prix d’achat de leur part. L’appelant a payé comptant la somme de 1 920 $ représentant le solde du prix de vente de sa part.

[6] Les projections établissaient le produit qui serait versé à chaque commanditaire dans l’éventualité d’une vente de la propriété immobilière au bout de dix ans. Elles avaient été établies en tenant compte de diverses hypothèses sur le taux annuel composé de l’accroissement de la valeur de l’ensemble locatif détenu par la société et les dépenses nettes faites durant la période de dix ans.

[7] L’appelant a témoigné lors de l’audience. Il a expliqué clairement qu’en investissant dans la société en commandite il espérait réaliser un profit au moment de la vente de la propriété immobilière et qu’il n’avait pas l’intention de vendre sa part.

[8] Aux termes des dispositions financières applicables à l’achat d’une part par l’appelant, une des sociétés promotrices s’engageait à combler l’insuffisance de liquidités de GA relativement à l’exploitation de l’ensemble de la rue Gerrard. L’insuffisance de liquidités est définie comme l’écart entre le revenu net (le revenu brut moins les dépenses d’exploitation) et les paiements effectués en vertu du billet à ordre principal souscrit pour payer le prix de vente (décrit comme le billet A). Les paiements effectués au titre de la garantie devaient s’ajouter au solde en capital impayé des deux autres billets souscrits pour payer le prix de vente (décrits comme les billets B et C). L’appelant et les autres investisseurs étaient tenus d’effectuer des paiements globaux annuels ne dépassant pas quarante-deux pour cent de leurs pertes fiscales pour l’année. Ces pertes étaient constituées notamment des charges financières relatives aux billets A, B et C, des frais de montage et de garantie et de la part proportionnelle de l’investisseur des pertes de la société en commandite relativement à l’exploitation de l’ensemble locatif.

[9] Lorsque les parts de GA ont été proposées à l’appelant et aux autres investisseurs, il était prévu que la société en commandite subirait des pertes fiscales atteignant en moyenne 393 053 $ par logement au cours de la période de dix ans.

[10] Dans le calcul de son revenu pour les années d’imposition 1989, 1990 et 1991, l’appelant a déduit les montants suivants relativement à son investissement dans GA:

Année Intérêt Frais de montage Frais de garantie

1989 35 336 $ 1 707 $ 1 319 $

1990 39 567 $ 1 707 $ 1 164 $

1991 34 431 $ 1 707 $ 1 164 $

[11] Il ne fait aucun doute que le rendement économique que l’appelant espérait réaliser avec son investissement dans GA consistait dans l’écart entre sa part du profit réalisé lors de la vente de l’immeuble de la rue Gerrard par la société en commandite et sa part des pertes annuelles accumulées de la société plus les coûts d’acquisition et les charges financières liés à son intérêt dans la société en commandite. Dans les projections relatives au produit versé aux investisseurs par suite de la vente de la propriété au bout de la période de dix ans, il était présumé que ce profit serait un gain en capital.

[12] L’entreprise de GA est décrite de la manière suivante dans le contrat de société en commandite :

[TRADUCTION]

4.1 L’entreprise de la société en commandite consiste à acheter l’ensemble immobilier et à exploiter une entreprise de location immobilière en Ontario en vue de tirer un bénéfice et à exercer les activités liées ou connexes à la propriété de l’ensemble immobilier sous réserve des restrictions établies dans les contrats liés ou connexes à l’acquisition de l’ensemble immobilier.

Il convient de remarquer qu’il n’est pas prévu au contrat que l’entreprise de la société en commandite comprend le commerce des ensembles immobiliers locatifs.

[13] Selon le contrat de société en commandite, GA avait été créée pour la période suivante :

[TRADUCTION]

3.1 La société en commandite commence à exploiter son entreprise le 31 décembre 1986 et poursuit ses activités jusqu’au 31 décembre 2018 à moins qu’elle ne cesse d’exercer ses activités avant cette date aux termes de la clause XIV. Toutes les clauses du contrat portant sur la dissolution, la liquidation et la résiliation sont cumulatives c’est-à-dire que l’application des clauses du présent contrat n’empêchera pas l’application des autres clauses.

