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Date: 20000620

Dossier: 1999-4330-GST-I

ENTRE :

ANDREW P. SIMON,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Teskey, C.C.I.

[1] L'appelant, Andrew Peter Simon, interjette appel à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la “ Loi ”) conformément aux dispositions concernant la taxe sur les produits et services (“ TPS ”) de cette loi.

Questions

[2] La question faisant l'objet du présent appel est celle de savoir si l'appelant est tenu, en vertu du paragraphe 323(1) de la Loi, en cas de défaut de Chevrolane Motorcars Ltd. (la “ société ”), de verser au receveur général un montant de taxe nette conformément au paragraphe 228(2) de la Loi ainsi que les intérêts et les pénalités y afférents.

Faits

[3] Un grand nombre de faits que le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a supposés au moment de l'établissement de la cotisation et reproduits dans la réponse à l'avis d'appel (la “ réponse ”) ont été admis avant le début de l'audience. Ces faits admis sont les suivants :

[TRADUCTION]

a) durant toute la période pertinente, la société était une personne morale en règle en vertu de la loi de l'Alberta intitulée Business Corporations Act;

b) durant la période pertinente, Jampa Enterprise Ltd. possédait 90 p. 100 à 100 p. 100 des actions de la société;

c) le père et son épouse possédaient toutes les parts de Jampa Enterprise Ltd.;

d) la société est inscrite aux fins de la Loi depuis le 1er avril 1992 et son numéro d'inscrit aux fins de la TPS est le 132856139;

e) durant toute la période pertinente, la société exerçait des activités commerciales et a effectué des fournitures qui étaient taxables à un taux de 7 p. 100;

f) la société était tenue de produire des déclarations tous les trois mois et son exercice se terminait le 31 mars;

g) la société a produit des déclarations dans lesquelles elle a déclaré les montants présentés ci-dessous représentant la taxe perçue et percevable, les crédits de taxe sur les intrants et la taxe nette;

Crédit de Taxe nette

Période de Date de Date Taxe taxe sur les Taxe nette Remboursement Taxe nette non

déclaration production d'échéance perçue intrants déclarée payé réelle déclarée

1992-06-30* 1992-08-24 1992-07-31 27 748,40 30 743,15 -2 994,75

1992-06-30* 27 748,40 63 412,09 -35 663,69

1992-06-30* 27 748,40 65 412,09 -37 663,69 37 668,94 -33 324,50 4 339,19

1992-09-30 1992-12-14 1992-11-02 26 381,60 21 333,78 5 047,82 6 637,54 1 589,72

1992-12-31 1993-03-01 1993-02-01 21 335,70 26 064,23 -4 728,53 4 728,53 -4 728,58 -0,05

1993-03-31 1993-06-04 1993-04-30 43 249,50 49 795,51 -6 546,01 6 547,30 -5 905,26 640,75

1993-06-30 1993-08-03 1993-08-02 54 710,60 53 330,86 1 379,74 3 707,38 2 327,64

1993-09-30 1993-10-26 1993-11-01 42 287,60 46 266,29 -3 978,69 3 995,33 -90,12 3 888,57

1993-12-31 1994-02-08 1994-01-31 28 920,12 30 953,34 -2 033,22 2 033,22 1 580,67 3 613,89

1994-03-31 1994-04-29 1994-05-02 21 474,32 42 318,01 -20 843,69 20 889,09 -9 637,77 11 205,92

1994-06-30 1994-08-22 1994-08-01 24 905,22 44 078,00 -19 172,78 19 172,78 -12 214,08 6 958,70

1994-09-30 1994-11-01 1994-10-31 16 178,55 136 454,63 -120 276,08 120 276,08 -88 218,16 32 057,92

1994-12-31 1995-02-06 1995-01-31 19 368,11 110 446,76 -91 078,65 91 102,94 -48 546,59 42 532,06

1995-03-31 1995-05-08 1995-05-01 12 952,58 113 447,52 -100 494,94 100 514,82 -38 759,21 61 735,73

1995-06-30 1995-10-19 1995-07-31 25 340,94 131 020,32 -105 679,38 0,00 -26 309,28 79 370,10

Sous-total      395 009,10 834 056,26 -439 047,16 406 929,03 -229 498,68 170 890,04

1995-09-30 1996-06-10 1995-10-31 55 662,66 175 378,05 -119 715,39 0,00 8 116,93 127 832,32

