Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date : 19971121

Dossier : 96-4526-IT-I

ENTRE :

JOHN GIBSON,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bonner, C.C.I.

[1] L'appelant interjette appel des cotisations d'impôt sur le revenu établies pour les années d'imposition 1992, 1993 et 1994. Le mariage de l'appelant n'a pas duré et son épouse a quitté le domicile conjugal. L'appelant et son épouse ont conclu un accord écrit daté du 1er février 1991, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Accord de séparation

Le 1er février 1991

Le présent accord, conclu entre John Gibson et Bonnie Gibson, vise à confirmer les paiements mensuels effectués par John Gibson qui correspondent à la part de Bonnie Gibson dans la propriété qui leur appartient à tous les deux et aux frais partiels d'entretien général de la propriété convenus par les parties. Les parties conviennent que ces paiements seront faits jusqu'à ce que la propriété (maison) soit vendue et que le produit de la vente soit partagé à parts égales. 750 $ par mois.

John Gibson accepte de continuer à payer les primes des polices d'assurance-vie déjà souscrites sur la vie de John Gibson et de Bonnie Gibson (par l'intermédiaire de Gerling Global). Les numéros des polices sont 094950-8 et 09449-0. Jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit rédigé.

Les parties conviennent que Jennifer Gibson (la fille) résidera avec sa mère et sera confiée aux soins de cette dernière, que John Gibson fils (le fils) résidera avec son père et sera confié aux soins de ce dernier, et que chaque partie laissera l'autre jouir pleinement de son droit de visite.

Les parties conviennent que John Gibson continuera à subvenir aux besoins de Jennifer Gibson (la fille) après que la propriété mentionnée précédemment aura été vendue et que le produit de la vente aura été partagé à parts égales. 300 $ par mois.

John C. Gibson ___________________

1er février 1991.

Bonnie L. Gibson__________________

[2] À l'audition des appels, l'appelant a, dans son témoignage, expliqué le contexte dans lequel le premier paragraphe de l'accord avait été rédigé. Lui et Bonnie Gibson étaient copropriétaires du domicile conjugal à Caledon (Ontario). Au moment de la rupture du mariage, le marché immobilier dans la région était en crise. Le couple a par conséquent déterminé que M. Gibson demeurerait dans la maison, qu'il s'occuperait de l'entretien de celle-ci et effectuerait les paiements hypothécaires jusqu'à ce que la maison puisse être vendue à un prix convenable. Le montant de 750 $ par mois qui figure dans l'accord représentait les paiements hypothécaires et les taxes. La maison a été vendue en avril 1994.

[3] Dans ses déclarations de revenus, l'appelant a demandé des déductions de 9 000 $ pour les années 1992 et 1993 et de 3 400 $ pour 1994. Ce dernier chiffre représentait en partie les paiements hypothécaires et les acomptes sur les taxes faits avant la vente de la maison, et en partie les paiements de pension alimentaire de 300 $ pour Jennifer Gibson, la fille adoptive de l'appelant.

[4] L'alinéa 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu qui s'applique à la présente affaire se lit comme suit :

Peuvent être déduites lors du calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition les sommes suivantes qui sont appropriées :

[...]

b) toute somme payée dans l'année par le contribuable, en vertu d'un arrêt, d'une ordonnance ou d'un jugement rendus par un tribunal compétent ou en vertu d'un accord écrit, à titre de pension alimentaire ou autre allocation payable périodiquement pour subvenir aux besoins du bénéficiaire, des enfants issus du mariage ou à la fois du bénéficiaire et des enfants issus du mariage, si le contribuable vivait séparé, en vertu d'un divorce, d'une séparation judiciaire ou d'un accord écrit de séparation, du conjoint ou de l'ex-conjoint à qui il était tenu de faire le paiement, le jour où le paiement a été effectué et durant le reste de l'année;

L'alinéa 60b) permet la déduction de paiements périodiques de pension alimentaire à un conjoint séparé, effectués en vertu d'un accord écrit. Les paiements doivent être faits pour subvenir aux besoins du bénéficiaire, des enfants issus du mariage ou à la fois du bénéficiaire et des enfants issus du mariage.

