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Date: 19980519

Dossier: 96-2348-GST-G

ENTRE :

CAMP KAHQUAH CORPORATION LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs de l'ordonnance

Le juge Bell, C.C.I.

[1] L'intimée a présenté à la Cour une requête dans laquelle elle demandait une ordonnance lui accordant la permission de modifier la réponse ainsi qu'une ordonnance lui adjugeant les frais et les dépens à l'égard de la requête.

LES FAITS

[2] L'appelante, Camp Kahquah Corporation Limited, interjette appel contre la cotisation relative à la TPS dont fait foi l'avis de cotisation du 19 novembre 1993 se rapportant à son année d'imposition 1992. L'appelante est un organisme de bienfaisance enregistré en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ). L'appelante exploitait un camp religieux où, moyennant certains frais, il était possible de se loger, de prendre des repas, de se livrer à des activités éducatives et à des activités récréatives ainsi que de recevoir une formation religieuse. Le ministre a établi une cotisation pour le montant payable par l'appelante en se fondant sur le fait que cette dernière fournissait des services taxables qui n'étaient pas exonérés en vertu de la Loi. En particulier, le ministre a allégué, dans l'avis de décision (en réponse à un avis d'opposition déposé par l'appelante) et dans la réponse à l'avis d'appel, que l'appelante fournissait des services de supervision ou d'enseignement dans le cadre d'une activité récréative ou sportive qui, conformément à l'alinéa 2j) de la partie IV de l'annexe V de la Loi, étaient expressément exclus de l'exonération générale s'appliquant aux fournitures effectuées par un organisme de bienfaisance.

[3] En réponse à l'avis d'appel, l'intimée déclare qu'en établissant la cotisation, elle s'est fondée sur un certain nombre d'hypothèses, dont les deux hypothèses suivantes, énoncées aux alinéas b) et c) :

[TRADUCTION]

b) l'appelante offrait et fournissait diverses possibilités de camping récréatif et sportif dans la région de Magnetewan (Ontario), dans un milieu qui était imprégné de valeurs et d'enseignements chrétiens (le « programme de camping » );

c) la fourniture du programme de camping était une fourniture effectuée par l'appelante d'un service de supervision et d'enseignement dans le cadre de diverses activités récréatives et sportives, et il s'agissait donc d'une fourniture taxable pour l'application de la Loi sur la taxe d'accise.

La réponse dit en outre que l'intimée se fonde entre autres sur l'alinéa 2j) de la partie VI de l'annexe V de la Loi. L'appelante a soutenu qu'elle est un organisme de bienfaisance effectuant des fournitures exonérées tel que le prévoit l'annexe V de la Loi. Plus précisément, le paragraphe (2) de la partie VI de l'annexe V comprend :

La fourniture de biens meubles ou de services par un organisme de bienfaisance, [...]

[4] Le paragraphe (2) prévoit un certain nombre d'exceptions qui ont pour effet de rendre une fourniture taxable. En particulier, dans sa réponse à l'avis d'appel, l'intimée s'est fondée sur l'alinéa 2j) :

j) [...] un service de supervision ou d'enseignement dans le cadre d'une activité récréative ou sportive, ou d'un droit d'adhésion ou autre droit permettant à une personne de bénéficier d'un tel service;

[5] Après les interrogatoires préalables, l'intimée a présenté cette requête et, ce faisant, elle a déclaré par l'entremise de son avocat, qu'à l'interrogatoire préalable, elle avait obtenu de nouveaux renseignements lui permettant d’étendre la portée des motifs sur lesquels la cotisation pouvait être fondée. Les nouveaux paragraphes proposés visés par cette modification sont les suivants :

[TRADUCTION]

8. Il déclare plus particulièrement que le programme de camping offrait des possibilités de camping récréatif et sportif :

a) aux jeunes enfants (le « camp pour les enfants en bas âge » );

b) aux enfants plus âgés (le « camp pour les pré-adolescents » );

c) aux adolescents (le « camp pour les adolescents » );

d) aux familles et aux adultes (le « camp familial » );

e) aux personnes âgées et aux retraités (le « lieu de repos pour les personnes âgées » );

f) à divers groupes pendant la morte-saison (les « locations hors de saison » ).

9. En ce qui concerne le camp pour les enfants en bas âge, le camp pour les pré-adolescents, et le lieu de repos pour les personnes âgées, une seule contrepartie était demandée à chaque campeur, pour les repas, le logement et l'utilisation des installations.