1995-12-31 1996-06-10 1996-01-31 26 224,70 72 298,41 -46 073,71 0,00 10 857,30 56 931,01

1996-03-31 1996-07-02 1996-04-30 13 479,51 104 254,30 -90 774,79 0,00 49 594,34 140 369,13

Total 490 375,97 1 185 987,02 -695 611,05 406 929,03 -160 930,11 496 022,50

* une déclaration originale et deux déclarations modifiées ont été produites durant cette période,

- toutes les déclarations ont été inscrites au compte de la société durant cette période de déclaration

- la déclaration originale et une déclaration modifiée ont été rejetées.

h) le ministre a payé les remboursements de taxe nette figurant au sous-paragraphe g) ci-dessus à la société;

i) entre autres choses, la société n'a pas justifié la taxe sur les fournitures qu'elles a effectuées durant la période pertinente à G.S. Wheels Inc.;

j) G.S. Wheels Inc. a réclamé des crédits de taxe sur les intrants relativement aux fournitures mentionnées dans les sous-paragraphes précédents;

k) il y avait beaucoup de divergences dans les livres et les registres de la société, dont ses listes d'inventaire;

l) la taxe nette de la société pour les périodes de déclaration se terminant durant la période pertinente s'élevait aux montants figurant ci-dessus au sous-paragraphe g);

m) les avis de cotisation suivants ont été reçus par la société relativement à la taxe nette qui a été déclarée dans les déclarations mentionnées au sous-paragraphe 7i) précité :

Date Total des Taxe nette

Période de cotisation de cotisation ajustements établie

1992-04-01 au 1995-06-30* 1996-05-15 250 260,14 $ -294 466,40 $

1995-07-01 au 1995-09-30 1996-10-18 127 832,32 $ 8 116,93 $

1995-10-01 au 1995-12-31 1996-10-18 56 931,01 $ 10 857,30 $

1996-01-01 au 1996-03-31 1996-10-18 140 369,13 $ 49 594,34 $

575 392,60 $ -225 897,83 $

* la taxe nette établie dans la cotisation devrait représenter un crédit de 225 807,56 $, mais comprenait incorrectement les remboursements de la taxe nette réclamés dans la déclaration originale et une déclaration modifiée durant la période de déclaration se terminant le 30 juin 1992, lesquelles ont été remplacées par une autre déclaration modifiée, dans le calcul.

n) au cours des périodes de déclaration se terminant durant la période pertinente pendant laquelle la taxe nette constituait un montant positif, la société a omis de remettre la taxe nette d'au moins 74 066,60 $ au receveur général du Canada tel que l'exigent les dispositions de la Loi;

o) la société a omis de payer les pénalités et les intérêts liés à la taxe nette mentionnée dans les sous-paragraphes précédents tel que l'exigent les dispositions de la Loi;

p) le ministre a payé les remboursements de la taxe nette figurant au sous-paragraphe g) ci-dessus à la société;

q) entre autres choses, la société n'a pas justifié la taxe sur les fournitures qu'elles a effectuées durant la période pertinente à G.S. Wheels Inc.;

r) G.S. Wheels Inc. a réclamé des crédits de taxe sur les intrants relativement aux fournitures mentionnées dans les sous-paragraphes précédents;

s) il y avait beaucoup de divergences dans les livres et les registres de la société, dont ses listes d'inventaire;

t) la société n'a pas fait de cession de biens en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité;

u) une ordonnance de séquestre n'a pas été rendue à l'encontre de la société en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité;

v) le 27 novembre 1996, un certificat a été délivré et enregistré à la Cour fédérale du Canada attestant que la société était responsable en vertu de la partie IX de la Loi d'un montant de 353 658,13 $, plus la pénalité et les intérêts afférents;

w) un bref de saisie-exécution a été émis le 27 novembre 1996;

x) il n'a pas été satisfait au bref de saisie-exécution;

y) le 10 juin 1997, la dette de la société relative à la taxe nette d'au moins 74 066,60 $ ainsi que les pénalités et les intérêts afférents n'était toujours pas réglée;

z) durant toute la période pertinente, Michael Peter Henrick Simon (le “ fils ”) a participé à la gestion de la société;

aa) durant la période pertinente, le père et son épouse étaient les seuls administrateurs de la société;

bb) durant toute la période pertinente, l'appelant était comptable;

cc) durant la période pertinente, l'appelant a signé l'attestation de certaines déclarations qui avaient été produites auprès du ministère;