Le contrat de société en commandite ne contient aucune clause visant à faciliter la vente de l’immeuble de la rue Gerrard par la société en commandite avant le 31 décembre 2018.

[14] CA a été constituée le 31 décembre 1986 dans le but d’acheter un ensemble immobilier locatif situé au 2079, Collegeway à Mississauga en Ontario. L’ensemble compte 105 logements. L’acquisition de la propriété a été financée en partie par la vente à des investisseurs de parts dans la société en commandite. Selon les termes de la notice d’offre, la société en commandite avait pour but d’offrir aux commanditaires l’occasion de tirer un revenu de l’ensemble, de réaliser une appréciation en capital et de reporter le paiement de l’impôt en se servant des dispositions de la Loi qui permettent de le faire.

[15] En décembre 1987, 105 parts de la société en commandite CA ont été vendues à des investisseurs au prix de 171 000 $ chacune. Lors de la souscription, chaque investisseur devait :

[TRADUCTION]

a) payer 105 000 $ pour chaque part par l’entremise d’un financement monté pour l’investisseur (le “ Billet A ”);

b) verser 10 925 $ comptant;

c) souscrire des billets à ordre (les billets “B” (35 000 $) et le billet “C” (31 000 $) soit un total de 66 000 $) moins le versement comptant de 10 925 $.

Chaque investisseur donnait sa part dans CA en gage pour garantir le paiement des billets A, B, et C. Les promoteurs de CA étaient les bénéficiaires des billets B et C.

[16] Avant d’investir dans CA, l’appelant a feuilleté la notice d’offre. À l’audition de l’appel, l’appelant a déposé une projection de l’ensemble des rendements en espèces sur son investissement dans la société en commandite établis en fonction d’une vente de la propriété par la société au bout de dix ans. Dans leurs calculs, les promoteurs tenaient compte des pertes subies dans le cours des activités de location, des intérêts sur les billets et d’un bénéfice lors de la vente de la propriété et prévoyaient que les commanditaires n’atteindraient le seuil de rentabilité que si le taux annuel composé de l’accroissement de la valeur de la propriété se situait à environ 9 pour cent. L’appelant a déclaré que cette projection avait été préparée récemment mais qu’elle correspondait aux explications fournies aux investisseurs à l’origine. Dans une note explicative figurant dans la projection. Il était prévu que : “ les incidences fiscales d’une vente à ce prix seront alors prises en considération pour le motif que le produit et le bénéfice net seront imposables en totalité puisqu’il sera présumé que l’investisseur avait principalement ou secondairement l’intention de tirer une partie importante du rendement économique de la vente de la propriété ”. Il convient de constater que l’opinion exprimée dans ce document récemment préparé sur un des principaux points en litige en l’espèce ne concorde pas avec celle établie dans la notice d’offre.

[17] Dans les projections, il était clairement mentionné que les déductions fiscales cumulatives de chaque commanditaire au cours de la période de dix ans se chiffreraient à 187 006 $, soit l’écart entre les déductions des coûts engagés par le commanditaire individuellement et sa part proportionnelle des revenus de la société en commandite.

[18] Dans un des contrats concernant l’achat de parts de CA par les commanditaires, il était prévu qu’un des promoteurs paierait les insuffisances de liquidités dans les cas où les revenus générés par les activités de location ne couvriraient pas les frais d’exploitation de la société en commandite et les frais d’intérêts des commanditaires. Les sommes versées dans ces circonstances s’ajoutaient au principal impayé des billets B et C. L’appelant et les autres commanditaires étaient tenus d’effectuer des paiements annuels n’excédant pas 43 pour cent des sommes suivantes :

[TRADUCTION]

a) celle équivalant à l’écart entre les frais d’intérêts effectivement versés relativement au total du solde impayé du montant original dû à Counsel Trust Company selon le billet à ordre garanti souscrit par chaque commanditaire et le total des frais d’intérêts projetés à ce titre calculés dans l’Annexe au billet à ordre “B”;

b) celle équivalant à l’écart entre les frais d’intérêts effectivement versés relativement au total du solde impayé du montant original dû à Collway et le total des frais d’intérêts projetés à ce titre pour l’année.