10. Il déclare qu'en ce qui concerne le camp familial, des frais d'inscription étaient demandés aux campeurs et une contrepartie distincte était demandée pour leur logement, et que le montant variait selon le genre de logement. Une contrepartie distincte était également demandée pour les repas que l’appelante pouvait offrir aux campeurs.

[6] L'intimée cherche à ajouter, en ce qui concerne les dispositions législatives sur lesquelles elle se fonde, les alinéas (2)e), f), m) et 25f) de la partie VI de l'annexe V de la Loi.

[7] Le paragraphe 14 de la réponse modifiée se lit comme suit :

[TRADUCTION]

En ce qui concerne le lieu de repos pour les personnes âgées et les locations hors de saison, il soutient subsidiairement que si ces fournitures n'étaient pas des fournitures d'un service de supervision et d'enseignement dans le cadre d'une activité récréative ou sportive au sens de l'alinéa 2j) de la partie VI de l'annexe V, il s'agissait de fournitures à chaque campeur d'un droit d'entrée à un lieu de divertissement au sens de l'alinéa 2m) de la partie VI de l'annexe V.

L'alinéa 2m), qui est une exception à l'exonération de la taxe, se lit comme suit :

m) d'un droit d'entrée :

(i) à un lieu de divertissement,

(ii) à un colloque, une conférence ou un événement semblable, si la fourniture est effectuée par une université ou un collège public,

(iii) à une activité de levée de fonds tenue après avril 1991.

[8] Le paragraphe 15 de la réponse modifiée proposée se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Il soutient subsidiairement qu'en ce qui concerne le lieu de repos pour les personnes âgées et les locations hors de saison, ces fournitures étaient des fournitures d'immeubles fournis soit par bail, soit par licence, dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise par l'appelante au sens de l'alinéa 25f) de la partie VI de l'annexe V, et d'un bien, effectuée par bail, licence ou accord semblable au sens de l'alinéa 2f) de la partie VI de l'annexe V.

L'alinéa (2)f), qui est une exception à l'exonération de la taxe, se lit comme suit :

[...]

f) d'un bien, effectuée par bail, licence ou accord semblable, conjointement avec la fourniture d'un immeuble visé à l'alinéa 25f);

L'alinéa (25)f), qui est une exception à l'exonération de la taxe, se lit comme suit :

[...]

f) les immeubles, sauf les logements provisoires, fournis soit par bail pour une période de moins d'un mois, soit par licence, si la fourniture est effectuée dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise par l'organisme;

[9] Le paragraphe 16 de la réponse modifiée proposée se lit comme suit :

[TRADUCTION]

En ce qui concerne le camp familial, il soutient subsidiairement que si la contrepartie versée n'était pas une contrepartie pour la fourniture d'un service de supervision et d'enseignement dans le cadre d'une activité récréative ou sportive au sens de l'alinéa 2j) de la partie VI de l'annexe V,

a) les frais d'inscription et le logement constituent une fourniture d'un droit d'entrée à un lieu de divertissement au sens de l'alinéa 2m) de la partie VI de l'annexe V, et subsidiairement une fourniture d'immeubles, sauf un logement provisoire, fournis soit par bail, soit par licence, dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise par l'appelante au sens de l'alinéa 25f) de la partie VI de l'annexe V, et d'un bien, effectuée par bail, licence ou accord semblable, au sens de l'alinéa 2f) de la partie VI de l'annexe V; et

b) les repas sont des fournitures d'un bien corporel ou de services fournis relativement au bien, au sens de l'alinéa 2e) de la partie VI de l'annexe V.

L'alinéa 2e) se lit comme suit :

[...]

e) du bien corporel que l'organisme acquiert, fabrique ou produit en vue de le fournir et qui n'a pas été donné à l'organisme ni utilisé par une autre personne, avant son acquisition par l'organisme, ou du service que l'organisme fournit relativement au bien, à l'exception d'un tel bien ou service que l'organisme fournit en exécution d'un contrat pour des services de traiteur;

[10] Il s'agit de savoir si l'intimée est autorisée à modifier la réponse à l'avis d'appel de façon à soulever de nouveaux points de droit aux fins de l'établissement de la cotisation par le ministre et si, ce faisant, elle émet de nouvelles hypothèses de fait sur lesquelles elle peut fonder la cotisation.