[4] Il a en outre été convenu que les chiffres suivants démontrent avec précision les périodes de défaut, celui relatif au paiement de la taxe nette, des intérêts et des pénalités ainsi qu'un solde courant :

Période de Taxe nette Intérêts Pénalités Solde

déclaration

1992-09-30 1 589,72 $ 533,44 $ 583,12 $ 2 706,28 $

1993-06-30 2 327,64 $ 605,08 $ 678,48 $ 3 611,20 $

1993-12-31 1 580,67 $ 362,22 $ 401,89 $ 2 344,78 $

1995-09-30 8 116,93 $ 710,49 $ 862,10 $ 9 689,52 $

1995-12-31 10 857,30 $ 749,29 $ 956,32 $ 12 562,91 $

1996-03-31 49 594,34 $ 2 495,87 $ 3 512,19 $ 55 602,40 $

Totaux    74 066,60 $ 5 456,39 $ 3 512,19 $ 86 517,09 $

[5] Un certain nombre de faits supposés par le ministre n'ont pas été admis et aucune preuve du contraire n'a été présentée ou encore la preuve a confirmé les faits de sorte qu'ils sont avérés, à savoir :

[TRADUCTION]

a) la société et G.S. Wheels Ltd. étaient des sociétés liées;

b) durant la période pertinente, certains véhicules ont été retirés de l'inventaire de la société sans qu'une vente ne soit enregistrée dans les livres et les registres de la société;

c) la société n'a jamais, durant la période pertinente, maintenu un compte ou des dépôts distincts relativement à la TPS perçue auprès de ses clients.

[6] L'appelant, son épouse et son fils ont été appelés à témoigner.

[7] L'explication donnée à la question de savoir pourquoi d'autres témoins n'ont pas été appelés est qu'ils étaient morts ou introuvables. Sans une preuve du contraire, je ne tire aucune inférence du fait que ces personnes n'ont pas été appelées à témoigner.

[8] Le fils a déclaré avoir abandonné l'école en onzième année et, tout en vivant à la maison, avoir créé une petite entreprise d'automobiles. Il achetait des automobiles peu coûteuses et les vendait sous la dénomination sociale de Simon Automotive Ltd. qui était la propriété de son père et de sa mère.

[9] Lorsqu'il a été décidé qu'un parc d'automobiles d'occasion serait créé, Simon Automotive Ltd. a changé son nom pour Jampa Enterprises Ltd. (“ Jampa ”). Jampa était considérée comme une compagnie de portefeuille par l'appelant et son épouse.

[10] Pendant qu'il en faisait le commerce, le fils a vendu environ vingt automobiles d'occasion peu coûteuses. Il est devenu ami avec un homme dans la cinquantaine du nom de Bill Clark (“ Bill ”) qui avait de l'expérience dans l'entreprise des automobiles d'occasion. Bill a acquis un petit nombre d'actions dans la société et a agi en tant que directeur général pendant environ un an et demi, soit jusqu'à l'automne 1993.

[11] G.S. Wheels (“ Wheels ”) a commencé son exploitation le 1er janvier 1995. Bien qu'aucun document justificatif n'ait été produit, le fils a prétendu que Wheels était détenue à parts égales par lui, son père et deux autres personnes.

[12] Le bilan consolidé du 31 mars 1996 déclarait : montant dû à un administrateur, 703 184 $, au 31 mars 1996. L'état financier de la société daté du 31 mars 1995 indique : montant dû à un administrateur, 301 684 $. Les états financiers de la société du 31 mars 1996 indiquent : montant dû à un administrateur, 286 684 $. Par conséquent, l'appelant, au cours de l'année, soit du 31 mars 1995 au 31 mars 1996, a reçu 15 000 $ de la société au titre du remboursement de son prêt.

[13] Le bilan consolidé du 31 mars 1996 indique : montant dû à un administrateur, 703 184 $. Le bilan de la société du 31 mars 1996 indique : montant dû à un administrateur, 286 684 $; la différence est de 416 500 $, soit le montant figurant sur le bilan de G.S. Wheels, au 31 mars 1996. Par conséquent, l'appelant a prêté 416 500 $ à Wheels, et les trois autres actionnaires n'ont pas versé le moindre montant. Donc, l'appelant a versé une contribution supplémentaire de 416 500 $ à l'entreprise d'automobiles d'occasion gérée par son fils entre le 1er janvier 1995 et le 31 mars 1996. (Moins le montant de 15 000 $ qu'il a reçu de la société.)