Dans la notice d’offre, la situation est décrite brièvement de la manière suivante : “ ...les investissements annuels (les contributions en capital versées à la société en commandite et les frais de financement) sont financés par l’entremise d’un flux de trésorerie exempt d’impôt et des économies d’impôt sur le revenu ”.

[19] Dans le calcul de son revenu pour les années d’imposition 1989, 1990 et 1991, l’appelant a déduit les sommes suivantes relativement à son investissement dans CA :

Année Intérêt

1989 21 534 $

1990 23 235 $

1991 21 295 $

[20] Selon les modalités du contrat de société en commandite, CA exerce ses activités jusqu’au 31 décembre 2099 à moins que la société ne cesse ses activités ou ne soit dissoute avant cette date. Le contrat de société en commandite ne comporte aucune modalité qui pourrait faciliter la vente de la propriété immobilière par la société avant 2099 dans le contexte d’un quelconque projet comportant un risque de nature commerciale. Le contrat prévoit également que :

[TRADUCTION]

2.03 Entreprise

L’entreprise exploitée par la société en commandite comprend l’achat, la possession, l’entretien, l’exploitation, l’amélioration, l’utilisation de l’ensemble, l’investissement dans celui-ci et l’exercice de toutes les activités liées ou connexes en vue de tirer un profit (l’“ entreprise ”), mais elle ne comprend pas la vente de l’ensemble. La société en commandite n’exerce aucune activité qui n’a pas de rapport avec ces buts sans y avoir été autorisée au préalable par une résolution ordinaire adoptée par les commandités et les commanditaires. [Je souligne.]

[21] En établissant les cotisations en l’espèce, le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a rejeté les déductions mentionnées dans les paragraphes 10 et 19 des présentes. Dans sa plaidoirie, l’avocat de l’intimée a soutenu que le ministre avait alors conclu ou supposé que :

[TRADUCTION]

a) l’appelant n’avait aucune attente raisonnable de profit à l’égard de son investissement dans GA ou dans CA;

b) l’appelant avait acheté des parts dans GA et CA dans le but de profiter des avantages fiscaux qui, à son avis, étaient liés à son investissement et non dans le but de tirer un revenu;

c) les seules sommes en espèces reçues par l’appelant et les autres commanditaires de GA et de CA étaient constituées de remboursements d’impôt sur le revenu résultant de la déduction de pertes prévues d’avance.[1]

L’intimée a aussi allégué qu’aucune société en commandite n’avait été constituée dans le cas de GA ou de CA, mais le ministre a permis à la société de déduire des pertes durant 1989, 1990 et 1991. Il incombe à l’intimée d’établir que GA et CA ne constituent pas des sociétés en commandite.

[22] L’avocat de l’intimée débute son argumentation en affirmant que GA et CA n’étaient pas des sociétés en commandite parce que, dans un cas comme dans l’autre, il n’y avait aucune intention d’exploiter une entreprise en commun dans le but de tirer un profit. Il a également prétendu que, même si les deux organismes étaient des sociétés en commandite, les parts de l’appelant dans chacune d’elles ne représentaient pas une source de revenu au sens de l’art. 3 de la Loi. À cet égard, l’avocat s’est fondé sur le critère établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Moldowan c. La Reine, 77 DTC 5213, à la page 5215 où elle a statué que :

... pour avoir une “source de revenu”, le contribuable doit avoir en vue un profit ou une expectative raisonnable de profit. L’expression source de revenu équivaut donc au terme entreprise :...

L’avocat a soutenu que puisque CA et GA n’offraient aucune perspective de profit aux commanditaires, du moins tant que la propriété immobilière n’était pas vendue, il ne pouvait y avoir d’entreprise à l’origine de pertes.