[11] L'avis de requête était daté du 30 mars 1998; il a été déposé devant cette cour le même jour. L'appelante ne s'est pas plainte du temps qui s'était écoulé entre le moment où elle avait reçu signification de l'avis et l'audition de la requête. Il est clair que l'appelante avait été avisée de l'intention de l'intimée de soulever des arguments subsidiaires. Dans une lettre du 30 janvier 1998, adressée à l'avocat de l'appelante par l'avocat de l'intimée, voici ce qui est dit :

[TRADUCTION]

Nous avons eu la possibilité d'examiner la transcription de l'interrogatoire préalable de Larry Hogg et de tenir compte des faits se rapportant aux activités de l'appelante tels qu'ils ont été relatés à l'interrogatoire, et nous voulons corriger ce qui a été dit en réponse à la question 120 de la transcription de l'interrogatoire de Mme White. Comme le montrait clairement l'interrogatoire de Larry Hogg, l'appelante effectue un certain nombre de fournitures de différents types qui peuvent être classées comme suit : un camp pour les enfants (en bas âge et pré-adolescents); un camp pour les adolescents; un camp familial; un lieu de repos pour les personnes âgées (maintenant connu sous le nom de lieu de repos pour les retraités); et des locations hors de saison. La TPS à l'égard de laquelle le remboursement en question a été demandé semble avoir été payée à l'égard de biens ou de services que l'appelante a acquis en vue de les consommer, de les utiliser ou de les fournir en effectuant les fournitures des cinq catégories susmentionnées. Si l'appelante croit que ce n'est pas le cas, veuillez nous en informer. Nous ne pouvons donc pas souscrire à l'argument figurant à la page 75 de la transcription de l'interrogatoire de M. Hogg, à savoir que les locations hors de saison ne peuvent pas être considérées comme se rapportant à la cotisation ici en cause.

En ce qui concerne le camp familial, le lieu de repos pour les personnes âgées et les locations hors de saison, l'intimée a l'intention de soutenir, à titre d'argument subsidiaire, que si ces trois catégories de fournitures ne sont pas visées par l'alinéa 2j) de la partie VI de l'annexe V, il s'agit de fournitures au sens des alinéas 2f) et 25f) de la partie VI de l'annexe V, et partant, de fournitures taxables.

Nous avons l'intention de vous soumettre une réponse modifiée renfermant ces arguments dans un avenir rapproché et de vous demander de consentir au dépôt de ladite réponse.

Par conséquent, il n'y a pas d'élément de surprise pour l'appelante à l'égard de la requête présentée par l'intimée. L'avocat de l'appelante a cité la décision Her Majesty the Queen v. McLeod, 90 DTC 6281. La Section de première instance de la Cour fédérale a statué qu'une demande que la Couronne avait présentée en vue d'obtenir l'autorisation de modifier un acte de procédure n'était pas appropriée. À la page 6284, le juge Collier a dit ceci :

[...] les tribunaux ont apporté une réserve à cette règle générale en affirmant qu'un amendement ne sera permis que s'il peut être fait sans nuire à la partie opposée. En général, les amendements ne sont permis que dans la mesure où ils sont justes, où la partie opposée est protégée en ce qui concerne l'interrogatoire préalable et la préparation de l'instruction et où tout préjudice éventuel peut être compensé au moyen d'une ordonnance relative aux frais.

Le savant juge a ajouté ceci :

[...] [les amendements] posent de nouvelles hypothèses et soulèvent de nouvelles questions. Ils représentent, selon moi, une nouvelle cotisation entièrement différente de celle qui a été établie initialement. La Loi interdit à la demanderesse d'établir une autre cotisation vu l'expiration du délai de quatre ans prévu à cette fin par l'alinéa 152(4)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Or, la demanderesse tente de contourner ce délai en demandant à la présente Cour de permettre les amendements. L'injustice qui découlerait de ma décision d'accorder à la demanderesse l'ordonnance qu'elle demande est évidente.

[12] À mon avis, les modifications que l'intimée se propose d'apporter à la réponse sous la rubrique : [TRADUCTION] « EXPOSÉ DES FAITS » ne contredisent pas les faits énoncés dans la réponse initiale. Les hypothèses de fait figurant dans la réponse initiale n'ont pas été niées ou remplacées. Les paragraphes 8, 9 et 10 précités ne font qu'étendre la portée de ces hypothèses. La demanderesse ne peut donc pas avoir gain de cause si elle s'oppose à la requête sur cette base.