[14] L'appelant est un homme d'affaires averti qui a travaillé pendant cinq ans chez Western Avionics, ayant débuté comme vice-président des finances. Avant cela, il a travaillé pour une entreprise de haute technologie pendant 20 ans; il avait commencé comme administrateur des finances puis était devenu vice-président des finances. Il peut lire des états financiers et établir des dossiers et des méthodes comptables pour des sociétés.

[15] Lorsque la société a été lancée, Bill agissait à titre de directeur général, le fils était directeur-adjoint et vendeur. Henry Metviw (“ Henry ”) avait environ 60 ans et tenait les livres pour plusieurs autres sociétés.

[16] L'appelant a acheté au nom de la société un ordinateur et un logiciel comptable et a établi les méthodes comptables selon ses spécifications.

[17] Henry a produit les déclarations de TPS, et l'appelant en a signé certaines parce que c'était plus pratique.

[18] L'appelant a engagé différentes entités pour dresser les états financiers de fin d'exercice. Ils ont été préparés de la manière suivante :

31 mars 1993 préparés par G.J. Meyer & Company,

comptables agréés

31 mars 1994 préparés par John D. Hind,

comptable agréé

31 mars 1995 préparés par Collins & Barrow,

comptables agréés

31 mars 1996 préparés par Owen J. Brown & Associates,

qui se considéraient eux-mêmes comme des comptables de gestion et qui à ce moment effectuaient la tenue quotidienne des livres de la société.

Aucun de ces états n'a été vérifié.

[19] Henry a pris sa retraite à la fin de l'été 1995. David Ingram (“ M. Ingram ”) a été embauché pour le remplacer avec une période de chevauchement. M. Ingram a été congédié, car il buvait pendant ses heures de travail et, en tout état de cause, le travail était effectué par Owen Brown (“ Owen ”). Owen a alors été embauché pour tenir les livres et préparer les états financiers de fin d'exercice.

Analyse

[20] L'appelant demande à la Cour de croire que même s'il a risqué les économies de sa vie entière pour son fils qui avait abandonné l'école secondaire, que malgré ses compétences en matière financière et dans le domaine des affaires, il a accepté les états financiers effectués par les comptables de la société et qu'il n'a jamais vérifié leurs chiffres produits et ne s'est jamais rendu compte qu'il y avait des problèmes.

[21] Je considère que ce n'est pas crédible. Je ne crois tout simplement pas que l'appelant, avec son bagage et ses compétences, n'aurait pas participé étroitement à la préparation financière de tous les dossiers et à l'exploitation réelle de l'entreprise.

[22] En examinant le témoignage de l'appelant et

a) une lettre envoyée par l'appelant à Revenu Canada en date du 1er avril 1993 (pièce R-3);

b) une télécopie envoyée par l'appelant à Henry en date du 14 juillet 1995;

c) une lettre envoyée par l'appelant et sa conjointe à Revenu Canada en date du 3 mars 1997,

seules deux conclusions peuvent être tirées, c'est-à-dire que l'appelant

a) a été négligent par rapport aux faits;

b) ou qu'il était prêt à induire Revenue Canada en erreur et a intentionnellement dénaturé les faits. (Ce que je conclus qu'il a fait.)

[23] En ce qui a trait à la lettre du 1er avril 1993, l'appelant déclare : [TRADUCTION] “ La pénalité et les intérêts susmentionnés proviennent du fait que nous avons remplacé le nom Simon Automotive par Chevrolane Motorcars Ltd. ”. De toute évidence, cela n'était pas vrai et l'appelant le savait. Il savait que la société devait acheter l'inventaire de Simon Automotive, mais il a tenté de faire passer cela auprès de Revenu Canada pour un changement de nom.

[24] La télécopie envoyée par l'appelant à Henry en date du 14 juillet 1995 prévoit :

[TRADUCTION]

[...] Nous exploitons l'entreprise depuis trois ans et je ne reçois toujours pas les états financiers tous les mois. [...]

Cette déclaration écrite contredit son témoignage oral au cours duquel il a affirmé (à la page 58 de la transcription) :

[TRADUCTION]

Tous les mois, je scrutais à la loupe l'état financier, oui.