[23] L’appelant soutient que, dans le cas où une opération commerciale est montée pour générer un revenu sous la forme d’un profit résultant de la vente et non des activités de location, il n’y a aucun fondement juridique permettant de distinguer entre les activités de location et la vente projetée et d’exclure le profit anticipé lors de la vente de celui que l’on pourrait raisonnablement s’attendre à réaliser. L’avocat de l’appelant a prétendu que l’acquisition des propriétés par GA et CA représentait des projets comportant un risque de nature commerciale. Il a affirmé qu’il n’y a aucune exigence que les dépenses engagées relativement à de tels projets soit reportées et ajoutées au coût de la propriété faisant l’objet du projet. En réponse à l’argument de l’intimée sur l’expectative raisonnable de profit, il a souligné que dans les cas où, comme en l’espèce, l’activité ne comporte aucun élément personnel, le principe de l’expectative raisonnable de profit doit être appliqué avec modération et d’une manière qui favorise le contribuable.

[24] À mon avis, on ne peut prétendre que GA ou CA se sont lancées dans un projet comportant un risque de nature commerciale consistant dans l’acquisition, la location pendant une période et la revente de leur propriété immobilière locative respective. Le critère utilisé pour déterminer si un profit est un profit en capital ou un revenu tiré d’une entreprise a été formulé d’une manière qui fait maintenant autorité dans l’arrêt Californian Copper Syndicate v. Harris, [1904] 5 T.C. 159, à la p. 165 où il est statué que :

[TRADUCTION]

Lorsque le propriétaire d’un investissement ordinaire décide de le réaliser et obtient un meilleur prix que celui qu’il a payé à l’achat, il est bien établi en matière de calcul de l’impôt sur le revenu que l’accroissement de prix ne constitue pas un profit au sens de la ... Loi de l’impôt sur le revenu.... Mais il est également bien établi que les valeurs accrues obtenues lors de la réalisation ou de la conversion de titres peuvent être considérées comme un profit dans les cas ou l’activité ne se limite pas à la réalisation ou à la modification de l’investissement mais, en fait, consiste en une activité exécutée dans le cours de l’exploitation d’une entreprise. Le cas le plus simple est celui d’une personne ou d’une association de personnes qui spéculent et visent à tirer un profit en achetant et en vendant des terrains et des titres et dont l’entreprise est de faire le commerce de tels investissements et de tenter ainsi d’obtenir des bénéfices....

L’argument de l’avocat de l’appelant a reposé en grande partie sur la théorie voulant que les sociétés en commandite avaient l’intention de faire un profit avec la vente de leur propriété respective. Il est alors utile de se rappeler ce que le juge Noël a statué dans l’arrêt Racine, Demers et Nolin c. M.R.N., 65 DTC 5106, à la p. 5111 :

Pour donner à une transaction qui comporte l’acquisition d’un capital le double caractère d’être aussi en même temps une initiative d’une nature commerciale, l’acquéreur doit avoir, au moment de l’acquisition, dans son esprit, la possibilité de revendre comme motif qui le pousse à faire cette acquisition; c’est-à-dire qu’il doit avoir dans son esprit l’idée que si certaines circonstances surviennent il a des espoirs de pouvoir la revendre à profit au lieu d’utiliser la chose acquise pour des fins de capital. D’un façon générale, une décision qu’une telle motivation existe devrait être basée sur des inférences découlant des circonstances qui entourent la transaction plutôt que d’une preuve directe de ce que l’acquéreur avait en tête.

[25] Il semble que la perspective d’un profit lors de la revente des ensembles au bout de dix ans ait servi de leurre aux promoteurs pour attirer les investisseurs. Toutefois, l’intention des commanditaires n’est pas pertinente parce que, du moins sur le plan individuel, ils n’étaient pas en mesure d’administrer les affaires de la société. Dans les circonstances, c’est l’intention des commandités qui compte.