[13] L'avocat de l'appelante a également cité la décision Lutheran Life Insurance Society of Canada v. The Queen, 91 DTC 5553. À la page 5572, voici ce que la Cour a dit, à l'égard d'un argument subsidiaire soulevé tardivement au stade de l'audience par l'avocat de Sa Majesté :

Je ne suis pas disposé à accepter cet argument subsidiaire. Il existe des moyens de procédure pour en motiver le rejet, à mon avis, en ce qui a trait à l'absence de mention de cet argument dans la plaidoirie ou dans les nouvelles cotisations établies par le Ministre. De plus, il modifie le fondement même des nouvelles cotisations qui n'ont fait aucune mention des cotisations de secours mutuels comme revenu d'assurance et il annule le fondement sur lequel les cotisations ont été établies, [...] De plus, le paragraphe 152(5) de la loi, applicable aux années en cause, empêche le ministre d'inclure des montants dans le revenu d'un contribuable en établissant une nouvelle cotisation, ce qui serait nécessaire en l'espèce pour donner effet à cet argument subsidiaire, plus de quatre ans à compter de la date de la première cotisation, qui était le 9 septembre 1982 pour les trois années en cause.

[14] À mon avis, les modifications que l'intimée se propose d'apporter à la réponse n'ont pas pour effet de changer le fondement des nouvelles cotisations. Elles ne font que préciser les hypothèses figurant dans la réponse initiale.

[15] L'avocat de l'appelante a également cité la décision Klie v. M.N.R., 79 DTC 254, de la Commission de révision de l'impôt. Il a référé la Cour au passage suivant des motifs de jugement :

La liberté dont jouit le Ministre avec la plaidoirie subsidiaire lui permet, à mon avis, d'alléguer seulement des faits nouveaux à l'appui de ses cotisations. Bien que la distinction soit difficile à établir parfois, je ne pense pas que le Ministre puisse introduire de nouveaux faits dans ses plaidoiries qui changent de façon radicale le fondement juridique de ses cotisations. Les changements fondamentaux dans les plaidoiries qui renversent, contredisent ou qui ne tiennent pas compte des présomptions qui sont à l'origine des cotisations aboutissent à mon avis, à modifier une cotisation alors que cela ne peut se faire normalement que par voie de nouvelle cotisation.

Ici encore, ce jugement n'aide pas l'appelante. Les changements dans les plaidoiries ne renversent pas, ne contredisent pas et n'omettent pas de tenir compte des présomptions figurant dans la réponse initiale. Comme il en a ci-dessus été fait mention, ils ne font que les préciser.

[16] Dans le jugement Vineland Quarries and Crushed Stone Ltd. v. M.N.R., 70 DTC 6043 (C. de l'É.), le juge Cattanach a dit ceci, aux pages 6045-6046 :

[TRADUCTION]

Si je comprends bien, l'appel qui est interjeté contre une cotisation établie par le ministre se rapporte au montant de la cotisation. [...] Dans ce cas-ci, le ministre ne cherche pas à augmenter le montant de la cotisation. Il cherche à maintenir la cotisation au montant établi. Toutefois, en modifiant la réponse, il cherche à s'assurer que, si la Cour devait conclure que la cotisation n'est pas fondée, il puisse, par suite d'un renvoi, établir un montant beaucoup moins élevé compte tenu du fondement qui, prévoit-il, pourrait être jugé approprié par la Cour. [...] Je crois que le ministre a le droit de le faire; je ferais donc droit à la requête et je permettrais au ministre de modifier la réponse à l'avis d'appel comme il l'a demandé.

[17] Dans la décision Wiebe et al. v. M.N.R., 88 DTC 1234 (C.C.I.), confirmée dans 89 DTC 5179 (C.A.F.), le ministre avait établi une cotisation pour le montant payable par le contribuable en se fondant sur le fait que ce dernier était actionnaire d'une corporation qui lui conférait des avantages. Le ministre a demandé à modifier la réponse à l'avis d'appel en plaidant subsidiairement que le contribuable était assujetti à l'impôt pour le motif qu'il était un employé de la corporation et qu'il tirait un revenu de cette dernière. En d'autres termes, le fondement et les motifs sur lesquels reposait l'impôt étaient différents de ceux de la cotisation originale, mais le montant de l'impôt n'avait pas changé. Le juge Goetz, de cette cour, a examiné un certain nombre de jugements, dont les jugements Minden, 62 DTC 1044 (C. de l'É.), et Vineland Quarries, ci-dessus, et il a fait droit à la requête en disant que le contribuable n'avait pas subi un préjudice indu et en outre qu'il avait dûment été avisé de ce à quoi il ferait face à l'audience.