Puis, à la page 76 :

[TRADUCTION]

Q. Alors, vous avez vraiment examiné les finances de votre entreprise qui étaient très détaillées par moments de sorte que vous connaissiez son genre de structure?

R. Non.

[25] La lettre que l'appelant et sa conjointe ont envoyée à Revenu Canada en date du 3 mars 1997 prévoyait :

[TRADUCTION]

[...] En juillet 1995, Henry Matviw a démissionné de son poste de comptable de l'entreprise, toutefois, il a accepté de tenir les livres jusqu'à ce que nous puissions le remplacer. [...]

Je conclus que Henry a démissionné à la suite de la réception de la télécopie du 14 juillet 1995 envoyée par l'appelant. L'appelant a également déclaré :

[TRADUCTION]

[...] Chevrolane a commencé à éprouver des difficultés financières en juin 1996 au moment où j'ai découvert que l'état financier reçu auparavant était nettement surestimé et qu'il n'y avait pour ainsi dire pas d'inventaire ni d'actifs.

Cela contredit le témoignage de l'appelant quand, à la question (page 29 de la transcription) :

[TRADUCTION]

Q. Quand l'entreprise a-t-elle fermé?

il a répondu :

[TRADUCTION]

R. Environ en avril, en mars ou en avril.

Q. De quelle année?

R. 1996.

[26] En l'espèce, je crois que la date de fermeture se situe en mars 1996, puisque cette date correspond à la dernière période de déclaration où la TPS n'a pas été remise. De plus, le rapport de Collins Barrow sur les lacunes des dossiers de la société est daté du 19 avril 1996.

[27] L'appelant a également déclaré (dans la lettre envoyée à Revenu Canada le 3 mars 1997) :

[TRADUCTION]

Je recevais toujours les états financiers mensuels préparés par le comptable, [...]

Cela est directement à l'opposé de sa déclaration faite à Henry dans sa télécopie envoyée le 14 juillet 1995. Il a également déclaré :

[TRADUCTION]

[...] Je visitais le parc d'automobiles tous les deux ou trois jours, [...]

[28] Dans son témoignage, il soutient avoir visité le parc d'automobiles deux ou trois fois par mois. Je crois qu'il est plus probable qu'il l'ait visité tous les deux ou trois jours et qu'il ait examiné toute la documentation qui était disponible.

[29] L'appelant a également déclaré à la page 3 de la lettre du 3 mars 1997 :

[TRADUCTION]

[...] J'ai également fait effectuer deux vérifications externes pendant cette période à des fins de précision, l'une d'elles étant celle qui a été effectuée par les comptables agréés Collins, Barrow.

Cette déclaration n'est tout simplement pas vraie. La seule vérification à avoir été effectuée à l'égard de la société est celle faite par Revenu Canada. L'appelant connaît la différence entre un état financier non vérifié et un état financier vérifié.

[30] Je conclus que je ne peux m'appuyer sur le témoignage de l'appelant. Il contient trop d'incohérences. Il a répondu à toutes les questions de son avocat, mais en contre-interrogatoire, il a répondu à une vingtaine de reprises “ Je ne me rappelle pas ”, “ Je n'en ai aucune idée ” ou d'autres réponses semblables.

[31] Voici certains autres exemples de conflit dans le témoignage de l'appelant entre ce qui a été dit lors de l'interrogatoire principal et ce que son fils a affirmé au cours de son témoignage. Le témoignage de l'appelant au sujet de Simon Automotive était vague, pourtant sa conjointe a pris les dispositions pour que cette société soit constituée en personne morale et elle ainsi que l'appelant en étaient les uniques actionnaires. Simon Automotive est devenue Jampa Enterprise, la société de portefeuille de la société. L'appelant était au courant de cela. Pourtant, aux pages 36 et 37 de la transcription, voici ce qu'il a répondu à la question suivante :

[TRADUCTION]

Q. Ce document prétend démontrer l'existence d'une autre entreprise automobile ou société automobile avant celle de Chevrolane Automobiles et votre signature y apparaît. Participiez-vous à la direction de cette société à l'époque?

R. Non, mon fils le faisait.

Pourtant, il en était copropriétaire.

[32] La série de questions suivantes a été posée en contre-interrogatoire (page 52 de la transcription) :

[TRADUCTION]

Q. Qui a réellement nommé le cabinet d'expertise comptable, qui était chargé de déterminer qui allait tenir les livres de l'exercice?