[26] La preuve ne permet pas de supposer que l’un ou l’autre des commandités avait l’intention de revendre l’ensemble locatif au lieu de l’utiliser comme source de revenus de location, bien au contraire, elle étaye la conclusion voulant qu’ils avaient l’intention de détenir les ensembles locatifs pour une très longue période. La preuve directe de l’intention se retrouve dans les termes du contrat en commandite qui établissent l’entreprise qui sera exploitée et fixent la durée des périodes durant lesquelles les deux sociétés exerceront leurs activités, deux questions qui revêtent une importance considérable. Il convient aussi de remarquer que les sociétés en commandites sont, en fait, depuis le début et jusqu’à aujourd’hui demeurées propriétaires des ensembles et en ont tiré des revenus de location. Aucune preuve laissant supposer que l’une ou l’autre des sociétés en commandite ait fait la moindre tentative pour vérifier si le marché était propice à la revente n’a été présentée. Enfin, je souligne qu’aucune personne au courant des intentions des commandités n’a été appelée à témoigner sur le point selon lequel les sociétés en commandite avaient acheté les ensembles dans l’intention de tirer un profit de la revente à la première occasion favorable.

[27] Il s’ensuit que l’appelant ne peut pas s’attendre à ce que les profits qu’il pourrait tirer de la vente future des propriétés par les société en commandite soient considérés comme un revenu potentiel dont on tiendrait compte pour déterminer si l’appelant avait une expectative raisonnable de profit à l’égard de ses investissements dans GA et dans CA. Puisque de tels gains sont exclus, les parts de l’appelant dans les deux sociétés en commandite ne peuvent être considérées comme des sources de revenu. Dans l’arrêt Canada v. Mastri et al., 97 DTC 5420 à la p. 5423, le juge Robertson a fait les observations suivantes à l’égard du critère relatif à l’expectative raisonnable de profit établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Moldowan, précité :

Premièrement, il a été décidé dans l’arrêt Moldowan que pour avoir une source de revenu, un contribuable doit avoir une attente raisonnable de profit. Deuxièmement, “ on doit s’appuyer sur tous les faits pour déterminer objectivement si un contribuable a une expectative raisonnable de profit ” (supra, à la page 486). Si, comme conclusion de fait un contribuable est jugé ne pas avoir d’attente raisonnable de profit alors il n’y a aucune source de revenu et, par conséquent, aucun fondement à l’égard duquel le contribuable est en mesure de calculer une perte locative....

Dans l’arrêt Mohammad v. The Queen, 97 DTC 5503, aux p. 5505 et 5506, le juge Robertson a fait les remarques suivantes à propos des affaires similaires à celles en l’espèce où le contribuable a fait un investissement qui produit inévitablement des pertes :

Il arrive souvent que des contribuables achètent un immeuble résidentiel à des fins de location en finançant la totalité du coût d’acquisition. La situation type est celle d’un contribuable qui occupe à plein temps un emploi tout à fait indépendant. Trop fréquemment, le montant des intérêts annuels payables sur le prêt dépasse de beaucoup les revenus de location auxquels on pouvait raisonnablement s’attendre. Cela est vrai, même en faisant abstraction des baisses imprévues du marché locatif ou de la survenance d’autres événements qui ont des répercussions négatives sur la rentabilité de l’activité locative, par exemple, les frais d’entretien et de réparation et des dépenses autres qu’en capital. Dans bon nombre de cas, la composante intérêts est si importante qu’une perte locative est enregistrée avant même que d’autres dépenses locatives autorisées soient prises en compte dans l’état des résultats. Les faits sont tels qu’il n’est pas nécessaire d’avoir l’expérience d’un analyste du marché immobilier pour comprendre qu’un bénéfice ne peut être réalisé tant que les frais d’intérêts ne sont pas réduits en remboursant le capital du prêt. Autrement dit, il y a des cas où le contribuable n’est pas en mesure de respecter à première vue la doctrine de l’expectative raisonnable de profit.... [Je souligne.]

[28] Pour les motifs susmentionnés, je conclus que le ministre était justifié d’établir les cotisations. Les appels sont rejetés avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de mars 1999.

“Michael J. Bonner”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 20e jour de décembre 1999.

Mario Lagacé, réviseur



[1]               L’avocat de l’intimée a mentionné que le ministre était arrivé à de nombreuses autres conclusions et suppositions mais elles ont plutôt l’air d’arguments qu’un avocat invoquerait dans une plaidoirie que de motifs ayant servi à établir la cotisation en l’espèce. Il n’est pas nécessaire de les considérer.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.