[18] Je souscris à l'avis que le juge Bowman a exprimé dans le jugement Continental Bank Leasing Corporation et al. v. The Queen, 93 DTC 298, à la page 302 :

Dans les affaires portées devant les tribunaux de l'Ontario et de la Colombie-Britannique auxquelles on m'a renvoyé, un certain nombre de critères ont été élaborés -- les faits ont-ils été admis par inadvertance, la modification ou la rétractation d'un aveu soulève-t-elle une question pouvant être matière à procès et la partie adverse subirait-elle un préjudice qui ne peut être compensé financièrement? À mon avis, ces critères ont été respectés. Mais je préfère tout de même examiner la question dans une perspective plus large : les intérêts de la justice seraient-ils mieux servis si la demande de modification ou de rétractation était approuvée ou rejetée? Les critères mentionnés dans les affaires entendues par d'autres tribunaux sont évidemment utiles, mais il convient de mettre l'accent sur d'autres facteurs également, y compris le moment auquel est présentée la requête visant la modification ou la rétractation, la mesure dans laquelle les modifications proposées retarderaient l'instruction expéditive de l'affaire, la mesure dans laquelle la thèse adoptée à l'origine par une partie a amené une autre partie à suivre dans le litige une ligne de conduite qu'il serait difficile, voire impossible, de modifier, et la mesure dans laquelle les modifications demandées faciliteront l'examen par la Cour du véritable fond du différend. Il n'existe aucun facteur qui soit prédominant, ou dont la présence ou l'absence soit nécessairement déterminante. On doit accorder à chacun des facteurs le poids qui lui revient dans le contexte de l'espèce. Il s'agit, en fin de compte, de tenir compte de la simple équité, du sens commun et de l'intérêt qu'ont les tribunaux à ce que justice soit faite.

[19] Pour les motifs susmentionnés, il est fait droit à la requête en vue de la modification de la réponse à l'avis d'appel. Dans la requête, l'intimée demande également une ordonnance lui adjugeant les frais et dépens à l'égard de la requête. Cela est pour le moins singulier. Lorsque j'ai demandé des renseignements à l'avocat de l'intimée au sujet des frais et dépens, il a répondu qu'après l'audience, si cette cour rejetait l'appel, il soutiendrait que « les frais et dépens pourraient peut-être être adjugés » . Voici les propos qui ont été tenus :

[TRADUCTION]

LE JUGE : Non, mais vous ne le demandez pas maintenant?

Me NOBLE : Pas maintenant, non, mais l'appelante conteste la requête. À mon avis, il n'existe aucun fondement raisonnable permettant à l'appelante de contester cette requête. L'appelante aurait dû consentir au dépôt de cette réponse. Elle ne l'a pas fait. Il nous a donc fallu préparer des documents et demander à la Cour d'examiner la requête.

Je n'ai pas pu tirer une conclusion à l'égard de cette requête aussi facilement que l'avocat de l'intimée, qui est la partie même qui a présenté une requête en vue de corriger son propre document, à savoir la réponse initiale à l'avis d'appel. Je suis pour le moins étonné que l'avocat croie réellement que la partie adverse doive supporter les frais à l'égard d'une correction qu'il a effectuée. À mon avis, il ne convient pas que l'appelante soit pénalisée pour s'être opposée à une requête qui, croyait-elle fermement, pouvait influer sur l'issue de la cause et à l'égard de laquelle le droit n’est pas aussi clair que l'avocat de l'intimée le soutient. C'est d'autant plus le cas lorsque, comme en l'espèce, le répartiteur avait en sa possession la publicité dans laquelle étaient décrites toutes les activités du camp, mais qu'il a omis de se fonder sur ces renseignements en établissant la nouvelle cotisation. La décision relative aux frais et dépens est réservée tant que le jugement ne sera pas rendu dans la présente affaire.

Signé à Winnipeg (Manitoba), ce 19e jour de mai 1998.

« R. D. Bell »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 7e jour d’août 1998.

Benoît Charron, réviseur

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