R. Je me rappelle qu'une année, j'ai demandé à Collins Barrow de le faire, mais pour le reste, honnêtement, je ne m'en rappelle pas.

Q. Et qui était le comptable chez Collins Barrow?

R. Je n'arrive pas à me rappeler.

Q. Aurait-ce été votre frère?

R. Cela se pourrait, oui [...]

[33] Je crois que l'appelant induisait intentionnellement la Cour en erreur. Il savait manifestement que son frère était un comptable agréé et que c'est avec lui qu'il traitait. De plus, dans son interrogatoire principal, à la page 10 de la transcription, à la question :

[TRADUCTION]

Maintenant, qui a préparé les états financiers de fin d'exercice et les déclarations de revenus pour la société?

Il a donné la réponse non équivoque suivante :

[TRADUCTION]

J'engageais un cabinet d'expertise comptable chaque année.

[34] Lorsqu'il a été interrogé au sujet du départ de Bill Clark de la société, l'appelant a parlé de disputes périodiques et du fait qu'il en avait assez des conflits internes, qu'il a donc conclu une entente avec Bill Clark. Pourtant, son fils a affirmé que la société ne faisait plus d'argent et qu'il souhaitait amener la société à un niveau supérieur, à l'encontre des souhaits de Bill.

[35] L'appelant n'a pas tenté d'expliquer de manière raisonnable pourquoi il avait demandé à trois comptables agréés différents de préparer des états financiers non vérifiés à la fin de chacun des trois premiers exercices. Pourtant, il a demandé à Owen Brown, l'assistant de David Ingram, qui est devenu le teneur de livres à plein temps en décembre 1995, de préparer les états financiers du 31 mars 1994.

[36] Il y a de nombreuses autres incohérences dans le témoignage de l'appelant.

[37] Même si j'avais accepté le témoignage de l'appelant selon lequel il se fiait totalement aux états produits par les teneurs de livres de la société, la télécopie envoyée par l'appelant à Henry en date du 14 juillet 1995 indique qu'il savait que les choses n'étaient pas correctes. Je crois que la connaissance que cette lettre atteste impose à l'appelant de vérifier toutes les questions puis de mettre sur pied un système qui aurait empêché les manquements.

[38] Le juge d'appel Robertson, dans la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Neil Soper c. La Reine, [1998] 1 C.F. 124 (97 DTC 5407), affirme que l'obligation expresse d'agir prend naissance lorsque des administrateurs obtiennent des renseignements qui pourraient les amener à conclure que les versements posent ou pourraient vraisemblablement poser un problème potentiel.

[39] Je remarque que le dernier paragraphe de la télécopie envoyée à Henry est ainsi libellé :

[TRADUCTION]

3. Jampa Holdings – Voir ci-dessus. J'ai remarqué que la déclaration de TPS n'a pas été produite pour la dernière période. Veuillez le faire lundi.

Henry, notre société prospère et pour que nous puissions prendre des décisions financières, la comptabilité doit accéder à un échelon supérieur. J'ai besoin de votre collaboration et de votre aide pour y parvenir. Si vous éprouvez des difficultés avec ce qui précède, je peux vous aider. Alors, n'hésitez pas à communiquer avec moi. Veuillez m'appeler au 250-2644 afin que nous discutions davantage.

[40] Cela démontre un mécontentement de la part de l'appelant. En raison de ses connaissances et de ses compétences et comme il a risqué les économies de sa vie, je ne crois pas qu'il n'a simplement rien fait et qu'il a permis à d'autres de l'induire en erreur.

[41] Même si j'avais considéré comme avéré que jusqu'en juillet 1995 il s'en est remis à Henry et n'a rien fait d'autre que d'examiner ses états (ce que je ne crois pas), les connaissances qu'il possédait en juillet 1995 nécessitaient que des mesures concrètes soient prises par l'appelant. Je l'aurais alors trouvé responsable de l'omission relative aux trois dernières périodes de déclaration seulement, ce qui correspond à environ 90 p. 100 de la cotisation.

[42] Le chèque de la société de juin 1995 (pièce R-2), à première vue, est criant de négligence et de mauvaise administration.

[43] Pour ces raisons, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de juin 2000.

“ Gordon Teskey ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 19e jour de décembre 2000.

Benoît Charron, réviseur

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