[5] L'une des questions soulevées dans la réponse à l'avis d'appel était de savoir s'il existait un accord écrit en vertu duquel les paiements étaient effectués. À l'audition des appels, l'appelant a déposé en preuve l'accord reproduit précédemment. L'avocate de l'intimée n'a fait aucun contre-interrogatoire, ni donné en plaidoirie quelque raison que ce soit de croire que l'accord n'avait pas été conclu à la date ou vers la date qui figure sur le document ou qu'il ne régissait pas la relation entre l'appelant et Bonnie Gibson, son épouse à l'époque.

[6] La seconde question en litige soulevée se rapporte à la relation entre l'appelant et Jennifer Gibson. L'avocate de l'intimée a semblé accorder beaucoup d'importance au fait que l'appelant n'était pas le père biologique de Jennifer Gibson. Tous conviennent cependant que Jennifer Gibson est la fille de Bonnie Gibson. La preuve a établi que Jennifer avait été adoptée légalement par l'appelant. De toute évidence, elle répond à la définition élargie du terme “enfant” utilisé à l'alinéa 252(1)d) de la Loi. À mon avis, la personne qui est l'enfant du conjoint du contribuable et qui est adoptée par le contribuable pendant le mariage doit être considérée comme un “enfant issu du mariage” au sens ordinaire où cette expression est utilisée à l'alinéa 60b). De plus, il faut donner effet au paragraphe 158(2) de la Loi sur les services à l'enfance et à la famille, L.R.O. 1990, ch. C. 11, relativement au statut de l'enfant adopté sous le régime des lois de l'Ontario :

(2) À compter de la date à laquelle est rendue une ordonnance d'adoption et à toutes les fins de la loi :

a) l'enfant adopté devient l'enfant du père adoptif ou de la mère adoptive et cette personne devient le père ou la mère de l'enfant;

b) l'enfant adopté cesse d'être l'enfant de la personne qui était son père ou sa mère avant l'ordonnance d'adoption, et cette personne cesse d'être son père ou sa mère, sauf si cette personne est le conjoint du père adoptif ou de la mère adoptive,

comme si l'enfant était né du père adoptif ou de la mère adoptive.

[7] La preuve est peu détaillée, mais il semblerait que les montants prévus au premier paragraphe de l'accord reproduit précédemment aient été payés, au sens de l'alinéa 60.1(1)b) de la Loi, “[...] [au] profit de [...]” Bonnie Gibson et qu'ils étaient par conséquent réputés avoir été payés à cette dernière et reçus par elle. Ils doivent néanmoins constituer une “allocation” payable périodiquement pour subvenir aux besoins de Bonnie Gibson pour être déductibles en vertu de l'alinéa 60b). Un paiement ne peut être une allocation au sens de l'alinéa 60b) que si le bénéficiaire peut utiliser l'argent à sa discrétion. Ici, évidemment, ce n'était pas le cas. Si je comprends bien, l'appelant payait simplement l'hypothèque et les taxes à l'organisme autorisé à percevoir ces paiements. Aux termes du paragraphe 60.1(2), les paiements ne sont pas réputés avoir été faits à titre d'allocation payable périodiquement et par conséquent déductible en vertu de l'alinéa 60b). Le paragraphe 60.1(2) ne s'applique pas aux dépenses relatives à un “établissement domestique autonome que le contribuable habite”. Les montants prévus au premier paragraphe de l'accord ne sont par conséquent pas déductibles.

[8] Pour les motifs qui précèdent, les appels des cotisations établies pour les années d'imposition 1992 et 1993 seront rejetés. L'appel de la cotisation établie pour l'année d'imposition 1994 sera admis et la cotisation sera déférée au ministre du Revenu national pour nouvelle cotisation en tenant compte du fait que l'appelant a le droit de déduire des paiements de 300 $ par mois, qu'il a commencé à effectuer en 1994 pour subvenir aux besoins de sa fille Jennifer Gibson. Je crois comprendre qu'il n'y a pas de litige sur le nombre de paiements du genre qui ont été effectués dans l'année.

“Michael J. Bonner”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 7e jour d’avril 1998.

Mario Lagacé, réviseur

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